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CHAPITRE VI

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Table des matières

L'armée du duc d'Anjou.—Temporisation.—Escarmouche de Loudun.—Les renforts attendus.—Bataille de Bassac ou de Jarnac.—Mort du prince de Condé.—Son éloge par La Noue.—Jeanne d'Albret à Tonnay-Charente.—Henri proclamé généralissime.—Affaires de Béarn.—Arrivée des reîtres en Limousin.—La campagne de Montgomery en Gascogne et en Béarn.—Combat de La Roche-Abeille.—Siège de Poitiers, désapprouvé par le prince de Navarre.—Tactique du duc d'Anjou.—Combat de Saint-Clair.—Mesures de proscription contre Coligny.—L'avis avant la bataille.—Bataille de Moncontour.—L'inaction de Henri et la grande faute de l'amiral.—Héroïsme de Jeanne d'Albret.

L'armée royale comptait plus de vingt mille hommes, tant Français que Suisses, Allemands et reîtres. Le duc d'Anjou, ayant sous ses ordres Tavannes et Sansac, recueillit les troupes de Montpensier et fut bientôt en présence de l'ennemi. Mais, soit qu'il y eût, de part et d'autre, comme un parti pris de temporisation, soit que le duc d'Anjou voulût attendre des renforts qui, en effet, vinrent, plus tard, grossir son armée, l'automne de 1568 se passa en manœuvres et en escarmouches. Dans une de ces rencontres, près de Loudun, Henri eut l'occasion de prouver qu'il avait acquis déjà le sens militaire. Les réformés étaient en force: le prince de Navarre s'étonna qu'on ne marchât point résolûment à l'ennemi. «—Si le duc d'Anjou, dit-il, se croyait assez fort, il ne manquerait pas de nous attaquer. Marchons donc sans délai: la victoire est certaine.» Elle était, du moins, probable, et les deux chefs principaux, Condé et Coligny, auraient pu suivre un plus mauvais conseil. Les rigueurs de l'hiver interrompirent les opérations. Les catholiques s'établirent dans le Poitou septentrional et le Limousin; les calvinistes, dans le Bas-Poitou, l'Angoumois et la Saintonge. La reine de Navarre et son fils passèrent le reste de l'hiver à Niort, d'où partirent les ordres et les messages en vue de la rentrée en campagne. Les deux armées nourrissaient également l'espoir d'être renforcées en temps opportun: les catholiques pressaient l'arrivée de nouvelles troupes, qui ne leur firent pas défaut, et les protestants attendaient avec impatience des renforts du Quercy, qui ne vinrent pas, et les auxiliaires allemands en marche sous les ordres du duc de Deux-Ponts. Ceux-ci arrivèrent trop tard.

Le duc d'Anjou, instruit du demi-désarroi de l'armée calviniste, prit l'offensive, dès les premiers jours du mois de mars 1569. Le 13, par une marche rapide, il arrive dans le voisinage de l'ennemi, qui occupait Cognac, Jarnac et les ponts de la Charente. Le duc jette un pont, pendant la nuit, près de l'abbaye de Bassac, non loin du logis de l'amiral. Coligny, surpris, veut se retirer; le désordre se met dans ses troupes, elles combattent en fuyant; l'arrière-garde est enveloppée; La Noue tombe au pouvoir de l'armée royale, et le prince de Condé, en chargeant les reîtres, la jambe cassée d'un coup de pied de cheval, est tué par Montesquiou, capitaine des gardes du duc d'Anjou, au moment où il venait de rendre son épée à deux gentilshommes catholiques.

Sans la mort de ce chef intrépide, la défaite de Jarnac n'eût été qu'un simple échec pour les protestants: leur infanterie était intacte, et elle se mit, en grande partie, à l'abri derrière les hautes murailles de Cognac. Mais en perdant Condé, les calvinistes perdaient plus qu'une armée: outre le courage et l'esprit de décision, il avait mis au service de la cause un vrai talent de généralissime, que rehaussait encore sa qualité de prince du sang. «En hardiesse, dit François de La Noue dans ses Mémoires, aucun de son siècle ne l'a surpassé, ni en courtoisie. Il parlait fort disertement, plus de nature que d'art, était libéral et très affable à toutes personnes; et avec cela excellent chef de guerre, néanmoins amateur de paix. Il se portait encore mieux en adversité qu'en prospérité.» Condé laissait un vide où menaçaient de s'engloutir les espérances du parti, malgré les mérites reconnus de l'amiral. Jeanne d'Albret et son fils firent bientôt oublier ce moment de défaillance.

A la nouvelle de la défaite de Jarnac, la reine de Navarre quitte La Rochelle. Comme elle avait «un grand cœur et un esprit mâle», dit de Thou, elle ne s'arrêta point à déplorer ce malheur. Elle court à Tonnay-Charente, où s'était rassemblée une partie de l'armée rompue. Elle parle en reine affligée, mais en héroïne indomptable; elle offre sa vie, celle de son fils; elle provoque le serment des résistances suprêmes. De longues acclamations accueillent ses paroles. Henri parle à son tour: «—Votre cause est la mienne; vos intérêts sont les miens. Je jure, sur mon âme, honneur et vie, d'être à jamais tout à vous.» Le fils de Condé s'associe à ce serment, que les chefs et l'armée prêtent à leur tour. Henri sera généralissime avec Condé pour lieutenant et Coligny pour lieutenant-général. Jeanne réunit les chefs. L'argent manque: elle donne tout ce qu'elle a; on l'imite; les pierreries, les bijoux seront mis en gage en Angleterre. Mais cela sauvegarde seulement le présent, il faut songer à l'avenir: on battra monnaie par la vente des biens ecclésiastiques dans les provinces conquises. C'est la guerre à outrance. Pauvre pays! que d'épreuves lui sont réservées! On aime à voir, du moins, le prince de Navarre, à peine revêtu d'un titre officiel à l'armée, s'occuper de venir en aide à quelques victimes de la guerre. Le 18 mars, il écrit au duc d'Anjou pour recommander à sa bienveillance les prisonniers calvinistes et lui offrir ses bons offices pour les prisonniers catholiques. «Nous avons en nos mains quelques prisonniers des vôtres, comme aussi vous en avez bien des nôtres; s'il vous plaît trouver bon de les mettre à rançon ou d'en faire échange, nous y entendrons volontiers, et vous plaira m'en mander votre volonté.»

Henri IV en Gascogne (1553-1589)

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