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I
MONSIEUR J. – D. DE SAINT-ROCH
III

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Il y aura six ans, vienne le mois de février, que Pascal est de retour à Paris après son expédition en Bretagne. Il arriva à la gare de Montparnasse par le train de cinq heures du matin.

Il faisait un joli petit froid de sept à huit degrés au-dessous de zéro. On ne trouva cependant aucun voyageur de gelé dans les wagons: cet accident arrivait parfois en hiver, avant l’heureuse idée, qu’ont eue les Compagnies, d’utiliser au profit des voyageurs la vapeur perdue de la locomotive.

Pascal avait fait un triste voyage. Il adorait ses parents, et l’idée du chagrin qu’il venait de leur causer lui pesait sur le cœur comme un remords. Jamais route ne lui parut plus longue; il lui semblait que la locomotive roulait sur place: il lui tardait d’être à Paris. Quelques heures de sommeil auraient trompé son impatience, mais c’est vainement qu’à plusieurs reprises il prit ses dispositions pour reposer: à peine fermait-il les yeux, qu’il était réveillé par quelqu’un des nombreux agents que la Compagnie entretient et paie pour empêcher les voyageurs de dormir; à chaque moment on lui demandait son billet, pour y faire des trous de forme variée avec un petit instrument de fer.

Il faut dire aussi que le jeune ingénieur n’avait pas été élevé à se promener avec 40,000 francs dans son porte-monnaie. La liasse de billets de Banque qu’il avait en poche ne laissait pas de l’inquiéter un peu. En homme prudent, il garda la main dessus, de Lannion à Paris. En arrivant, il avait le bras engourdi.

Harassé de fatigue, les jambes brisées, il gagna la salle où il est d’usage que les voyageurs attendent leurs bagages pendant quelques quarts d’heure. Il venait de s’asseoir, lorsqu’il s’entendit appeler par une voix joyeuse.

– Eh! monsieur l’ingénieur! monsieur l’ingénieur!

Il se retourna, et le long de la grille si ingénieusement disposée pour séparer les arrivants de leurs amis venus au-devant d’eux, il aperçut un gros homme à face épanouie qui lui faisait toutes sortes de signes d’amitié. Il courut à lui.

– Enfin, vous voilà, monsieur l’ingénieur, dit l’homme, j’ai reçu votre lettre, je vous attendais. Avez-vous fait bon voyage, au moins?

– Pas des meilleurs. Ah! père Lantier, si vous n’aviez pas eu ma parole! Enfin, j’ai l’argent.

– Chut!.. plus bas, au nom du ciel… si on vous entendait! Est-ce qu’on parle d’argent comme cela tout haut? Le mien est prêt aussi; je l’ai porté à la Banque. Chez moi, il m’empêchait de dormir. Nous allons le faire un peu travailler, cet argent, s’il vous plaît.

– Oui, dit Pascal avec un soupir, il s’agit de ne pas perdre la partie.

– Perdre la partie, monsieur l’ingénieur, avec tous les atouts en main; vous voulez rire, sans doute. Ah çà! vous descendez chez moi, ici, à deux pas.

– Mais, mon brave ami, je vais vous gêner horriblement.

– Me gêner! un homme comme vous. Ah! vous ne me feriez pas l’injure de descendre à l’hôtel! Vous ferez un bon somme jusqu’au déjeuner, nous causerons après. Allez, j’ai déniché une fameuse affaire. Je vais toujours chercher une voiture.

Si Lantier ne tira pas le canon pour M. l’ingénieur, c’est qu’il n’avait pas de canon. Mais la maison avait été mise sens dessus dessous; une bonne chambre bien chaude, une bouteille de vieux vin, un bouillon délicieux attendaient Pascal. Lorsqu’il fut prêt à se mettre au lit:

– Je vous quitte, lui dit Lantier; s’il vous manque quelque chose, appelez…

– Merci, je n’ai besoin que de sommeil. A tantôt, mon cher associé.

Le brave homme referma doucement la porte et s’éloigna sur la pointe du pied.

– C’est pourtant vrai, se disait-il, je suis son associé. Qui m’aurait dit cela, que je deviendrais l’associé d’un homme comme lui, qui était le premier des ponts et chaussées!

Jean Lantier, l’associé de Pascal, est à cette heure un des entrepreneurs aisés de Paris. Il ne sera jamais très riche, parce qu’il n’est pas ambitieux. Il compte se retirer des affaires aussitôt qu’il pourra donner 50,000 écus à chacune de ses filles; il en a trois, tout en gardant pour lui une vingtaine de mille livres de rentes.

Il y a vingt ans, Jean Lantier roulait la brouette sur une grande route, au service des ponts et chaussées. Il était gai et bien portant. Comme il gagnait 67 francs par mois, – déduction faite d’une retenue pour la caisse des retraites, – comme il avait une bonne conduite et qu’il n’était pas mal de sa personne, il trouva un bon parti pour s’établir.

Il se maria, et reçut en dot, de son beau-père, une somme ronde de 6,000 francs en bons écus sonnants. Sa femme était douce, jolie, bonne ménagère; il se trouva le plus heureux des hommes.

Mais les enfants vinrent. La famille augmenta, les appointements restèrent les mêmes, la gêne entra dans le ménage. Jean Lantier ne gagna plus que juste de quoi s’empêcher de mourir de faim, lui et les siens. On mettait de côté autrefois, il fallut prendre au sac.

– «Cela ne peut durer ainsi,» grommelait sans cesse Lantier. Et un beau jour il fit un coup de tête.

– «Au petit bonheur,» dit-il. Il rendit à l’administration pelle et brouette, malgré sa femme qui l’engageait à patienter.

A la tête d’un capital de 2,000 écus, il se lança dans les entreprises de terrassements. Mais en tout il faut un apprentissage: il l’apprit à ses dépens. Sa première affaire engloutit la moitié de son avoir. Il ne se découragea pas. Sentant l’insuffisance de son instruction, il travailla, le soir, et même fit la dépense de quelques leçons. Après deux ou trois entreprises de blanc, c’est-à-dire sans profits ni pertes, il regagna le capital perdu, le risqua de nouveau, l’augmenta, et finalement le doubla.

A quarante ans, il était à la tête de 40,000 francs qui ne devaient pas un centime à personne. Et il avait bien vécu, et ni la femme ni les enfants n’avaient enduré de privations.

C’est vers ce temps que Jean Lantier fit la connaissance de Pascal, qui dirigeait les travaux dont il avait la concession.

Le jeune ingénieur se prit d’amitié pour son entrepreneur. C’était un homme laborieux, intelligent, on pouvait compter sur lui. Tous ceux qui le connaissaient l’estimaient. Ses confrères l’appelaient un gâte-métier, parce qu’une fois un traité signé, il avait l’habitude de l’exécuter, dût-il y perdre.

Il arriva que Pascal eut l’occasion de rendre un assez grand service à son entrepreneur. Contre l’ordinaire, l’obligé fut reconnaissant. Jean Lantier, qui avait toujours professé une grande vénération pour les ponts et chaussées, reporta tout cette vénération sur le jeune ingénieur. Bientôt son admiration n’eut plus de bornes, il allait partout chantant ses louanges, et tout le bien qu’il disait, il le pensait.

Les travaux terminés, l’entrepreneur ne perdit point Pascal de vue. Il allait le voir assez souvent, tantôt pour le seul plaisir de causer avec lui, tantôt pour lui demander un conseil. Sans trop savoir pourquoi, Lantier se serait jeté dans le feu pour son ami l’ingénieur.

Cependant, la dernière année d’études de Pascal touchait à sa fin, et déjà il songeait sérieusement à donner sa démission. S’il hésitait, s’il tardait encore, c’est qu’il désirait trouver tout de suite à utiliser son activité et ses aptitudes. Il attendait avec impatience le résultat de certaines démarches qu’il venait de faire près d’une grande Compagnie de chemin de fer.

La réponse tardait à venir.

Jean Lantier, sans s’en douter, mit fin aux incertitudes du jeune homme.

On était alors au fort des démolitions de Paris, si toutefois elles ont diminué. Des quartiers entiers recevaient congé, des rues populeuses tombaient, et étaient comme par enchantement remplacées par des voies nouvelles. Lantier rêvait de devenir démolisseur.

C’est une profession toute moderne, qui a ses héros et ses dupes, mais qui compte bon nombre de millionnaires.

Avant de rien tenter, cependant, avant de confier son sort et son argent à une soumission cachetée, l’entrepreneur était venu consulter le jeune ingénieur. Le brave homme se grisait de ses espérances, ses projets lui montaient à la tête. Il en parlait sans cesse, et avec la volubilité de l’enthousiasme; il les exposait avec la clarté de la conviction.

Il eut vite mis Pascal au courant. Il lui expliqua les mystères d’un métier alors bien moins connu qu’aujourd’hui, et lui en montra le fort et le faible. Il parlait en expert, ayant longtemps étudié «le bâtiment,» aussi bien pour la démolition que pour la construction. Lorsqu’on a mis quarante ans à amasser sou à sou 40,000 francs, on ne les expose pas volontiers sur une seule carte.

Mais Lantier était sûr de son fait. Il avait déjà essayé quelques petites spéculations qui lui avaient réussi; il avait eu des huitièmes, des douzièmes de lots, et il ne regrettait qu’une chose, d’avoir été trop timide, trop prudent. Il avait au reste la vocation. Jamais démolisseur ne tira plus ingénieusement parti des vieux matériaux: il est le premier qui ait eu l’idée d’entreprendre en grand la vente des bois de démolition comme bois à brûler. Il occupe vingt hommes dans le vaste chantier qu’il a établi près de l’ancienne barrière de Monceaux, et chaque jour il s’y débite des centaines de stères de gros bois, qu’achètent les gens aisés, et des milliers de petits fagots à cinq sous, chauffage économique des pauvres ménages.

Involontairement, Pascal prêta toute son attention à un homme si sûr de réussir qu’il se faisait fort de doubler son capital en moins d’un an.

– Voyez-vous, monsieur l’ingénieur, disait Lantier, voici comment la chose se passe: La ville veut démolir un quartier pour le reconstruire, n’est-ce pas? Il lui faut bien déblayer le terrain et jeter bas les vieilles constructions. Que fait-elle, alors? elle divise son quartier par lots de deux, de quatre, de dix maisons, cela dépend; puis elle met ces lots en adjudication. Les entrepreneurs soumissionnent, et celui qui offre les conditions les plus avantageuses a le lot. Vous comprenez bien qu’entre gens du métier, on est assez raisonnable pour s’entendre et ne pas laisser tomber les prix. Qu’on ait donc une adjudication sur cinq ou six, et on fait joliment ses affaires…

– Mais il faut beaucoup d’argent, objecta Pascal.

– Pas tant que vous croyez. La ville fait crédit. Elle se contente d’un cautionnement qui varie selon l’importance du lot. Mais on n’est pas longtemps à se faire de l’argent comptant. Tout se vend, voyez-vous, dans une maison, du pignon aux fondations, de la cave au grenier. On construit, si on démolit, et ceux qui font construire ont du bénéfice à acheter du vieux qui fait d’ailleurs tout aussi bon usage que du neuf; ils ont vite débarrassé les démolisseurs de leurs marchandises. On leur cède les ardoises, les portes, les fenêtres, les cheminées, les carreaux, les escaliers, tout enfin, de la pierre, du bois et du fer. Des lattes de la toiture, on fait des fagots à deux sous, on débite les poutres trop vieilles pour resservir, on nettoie les briques, et on trouve encore à se défaire des platras…

– Mais gagne-t-on vraiment de l’argent?

– A boisseaux, monsieur l’ingénieur, à boisseaux…

Et tenez, vous connaissez bien le grand Joigny, n’est-ce pas, qui travaillait avec moi? eh bien! à cette heure il a une voiture, oui, monsieur, une voiture, et il l’a payée, et elle est à lui… Pourtant il était bête et paresseux, et il a commencé avec deux sous qu’il avait empruntés. Ah! si j’avais cent mille francs au lieu de quarante mille, et le bonheur d’avoir un homme comme vous avec moi…

Lantier s’arrêta, s’apercevant que son auditeur ne l’écoutait plus.

– Ah! murmurait Pascal, répondant à ses pensées secrètes, c’est bien tentant.

– Quoi! comment! que dites-vous! s’écria l’entrepreneur, le cœur vous en dirait-il? Non, ce serait trop de chance. C’est pour le coup que ma fortune serait faite. Qu’est-ce qui me manque à moi? c’est de voir en grand. Les grosses affaires me font peur, et je manque les meilleures occasions. Ensuite il faut se faire des relations, comme on dit, voir l’un, voir l’autre, causer avec les gros bonnets pour se tenir au courant, et moi je n’ose pas; tandis qu’avec vous!.. ah! je n’aurais plus peur de m’enfoncer; j’irais trouver le préfet lui-même, oui, et je lui dirais: «Vous voulez démolir Paris; soit, je m’en charge, et voilà monsieur l’ingénieur qui vous le rebâtira, et un peu mieux, j’ose le dire, que tous vos architectes.»

L’enthousiasme du brave homme fit sourire Pascal.

– Vous riez, continua-t-il, je ferais pourtant comme je le dis. Ce n’est pas tout d’abattre, il faut reconstruire: voilà votre affaire. Et à cela encore on gagne gros. De trois vieilles maisons on en fait une neuve. Ce n’est pas plus malin que ça… Mais bast, est-ce que vous songez seulement à ce que je vous débite là?

– Écoutez, Lantier, reprit Pascal, j’ai besoin de réfléchir à tout ce que vous venez de me dire. Je puis compléter les cent mille francs, et il est possible que je réalise votre idée d’association. Repassez dans trois jours, et je vous rendrai réponse.

Au jour indiqué, longtemps avant l’heure, Lantier, qui ne vivait plus, se présentait chez l’ingénieur, le cœur battant de crainte et d’espoir.

– Eh bien! lui dit Pascal, dès qu’il entra, j’ai réfléchi, c’est une affaire conclue.

Lantier faillit devenir fou de joie.

– A nous Paris! s’écria-t-il.

Et dans son exaltation, il embrassa son ingénieur, et ensuite lui demanda pardon de la liberté grande.

Il fut alors convenu que Pascal allait partir pour la Bretagne afin de se procurer l’argent nécessaire. L’entrepreneur, de son côté, devait, pendant le voyage de son associé, réunir ses capitaux et se mettre en quête de quelque bonne affaire, car il s’agissait de ne pas perdre une minute.

Les deux associés prouvèrent bien qu’ils connaissaient la valeur du temps. Dès le jour de son arrivée, Pascal trouva la besogne préparée. Il avait à peine déjeuné, après s’être bien reposé, que Lantier alla chercher une grande feuille de papier sur laquelle il avait pris ses notes, et lui démontra la nécessité d’acheter une demi-douzaine de maisons de la rue de la Harpe, qu’on démolissait alors pour faire place au boulevard Saint-Michel.

Lorsque Lantier eut fini, ils convinrent d’aller ensemble le lendemain visiter leurs acquisitions futures. Il s’y rendirent en effet, et, après une journée passée à mesurer, à calculer, à estimer la valeur approximative de chaque chose, ils arrêtèrent leur prix définitif, et le soir même Pascal rédigea la première soumission de la société Pascal et Lantier.

Ils avaient toutes chances d’être adjudicataires, car leur offre était élevée; mais pour leur première affaire ils étaient décidés à se contenter d’un très-petit bénéfice, suffisant cependant, eu égard aux chances de perte: une trentaine de mille francs environ, à leur estimation. Cela fait, ils n’avaient plus qu’à attendre le résultat.

Cependant Pascal ne pouvait demeurer éternellement chez son associé, bien que celui-ci l’eût vivement désiré. Il se mit à la recherche d’un domicile, recherche pénible, et, après avoir gravi une centaine d’étages, il finit par arrêter un petit logement tout meublé qui ne lui convenait pas le moins du monde; mais cet appartement était à deux pas de l’Hôtel de Ville, désormais le centre de ses opérations. C’est en effet sous les combles de l’hôtel de la préfecture de la Seine, dans une galerie vitrée, à cent quatre-vingts marches au-dessus du sol, que se traitent toutes les affaires de grande voirie.

Pascal était à peine installé dans son nouveau domicile, qu’il vit accourir Lorilleux, prévenu enfin de son retour. Le médecin n’avait pas été sans inquiétude depuis un mois. Qu’était devenu le futur mari de sa sœur? que comptait-il faire? reviendrait-il? Et il se désespérait. Aussi venait-il vite prendre de ses nouvelles.

En entrant chez son ami, il se heurta contre Jean Lantier qui sortait, mais il ne prit pas garde à cet homme qui portait le costume des ouvriers aisés.

– Enfin, je tiens mon déserteur, cria-t-il dès la porte; le voici revenu, le pigeon voyageur; laisse-moi te serrer les mains et me poser en point d’interrogation. Ah çà! que signifie cette fugue, daigneras-tu me l’apprendre?

– Oh! très volontiers, d’autant qu’il n’y a plus à revenir maintenant sur ma détermination…

– C’est-à-dire que tu redoutais mes conseils, ta folie se défiait de ma sagesse. Très bien! je suis fixé; tu as dû faire des choses insensées.

– Je ne le pense pas.

– Excuse-toi, alors, défends-toi, j’écoute.

– Eh bien, mon cher ami, je suis marchand de maisons en vieux, maçon en gros, entrepreneur de démolitions, si tu l’aimes mieux.

– Oh! c’est impossible! exclama le médecin, toi, un ancien élève de l’École polytechnique?.. tu veux sans doute plaisanter.

– Pas le moins du monde, et ce gros homme couvert de plâtre que tu as heurté en entrant est mon associé; il venait m’apprendre que nous sommes adjudicataires de neuf maisons rue de la Harpe; nous allons y mettre le pic dès demain.

Alors il raconta au médecin l’histoire de l’association, du voyage en Bretagne, des quarante mille francs, de la colère de M. Divorne.

Lorilleux, en l’écoutant, semblait plus surpris qu’un homme qui tombe des nues. A chaque instant il poussait des exclamations d’étonnement, des oh! des ah! il levait vers le ciel des bras désespérés. Enfin, lorsque Pascal eut fini:

– Cher ami, lui dit-il, tu as perdu la tête, il n’y a rien à faire à cela. Tu crois que la vie est un roman, et tu as agi comme un héros de feuilleton. Quand Paul Féval veut du bien à un de ses personnages, il lui fait cadeau d’un million, sans bourse délier. Mais dans la vie réelle, on ne trouve pas de millions comme cela.

– Qui sait? répondit Pascal avec une nuance de fatuité.

– Ce n’est pas un conseil qu’il te faut, reprit le médecin, mais bien une douche. Tu n’es qu’un poète égaré à l’École des ponts et chaussées, qui pourtant est bien loin du Parnasse. Aurait-on cru cela d’un mathématicien? Mon pauvre ami, tu ne sais rien de l’existence, ni de ses difficultés, et je vois avec douleur que tu vas l’apprendre à tes dépens. Je devais pourtant te servir d’exemple.

– Sais-tu bien que tu n’es pas encourageant!

– Hélas! c’est que je suis dans le vrai.

Sur ce sujet, la conversation en resta là. Comme l’avait dit Pascal, il était trop tard pour revenir sur ses pas, et Lorilleux aurait inutilement froissé son ami.

Mais le médecin sortit plus mécontent qu’il ne l’avait jamais été. Cette frasque de son ami coûtait, il se le disait au moins, quarante mille francs à sa sœur; car il considérait cet argent comme perdu, et il en faisait son deuil. Une chose cependant le consolait, c’est que probablement cette expérience refroidirait singulièrement Pascal, et le ramènerait à des idées plus positives. On dit que les folies passées sont un gage de sagesse pour l’avenir. Mieux valait que l’étourdi dépensât quarante mille francs avant son mariage que de se ruiner lorsqu’il serait père de famille. Cette école, d’ailleurs, ne le ruinait pas. Il avait encore à attendre de sa famille une jolie aisance.

Telles étaient les réflexions de Lorilleux. Enfin, comme à quelque chose malheur est toujours bon, il songeait, non sans une certaine satisfaction, que cet événement mettait Pascal sous sa main. Ainsi, il restait près de lui, et il comptait bien redoubler de soins et l’entourer d’une plus sévère surveillance. Ainsi, il ne lui échapperait certainement pas; tandis que, nommé ingénieur en province, il aurait fort bien pu se marier sans prévenir son ami. Que seraient alors devenus ses projets?..

On peut penser après cela que le médecin fut l’hôte fidèle de Pascal, il venait presque tous les jours passer la soirée avec lui.

– Comment va le roman? demandait-il de temps à autre.

– Mais pas mal, répondait l’associé de Jean Lantier.

En effet, si l’entreprise était romanesque, les bénéfices étaient réels. Les maisons de la rue de la Harpe avaient donné moins qu’on ne l’espérait, mais quelques autres avaient rendu davantage. Deux lots importants près de Saint-Lazare avaient surtout procuré des bénéfices tout à fait inespérés.

Il est vrai que les deux associés, Pascal la tête et Lantier les bras, ne ménageaient pas leurs peines, ni leurs démarches. Pascal courait du matin au soir, faisait dix visites, rédigeait les marchés et les soumissions, assiégeait les commissions et les bureaux de l’Hôtel de Ville. Lantier, dans le plâtre jusqu’aux genoux, comptait les pierres et les poutres, et ne reculait pas devant les litres de vin nécessaires à la conclusion des petites ventes.

Cette activité donnait beaucoup à penser à Lorilleux, et il n’était pas sans remarquer l’air heureux des deux associés. Pascal prenait plus d’assurance, on devinait à son aplomb l’homme qui réussit. Le ventre de Lantier s’arrondissait.

– Il ne me trompe donc pas, se disait le médecin, il réussit donc. C’est prodigieux, c’est invraisemblable; mais enfin, tant mieux, c’est pour ma sœur qu’il travaille, et je dois doublement me réjouir, comme ami et comme beau-frère.

Les parents de Pascal avaient naturellement été les premiers instruits du succès de ses entreprises. On n’avait pas voulu l’écouter lorsqu’il était à Lannion, il savait bien qu’on le lirait. Il ne se faisait pas faute d’écrire souvent; mais madame Divorne seule répondait. Toutes les semaines, régulièrement, elle adressait à son fils une bonne lettre, bien longue, bien tendre, comme savent seules en écrire les mères. Pour l’avoué, il s’obstinait à garder le silence; il semblait avoir perdu l’usage de la plume.

Dans les commencements, Pascal s’affligea beaucoup de cette obstination de son père; peu à peu, il s’en inquiéta moins, sachant bien qu’il se rendrait et que sa rancune ne tiendrait pas devant de bons et solides arguments, sur l’État ou sur première hypothèque.

Et ces arguments, le jeune ingénieur était en état de les fournir. Les affaires allaient de mieux en mieux, les démolisseurs ne savaient où donner de la pioche; si bien que les associés, lorsqu’ils firent leur inventaire, au bout de deux ans, trouvèrent que chacun d’eux possédait un peu plus de cent soixante mille francs. Les pièces de vingt sous étaient devenues des pièces de cinq francs, pour parler comme Jean Lantier.

Ce résultat féerique éblouit Lorilleux. Il voulut douter, mais il fallut bien se taire, les chiffres étaient là.

– Peut-être devrais-tu t’arrêter, dit-il à son ami; ne compromettras-tu pas dans tes spéculations futures ce que tu as si heureusement gagné?

Pascal n’entendait pas de cette oreille. Il ne s’était pas fait, comme il le disait, maçon en gros pour s’arrêter en si beau chemin. Le médecin dut imposer silence à la voix inquiète qu’il nommait sa prudence. Il se résigna à penser que sa sœur aurait voiture, et il se promit bien de la lui emprunter quelquefois, pour éblouir certains clients qui s’obstinent à ne pas croire au talent qui va à pied.

Mais Pascal ne songeait pas encore à la voiture, ou du moins n’en parlait pas. Seulement, comme il se trouvait fort mal dans son petit logement, il résolut de se donner un peu ses aises. Il aimait le confortable, et pensait l’avoir bien gagné.

En conséquence, il loua dans la rue de Rivoli un joli appartement dont les fenêtres donnaient sur le square Saint-Jacques. Il ne le paya guère plus de trois fois ce qu’il valait. La vue, il faut tout dire, était comprise dans le prix.

Cette vue était une des plus belles de Paris, elle n’était pas encore masquée par ces deux malencontreux théâtres, niaises et prétentieuses constructions, près desquelles la tour Saint-Jacques, cet inimitable bijou, semble une protestation de l’art et du bon goût.

En homme prudent qui veut pouvoir faire une réparation ou un embellissement, sans risquer le lendemain d’être augmenté ou de recevoir congé, Pascal fit un bail. Outre le prix de son loyer, il avait à acquitter divers petits frais qui augmentaient d’un sixième le prix convenu; mais il ne voulut pas chicaner pour si peu: il faut bien se conformer à l’usage.

Il paya six mois d’avance, prêta entre les mains du portier le serment de se conformer aux usages de la maison, signa un état de lieux qui lui coûta cent dix-sept francs cinquante-cinq centimes, remplit diverses autres formalités, et enfin fut chez lui. A Paris, avoir un chez-soi n’est pas plus difficile que ça.

Puis il mit les ouvriers dans son appartement. Des sept pièces qui le composaient, il en fit trois, et alors il put recevoir plus de deux personnes à la fois, étendre les bras sans danger de se faire du mal aux mains, et éternuer sans risquer de casser le globe de sa pendule.

Le propriétaire le laissa tailler à sa fantaisie, se promettant bien de lui faire payer très cher, plus tard, ces dégradations à son immeuble.

C’est alors que Pascal fit vraiment des folies. Il trancha du Crésus, et ne dépensa pas moins d’une douzaine de mille francs pour dorer ses lares. Pour ce prix il eut quelques beaux meubles, des tapis, des étoffes de bon goût et trois ou quatre de ces bronzes qu’on ne rencontre pas sur toutes les pendules des coiffeurs élégants.

Chose singulière! Lorilleux en cette circonstance parut oublier son rôle de Mentor. Loin de prêcher l’économie, il poussa presque à la dépense. Il avait calculé que l’appartement serait assez grand pour un jeune ménage, et il pensait que l’achat des meubles était une dépense nécessaire qu’il valait autant faire de suite. S’il s’intéressait si vivement aux dispositions de l’appartement, au bois des meubles, à la couleur des tentures, c’est qu’il meublait par la pensée l’appartement de sa sœur. Sa conviction était telle, qu’il empêcha son ami d’acheter un petit tableau de Boucher, un chef-d’œuvre, parce qu’il trouvait le sujet peu convenable.

C’était cependant une occasion unique.

C’est vers cette époque que, tout à coup, le bruit des immenses richesses de Pascal se répandit à Lannion. Il avait remué ses louis d’or, et leurs tintements étaient venus aux oreilles de ses compatriotes. Toute la ville sut bientôt à n’en pas douter que le fils de M. Divorne était trois ou quatre fois millionnaire, pour le moins.

Cette incroyable nouvelle avait été apportée par deux enfants de la ville, qui, après être venus tenter fortune à Paris, retournaient au pays, Gros-Jean comme devant, plus pauvres de quelques mille écus, mais riches de cette conviction qu’il y a beaucoup d’appelés et peu d’élus. Ils avaient eu besoin de Pascal et l’avaient trouvé au moment critique.

Les braves gens mesurèrent le luxe de leur compatriote à leur reconnaissance, et ils racontèrent à qui voulut les entendre qu’il roulait voiture et habitait dans la capitale un palais des Mille et une nuits.

On ne les croyait qu’à demi, lorsque tous les faits qu’ils avaient avancés furent confirmés et au-delà par un jeune étudiant auquel Pascal avait prêté une fois quatre-vingts francs pour aller au bal masqué, et cent francs un autre jour pour apaiser un tailleur menaçant.

Ce jeune homme, qui avait dîné quelquefois chez Pascal, ne tarissait pas à son sujet. Les meubles de chêne et les bronzes l’avaient ébloui: on ne sait pas encore au Quartier Latin tout ce qui se fabrique à Paris de vieux chêne avec du carton-pâte verni, et de bronze florentin avec du mastic préparé par la galvanoplastie.

Cet étudiant, qui en était encore à s’étonner des magnificences et de la générosité de Pascal, stupéfia ses compatriotes par ses descriptions, faites de bonne foi. Selon lui, l’ingénieur se lavait les mains dans l’or, et, la nuit, reposait sur des matelas de billets de banque.

Les exagérations admises comme choses certaines, Pascal fut plus admiré qu’il n’avait été honni. Les pères qui avaient tremblé autrefois d’avoir un pareil fils, le citèrent en exemple à leurs enfants; ceux qui l’avaient le plus maltraité ne se pardonnaient pas cette offense, ce crime de lèse-capital. Ah! l’argent est un avocat puissant!

Le résultat immédiat et le plus clair de ce revirement d’opinion fut pour Pascal une avalanche de lettres: on se rappelait à son souvenir, on sollicitait sa protection pour un neveu, on lui dénonçait les gens qui avaient mal parlé de lui. Un conseiller municipal se hasarda à lui écrire et à faire un appel à «son bon cœur, au nom des pauvres de Lannion, sa ville natale.»

Pascal ne répondit à personne, mais il mit sous pli cinq cents francs pour les pauvres. A cette munificence royale, on vit bien que sa fortune n’avait pas été exagérée; on reconnut à ce trait l’homme dont la signature sur un chiffon de papier donne à ce chiffon la valeur de l’argent comptant. On le salua millionnaire. Quant à demander où et comment il avait gagné cette fortune énorme, personne n’en eut l’idée. Ce sont là d’indiscrètes questions qu’on adresse seulement aux pauvres diables.

Par suite de ces petits événements, l’importance de M. Divorne s’accrut singulièrement; sa considération grandit de cent coudées. Il recueillit les bénéfices des succès de son fils. Il rejaillit sur son front quelques-uns des rayons d’or qui faisaient l’auréole de Pascal. On salua avec vénération le père d’un homme si riche.

Et pourtant, l’avoué était le seul à ne pas ajouter foi à ce qu’il appelait des cancans de petite ville. Pascal avait bien écrit qu’il gagnait de l’argent; mais était-ce probable? Il avait prédit à son fils qu’il se ruinerait; la prédiction devait s’accomplir, car un père ne doit pas se tromper, et tous les jours il s’attendait à le voir revenir réduit à la besace.

L’envoi des cinq cents francs, bien vite connu de tout le monde, ébranla ses convictions. Qui lui garantissait la fausseté de tous ces on-dit? Tous les jours on voit des choses plus surprenantes. Il s’inquiéta, et son esprit fut singulièrement troublé. Toutes ses idées étaient bouleversées, et il ne savait pas encore au juste s’il devait s’affliger d’avoir été mauvais prophète, ou de se réjouir du succès de son fils, à supposer que ce succès fût réel.

Cet état d’incertitude était insoutenable pour l’avoué. Mais il ne voulait pas que l’idée d’aller s’assurer des faits parût venir de lui. Il amena fort adroitement sa femme, qui ne demandait pas mieux, à le presser de faire le voyage de Paris. Pour sauver les apparences, il résista quelque temps, faiblement il est vrai, et enfin eut l’air de se rendre aux sollicitations d’une mère inquiète. Un beau jour il s’avoua vaincu, et comme il avait pris ses mesures à l’avance, il se décida tout à coup, et partit sans crier gare. Il voulait surprendre son fils, qu’il ne surprit pas le moins du monde.

Pascal causait fort tranquillement avec Lorilleux, qui lui consacrait presque toutes ses soirées, lorsque son père entra. Il fut médiocrement étonné, mais très-joyeux; depuis longtemps il espérait et attendait ce petit triomphe. C’est avec un bonheur réel qu’il embrassa son père, lequel en cette circonstance se départit de sa froideur habituelle, et s’attendrit, bien qu’il y eût un témoin de sa faiblesse.

Du premier coup d’œil, l’avoué comprit qu’il devait y avoir du vrai dans les lettres de Pascal; aussi fut-il un peu honteux de sa longue «fermeté,» mais il n’en laissa rien paraître, et prit à tâche de se montrer aimable et affectueux.

Comme il voulait des renseignements, il raconta longuement et gaiement les bruits qui avaient agité Lannion. Pascal, tout en riant beaucoup de l’imagination fertile de ses compatriotes, ne voulut pas laisser plus longtemps son père dans le doute, et en quelques mots il lui exposa le chiffre de sa fortune. Il possédait environ huit mille livres de rentes, gagnées en un peu plus de deux ans.

Il y avait loin de ce revenu modeste aux millions dont on l’avait gratifié; c’était peu en comparaison. Mais ce peu sembla encore énorme à l’avoué. Faisant un retour sur lui-même, il se rappela qu’à l’âge de vingt-six ans, qu’avait alors son fils, il était, lui, simple second clerc dans une étude de province, aux maigres appointements de mille francs l’an. Tant d’argent gagné en si peu de temps choquait toutes ses idées. Il ne put s’empêcher de dire que ce bien était, à son avis, trop facilement acquis. Il vanta l’époque où l’on mettait vingt-cinq ans à amasser quatre mille livres de rentes, sans penser que cent mille livres de cet âge d’or représentaient presque cent mille écus de notre âge de fer.

Puis, comme il était de ces hommes qui veulent avoir raison encore, lorsque l’évidence leur a démontré leur erreur, il remonta son dada favori, et prouva clair comme le jour à son fils qu’il avait eu le plus grand tort de donner sa démission et de ne pas écouter les conseils sensés d’un père qui avait plus d’expérience que lui. Mais il le fit sans amertume et uniquement pour conserver ses avantages.

– Tu aurais les millions qu’on te prête, dit-il à son fils, je te le répéterais encore: tu as eu tort. Je suis trop ferme en mes principes pour qu’un succès les fasse varier. Tu as réussi, mais tu devais échouer. Une exception ne fait rien à la règle, et tu es une exception.

Pascal convint de tout avec la meilleure grâce du monde. A quoi lui aurait servi de combattre des opinions plus solides que le roc, que la mer use à la longue? Il aurait eu d’ailleurs affaire à deux adversaires, car Lorilleux prêtait à l’avoué l’appui de son éloquence. Lorilleux triomphait enfin, il trouvait quelqu’un qui entendait la vie comme lui; il abusa de ses avantages.

Cette première soirée mit au mieux l’avoué et le médecin, et les quinze jours qui suivirent ne firent qu’accroître l’estime et l’amitié qu’ils ressentaient l’un pour l’autre. Plus ils causaient, et mieux il leur était démontré qu’ils s’entendaient sur tous les points. Le machiavélique Lorilleux profita très habilement de cette bonne fortune pour s’établir solidement dans le cœur du père de son ami. Même, avec des précautions et une délicatesse infinies, il osa parler de l’établissement futur de Pascal, et fut au comble du bonheur lorsqu’il crut découvrir que M. Divorne ne regarderait pas à la dot de la femme que choisirait son fils.

Quinze jours passèrent comme un songe pour l’avoué; il aurait été parfaitement satisfait, si Pascal avait eu quelqu’un de ces titres qui font si bon effet sur une carte de visite; mais il n’en avait aucun, car on ne peut décemment s’intituler «démolisseur.» Il ne put s’empêcher de communiquer son chagrin à son fils.

– Si on me demande ce que tu fais, lui dit-il, que répondrai-je?

– Eh! cher père, répondit Pascal, ne suis-je pas toujours ingénieur et plus que jamais architecte? Dites, si vous le voulez, que j’ai rebâti Paris.

– Tu plaisantes toujours, fit l’avoué avec humeur. Quand donc seras-tu sérieux comme M. Lorilleux! voilà un homme posé, au moins, et qui entend la vie. Tu es heureux en tout, car tu peux te vanter d’avoir là un ami qui t’est dévoué, et c’est chose rare.

Jean Lantier aussi plut beaucoup à M. Divorne. Il avait bien été un peu surpris de voir à son fils un tel associé qui aurait porté la veste ronde avec plus d’aisance que la redingote, mais la rondeur du bonhomme le charma. L’entrepreneur, en l’honneur du père de son associé, avait donné un grand dîner, et l’ordonnance du repas, la magnificence de la vaisselle, l’excellence des vins, mirent le comble à l’étonnement de l’avoué, qui ne se doutait pas que le même homme pût passer ses journées dans les débris et les gravats, et rentrer le soir dans un intérieur si confortable, pour ne pas dire si luxueux.

Enfin, M. Divorne partit enchanté, en faisant promettre à son fils de venir tous les ans au moins une fois passer quelques jours à Lannion.

– Décidément, dit-il à sa femme, lorsqu’il fut de retour, notre fils est dans une très belle position.

On peut juger du ravissement de madame Divorne.

– Sans doute, se disait-elle, Pascal songera bientôt à se marier, et c’est à moi de chercher une jeune fille digne d’avoir un tel mari.

La même idée, à peu près, était venue à Jean Lantier. – Si je pouvais marier une de mes filles à monsieur l’ingénieur, quel bonheur pour elle, quel honneur pour moi: avoir dans ma famille un homme qui était le premier à l’École des ponts et chaussées! Il faudra voir. J’ai trois filles qui seront bientôt en âge, elles sont jolies, bien élevées… ma foi! je lui donnerai le choix.

Ainsi, de trois côtés à la fois, la liberté de Pascal était menacée; lui ne s’en doutait guère.

Mariages d'aventure

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