Nouvelles lettres d'un voyageur
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Жорж Санд. Nouvelles lettres d'un voyageur
GEORGE SAND. 1877
I. LA VILLA PAMPHILI
II. LES CHANSONS DES BOIS. ET DES RUES
III. LE PAYS DES ANÉMONES
I
II
IV. DE MARSEILLE A MENTON
V. A PROPOS DE BOTANIQUE
MÉLANGES
I. UNE VISITE AUX CATACOMBES
II. DE LA LANGUE D'OC. ET. DE LA LANGUE D'OIL
VI. Comment Pantagruel rencontra ung Limosin qui contrefaisoit le languaige françoys
III. LA PRINCESSE. ANNA CZARTORYSKA
IV. UTILITÉ D'UNE. ÉCOLE NORMALE D'ÉQUITATION 16
V. LA BERTHENOUX
VI. LES JARDINS EN ITALIE
VII
VIII. LES BOIS
IX. L'ILE DE LA RÉUNION19
X. CONCHYLIOLOGIE. DE L'ILE DE LA RÉUNION21
XI. A PROPOS DU CHOLÉRA DE 1865
LES AMIS DISPARUS
I. NÉRAUD PÈRE
II. GABRIEL DE PLANET
III. CARLO SOLIVA23
IV. LE COMTE D'AURE
V. LOUIS MAILLARD
VI. FERDINAND PAJOT
VII. PATUREAU-FRANCOEUR
VIII. MADAME LAURE FLEURY
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Rome, 25 mars 185…
La villa Pamphili n'a pas été abîmée dans les derniers événements, comme on l'a dit. Ni Garibaldi, ni les Français n'y ont laissé de traces de dévastation sérieuse. Ses pins gigantesques sont, en grande partie, encore debout. Elle est bien plus menacée de périr par l'abandon que par la guerre, car elle porte l'empreinte de cette indifférence et de ce dégoût qui sont, à ce que l'on me dit, le cachet général de toutes les habitations princières de la ville et des environs.
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Apprendre à voir, voilà tout le secret des études naturelles. Il est presque impossible de voir avec netteté tout ce que renferme un mètre carré de jardin naturel, si on l'examine sans notion de classement. Le classement est le fil d'Ariane dans le dédale de la nature. Que ce classement soit plus ou moins simple ou compliqué, peu importe, pourvu qu'il soit classement et qu'on s'y tienne avec docilité pour apprendre. Chacun est libre, avec le temps et le savoir acquis, de rectifier selon son génie ou sa conscience les classifications hasardées ou incomplètes des professeurs. Adoptons une méthode et n'ergotons pas. Le but d'un esprit artiste et poétique comme le vôtre n'est pas de se satisfaire en connaissant d'une manière infaillible tous les noms charmants ou barbares donnés aux merveilles de la nature; son but est de se servir de ces noms, quels qu'ils soient, pour former les groupes et distinguer les types. Les principaux sont si faciles à saisir que peu de jours suffisent à cette prise de possession des familles. Les tribus et les genres s'y rattachent progressivement avec une clarté extrême. La distinction des espèces exige plus de patience et d'attention, c'est le travail courant, habituel, prolongé et plein d'attraits de la définition. On y commet longtemps, peut-être toujours, plus d'une erreur, car les caractères accessoires sur lesquels repose l'espèce sont parfois très-variables ou difficiles à saisir, même avec la loupe ou le microscope. Vous pouvez bien vous arrêter là, si vous avez atteint le but, qui est d'avoir vu tout ce qu'il y a de très-beau à voir dans le végétal. Pourtant cette recherche ardue ne nuit pas. La loupe vous révèle des délicatesses infinies, des différences de tissu, des appareils respiratoires ou sudorifiques très-mystérieux, des appendices de poils transparents qui ressemblent à une microscopique chevelure hyaline, tantôt disposée en étoiles, tantôt couchée comme une fourrure, tantôt courant le long de la tige et alternant avec ses noeuds, tantôt composée de fines soies articulées ou terminées par une petite boule de cristal. Ces appendices, placés tantôt sur la tige en haut ou en bas, tantôt sur le calice, le bord des feuilles ou des pétales, déterminent quelquefois une partie essentielle des caractères. S'ils ne nous renseignent pas toujours exactement, c'est un bien petit malheur; l'important, c'est d'avoir vu cette parure merveilleuse que la plus humble fleurette ne révélait pas à l'oeil nu, et, pour la chercher avec la lentille, il fallait bien savoir qu'elle existe ou doit exister.
Je vous cite ce petit fait entre mille. Si vous étudiez la plante dans tous ses détails, vous serez frappé d'une première unité de plan vraiment magistrale, donnant naissance à l'infinie variété et reliant cette variété au grand type primordial par des embranchements admirablement ingénieux et logiques. Je m'embarrasse fort peu, quant à moi, des questions religieuses ou matérialistes que soulève l'ordre de la nature. Il a plu à de grands esprits d'y trouver du désordre ou tout au moins des lacunes et des hiatus. Pour mon compte, j'y trouve tant d'art et de science, tant d'esprit et tant de génie, que j'attribuerais volontiers les lacunes apparentes de la création à celles de notre cerveau. Nous ne savons pas tout, mais ce que nous voyons est très-satisfaisant, et, que la vie se soit élancée sur la terre en semis ou en spirale, en réseau ou en jet unique, par secousses ou par alluvions, je m'occupe à voir et je me contente d'admirer.
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