Читать книгу L’ombre du mal - Блейк Пирс - Страница 7

CHAPITRE 1

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Le cœur de Keri Locke battait à tout rompre. Bien qu’elle soit au milieu d’un grand commissariat de police, elle parvint à bloquer tout ce qui l’entourait. Elle parvenait à peine à réfléchir clairement en lisant l’email qu’elle venait de recevoir. Il était difficile de croire que c’était vrai.

suis prêt à vous rencontrer si vous respectez les règles. vous recontacte bientôt.

Les mots en étaient simples, mais le message était porteur d’une signification colossale.

Pendant six semaines interminables, Keri avait attendu cela, espérant désespérément que l’homme qu’elle soupçonnait d’avoir enlevé sa fille cinq ans plus tôt la contacterait. Et il venait de le faire.

Keri repoussa son portable et ferma les yeux, essayant de garder sa contenance tout en réfléchissant à la situation. La première fois qu’elle avait trouvé le moyen de contacter cet homme, connu sous le seul surnom de Collectionneur, elle avait organisé un rendez-vous. Il n’était pas venu.

Elle lui avait écrit pour savoir pourquoi, et il avait répondu qu’elle n’avait pas respecté les règles, tout en suggérant qu’ils pourraient se recontacter à l’avenir. Il lui avait fallu toute sa patience et toute son autodiscipline pour ne pas faire le premier pas. Elle en mourait d’envie mais craignait de paraître trop empressée, qu’il prenne peur et supprime définitivement son compte email. Cela lui aurait enlevé toute possibilité de le retrouver un jour, ni lui ni Evie.

Et maintenant, après plusieurs semaines de torture et de silence, il avait fini par la recontacter. Évidemment, il ne savait pas qu’il communiquait avec la mère d’Evie, ni même que Keri était une femme. Tout ce qu’il savait, c’était qu’il s’agissait d’un client potentiel, qui voulait discuter d’un enlèvement contre rémunération.

Cette fois-ci, elle trouverait un meilleur stratagème que la dernière fois, où il lui avait laissé moins d’une heure pour rejoindre le lieu de rendez-vous désigné. Elle avait mis en place un leurre, un fantoche, pour qu’il aille à sa place, et elle avait surveillé de loin la situation. Mais d’une façon ou d’une autre, le Collectionneur avait su que le leurre n’était pas son vrai client, et il n’était pas venu. Elle ne pouvait pas laisser cela se reproduire.

Reste calme. Tu as tenu tout ce temps et ça a payé. Ne ruine pas tout en faisant quelque chose d’impulsif. De toute façon, pour le moment, tu ne peux rien faire. La balle est dans son camp. Fais une réponse simple et attends qu’il réagisse.

Keri tapa un seul mot :

compris

Ensuite, elle rangea son portable dans son sac et se leva, trop tendue et fébrile pour rester assise. Comme elle savait qu’il n’y avait rien à faire de plus, elle s’efforça de chasser le Collectionneur de ses pensées.

Elle se dirigea vers la salle de repos pour manger un morceau. Il était 16h passées, et son estomac grondait, bien qu’elle ne sache pas si c’était parce qu’elle avait sauté le déjeuner ou à cause de son anxiété générale.

Lorsqu’elle arriva, elle vit son collègue de binôme, Ray Sands, qui fouillait le réfrigérateur. Il était connu pour s’approprier tout aliment dont le propriétaire ne soit pas correctement indiqué. Heureusement, sa salade au poulet, sur laquelle figurait clairement son nom, était cachée en bas, au fond du frigo. Ray, un grand Noir d’1,93 mètres et 105 kilos, au crâne chauve et à la carrure imposante, aurait du être vraiment affamé pour aller chercher jusque là une simple salade.

Keri resta un moment debout dans l’embrasure, profitant de la vue des fesses de Ray qui se tortillaient pendant ses manœuvres. En plus d’être son binôme, il était son meilleur ami, et depuis quelque temps, peut-être même plus que cela. Ils étaient tous les deux profondément attirés l’un par l’autre, et se l’étaient avoués moins de deux mois auparavant, lorsque Ray se remettait d’une blessure par balle reçue en combattant un kidnappeur d’enfants.

Mais depuis lors, ils n’avaient fait que dépasser des étapes minimes. Ils flirtaient plus ouvertement lorsqu’ils étaient seuls, et il plusieurs rendez-vous semi-romantiques avaient eu lieu, pendant lesquels ils se rendaient l’un chez l’autre pour regarder un film.

Mais ils semblaient tous deux avoir peur de faire le pas suivant. Keri savait pourquoi elle ressentait tout cela, et elle soupçonnait que Ray le savait également. Elle s’inquiétait de la possibilité que leur amitié et leur binôme soient compromis, s’ils se mettaient ensemble et que leur couple ne durait pas. C’était une inquiétude légitime.

Aucun des deux n’avait eu beaucoup de succès dans le domaine amoureux. Ils étaient tous deux divorcés. Ils avaient tous deux trompé leur partenaire. Ray, qui était un ancien boxeur professionnel, était aussi un homme à femmes notoire. Et Keri devait bien admettre que depuis l’enlèvement d’Evie, elle n’avait été qu’une boule de nerfs à vif, constamment au bord du précipice. Il était peu probable que Meetic fasse d’eux des porte-parole de la marque dans un futur proche.

Ray sentit qu’on le regardait, et il se retourna, un demi-sandwich non étiqueté à la main. En voyant qu’il n’y avait personne d’autre que Keri dans la salle, il lui demanda : « La vue t’a plu ? » en clignant de l’œil.

« Ne prends pas la grosse tête, Hulk », l’avertit Keri. Ils adoraient s’affubler de surnoms qui soulignaient leur grande différence de taille.

« Tant que ce ne sont pas mes fesses qui deviennent grosses, hein, Miss Bianca ? » fit-il en souriant.

Keri vit son expression changer, et elle devina qu’elle n’avait pas suffisamment bien caché sa fébrilité due au Collectionneur. Ray la connaissait trop bien.

« Qu’est ce qu’il y a ? demanda-t-il tout de suite.

— Rien », fit-elle en se faufilant à côté de lui et se penchant pour attraper sa salade.

Contrairement à lui, les espaces exigus ne lui posaient aucun problème. Bien qu’elle ne soit pas aussi menue que ne le suggérait son surnom de souris de dessin animé, comparée à Ray, sa stature d’1,67 cm et 59 kilos était lilliputienne.

Elle sentit son regard se poser sur elle, mais fit mine de ne rien remarquer. Elle ne voulait pas parler de ce qui la préoccupait, pour plusieurs raisons. Avant tout, si elle lui parlait de l’email du Collectionneur, il allait vouloir discuter de chaque détail avec elle, ce qui irait à l’encontre de ses efforts pour ne pas y penser afin de conserver son calme.

Mais il y avait une autre raison. Keri était surveillée par un avocat véreux nommé Jackson Cave, qui était connu pour représenter des kidnappeurs d’enfants et des pédophiles. Pour obtenir les informations qui lui avaient permis de trouver le Collectionneur, elle était entrée par effraction dans son bureau et avait fait une copie d’un fichier secret.

La dernière fois qu’ils s’étaient vus, Cave avait laissé entendre qu’il savait ce qu’elle avait fait, et il avait ouvertement déclaré qu’il la tiendrait à l’œil. Pour Keri, la signification en était claire. Depuis, elle vérifiait régulièrement qu’on n’avait pas placé de mouchard sur elle, et elle prenait garde de ne discuter du Collectionneur que dans des endroits sûrs.

Si Cave venait à savoir qu’elle avait trouvé la trace du Collectionneur, il risquait de le prévenir. Alors, le Collectionneur disparaîtrait et elle ne retrouverait jamais Evie. Il était donc hors de question de raconter quoi que ce soit à Ray dans cet endroit.

Mais Ray ne savait rien de tout cela, et il insista : « Je vois bien qu’il y a quelque chose ».

Mais avant que Keri puisse battre en brèche, leur chef fit irruption dans la pièce. Le lieutenant Cole Hillman, leur supérieur direct, avait cinquante ans mais semblait beaucoup plus vieux. Il avait des rides profondes, une chevelure poivre et sel emmêlée, et un ventre de buveur de bière en plein développement, qu’il ne parvenait pas à cacher sous ses chemises trop grandes. Comme d’habitude, il portait une veste et une cravate, mais la première était mal ajustée et la seconde ridiculement lâche.

« Bien, je suis ravi que vous soyez là tous les deux », dit-il, se passant de toute forme de salutation. « Venez avec moi. On a un nouveau dossier. »

Ils le suivirent jusqu’à son bureau, et s’assirent sur la causeuse défoncée placée contre le mur. Sachant qu’elle n’aurait sans doute pas l’opportunité de manger plus tard, Keri engloutit sa salade pendant que Hillman les mettait au courant. Elle remarqua que Ray avait fini le sandwich qu’il avait volé avant même qu’ils ne soient assis. Hillman entra tout de suite dans le vif du sujet :

« La possible victime est une fille de seize ans de Westchester, Sarah Caldwell. On ne l’a plus vue depuis la pause déjeuner. Ses parents l’ont appelée plusieurs fois, et disent qu’ils n’arrivent pas à l’avoir.

— Ils stressent parce que leur fille adolescente ne les rappelle pas ? demanda Ray, sceptique. On dirait la description de toutes les familles en Amérique. »

Keri ne répondit pas, malgré son envie naturelle de le contredire. Ray et elle s’étaient disputés de nombreuses fois à ce sujet. Elle estimait qu’il était trop lent à s’impliquer dans les cas comme ceux-ci, tandis que lui estimait que son expérience personnelle la rendait susceptible d’intervenir prématurément. C’était une source constante de frictions et elle n’avait aucune envie de s’infliger cela en ce moment. Mais apparemment, Hillman en avait envie.

« C’est ce que je me suis dit au début, dit Hillman, mais ils ont été très convaincants quand ils m’ont expliqué que leur fille ne passerait pas autant de temps sans les prévenir. Ils ont également essayé de vérifier où elle était grâce au GPS de son portanle, mais il était éteint.

— C’est un peu étrange, mais bon... répéta Ray.

— Écoutez, il se peut que ça ne soit rien. Mais les parents étaient insistants, et même paniqués. Et ils ont fait remarquer que pour les mineurs, la police n’a pas à atteindre les vingt-quatre heures de disparition réglementaires. Vous deux, vous n’avez pas de dossier urgent en ce moment, donc je leur ai dit que vous passeriez chez eux pour recueillir leur déposition. Il se peut que la fille revienne d’ici là, mais ça ne peut pas faire de mal. Et comme ça, s’il y a un problème, on est couverts.

— Ça m’a l’air bien, dit Keri en se levant pour partir, la bouche pleine d’une dernière bouchée de salade.

— Évidemment que ça t’a l’air bien, grogna Ray en notant l’adresse que lui dictait Hillman. Encore une folle équipée dans laquelle tu peux m’embarquer.

— On sait tous que tu adores ça, dit Keri en sortant avant lui.

— Est-ce que vous pourriez vous montrer un peu plus professionnels quand vous serez chez les Caldwell ? cria Hillman derrière eux. J’aimerais au moins qu’ils aient l’impression qu’on les prend au sérieux ! »

Keri jeta l’emballage de sa salade dans une poubelle et se dirigea vers le parking. Ray dut presser le pas pour tenir son rythme. Alors qu’ils atteignaient la sortie, il se pencha vers elle et murmura : « Ne t’imagine pas que je vais laisser tomber, pour ton petit secret. Tu peux me raconter maintenant ou plus tard. Mais je sais qu’il y a quelque chose. »

Keri s’efforça de ne pas montrer sa réaction. En effet, il y avait quelque chose. Et elle comptait le mettre au courant dès que ce serait sûr. Mais il fallait qu’elle trouve un endroit plus sûr pour raconter à son binôme, meilleur ami, et petit copain potentiel qu’elle était sur le point de finalement attraper le ravisseur de sa fille.

L’ombre du mal

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