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PRÉFACE.

Table des matières

L’utilité de ce livre ne saurait être contestée, peu de mots suffiront pour la faire comprendre. Comment, en effet, émettre un jugement consciencieux sur une foule de points de médecine légale, sans la connaissance des principes généraux de cette science. Les coups, blessures ou sévices, les homicides, les empoisonnemens, les infanticides, les sophistications, les maladies simulées, les maladies mentales soulèvent tous les jours de nouvelles questions. Si le ministère public ignore les faits de médecine légale, et les véritables secours que cette connaissance peut lui fournir dans la poursuite des coupables, la société se trouve sans vengeur, et le crime sans répression si l’ignorance est du côté de l’avocat, c’est la défense qui en souffre. Eufin, si les jurés n’ont rien compris à la discussion qui s’est élevée entre le défenseur et le procureur du Roi, le jugement est faussé par leur conviction mal formée.

Ces raisonnemens nous paraissent sans réplique; reste maintenant la question de sa voir si la science du médecin légiste peut être mise à la portée des jurés, des magistrats, des avocats, sans les fatiguer par des détails trop techniques. Toutes les fois qu’un tribunal demande un rapport sur un fait, il faut de toute nécessité que ce rapport se termine par des conclusions positives, négatives ou douteuses; car l’examen d’un fait médical quelconque ne peut amener que ces trois sortes de conclusions. C’est donc à l’exposition des faits que nous avons borné ce travail. Citons un exemple:

Supposons une accusation d’infan- ticide: les deux questions principales se réduisent à déterminer, 1° si l’enfant, qui dans ce cas est le corps du délit, était né viable, 2° s’il a respiré : nous ne parlerons ici que de la viabilité. Il est bien clair que cette question se résout aux yeux du médecin par l’examen anatomique et physiologique du fœtus; mais pour nos lecteurs, il suffit de connaître les vérités proclamées parla science qui leur apprend que tout fœtus est né viable lorsque:

1°. La moitié de la longueur totale du corps répond à l’ombilic, ou à très peu de distance au-dessus;

2°. Lorsque sa pesanteur est de 6 à 7 livres environ;

5°. Lorsque la longueur est de 16 à 18 pouces;

4°. Enfin lorsque l’extrémité inférieure du fémur présente un point d’ossification.

Ces notions bien simples acquises à tout magistrat, à tout homme de loi, à tout juré. les uns et les autres seront en état de rectifier un rapport médico-légal, ou de provoquer au moins sa rectification, si l’examen de ces quatre circonstances fondamentales était incomplet ou mal déterminé, Or, qu’y a-t-il de plus facile à connaître que de semblables faits.

Prenons un second exemple: on attribue la mort d’un individu à l’arsenic, si le rapport soumis aux magistrats, indique:

1°. Que la substance trouvée dans la matière des vomissemens, dans l’estomac, ou les intestins, ressemble à du sucre pulvérisé,

2°. Qu’elle est âpre, nullement caustique, provoquant une abondante salivation;

3° Que mise sur les charbons ar-dens, elle est décomposée par eux, et répand des vapeurs brunâtres, d’une odeur d’ail .

4°. Si le rapport ajoute surtout que le mélange de cette substance avec l’eau, traité par l’acide hydrosulfurique, et par l’addition d’une goutte d’acide hydrochlorique, est jauni, et qu’il s’en précipite des flocons de sulfure jaunes d’arsenic entièrement solubles dans l’ammoniaque;

5°. Que ce sulfure desséché et calciné avec de la potasse et du charbon donne de l’arsenic métallique, les magistrats et les jurés ne peuvent conserver d’incertitude, l’individu est mort empoisonné par l’arsenic.

On voit par ces deux exemples que nous avons choisi entre beaucoup d’autres, qu’il est indispensable que les rapports énoncent principalement les caractères distinctifs d’un fait. C’est presque toujours, dit M. Orfila, parce que les premiers rapports manquent par l’omission de ces signes, ou par la manière dont ils sont présentés, qu’on voit s’élever tant de difficultés devant les tribunaux. On ne saurait donc assez recommander aux hommes de l’art, appelés à les rédiger, de bien insister sur les caractères fondamentaux.

En considérant la haute importance qu’il y a pour la bonne administration de la justice, que les notions précises de médecine légale soient plus généralement répandues, nous avons senti la nécessité de la création d’une chaire de médecine légale dans toutes les facultés de droit du royaume. Aussi exprimons-nous hautement le désir que M. Orfila, usant de l’influence que sa [position personnelle et ses titres scientifiques lui ont justement méritée, provoque lui-même cette mesure.

Pénétré de la vérité de ces principes, nous croyons avoir fait quelque chose pour l’éducation civile en publiant notre Manuel. Il n’existe, à vrai dire, aucun ouvrage dans lequel soient exposés d’une manière claire et presque aphoristique les principes de médecine légale, tels qu’ils doivent être présentés à des jurés, à des magistrats, à des avocats, nous pourrions même dire à des officiers de santé. Nous avons pris pour guide, dans cette tâche, le professeur célèbre qui, après avoir formé la plupart des médecins légistes de ces derniers temps, dirige avec une incontestable supériorité la premèire école médicale du monde, la faculté de médecine de Paris. L’article homicide par empoisonnement , par lequel nous allons commencer notre livre, a été revue et annoté par M. Orfila lui-même, qui regarde cette question comme la plus importante et la plus précise de la médecine légale. Grâce aux travaux de ce savant justement renommé, il n’est point aujourd’hui de crime d’empoisonnement qui puisse rester caché aux recherches, et par conséquent point d’empoisonneur qui puisse échapper au glaive de la loi. C’est pour la société une garantie immense, et c’est aussi pour elle un devoir de rendre hommage à la science et à ses bienfaits. Pour nous, quelque médiocre que soit notre part dans le travail que nous avons entrepris, nous nous féliciterons toujours de l’heureux concours de circonstances qui nous a permis de propager les idées et les découvertes de deux hommes aussi illustres que MM. Dupuytren et Orfila .

Un dernier mot sur la destination première de ce livre, et sur ses élémens. Dans l’origine le Manuel de médecine légale avait été écrit pour le bibliothèque populaire, dont nous nous honorons d’avoir été un des collaborateurs; persuadé que toute entreprise qui a pour but de populariser les sciences est un véritable service rendu à l’humanité. Le supplément dont le Manuel devait faire partie, n’ayant point été publié, nous avons pensé qu’un ouvrage pour lequel M. Orfila avait bien voulu nous donner des conseils pouvait encore être utilisé. Nous l’avons revu en entier, extrayant de tous les meilleurs travaux que nous possédons sur la médecine légale, ce qu’il y avait dé réellement important à connaître pour le plan que nous nous étions proposé. MM. Marc, Adelon, Esquirol, Mahon Devergie, Fodéré, Belloc, Biessy,Georget, Leuret , Hofbauer, Briand, Ollivier d’Angers, Sédillot, ont été également mis à contribution par nous. L’accueil fait à nos mémoires sur la monomanie homicide et l’interdiction des aliénés nous ont engagé à les consulter. Mais nous le répétons, nous avons tâché d’être toujours fidèles à l’esprit de ce Manuel, en ne donnant que le plus possible les caractères distinctifs de chaque fait de médecine légal.

Manuel de médecine légale

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