Journal d'un curé de campagne
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Georges Bernanos. Journal d'un curé de campagne
Journal d'un curé de campagne
Table des matières
I
II
III
Отрывок из книги
Georges Bernanos
Publié par Good Press, 2021
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Il est devenu tout rouge et m’a regardé de haut en bas.
—Je me demande ce que vous avez dans les veines aujourd’hui, vous autres jeunes prêtres! De mon temps, on formait des hommes d’église—ne froncez pas les sourcils, vous me donnez envie de vous calotter—oui, des hommes d’église, prenez le mot comme vous voudrez, des chefs de paroisse, des maîtres, quoi, des hommes de gouvernement. Ça vous tenait un pays, ces gens-là, rien qu’en haussant le menton. Oh! je sais ce que vous allez me dire: ils mangeaient bien, buvaient de même, et ne crachaient pas sur les cartes. D’accord! Quand on prend convenablement son travail, on le fait vite et bien, il vous reste des loisirs et c’est tant mieux pour tout le monde. Maintenant les séminaires nous envoient des enfants de chœur, des petits va-nu-pieds qui s’imaginent travailler plus que personne parce qu’ils ne viennent à bout de rien. Ça pleurniche au lieu de commander. Ça lit des tas de livres et ça n’a jamais été fichu de comprendre—de comprendre, vous m’entendez!—la parabole de l’Époux et de l’Épouse. Qu’est-ce que c’est qu’une épouse, mon garçon, une vraie femme, telle qu’un homme peut souhaiter d’en trouver une s’il est assez bête pour ne pas suivre le conseil de saint Paul? Ne répondez pas, vous diriez des bêtises! Hé bien, c’est une gaillarde dure à la besogne, mais qui fait la part des choses, et sait que tout sera toujours à recommencer jusqu’au bout. La Sainte Église aura beau se donner du mal, elle ne changera pas ce pauvre monde en reposoir de la Fête-Dieu. J’avais jadis—je vous parle de mon ancienne paroisse—une sacristaine épatante, une bonne sœur de Bruges sécularisée en 1908, un brave cœur. Les huit premiers jours, astique que j’astique, la maison du bon Dieu s’était mise à reluire comme un parloir de couvent, je ne la reconnaissais plus, parole d’honneur! Nous étions à l’époque de la moisson, faut dire, il ne venait pas un chat, et la satanée petite vieille exigeait que je retirasse mes chaussures—moi qui ai horreur des pantoufles! Je crois même qu’elle les avait payées de sa poche. Chaque matin, bien entendu, elle trouvait une nouvelle couche de poussière sur les bancs, un ou deux champignons tout neufs sur le tapis de chœur, et des toiles d’araignées—ah, mon petit! des toiles d’araignées de quoi faire un trousseau de mariée.
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