Victor Hugo
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Gautier Théophile. Victor Hugo
I. 1830
II. LE GILET ROUGE
III. LA PRÉSENTATION
IV. UN BUSTE DE VICTOR HUGO
V. LA PLACE ROYALE
VI. LA PREMIÈRE D'HERNANI
VII. PROCÈS DE VICTOR HUGO. CONTRE LA COMÉDIE-FRANÇAISE
VIII. REPRISE D'HERNANI PAR AUTORITÉ DE JUSTICE
IX. DÉBUTS DE MADEMOISELLE EMILIE GUYON DANS HERNANI
X. REPRISE D'HERNANI
XI. REPRISE D'HERNANI
XII. REPRISE D'HERNANI
XIII. A PROPOS D'HERNANI AU THÉÂTRE-ITALIEN
XIV. LA REPRISE D'HERNANI
XV. LETTRE À SAINTE-BEUVE
XVI. PROSPECTUS POUR NOTRE-DAME DE PARIS
XVII. UN DRAME TIRÉ «DE NOTRE-DAME DE PARIS»
XVIII. ANGELO
XIX. MADEMOISELLE RACHEL DANS ANGELO
XX. VICTOR HUGO DESSINATEUR
XXI. PREMIÈRE DE RUY BLAS
XXII. REPRISE DE RUY BLAS
XXIII. VERS DE VICTOR HUGO
XXIV. LE DRAME
XXV. REPRISE DE «MARION DELORME»
XXVI. REPRISE DE MARION DELORME
XXVII. «DIANE», D'AUGIER, ET «MARION DELORME»
XXVIII. UNE LETTRE DE VICTOR HUGO
XXIX. GASTIBELZA
XXX. CHANGEMENTS A VUE
XXXI. LUCREZIA BORGIA
XXXII. LUCRÈCE BORGIA
XXXIII. LUCREZIA BORGIA
XXXIV. LUCRÈCE BORGIA
XXXV. LES BURGRAVES
XXXVI. PREMIÈRE DES BURGRAVES
XXXVII. LA REPRISE DES BURGRAVES
XXXVIII. PARODIES DES BURGRAVES
XXXIX. PARODIES ET PASTICHES
XL. VENTE DU MOBILIER DE VICTOR HUGO
XLI. A PROPOS DU MÉLODRAME INTITULÉ «LA CHAMBRE ARDENTE»
XLII. MADEMOISELLE GEORGES
XLIII. MORT DE MADEMOISELLE GEORGES
XLIV. MADEMOISELLE RACHEL
XLV. MADAME DORVAL
XLVI. MORT DE MADAME DORVAL
XLVII. FRÉDÉRICK LEMAÎTRE
XLVIII. MADEMOISELLE JULIETTE
XLIX. LE CHATEAU DU SOUVENIR
L. ÉTUDES SUR LA POÉSIE FRANÇAISE. 1868
LI
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Le gilet rouge! on en parle encore après plus de quarante ans, et l'on en parlera dans les âges futurs, tant cet éclair de couleur est entré profondément dans l'œil du public. Si l'on prononce le nom de Théophile Gautier devant un philistin, n'eût-il jamais lu de nous deux vers ou une seule ligne, il nous connaît au moins par le gilet rouge que nous portions à la première représentation d'Hernani, et il dit d'un air satisfait d'être si bien renseigné: «Oh oui! le jeune homme au gilet rouge et aux longs cheveux!» C'est la notion de nous que nous laisserons à l'univers. Nos poésies, nos livres, nos articles, nos voyages seront oubliés; mais l'on se souviendra de notre gilet rouge. Cette étincelle se verra encore lorsque tout ce qui nous concerne sera depuis longtemps éteint dans la nuit, et nous fera distinguer des contemporains dont les œuvres ne valaient pas mieux que les nôtres et qui avaient des gilets de couleur sombre. Il ne nous déplaît pas, d'ailleurs, de laisser de nous cette idée; elle est farouche et hautaine, et, à travers un certain mauvais goût de rapin, montre un assez aimable mépris de l'opinion et du ridicule.
Qui connaît le caractère français conviendra que cette action de se produire dans une salle de spectacle où se trouve rassemblé ce qu'on appelle tout Paris avec des cheveux aussi longs que ceux d'Albert Durer et un gilet aussi rouge que la muleta d'un torrero andalou, exige un autre courage et une autre force d'âme que de monter à l'assaut d'une redoute hérissée de canons vomissant la mort. Car dans chaque guerre une foule de braves exécutent, sans se faire prier, cette facile prouesse, tandis qu'il ne s'est trouvé jusqu'à présent qu'un seul Français capable de mettre sur sa poitrine un morceau d'étoffe d'une nuance si insolite, si agressive, si éclatante. A l'imperturbable dédain avec lequel il affrontait les regards, on devinait que, pour peu qu'on l'eût poussé, il fut revenu à la seconde représentation pavoisé d'un gilet jonquille.
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Malgré les répugnances bien concevables du brave Gaulois, le pourpoint s'exécuta, s'agrafa par derrière et, sauf le ridicule d'être dans la salle le seul de sa coupe et de sa couleur, nous allait aussi bien qu'un gilet à la mode. Le reste du costume se composait d'un pantalon vert d'eau très pâle, bordé sur la couture d'une bande de velours noir, d'un habit noir à revers de velours largement renversés, et d'un ample pardessus gris doublé de satin vert. Un ruban de moire, servant de cravate et de col de chemise, entourait le cou. Le costume, il faut en convenir, n'était pas mal combiné pour irriter et scandaliser les philistins. N'allez pas croire à des enjolivements après coup. Rien de plus exact. Nous voyons dans Victor Hugo raconté par un témoin de sa vie: «Il n'y eut que l'excentricité des costumes, qui, du reste, suffit amplement à l'horripilation des loges. On se montrait avec horreur M. Théophile Gautier, dont le gilet flamboyant éclatait ce soir-là sur un pantalon gris tendre, orné au côté d'une bande de velours noir, et dont les cheveux s'échappaient à flots d'un chapeau plat à larges bords. L'impassibilité de sa figure régulière et pâle et le sang-froid avec lequel il regardait les honnêtes gens des loges démontraient à quel degré d'abomination et de désolation le théâtre était tombé.»
Oui, nous les regardâmes avec un sang-froid parfait toutes ces larves du passé et de la routine, tous ces ennemis de l'art, de l'idéal, de la liberté et de la poésie, qui cherchaient de leurs débiles mains tremblotantes à tenir fermée la porte de l'avenir; et nous sentions dans notre cœur un sauvage désir d'enlever leur scalp avec notre tomahawk pour en orner notre ceinture; mais à cette lutte, nous eussions couru le risque de cueillir moins de chevelures que de perruques; car si elle raillait l'école moderne sur ses cheveux, l'école classique, en revanche, étalait au balcon et à la galerie du Théâtre-Français une collection de têtes chauves pareille au chapelet de crânes de la déesse Dourga. Cela sautait si fort aux yeux, qu'à l'aspect de ces moignons glabres sortant de leurs cols triangulaires avec des tons couleur de chair et de beurre rance, malveillants malgré leur apparence paterne, un jeune sculpteur de beaucoup d'esprit et de talent, célèbre depuis, dont les mots valent les statues, s'écria au milieu d'un tumulte: «A la guillotine, les genoux!»
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