Histoire du Canada depuis sa découverte jusqu'à nos jours. Tome II
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Garneau François-Xavier. Histoire du Canada depuis sa découverte jusqu'à nos jours. Tome II
LIVRE V
CHAPITRE I. COLONIES ANGLAISES. 1690
CHAPITRE II. LE SIÈGE DE QUÉBEC. 1609-1696
CHAPITRE III. TERRENEUVE ET BAIE D'HUDSON. 1696-1701
LIVRE VI
CHAPITRE I. ÉTABLISSEMENT DE LA LOUISIANE. 1683-1712
CHAPITRE II. TRAITÉ D'UTRECHT. 1701-1713
CHAPITRE III. COLONISATION DU CAP-BRETON. 1713-1744
LIVRE VII
CHAPITRE I. SYSTÈME DE LAW. – CONSPIRATION DES NATCHÉS. 1712-1731
CHAPITRE II. LIMITES. 1715-1744
LIVRE VIII
CHAPITRE I. COMMERCE. 1608-1744
CHAPITRE II. LOUISBOURG. 1744-1748
CHAPITRE III. COMMISSION DES FRONTIÈRES. 1748-1755
APPENDICE
SOMMAIRES
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Objet de ce chapitre. – Les persécutions politiques et religieuses fondent et peuplent les colonies anglaises, qui deviennent en peu de temps très puissantes. – Caractère anglais dérivant de la fusion des races normande et saxonne. Institutions libres importées dans le Nouveau-Monde, fruit des progrès de l'époque. – La Virginie et la Nouvelle-Angleterre. – Colonie de Jamestown (1607). – Colonie de New-Plymouth et gouvernement qu'elle se donne (1620). – Immensité de l'émigration. – L'Angleterre s'en alarme. – La bonne politique prévaut dans ses conseils et elle laisse continuer l'émigration. – New-Plymouth passe entre les mains du roi par la dissolution de la compagnie-Commission des plantations établie; opposition qu'elle suscite dans les colonies; elle s'éteint sans rien faire. – Etablissement du Maryland (1632) et de plusieurs autres colonies. – Leurs diverses formes de gouvernement: gouvernemens à charte, gouvernemens royaux, gouvernemens de propriétaires. – Confédération de la Nouvelle-Angleterre. – Sa quasi-indépendance de la métropole. – Population et territoire des établissemens anglais en 1690. – Ils jouissent de la liberté du commerce. – Jalousie de l'Angleterre: actes du parlement impérial et notamment l'acte de navigation passés pour restreindre cette liberté. – Opposition générale des colonies; doctrines du Massachusetts à ce sujet. – M. Randolph envoyé par l'Angleterre pour faire exécuter ses lois de commerce; elle le nomme percepteur général des douanes. Négoce étendu que faisaient déjà les colons. – Les rapports et les calomnies de Randolph servent de prétextes pour révoquer les chartes de la Nouvelle-Angleterre. – Ressemblance de caractère entre Randolph et lord Sydenham. Révolution de 1690. – Gouvernement. – Lois. – Education. – Industrie. – Différence entre le colon d'alors et le colon d'aujourd'hui, le colon français et le colon anglais.
Le Canada n'avait pas été actuellement en guerre avec les Anglais depuis le traité de St. – Germain-en-Laye en 1632. A cette époque reculée, où les colonies de l'Amérique septentrionale naissaient à peine, les combattans étaient tous des Européens, qui se disputaient des lambeaux du continent dû au génie de Colomb. Aucun d'eux n'avait pris les armes pour défendre le sol de sa vraie patrie; la terre qu'ils foulaient était encore à leurs yeux une terre étrangère. Mais en 1689 les choses avaient déjà changé. Il y avait alors des Canadiens, il y avait des Américains, il y avait une patrie, ce mot si magique pour le soldat. Et chose remarquable, les Européens laissèrent pour ainsi dire le champ libre à ces nouveaux hommes, qui essayèrent leur force et leur courage les uns contre les autres, et déployèrent dans la lutte cette même ardeur et cette haine nationale dont leurs mères-patries respectives donnaient le douloureux spectacle depuis des siècles dans l'ancien monde.
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L'Angleterre, effrayée par cette activité toujours croissante, songea enfin à prendre des moyens prompts et efficaces pour faire rentrer le négoce des colonies dans les bornes d'un système moins préjudiciable à ses intérêts. Par ses lois, par ses douanes, elle réussit à le modifier, à le restreindre selon ses vues; mais les colons ne se soumirent qu'à la force, en attendant l'occasion de revendiquer ce qu'ils regardaient comme les droits imprescriptibles des sujets anglais, la liberté du commerce, aussi sacrée à leurs yeux que la liberté politique et religieuse.
L'instrument dont la métropole se servit pour amener cette révolution, fut l'agent que nous avons déjà nommé, M. Edouard Randolph, homme résolu, infatigable et doué de beaucoup de pénétration et d'adresse dans les affaires. Charles II l'envoya en Amérique en 1676 avec ordre de lui faire un rapport sur l'état de la Nouvelle-Angleterre. Le caractère de ce commissaire a une analogie frappante avec celui de lord Sydenham, sous les auspices duquel s'est élaboré et accompli l'acte d'union des Canadas. Leurs dépêches présentent plusieurs coïncidences remarquables, et se ressemblent surtout par le ton de passion et le cynisme d'une politique sans morale et sans dignité qui y règnent 12. Les habitans du Massachusetts tiennent dans les lettres de Randolph la place qu'occupent les Canadiens français dans celles de l'agent moderne. A l'entendre on dirait qu'il n'y a que cette province à punir; les petites colonies de New-Plymouth, de New-Hampshire, et de Connecticut méritent toute la sympathie du gouvernement. D'après le rapport que ce commissaire fit au roi, tout le pays se serait plaint de l'usurpation des magistrats de Boston, les habitans auraient désiré instamment que Sa Majesté ne les laissât pas opprimer plus longtemps, et qu'elle fît mettre enfin à exécution les mesures de soulagement promises par ses commissaires en 1665. C'est ainsi qu'il cherche à diviser les colons; il parcourt en même temps le pays, et excite les habitans les uns contre les autres par ses propos.
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