Читать книгу Condamné à fuir - Блейк Пирс - Страница 8
CHAPITRE CINQ
ОглавлениеAdèle plissa les yeux devant son ordinateur portable, se penchant en arrière sur le siège de première classe payé par Interpol. L’avion vibrait en fendant le ciel, mais Adèle avait fermé le hublot, et la lueur de l’écran de l’ordinateur éclairait sa petite section de la cabine de l’avion.
Elle se surprit à triturer nerveusement la sangle de sa sacoche d’ordinateur portable sur le siège vide à côté d’elle, scrutant à nouveau les informations sur l’écran. Une fois qu’elle avait lu un dossier, elle en oubliait rarement les détails.
Elle s’installa, appuyée contre la paroi courbe en plastique blanc, ses yeux passant du texte aux photos.
Deux victimes jusqu’à présent. À trois jours d’intervalle. Un rythme rapide, même pour un tueur en série. Aucune preuve matérielle d’aucune sorte. Un rein manquant pour la première victime et un rapport du médecin légiste en attente pour la seconde. Lui manquerait-il également un rein ?
Des jeunes femmes, toutes les deux. Des expatriées américaines qui vivaient maintenant en France. Des nouvelles arrivantes. Tuées si vite qu’elles n’avaient pas réagi. C’était la seule explication à la netteté des lacérations. Pas de peau déchiquetée, pas de traces de lutte. Les jeunes femmes étaient en vie, chez elles, et à l’instant d’après, une ombre la leur ôtait.
Adèle doutait que les femmes l’aient même vu venir. Elle ne disposait pas de beaucoup plus d’informations – pas pour l’instant en tout cas. Pourtant, elle gardait le hublot fermé, écoutant le bruit des moteurs qui tournaient dans les airs. Elle parcourait le dossier, encore et encore… et encore.
***
Elle parvint à se connecter au Wi-Fi de l’aéroport Charles De Gaulle, et elle haussa les sourcils en lisant le dernier message de Robert Henry, son ancien mentor et ami. Il disait : Désolé, ma chère, je ne viendrai pas te chercher. Ils envoient un autre agent. Puis il avait ajouté une série d’émojis et de smiley.
Elle marqua une pause, puis tapa : Pas de problème. Je te verrai au bureau. Qui ont-ils envoyé ?
Pas de réponse. Adèle secoua la tête en émergeant de la passerelle et en entrant dans le terminal principal, accueillie par l’odeur du café hors de prix et des pâtisseries rassies des restaurants de l’aéroport. Ses yeux se posèrent sur une série de magasins, l’un de souvenirs, l’autre une librairie. Adèle remit son téléphone dans sa poche, se déplaçant rapidement en direction de la zone de récupération des bagages. La dernière fois, elle avait fait équipe avec John – il était probable que cela se reproduise. Mais ils s’étaient quittés sur une note un peu étrange. Alors qu’elle et Robert s’étaient régulièrement envoyés des messages depuis son départ de France, John ne lui avait donné aucune nouvelle.
Mais toi non plus, lui rappela une petite voix.
Mais elle la fit taire d’un léger haussement d’épaules. Elle arriva à la réception des bagages et observa les valises se succéder sur le tapis roulant à lattes métalliques ; elle attendit patiemment, incapable de refouler l’impatience qui montait dans sa poitrine.
Elle parvint enfin à récupérer son sac, en attendant qu’un espace se libère autour du tapis.
Elle se surprit à se lisser les cheveux derrière les oreilles et à défroisser sa tenue alors qu’elle s’approchait de la douane et attendait que l’agent de la douane examine son passeport et ses papiers. Reprends-toi, s’ordonna-t-elle, cinglante. Pourquoi était-elle si préoccupée par son apparence tout à coup ? John ou pas, pourquoi cela importerait-il ? Adèle était plus grande que la plupart des femmes, mais pas exceptionnellement – ses longs cheveux blond foncé encadraient des traits qui laissaient deviner son héritage franco-américain. Exotique, selon certains. Un grain de beauté unique ornait le dessus de sa lèvre, source de complexes à l’adolescence, mais plus maintenant.
Adèle repensa à la dernière fois qu’elle avait vu John, nageant dans la piscine privée de Robert. La façon dont John s’était comporté au début de la soirée, puis le changement vers la fin. Il avait essayé de l’embrasser, n’est-ce pas ? Avait-elle mal interprété son geste ? Quoi qu’il en soit, quand elle s’était écartée, il avait pris offense. Il était parti peu après.
Au mépris de ses émotions, Adèle se décoiffa, emmêlant volontairement sa frange. Puis, la mâchoire serrée, elle passa la douane avec sa valise, avant d’émerger dans la zone des arrivées.
Elle scruta la foule, à la recherche de la grande silhouette élancée de son ancien partenaire français. Mais alors que son regard parcourait la foule qui attendait, il n’y avait aucun signe de John. Son sourire – elle ne s’en rendit pas compte tout de suite, mais elle s’était mise à sourire – se figea brutalement lorsqu’elle repéra une femme en tailleur appuyée contre la vitre teintée qui donnait sur l’extérieur de l’aéroport.
Son sourire s’effaça complètement lorsqu’elle reconnut les lèvres pincées de la femme et ses cheveux argentés tirés en chignon. La femme ressemblait à un professeur sévère, ou peut-être à une nonne en civil. Pas une mèche de cheveux n’était déplacée et même les rides au bord de ses yeux semblaient s’étirer comme si elle visait l’impassibilité totale.
Un agent avec qui elle avait déjà travaillé… Mais pas John.
Cet agent en particulier avait été le superviseur d’Adèle à l’époque où elle travaillait pour la DGSI. Elle avait également été rétrogradée, un scénario malheureux pour lequel elle blâmait exclusivement Adèle. Les yeux de l’agent Sophie Paige se mirent à refléter le mépris et l’impatience de manière flagrante, mais finalement, elle leva une main et adressa un geste brusque à Adèle.
C’était davantage un geste lui demandant de s’approcher, comme un maître qui appellerait son chien de compagnie qu’un salut en tant que tel. Adèle resta figée sur place pendant un moment, sentant les gens se bousculer autour d’elle pour se précipiter de saluer leur famille ou les amis qui les attendaient. Il y avait les rires des retrouvailles, les embrassades, quelques soupirs d’épuisement des voyageurs qui quittaient de l’aéroport et se pressaient avec soulagement en direction des taxis ou des voitures stationnées.
Pendant un court instant, Adèle dut résister à l’envie de faire demi-tour et de remonter dans l’avion, laissant Sophie Paige et son air renfrogné près de la fenêtre.
Mais finalement, elle rassembla ce qui lui restait de courage, remit rapidement ses cheveux en place avec des mouvements furtifs et se dirigea vers la silhouette de son ancien superviseur et de sa nouvelle partenaire.