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PRÉFACE.

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De tous les saints, François de Sales est peut-être le plus universellement connu, aimé, vénéré. Sa vie et ses écrits, son apostolat et ses vertus, ont été l’objet des investigations les plus consciencieuses, des recherches les plus patientes. Cette haute intelligence, dominant un siècle de débauches ou de révolutions, et éclairant sa marche dans les voies qui ramènent à Dieu; les trésors de ce cœur si tendre, si aimant, à l’aide desquels il réhabilitait la piété chrétienne, en la montrant sous son vrai jour dans sa personne; l’onction de cette parole suave, attirant les âmes, triomphant de toutes les résistances, et soutenue par une éloquence plus persuasive encore, celle de ses douces et fortes vertus: tout a été dit et mis au grand jour! En présence d’un tel spectacle, comment ne pas répéter ce mot que faisait entendre naguère un pieux prélat: «Où trouver, dans les

«fastes de la sainteté, une figure plus

«gracieuse et plus aimable que celle du

«grand Evêque de Genève? Où trouver

«un nom plus illustre dans l’histoire des

«triomphes pacifiques de l’Église?»

Toutefois il nous semble qu’il est encore une des faces de cette noble et radieuse figure qui n’a pas reçu toute la lumière dont elle pouvait être susceptible. C’était un travail à ajouter à tant d’autres. Ce travail, nous avons voulu le faire dans la mesure du possible, et rendre ainsi à l’auréole de ce grand Saint les rayons de gloire que lui a dérobés la poussière des siècles. Qui se doute aujourd’ hui que cet illustre pontife ait été l’un des plus grands thaumaturges de l’Eglise dans ces derniers temps? C’est pourtant un fait certain, mais généralement ignoré de nos jours. La plupart de ses historiens ont laissé dans l’ombre les glorieuses manifestations de cette puissance dont Dieu honore ses grands serviteurs, la puissance des miracles, témoignage certain du degré de gloire dont ils jouissent dans le ciel. Désormais cette lacune regrettable sera comblée par les documents originaux, puisés dans les archives du monastère de la Visitation d’Annecy. Les recherches que nous y avons faites, démontrent que c’est par milliers qu’il faut compter les miracles du grand Evêque de Genève, soit avant, soit après sa mort. Durant une période de quarante-trois ans surtout, de l’époque de son décès à celle de sa canonisation, les merveilles opérées chaque jour à son tombeau et ailleurs, furent telles, qu’on ne peut se défendre d’un saisissement profond et d’une religieuse stupeur, quand on en parcourt le récit. Par le nombre, la variété, la grandeur de ces prodiges, on se sent comme transporté aux premiers âges de l’Eglise, alors que tout ici-bas, la nature, les éléments, les fléaux, la maladie, la mort elle-même, subissait l’empire des envoyés de Dieu! Voilà le grand fait dont nous allons fournir les preuves dans ce livre. La vertu miraculeuse de saint François de Sales, tout en ajoutant beaucoup à l’éclat de cette sainte et glorieuse renommée, nous donne, à elle seule peut-être, le secret de l’immense popularité dont il n’a cessé de jouir depuis plus de deux siècles, même parmi ceux qui n’ont jamais lu une seule ligne de sa vie ou de ses écrits. Dans nos villes et nos campagnes, les classes laborieuses et illettrées ne connaissent le Saint dont se glorifie la Savoie, que par ses miracles et ses œuvres de miséricorde. Les pères les ont racontés à leurs fils de génération en génération, et ainsi la reconnaissance et l’amour se sont perpétués, au sein de chaque famille, par le souvenir des bienfaits. Eh bien, ce souvenir, nous allons le réveiller, et nous vivifierons par là même, s’il plaît à Dieu, les sentiments qui en découlent.

Dans les dernières années de son pontificat, le pape Innocent X, frappé de l’immense concours de peuples qui accouraient au tombeau du grand Évêque de Genève, résolut de procéder à sa béatification. Il eût été bien consolant sans doute pour le glorieux pontife, qui venait de foudroyer, d’une main, cette sombre et farouche hérésie qui resserrait les âmes et n’élargissait que l’enfer, de pouvoir glorifier et exalter, de l’autre, le vénérable prélat dont la doctrine opposée, si pleine de charmes, si riche en miséricorde, attirait et dilatait tous les cœurs. Mais c’était trop de gloire peut-être pour un seul homme, et Dieu permit que sa mort vînt suspendre le cours des informations juridiques qu’il avait ordonnées. Cet honneur était réservé à son successeur, le cardinal Fabio Chigi, élevé à la papauté en 1655, sous le nom d’Alexandre VII. Le nouvel élu connaissait mieux que personne les mérites et la sainteté de François de Sales, auquel il était déjà redevable d’un bienfait signalé. L’année qui précéda son élévation au souverain pontificat, étant en Allemagne, comme plénipotentiaire du Pape pour les négociations relatives à la paix de Munster, il fut atteint d’une maladie si grave, qu’il crut n’avoir échappé à la mort que par l’intervention miraculeuse de celui-là même qui semblait ainsi solliciter des honneurs dont il se montrait en même temps si digne. Aussi à peine rétabli, et comme témoignage de sa vive gratitude, le cardinal Chigi envoya une somme considérable à Annecy, pour aider à la reconstruction de l’église qui renfermait le tombeau du saint Évêque, ajoutant à cette riche offrande l’assurance, plus précieuse encore, qu’il contribuerait de tout son pouvoir à sa béatification, dès qu’il serait de retour à Rome. Cette promesse et les dispositions bien connues de l’illustre pontife, placé à la tête du gouvernement de l’Eglise, ne pouvaient être que l’heureux présage du décret qu’appelaient les vœux du monde catholique. L’événement ne tarda pas à justifier toutes les prévisions. Peu après, cédant plus encore aux sollicitations de son cœur qu’à celles qui lui venaient du dehors, Alexandre VII reprit les informations canoniques, interrompues par la mort de son prédécesseur. Par ses ordres, il fut enjoint aux fidèles du vaste diocèse de Genève et à ceux des pays limitrophes, de faire connaître les grâces miraculeuses qu’ils auraient obtenues par l’intercession de François de Sales, et d’en consigner la déclaration au premier monastère de la Visitation d’Annecy. Or il arriva, nous dit la vénérable Mère de Chaugy, alors supérieure, «qu’il en venait tous les jours en si

«grand nombre, que plusieurs écrivains

«et quelques sœurs avaient assez de be-

«sogne. On amassait le tout avec grand

«ordre, pour ne point perdre de temps

«et savoir où prendre les témoins, quand

«il faudrait déposer avec serment de la

«vérité des faits. On faisait aussi un

«choix parmi ces déclarations, afin de

«ne soumettre à l’enquête juridique que

«les miracles de premier ordre, c’est-à-

«dire: les morts ressuscités, les aveugles

«rendus à la lumière, les paralytiques

«guéris, et quelques autres dont il est

«parlé dans l’Evangile. Du surplus,

«ajoute la Mère de Chaugy, nous en

«gardons les mémoires avec quelque

«petit dessein; car il y a de quoi faire un

«juste volume à la gloire immortelle de

«notre bienheureux Fondateur.» Voilà le mot et la pensée qui ont donné naissance à ce livre; puisse-t-il, bien que très-incomplet, ne pas être trop au dessous de celui qu’aurait présenté l’illustre secrétaire de sainte Chantal, cette femme éminente, qu’un célèbre biographe n’a pas craint d’appeler l’Homère de la Visitation.

Lorsque les commissaires apostoliques, délégués pour l’enquête, furent arrivés à Annecy, la Mère de Chaugy répondit à leurs questions par la déclaration suivante: «Les miracles que Dieu a opérés

«par notre vénérable Fondateur, soit en

«son tombeau, soit ailleurs, sont en si

«grand nombre, que l’on compte, d’a-

«près les relations de divers lieux, jus-

«qu’à trente-sept morts ressuscités, dix-

«neuf sourds et muets ayant reçu l’usage

«de l’ouïe et de la parole, douze lépreux

«rendus à la santé, vingt aveugles illu-

«minés, trente-quatre personnes guéries

«de maux d’yeux incurables, cent deux

«paralytiques entièrement rétablis, qua-

«torze guéris de la goutte ou de la poda-

«gre, plus de six cents personnes guéries

«de fièvres pestilentielles; enfin, plu-

«sieurs bourgs et villages préservés de la

«peste pendant les années 1628, 1629,

«1630, parles vœux qu’ils firent et qu’ils

«vinrent rendre au tombeau du Servi-

«teur de Dieu. Par après, j’ai encore

«pu compter cinquante-deux personnes

«guéries de plaies et d’ulcères incura-

«bles, dix-neuf épileptiques et trente-

«deux estropiés parfaitement rétablis,

«dix personnes préservées d’un naufrage

«imminent, quatre-vingt-sept femmes

«en travail d’enfant, délivrées du péril

«évident de mort, trente-sept frénétiques

«rétablis en leur bon sens, nonante-trois

«démoniaques délivrés de la possession

«du démon, et un grand nombre d’au-

«très merveilles dont les relations ne

«sont pas écrites..... Et j’atteste comme

«véritable tout ce qui est dit ci-dessus,

«pour en avoir lu lesdites relations,

«écrites de divers endroits de la Savoie,

«de la Bourgogne et de toutes les pro-

«vinces de France.»

Une autre religieuse, la sœur Marie-Judith Gilbert, qui devait répondre elle-même sur la guérison miraculeuse dont elle avait été l’objet, tint un langage non moins explicite au sujet de ces nombreuses merveilles: «Je sais,

«dit-elle, qu’il a plu à Dieu d’opérer

«un très- grand nombre de miracles

«par l’intercession de notre vénéra-

«ble fondateur, François de Sales, et

«j’ai vu des relations qui font foi de

«plus de cent miracles insignes: tels

«que des morts ressuscités, des aveu-

«gles-nés rendus à la lumière, des para-

«lytiques de naissance guéris, des dé-

«moniaques sans nombre délivrés de la

«possession des démons; en outre, des

«guérisons miraculeuses de fièvres et

«autres maladies désespérées des méde-

«cins, jusqu’à cinq et six mille bien comp-

«tées.»

Toutes les formalités d’enquête étant accomplies, les commissaires apostoliques firent leur rapport à Rome, et le Pape, saisi d’admiration à la vue de tant de prodiges, qui s’appuyaient sur des témoignages sans nombre, résolut de procéder immédiatement à la béatification, sans attendre que fût écoulée la période de cinquante ans prescrite par les constitutions pontificales. Dès le 28 décembre 1661, il en adressa le bref au premier monastère de la Visitation d’Annecy, où bientôt l’on s’empressa d’ouvrir le tombeau du bienheureux Prélat, et de le placer sur l’autel dans une magnifique châsse d’argent, donnée par la princesse Christine de France, duchesse de Savoie. Quatre années s’écoulèrent encore avant la canonisation. Bien que le Pape fût personnellement de l’avis de ceux qui disaient à Rome, «que

«dans le procès de béatification de Mon-

«seigneur de Genève, il y avait plus de

«miracles qu’il n’en faudrait pour élever

«sur les autels une cinquantaine de bien-

«heureux,» il ne voulut jamais se départir des règles ordinaires de la prudence en pareil cas. Ce ne fut qu’après un délai convenable, et à la demande des souverains catholiques, du clergé, des ordres religieux, des parlements de France et des gouverneurs de province, qu’eut lieu à Rome, le 19 avril 1665, la canonisation solennelle du saint Évêque de Genève. Alexandre VII saisit cette circonstance Pour donner à l’Ordre de la Visitation un nouveau témoignage de la pieuse vénération qu’il professait pour son illustre Fondateur. Il daigna accompagner la bulle de canonisation, adressée aux religieuses du premier monastère d’Annecy, de l’envoi d’une riche bannière représentant le saint Prélat revêtu, d’un côté, des ornements pontificaux, et, de l’autre, des insignes du canonicat: touchante allégorie qui rappelait tout à la fois, et les grands travaux de l’Évêque de Genève et la glorieuse mission du Chablais, accomplie pendant qu’il n’était encore que chanoine d’Annecy.

L’Eglise venait donc de répondre au vœu le plus ardent de la catholicité, en plaçant sur les autels l’illustre Pontife qu’elle acclamait depuis si longtemps; la foi, la reconnaissance, la dévotion des peuples avaient, comme toujours, précédé ses décisions. Le pèlerinage au tombeau de saint François de Sales comptait, à cette époque, quarante-trois ans de date, et les prodiges de tout genre s’y étaient manifestés avec tant d’éclat, le concours des fidèles, pressés par le besoin et la confiance, avait été si nombreux, si enthousiaste, la reconnaissance si universelle, qu’il est impossible de se faire une juste idée des trésors de grâces et de miséricorde qui, chaque jour, s’épanchaient du ciel sur ces foules prosternées devant une tombe, d’où sortaient incessamment la santé et la vie! Laissons parler ici un témoin oculaire, racontant, en 1654, ce que tout le monde alors pouvait voir de ses yeux et toucher de ses mains. Élisabeth de la Tour, religieuse du premier monastère de la Visitation d’Annecy, avait rempli, pendant neuf ans, les fonctions de sacristine. «En

«cette qualité, dit-elle, je fis enlever et

«serrer plus de quatre charretées de

«béquilles. Dans ces neuf ans, je crois

«que j’ai fait attacher plus de deux mille

«vœux d’argent: c’étaient des têtes, des

«bras, des yeux, des cœurs, des jambes,

«des poumons; enfin il y en avait de toutes

«les sortes. Je n’ai pas compté les vœux

«en cire, ils étaient innombrables. Je fis

«fondre une fois tant de vieux flambeaux

«qu’on ne savait plus qu’en faire, ni où

«les retirer. Nous envoyâmes à Lyon

«plus de six cents livres de cire blanche.

«Les clous où l’on attache les vœux

«d’argent, étaient si garnis, du temps

«que notre Mère de Chaugy fut déposée,

«qu’il y en avait qu’on ne pouvait plus

«mettre en rang. Cependant elle n’en

«voulut jamais vendre, dans quelque né-

«cessité où l’on se trouvât; pourtant elle

«l’aurait pu faire. La bonne Mère de

«Rabutin en envoya à Lyon 300 marcs

«d’argent des restes. L’église était pleine

«d’ex-voto: on y remarquait six lampes

«d’argent; les deux pélérines, ainsi appe-

«lées parce que le pape Alexandre VII les

«avait envoyées avec six chandeliers de

«la même hauteur.»

Cependant cette source de grâces et de miracles ne tarit point une fois que l’Église eut placé François de Sales sur le catalogue des Saints. D’après les documents de l’époque, les mêmes prodiges continuèrent de sortir de ces restes sacrés et de s’étendre au loin. En 1687, la dévotion à ce grand et illustre pontife avait passé les mers, pénétré en Amérique, où déjà elle était si répandue, que l’évêque de Québec ne craignait pas de dire que, dans son diocèse, les miracles opérés par l’intercession du Saint étaient aussi nombreux que dans la primitive Église. Une lettre circulaire de 1690, adressée à tous les monastères de la Visitation par les religieuses d’Annecy, donne les curieux détails que voici: «Les

«peuples continuent toujours de recourir

«avec confiance à l’intercession de notre

«grand Saint. Les habitants de ces pays-ci

«reconnaissent qu’ils ont été préservés

«des grands maux dont ils étaient me-

«nacés à l’occasion de la guerre. Mes-

«sieurs les Français ont avoué eux-

«mêmes qu’aux approches de cette ville

«d’Annecy, ils sentaient un mouvement

«secret qui les portait à n’y pas faire

«grand mal, quand bien même ils en au-

«raient eu le pouvoir. Aussi donnèrent-

«ils à notre Saint des marques de piété ;

«car dès que les portes de la ville furent

«ouvertes, les généraux de l’armée et

«les officiers vinrent à notre église pour

«vénérer les Reliques..... On en de-

«mande de toutes parts, et notre Mère,

«sœur Marie-Thérèse de Passier, en a

«envoyé à Madrid et à Mexico, où l’on

«a bâti des chapelles magnifiques et

«érigé des confréries en l’honneur de

«notre bienheureux Père.»

Une autre circulaire, de 1707, s’exprime ainsi: «Le concours du peuple est si

«grand, que notre église ne désemplit

«pas durant tout le jour. Chacun avoue

«qu’on ne saurait y entrer sans y res-

«sentir une certaine onction secrète qui

«se répand plus ou moins dans les âmes,

«selon leurs dispositions. Nous avons vu

«un officier voulant, comme bien d’au-

«tres, baiser les saintes Reliques, s’ar-

«rêter subitement, parce qu’une an-

«cienne plaie venait de se rouvrir tout

«à coup en répandant du sang. Cet

«événement salutaire le fit pâlir et ren-

«trer en lui-même. Quelques personnes

«présentes lui dirent: «Mon ami, vous

«n’êtes pas en état d’approcher d’une si

«sainte Relique; pensez à votre cons-

«cience.» Il avoua qu’il en était ainsi, et

«alla se réconcilier avec Dieu par le sa-

«crement de pénitence.»

Nous pourrions multiplier ces citations, et montrer que le pèlerinage au tombeau de saint François de Sales n’a pas été moins célèbre ni moins fréquenté au XVIIIe siècle que dans le XVIIe. Mais à quoi bon? la tradition en est encore vivante dans toute la Savoie, et nos pères eux-mêmes nous ont appris que le concours des fidèles n’avait déserté cet auguste sanctuaire qu’au moment fatal de l’invasion de la révolution française. A cette époque, grâce au patriotisme éclairé, à la foi courageuse et intelligente de quatre hommes du peuple, les reliques de saint François de Sales échappèrent au vandalisme de 93. Elles restèrent ensevelies dans une profonde retraite, jusqu’au jour où il fut possible de les exposer de nouveau à la vénération publique dans une des églises d’Annecy. Mais ce ne pouvait être leur destination dernière: vingt ans plus tard, elles reprirent triomphalement le chemin du nouveau sanctuaire élevé pour les recevoir, et là elles retrouvèrent, avec une affluence considérable de pèlerins, les anges de la solitude chargés de veiller sur elles, les pieuses Filles de François de Sales, compagnes inséparables de l’exil et des triomphes de leur bien-aimé Père!

Disons maintenant un mot du livre que nous offrons au public. Ce livre n’a pas de nom, pas d’auteur; chacun des protégés de saint François de Sales est venu lui apporter sa page. C’est une collection de faits très-authentique; un ensemble de prodiges, de faveurs extraordinaires, de grâces merveilleuses, publiés à la face du soleil, et présentés comme le fruit des prières adressées à ce grand Saint par des hommes de tout pays, de toute condition, qui avaient des yeux pourvoir, des oreilles pour entendre, et savaient, tout aussi bien que nous, distinguer leur main droite de leur main gauche, et ne pas prendre un corps plein de vie pour un cadavre en putréfaction. Est-ce à dire que, dans ces divers récits, il n’y ait que des miracles? Nous sommes loin de le penser: il y en a, et c’est peut-être le plus grand nombre. Mais ce livre renferme autre chose; il s’adresse surtout aux chrétiens, et, pour nourrir leur foi, les chrétiens de nos jours ont plus besoin de grâces, d’encouragements et de forces que de miracles. Souvent il arrive que les prodiges de la bonté, les effusions de la charité, impressionnent plus vivement les âmes que les miracles de la toute-puissance. En faisant paraître ce petit volume à la veille du deuxième anniversaire centenaire de la canonisation de saint François de Sales, nous n’avons en vue que deux choses: justifier la démarche des nombreux pèlerins qui accourent de toutes parts, et soutenir, fortifier une confiance qui a pour garant, dans le passé, des grâces, des faveurs, des consolations sans nombre.

La plus grande partie des dépositions relatées dans ce livre a été fidèlement extraite des procès-verbaux de la béatification et de la canonisation du Saint; les autres, faites aussi sur la foi du serment, se retrouvent dans les archives de la Visitation d’Annecy, où elles avaient été envoyées de diverses contrées avec le plus pieux empressement. Nous n’avons pas cru devoir ôter à ces récits le caractère de leur époque, en retouchant le style. A part quelques légères modifications nécessaires à l’intelligence des faits, nous les présentons à nos lecteurs tels qu’ils sont, et avec tous leurs gracieux défauts. On y trouvera des longueurs de diction, des irrégularités de langage, le plus grand laisser aller dans le choix des termes et les naïvetés les plus curieuses dans les détails: toutes choses qui laissent mieux voir le prix du diamant qu’elles enchâssent. Nous n’avons point voulu porter une main téméraire sur les formes d’un langage qui ne respire que la sincérité, l’onction, la piété la plus douce; il nous a semblé que la condescendance pour les contemporains ne devait pas aller jusqu’à mutiler les œuvres de foi, d’amour et de reconnaissance de nos aïeux.

La succession des récits contenus dans ce petit volume sera naturellement fixée par l’ordre chronologique. Ainsi, les miracles qu’a faits saint François de Sales de son vivant; les prodiges opérés à son tombeau depuis sa mort jusqu’à sa canonisation; ceux qui ont suivi cette époque, et enfin les grâces particulières, les faveurs extraordinaires, obtenues dans tous les temps par son intercession: telle est la division générale et la série des faits qui composent l’ensemble de ce modeste travail. Puisse-t-il, en jetant quelques lumières sur ce rôle de thaumaturge que Dieu a si libéralement départi à notre grand Saint, réveiller parmi nous les souvenirs du passé, et ranimer dans les âmes cette dévotion si tendre, si confiante, que professaient pour lui nos pieux ancêtres! Nous avons du moins la confiance qu’il ne sera pas tout à fait stérile. Ce livre nous a fait trop de bien à nous-même pour qu’il n’en produise pas dans ceux qui le liront; il rencontrera infailliblement sur son chemin des âmes semblables à la nôtre. Il nous paraît impossible qu’on puisse parcourir attentivement cet ensemble de merveilles sans être ému et parfois touché jusqu’aux larmes! Quoi qu’il en soit, nous plaçons avec bonheur ce petit volume sous l’auguste patronage de Celui dont il raconte les œuvres, et nous le déposons à ses pieds comme le trop faible hommage de notre profonde vénération et de notre amour le plus filial!

L’ÉDITEUR.

Pouvoir de saint François de Sales

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