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CHAPITRE CINQ

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Jenny Bjurman avait visiblement pleuré, mais ça n’avait en rien altéré sa beauté. Elle était petite et elle avait le genre de corps que la plupart des femmes rêveraient d’avoir. Sa silhouette était moulée dans un t-shirt et un pantalon de yoga, quand elle leur ouvrit la porte et les invita à entrer. Ça semblait une tenue un peu étrange vu les circonstances, mais c’était peut-être tout simplement le genre de vêtements que Jenny Bjurman portait quand elle était chez elle. En voyant combien elle était jolie, Chloé se demanda si son mari était tout aussi attirant.

« Nous apprécions vraiment le fait que vous preniez le temps de nous recevoir, » dit Chloé. « Nous savons que la police est déjà venue vous poser des questions. »

« Il n’y pas de soucis, » dit Jenny. Elle s’était assise à la table de la cuisine et buvait un thé. « Je serai heureuse de répondre à toutes les questions qui pourraient aider à trouver le responsable. Je suis complètement perdue… je suis à court de mots… à court de tout, pour dire vrai. »

« Veuillez nous excuser si on vous pose des questions que la police vous aurait déjà posées, » dit Rhodes. « Mais est-ce qu’il y a quelqu’un qui aurait pu avoir envie que votre mari meure ? »

« C’est ça, le truc, » dit Jenny. « Tout le monde l’aimait. Je sais que ça peut paraître banal, mais c’est vrai. Je ne vois personne qui aurait pu lui vouloir du mal. »

« Quelqu’un du travail ? » demanda Chloé. « Du fitness Fulbright, peut-être ? »

« J’en doute, » dit-elle. « Il avait pour habitude de me raconter qui se passait au boulot. De plus, tous les cours qu’il donnait au Fulbright étaient réservés à travers le fitness, pas auprès de Viktor directement. Toute plainte aurait été adressée à la direction du fitness. »

« Vous dites que tout le monde l’aimait. Est-ce que vous voulez dire par là qu’il était du genre sociable ? »

« Oui, il était très sociable. Il était présent à chaque nouvelle inauguration ou à tout événement un peu officiel. Il cherchait toujours à aider les autres. C’était le genre de personne à donner sa chemise, si c’était nécessaire. »

« Et que savez-vous des clients qu’il voyait à domicile ? » demanda Rhodes. « Est-ce que vous les connaissiez ? »

« Oui, je connais la plupart d’entre eux. Viktor me mettait toujours au courant quand il avait un nouveau client parce que c’étaient généralement des femmes. Il était très ouvert à ce sujet. Il voulait être sûr que je sache quand il allait chez l’une d’entre elles. Mais de toute façon, leurs maris étaient présents la plupart du temps. »

« Est-ce que vous avez une liste de ses clientes ? »

« Non, mais on a une liste partagée de contacts sur nos téléphones. Je pense que la police a contacté le fitness Fulbright pour avoir une liste des clientes qu’il voyait à domicile. »

« Si vous pouviez nous donner le nom et le numéro de téléphone de ces contacts que vous partagiez avec votre mari, ça pourrait quand même nous être utile, » dit Chloé.

« Oui, bien sûr, » dit Jenny. En prenant son téléphone, elle se mit silencieusement à pleurer. Elle regarda l’image qui se trouvait à l’écran et qui la montrait en compagnie d’un homme qui devait sûrement être son mari. Elle introduisit son code et commença à faire défiler ses contacts.

Elle leur donna l’un après l’autre le nom et le numéro de téléphone des clients de Viktor. Sa voix se brisait petit à petit, au fur et à mesure qu’elle parcourait ce qui restait de la vie de son mari. Chloé prit note des informations. Elle remarqua que presque tous les clients que Viktor Bjurman voyait à domicile étaient des femmes. Et si son physique était pareil à celui de son épouse, il devait sûrement faire beaucoup d’efforts pour résister aux propositions qu’il ne devait pas manquer de recevoir.

Elle garda cette idée dans un coin de sa tête, pendant que Jenny Bjurman continuait d’énumérer les clients. Après sept d’entre eux, Jenny dut s’arrêter. Elle jeta le téléphone à terre d’un geste brusque et s’effondra sur la table, en laissant échapper un gémissement de douleur.

Chloé ramassa lentement le téléphone et le reposa sur la table. Ce faisant, elle put voir la photo qui était affichée à l’écran et se rendre compte que Viktor Bjurman était en effet un très bel homme. Avec Jenny, ils formaient un couple magnifique. Et bien qu’elle ne veuille pas sauter trop vite aux conclusions, Chloé se demanda comment un homme aussi beau pouvait aller et venir chez des femmes sans que ça irrite certains de leurs maris.

***

Une fois que Jenny fut à nouveau capable de parler, elle consulta l’emploi du temps de Viktor et leur apprit que la dernière cliente qu’il avait vue avant de mourir, c’était une femme du nom de Theresa Diaz. Elle vivait dans la rue Primrose, à moins d’un kilomètre de la maison des Bjurman.

Il était midi quand Rhodes gara la voiture devant la maison des Diaz. C’était une jolie petite maison avec des parterres de fleurs tout autour. La porte du garage était ouverte et un SUV y était garé. Les agents sortirent de voiture et Rhodes sonna à la porte d’entrée. Elles durent attendre quelques minutes avant que la porte soit ouverte par une jolie femme blonde. Chloé eut une impression de déjà-vu. En dépit de quelques différences, elle ressemblait vraiment beaucoup à Jenny Bjurman. Et une chose que les deux femmes avaient en commun, c’était le fait d’avoir pleuré – mais Theresa Diaz faisait de son mieux pour le cacher.

« Oui ? » dit-elle, sur un ton interrogateur.

« Madame Diaz, nous sommes les agents Fine et Rhodes du FBI, » dit Chloé. « Nous aimerions vous poser quelques questions concernant Viktor Bjurman. J’imagine que vous avez appris ce qui lui était arrivé ? »

« Oui, j’ai appris la nouvelle. S’il vous plaît, entrez. »

Theresa les guida à l’intérieur. C’était une petite maison, mais elle était très joliment décorée. Chloé entendit de la musique douce venant d’une autre pièce, au fond de la maison. Theresa les mena jusqu’au salon. Chloé remarqua qu’il n’y avait pas de télé et que tous les fauteuils se faisaient face, semblant indiquer par là que la famille Diaz était bien plus intéressée par la conversation que par les séries télé.

« À quand remonte la dernière fois où vous avez vu monsieur Bjurman ? » demanda Rhodes.

« Hier soir. Il est venu ici pour une séance de Pilates. »

« À quelle heure est-il parti ? » demanda Chloé.

« Je ne me rappelle pas l’heure exacte, mais la séance s’est terminée à dix-neuf heures. En général, il part juste après. Alors, il ne devait pas être plus tard que dix-neuf heures cinq, par-là… »

« Excusez-moi de vous poser cette question, » dit Chloé, « mais est-ce que votre mari était présent ? »

« Non. » Elle s’interrompit un instant, comme si elle essayait de décider si elle devrait se sentir insultée par ce que Chloé avait l’air de suggérer. Finalement, elle balaya cette idée de sa tête et continua à parler. « Il est en voyage d’affaires pour l’instant. Il ne rentrera que dans trois jours. Mais mon mari connaît Viktor et il n’y a aucun problème à ce qu’il vienne quand il n’est pas là. »

Il n’y avait aucune arrogance, ni aucune méfiance dans sa voix. Elle parlait de manière plutôt polie, en fait. Mais il n’empêche qu’elle avait visiblement beaucoup pleuré au cours des dernières heures.

« Est-ce que vous connaissiez monsieur Bjurman en-dehors de vos relations professionnelles ? » demanda Rhodes. « Est-ce que vous le considériez comme un ami ? »

« Oui, bien sûr. On riait et on plaisantait beaucoup ensemble. De temps en temps, il restait prendre un verre de vin après les séances, mais uniquement quand Mike – mon mari – était à la maison. »

Chloé réfléchit soigneusement à la prochaine question qu’elle allait poser. Theresa Diaz avait bien veillé à mentionner son mari à plusieurs reprises au cours des vingt dernières secondes. Elle avait également fait de son mieux pour poliment fermer toute possibilité à l’idée d’une éventuelle liaison entre elle et Viktor. Chloé avait compris que c’était un sujet délicat et que si elle insistait, Theresa allait les envoyer paître.

« Ça fait combien de temps que vous êtes cliente de monsieur Bjurman ? » demanda Chloé.

« Ça fait environ un an. Il était très bon… »

Elle s’arrêta de parler et secoua la tête pour reprendre ses esprits. « Désolée. Tout ça, c’est vraiment soudain. Je veux dire… je l’ai vu hier soir. »

« Ne vous inquiétez pas, nous comprenons, » dit Rhodes. « Est-ce que vous avez une idée de qui pourrait lui vouloir du mal ? »

« C’est ça, le truc, » dit Theresa. « Je ne l’ai jamais vu se disputer avec qui que ce soit. Et je n’ai jamais entendu personne parler mal de lui. »

« Qu’est-ce que votre mari pense de lui ? » demanda Rhodes. Chloé eut un sourire crispé, en se demandant si ça allait être la question qui allait clore l’entretien. Mais non, Theresa le prit plutôt bien. Ou peut-être qu’elle n’avait tout simplement pas saisi la subtilité de la question de Rhodes.

« Mike s’entendait très bien avec lui. Maintenant, pour être tout à fait honnête, il n’aimait pas l’idée qu’un homme vienne me donner des cours de fitness à la maison quand il n’était pas là. Mais quand Mike l’a rencontré, il a changé d’avis. Viktor était un homme vraiment charmant. Tout le monde l’aimait. Je ne comprends pas comment quelqu’un pourrait vouloir le tuer. »

« Est-ce que vous savez si Viktor avait des clients dans la ville de Colin ? » demanda Chloé.

« Je ne sais pas. Mais peut-être que sa femme pourrait obtenir cette information. »

C’est courageux de sa part de mentionner la femme de Bjurman, pensa Chloé. Parce qu’elle est clairement attirée par lui et je ne serais pas étonnée qu’ils aient eu une liaison.

« Est-ce que monsieur Bjurman avait l’air particulièrement stressé ou mal à l’aise hier soir ? » demanda Chloé.

« Non. Et si c’était le cas, il l’a très bien caché. Je… je ne comprends pas… »

Apparemment, personne n’avait l’air de comprendre. Et il était clair qu’elles n’allaient rien apprendre de plus de Theresa Diaz. Chloé savait que l’étape suivante était logiquement de se rendre à Colin et voir ce qu’elles pouvaient découvrir concernant Steven Fielding. Mais en faisant ça, Chloé avait l’impression qu’elles allaient s’éloigner du meurtre de Bjurman parce qu’elle était de plus en plus certaine que les deux meurtres n’avaient aucun lien entre eux.

« Je ne comprends vraiment pas, » dit à nouveau Theresa, d’une voix tremblante.

Alors, on est deux, pensa Chloé.

Vitres Teintées

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