Читать книгу Si elle entendait - Блейк Пирс - Страница 6

CHAPITRE TROIS

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Les réunions avec le directeur Duran n’avaient jamais été faciles. Mais il s’était toujours bien comporté avec Kate et elle le considérait comme un ami. Cependant, vu la manière dont la vie de Kate avait changé au cours de ces derniers mois, elle s’attendait à une réunion un peu tendue –peut-être même qu’il allait mettre un point final à sa carrière en tant qu’agent du FBI.

Quand elle entra dans son bureau, il l’accueillit avec ce sourire pragmatique qu’elle lui connaissait si bien. Duran avait plus ou moins le même âge qu’elle et ils avaient appris à s’apprécier mutuellement.

« Salut, Kate, entre, assieds-toi. »

Elle fut tout de suite inquiète en l’entendant l’appeler par son prénom. C’était très familier et ce n’était pas dans ses habitudes, à moins que ce soit après les heures de travail ou que la conversation soit un peu animée.

« Kate, hein ? » dit-elle. Elle était plutôt à l’aise en sa présence et elle fit cette remarque sur le ton de la plaisanterie, histoire de lui signaler qu’elle avait bien remarqué le ton informel qu’il avait utilisé.

« Eh bien, officiellement, tu es toujours en congé de maternité, » dit-il. « Ce serait bizarre de t’appeler agent. Mais comme tu peux l’imaginer, c’est aussi l’une des raisons pour laquelle je voulais te parler. » Il laissa échapper un soupir et la regarda droit dans les yeux. « Comment vas-tu, Kate ? »

« Bien. Mais un peu perdue… »

« Tu as l’impression d’être cette mère miracle ? »

« Apparemment, je suis entrée dans le club des célébrités, » plaisanta-t-elle. « D’ailleurs, cette petite réunion ne peut pas durer trop longtemps. J’ai un déjeuner prévu avec Ryan Seacrest juste après ça. »

« Je ne sais pas de qui tu parles. »

Kate haussa les épaules. L’humour n’avait jamais vraiment fait partie de leur relation.

« Je ne vais pas te mentir, » dit Duran. « La nouvelle a été plutôt bien accueillie. Tous les agents se sont envoyés des liens et des articles sur la mère miracle. »

« Tu sais, je n’ai donné que deux interviews. Je ne sais pas du tout comment ça a pu déboucher sur plus de quarante articles. »

« Sûrement les réseaux sociaux qui se sont emballés. Mais dis-moi… Est-ce que cette notoriété soudaine te ferait hésiter à retravailler pour le FBI ? »

Elle ne put s’empêcher de rire. « Non. S’il y avait quoi que ce soit qui pourrait me retenir de retravailler avec vous, ce ne serait certainement pas cette gloire éphémère. »

« Il y aurait donc certaines choses qui pourraient t’en empêcher ? »

« Éventuellement. Peut-être mon bébé, ou mon âge avancé. »

« Ça fait maintenant trois mois que tu es en congé, » dit-il. « Même un petit peu plus longtemps. J’imagine que je n’ai pas besoin de te préciser que tu ne rajeunis pas. Mais… tu es encore en pleine forme physiquement. C’est impressionnant. »

« Excuse-moi si je suis un peu directe, » dit Kate. « Mais qu’est-ce que tu veux exactement ? Est-ce que tu veux que je revienne travailler pour vous ? »

« Dans un monde parfait, oui. Ça a été mentionné à plusieurs reprises lors de réunions. Mais tous ces articles à ton sujet soulignent non seulement le fait que tu as accouché à cinquante-sept ans, mais aussi le fait que tu sois encore un agent actif du FBI. Je ne sais pas comment ça va se passer en termes médiatiques si tu retournes sur le terrain. »

Kate s’appuya contre le dossier de sa chaise. Elle n’avait pas pensé à ça.

« Pour être tout à fait franc, » continua Duran. « Oui, je veux que tu reviennes. Mais c’est un peu égoïste de ma part. Tu es l’un de nos meilleurs éléments et ce serait vraiment positif pour l’image du FBI. Les médias t’adorent. Tu es devenue une sorte de célébrité. Mais je n’ai pas non plus envie de t’influencer. Si tu veux arrêter, il n’y a pas de problème. Tout le monde comprendra. »

« Mais en fait, ça me manque, » dit Kate. Ce ne fut qu’au moment de prononcer ces mots qu’elle s’en rendit compte.

« Je m’en doutais un peu. Alors ce que je peux faire – en tout cas, pour les prochains mois – c’est de t’assigner des enquêtes pas trop risquées. Pour que tu gardes l’esprit occupé et que tu restes concentrée. Enfin… si tu penses avoir eu suffisamment de temps pour te reposer et si tu es prête à revenir travailler. »

« Oui, je suis prête, » dit-elle. L’idée de mettre Michael à la crèche lui faisait de la peine, mais elle savait que ce serait positif pour lui… ainsi que pour elle et pour Allen. Bien qu’au fond d’elle, elle ne soit pas vraiment sûre d’y être totalement préparée. Afin d’éviter de penser à tout ça, elle continua à parler. « Comment va DeMarco ? Je ne lui ai parlé que trois fois depuis que je suis partie et à chaque fois que je lui ai posé des questions sur le boulot, elle a changé de sujet de conversation. »

« C’est sûrement parce qu’elle a été très occupée. J’ai le droit de t’en parler parce que tu es encore techniquement sa coéquipière… mais elle a travaillé sur deux affaires assez importantes dernièrement. Il y a trois semaines, elle a arrêté deux hommes qui distribuaient de l’héroïne. Et la semaine dernière, elle a épinglé à elle toute seule un type qui a assassiné trois personnes en Virginie de l’Ouest avant de partir en cavale à travers le Maryland. »

« Ah oui… elle a vraiment été bien occupée ! »

« Et maintenant que tu mentionnes DeMarco, on vient juste de lui assigner une enquête en Caroline du Nord. Ça m’a l’air d’être une affaire assez simple. Deux jeunes filles universitaires assassinées. Sûrement l’œuvre d’un harceleur. Je suis sûr que DeMarco serait enchantée que tu te joignes à elle. Vu que l’affaire semble assez simple, ça pourrait être parfait pour toi, dans ta situation. »

« Et en quoi consiste ma situation, exactement ? »

« Kate, tu sais ce que je veux dire. Si tu veux te remettre dans le bain, c’est l’enquête parfaite pour le faire. Mais bien entendu, ça dépend totalement de toi. C’est toi qui choisis. »

« Ça me paraît une bonne idée, mais maintenant qu’elle s’en sort très bien toute seule, je n’ai pas non plus envie de la déranger. »

« Je suis sûr qu’elle sera ravie que tu te joignes à elle. Et pour être tout à fait honnête, vu qu’on ne sait pas combien de temps tu vas encore rester avec nous, c’est plus logique que tu travailles avec une coéquipière que tu connais bien. »

« Oui, c’est logique. »

Duran resta un moment silencieux, avant de se lever de sa chaise. « Elle part demain matin. Est-ce que ça te laisse assez de temps pour tout organiser avec ton mari ? Est-ce que vous en avez déjà parlé ? »

« Plus ou moins, » dit-elle. « Enfin… de manière tacite, mais l’idée est bien présente dans notre esprit. Je suis sûre qu’il sait que je n’en ai pas terminé avec le FBI, mais… »

« Mais quoi ? »

« Mais que ça ne va plus tarder. Que ma carrière au FBI touche à sa fin. »

Elle vit que Duran était sur le point de lui poser une autre question, mais il se ravisa. Elle savait ce que c’était, alors elle lui fut reconnaissante de ne pas la poser.

Est-ce que ça va être la dernière enquête de ta carrière ?

Elle était contente qu’il ne lui ait pas demandé, parce qu’elle ne savait pas du tout quelle était la réponse à cette question.

***

Ce fut leur seul sujet de conversation au dîner. Allen le prit plutôt bien, car il s’y attendait. Dès le moment où Duran avait appelé Kate, il avait su. La conversation s’était étonnamment bien passée, bien qu’une certaine tension persiste entre eux.

« Il faut que je te dise quelque chose, » dit Allen, en écartant son assiette vide. Il avait préparé du poulet teriyaki pour dîner et le repas avait été excellent. La cuisine était l’une de ses nombreuses qualités. « Je suis vraiment ravi à l’idée que tu retournes travailler. Ça a vraiment été pénible pour moi de voir dans quel état tu étais le mois dernier. On aurait dit que tu avais perdu quelque chose et que tu ne savais pas où chercher. Je sais que le boulot te manque et je suis ravi que tu puisses travailler sur cette enquête. Mais j’ai tout de même quelques questions. »

« Je m’en doute, » dit Kate. « Alors, passons-les en revue. »

« OK ! Bien que je sois presque à la retraite, je dois encore répondre à des appels et assister à des réunions au cours de l’année à venir. Et je ne veux pas que ton boulot passe avant le mien. Il faut aussi qu’on cherche une crèche pour Michael. »

« Je suis tout à fait d’accord. Maintenant, dans le cas de cette enquête, est-ce que tu es disponible pour t’occuper de Michael pendant quelques jours ? »

« Oui. En fait, je n’ai rien de prévu pour les trois semaines à venir. »

« Et ça ne te dérange pas de t’occuper tout seul de lui pendant ces quelques jours ? »

« Pas du tout. Ça va être amusant de se retrouver entre hommes. »

« Quelles autres questions voulais-tu me poser ? »

« Je pensais à ta sécurité. Je sais que tu peux te défendre et c’est l’une des raisons pour laquelle je t’aime autant. Mais je n’aime pas beaucoup l’idée que ma femme de cinquante-sept ans soit occupée à pourchasser des hommes qui ont moitié son âge. Tu n’es pas vraiment le genre d’agents à rester assise derrière un bureau ou dans une voiture. »

« On en a parlé avec Duran. Cette affaire devrait être assez simple. Il a également pris en compte le facteur âge, bien qu’il en ait parlé en termes un peu plus agréables. »

« Une dernière question. » Allen s’appuya contre le dossier de sa chaise et but une gorgée de son vin. Il regarda en direction de la balancelle où Michael s’était endormi pendant qu’ils dînaient. « Combien de temps vas-tu encore continuer ? Franchement ? Le fait de mettre un bébé au monde a dû également puiser dans tes réserves d’énergie. »

« C’est une question difficile, » dit-elle. « Toute cette situation… je n’aurais jamais pu l’imaginer. Un bébé à cinquante-sept ans. Un supérieur et une coéquipière qui veulent que je continue à travailler. Je ne m’y attendais pas du tout et… je ne sais pas. Et probablement que je ne le saurai pas tant que je ne serai pas retournée sur le terrain. »

Elle le vit réfléchir à ce qu’elle venait de lui dire. Le côté droit de sa bouche se retroussa légèrement.

« Alors, c’est sûrement mieux que tu y retournes, » dit-il. « En tout cas… pour l’instant. On en reparlera dans trois mois. Est-ce que ça te paraît raisonnable ? »

« Plus que raisonnable. »

Elle eut envie de lui dire combien il avait été adorable et arrangeant tout au long de leur relation. Mais il le savait déjà, parce qu’elle le lui répétait continuellement. Elle savait qu’elle donnait l’impression de faire passer son boulot avant lui et, pour être tout à fait honnête, c’était exactement ce qu’elle avait fait. Mais maintenant, ils avaient un bébé et un mariage se profilait à l’horizon. C’était ça, sa vie, maintenant. Sa nouvelle vie. Et elle avait enfin l’occasion de ne pas laisser son boulot tout contrôler. C’était ce qu’elle avait fait dans le passé et elle avait failli creuser un fossé entre elle et Mélissa.

Elle sut tout de suite que quelque chose avait changé. Dans le passé, elle n’aurait pas perdu une minute – elle se serait directement levée de table et elle aurait commencé à préparer ses affaires pour son départ en Caroline du Nord. Mais maintenant, après la réunion avec Duran et la conversation avec Allen, tout ce dont elle avait envie, c’était de rester assise à ses côtés. C’était lui, son avenir. Pas son boulot. Allen, Michael et Mélissa étaient son point d’ancrage.

Tout ce qu’elle devait faire, c’était s’assurer que sa tête suive pour parvenir à s’installer dans cette vie aux allures si parfaites.

Et à l’instant présent, alors qu’elle était assise à côté d’Allen, sa vie lui paraissait de fait plutôt magique.

Si elle entendait

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