Читать книгу Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 6 - (G - H - I - J - K - L - M - N - O) - Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc - Страница 2
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ОглавлениеHALLE, s. f. Lieu enclos, couvert ou découvert, dans lequel des marchands, moyennant une redevance payée au seigneur dudit lieu, acquiéraient le droit de vendre certaines natures de marchandises. Dès les Xe et XIe siècles il y avait à Paris une halle qui se tenait sur un terrain entouré d'un fossé désigné sous le nom de Campelli, Champeaux, à peu près sur l'emplacement du marché des Innocents. «Au commencement du XIIe siècle, dit Sauval 26, Louis le Gros y établit un nouveau marché pour les merciers et les changeurs... Philippe-Auguste, en 1181, y transféra la foire de Saint-Lazare... Deux ans après il y fit faire deux halles entourées d'une muraille garnie de logis et fermée de bonnes portes, afin que, quand il pleut, les marchands y pussent vendre leurs marchandises et les tenir à couvert en tout temps et en toute sûreté.» Les halles se multiplièrent singulièrement à Paris pendant le cours des XIIIe et XIVe siècles; saint Louis en fit établir plusieurs vers 1263. Généralement les halles, pendant le moyen âge, n'étaient autre chose qu'un espace appartenant à un seigneur féodal ou à la ville, sur lequel on permettait la vente de marchandises. La halle se tenait sur une place, sous des porches d'églises, sous des portiques de maisons, autour des beffrois, des hôtels de ville, sous des appentis. Par le fait, la halle n'avait pas un caractère monumental qui lui fût particulier. Il n'y a donc pas lieu de nous étendre ici sur ces établissements. Sauval, cependant, mentionne la halle aux draps en gros de Paris, qui, dès 1417, «consistait en vingt travées, avait six toises de large, et était couverte d'une voûte de pierre de taille.» Mais cette halle ayant été démolie en 1572, nous n'avons aucun renseignement sur sa structure.
HERSE, s. f. Harse, coulisse. Lourde claire-voie composée de pièces de fer ou de charpente assemblées, s'engageant verticalement dans deux rainures et formant un obstacle sous le passage d'une porte fortifiée. La herse se relève au moyen de contre-poids et d'un treuil; elle retombe par son propre poids. Les Romains connaissaient la herse; on la voit figurée sur des vignettes de manuscrits dès les IXe et XIe siècles. Toutefois, dans les édifices militaires encore debout, nous n'en connaissons pas qui soient antérieures au XIIe siècle.
Nous avons l'occasion de donner un certain nombre de combinaisons de herses à l'article PORTE.
HEURTOIR, s. m. Hurtoir. Marteau pour frapper aux portes. Les premiers heurtoirs paraissent avoir été de petits maillets suspendus extérieurement aux huis des portes.
«Bien sembloit l'hermitage de vieil antiquité.
Cele part est alée s'a à l'uisset hurté.
D'un maillet qui là pent a sus l'uis assené 27.»
Les anneaux de fer attachés à des têtes de bronze en dehors des portes, dès une époque très-ancienne, servaient également de heurtoirs, car ils sont souvent munis d'une boule ou partie renflée qui frappait sur une grosse tête de clou. Ces anneaux facilitaient le tirage des vantaux lorsqu'on voulait les fermer; de plus ils étaient, à la porte de certaines églises, un signe d'asile. Pour requérir l'asile, il suffisait de saisir l'anneau. À ce sujet, Lebeuf 28 dit avoir eu connaissance de cet ancien usage (mentionné d'ailleurs par Grégoire de Tours) dans l'histoire des miracles de saint Germain, recueillis par le moine Hérie d'Auxerre, sous Charles le Chauve. Au XVIe siècle, pour indiquer l'action de se servir du heurtoir, on disait tabuter à la porte 29.
Voici (1) l'un des plus anciens heurtoirs à anneau que nous connaissions en France, et qui est attaché à la porte du nord de la cathédrale du Puy-en-Vélay; il date du XIe siècle; la tête de bronze est parfaitement conservée; l'anneau seul a été enlevé.
Nous en donnons un second (2) qui date du commencement du XIIIe siècle et qui est intact; il est attaché à la porte occidentale de la cathédrale de Noyon. Ici la tête et l'anneau sont en bronze.
Mais ces heurtoirs à anneaux paraissent avoir été particulièrement destinés aux portes d'églises, par suite peut-être de cette tradition du droit d'asile. Aux vantaux des portes d'habitations, les heurtoirs sont primitivement, ainsi que nous le disions tout à l'heure, des maillets, puis plus tard des marteaux suspendus au moyen de deux tourillons. Les plus anciens dont nous ayons pu nous procurer des dessins sont très-simples de forme (3) 30 et ne sont ornés que par les gravures au burin qui couvrent la tige du marteau ainsi que les deux boucles servant à maintenir ses tourillons. Les heurtoirs du XVe siècle sont moins rares; il en existe un fort beau sur le vantail de la porte de l'Hôtel-Dieu de Beaune 31. En voici un autre qui provient de Châteaudun et qui est de la même époque (4).
Les tourillons du marteau sont garantis de l'humidité par un petit toit en appentis percé d'une lucarne. Le tout est en fer forgé d'un joli travail. L'un des plus beaux provient d'une maison de Troyes (5), et est actuellement déposé dans le musée archéologique de la ville.
Il appartient également au XVe siècle, et le marteau se meut non plus au moyen de deux tourillons, mais est suspendu par un oeil à travers lequel passe un boulon. Devant la tige du heurtoir, sur un cul-de-lampe très-délicatement forgé et ciselé, est posé un enfant nu portant un écusson armoyé, vairé de... au chef de... chargé d'un lion léopardé de... Cette petite figure est une pièce de forge très-remarquable. En A, on voit le profil du marteau, moitié d'exécution. Probablement l'écu était peint aux couleurs du blason.
Au XVIe siècle, on en revient aux heurtoirs en forme d'anneau ou de boucle, avec poids à l'extrémité, pour les portes d'hôtels et de maisons. Il en existe de fort jolis de ce genre aux musées du Louvre et de Cluny. Les heurtoirs à marteau ne furent plus guère en usage que pour les portes d'habitations rurales.
Il y avait aussi des heurtoirs aux portes des châteaux forts.--«Atant es vous, chevalier qui hurte à la porte: et on vint as creniaus 32.» Toutefois il faut admettre que ces heurtoirs ne pouvaient être attachés qu'aux huis des poternes sans pont-levis, ou aux portes des barrières extérieures.
Les heurtoirs ont disparu de nos maisons et hôtels pour faire place aux sonnettes ou timbres, qui ont cet avantage de ne pas réveiller toute la maisonnée si quelque habitant attardé veut se faire ouvrir la porte au milieu de la nuit.
HÔPITAL. (Voy. HÔTEL-DIEU.)
HORLOGE, s. f. Reloige, reloge, orloge. Dès le XIe siècle, il y avait des horloges dans les églises et dans les châteaux. Ces horloges étaient habituellement placées à l'intérieur comme de grands meubles. Cet usage se perpétua jusqu'au XVIe siècle. Toutefois des sonneries annonçaient l'heure à l'extérieur.
«Quant il ont le convers oï
Durement furent esbahi
Qu'il n'orent oï soner cloche
Ne champenelle, ne reloge 33.»
Guillaume Durand, au XIIIe siècle, dans le chapitre Ier de son oeuvre 34, considère l'horloge comme une des parties essentielles de l'Église. «L'horloge, dit-il, sur laquelle on lit et on compte les heures, signifie l'empressement et le soin que les prêtres doivent avoir à dire les Heures canoniques au temps voulu, selon cette parole: Sept fois par jour je te louai, Seigneur.»
L'abbé Pierre de Chastelux donna, vers 1340, à l'abbaye de Cluny, une horloge remarquable en ce que son mécanisme présentait un calendrier perpétuel qui marquait l'année, le mois, la semaine, le jour, l'heure et les minutes, et un calendrier ecclésiastique qui désignait les fêtes et les offices de chaque jour. Cette horloge indiquait encore les phases de la lune, les mouvements du soleil, puis quantité de petites figurines mobiles représentant le mystère de la Résurrection, la Mort, saint Hugues et saint Odilon, abbés de Cluny, la sainte Vierge, la passion, etc. Les heures étaient annoncées par un coq qui battait des ailes et chantait à deux reprises; en même temps un ange ouvrait une porte et saluait la sainte Vierge; le Saint-Esprit descendait sur sa tête sous la forme d'une colombe, le Père Éternel la bénissait; un carillon harmonique de petites clochettes jouait un air; des animaux fantastiques agitaient leurs ailes, faisaient mouvoir leurs yeux; l'heure sonnait, et toutes les figurines rentraient dans l'intérieur de l'horloge 35.
Ces horloges compliquées étaient fort en vogue pendant les XIVe, XVe et XVIe siècles. À l'extérieur même, les sonneries des horloges étaient presque toujours accompagnées de Jacquemars, qui frappaient sur les timbres avec des marteaux. Quelques beffrois de nos villes du Nord, notamment celui de Compiègne, ont conservé ces jacquemars qui jouissent d'une grande popularité. Tout le monde a vu ou entendu parler des horloges célèbres des cathédrales de Lyon et de Strasbourg. La première horloge intérieure de Strasbourg fut commencée en 1352 et achevée en 1354, sous l'épiscopat de Jean de Lichtenberg; elle se composait d'un coffre de menuiserie, avec un grand disque en bois, représentant en peinture les indications relatives aux principales fêtes mobiles. Dans la partie du milieu se trouvait un cadran dont les aiguilles marquaient les mouvements du soleil et de la lune, les heures et leurs subdivisions. Le couronnement était orné d'une statuette de la Vierge, devant laquelle on voyait, à l'heure de midi, s'incliner trois mages; un coq chantait au même instant en battant des ailes. Un petit carillon jouait des airs à certaines heures. Cette horloge fut remplacée en 1547, puis refaite en 1838; c'est celle que nous voyons aujourd'hui sur la paroi du transsept méridional, en face de l'emplacement réservé à l'ancienne horloge 36.
On voit encore dans les cathédrales de Beauvais et de Reims des horloges dont les coffres datent du XIVe siècle. Elles sont toutes deux fort bien gravées dans le recueil publié par M. Gailhabaud 37.
Sur les tours d'églises du XIIe au XIVe siècle, aucun espace n'est disposé pour le placement de cadrans pouvant être aperçus de loin; ce qui fait supposer qu'avant le XVe siècle, si des sonneries indiquaient les heures aux habitants des villes, il n'y avait point de cadrans extérieurs. On ne voit apparaître ceux-ci que vers la fin du XVe siècle. Ils sont alors couverts par de petits auvents, et façonnés soit en bois, soit en plomb, et revêtus de peintures.
HÔTEL, s. m. On donnait le nom d'hôtel aux habitations qui, dans les villes, appartenaient à des seigneurs ou à de riches particuliers, mais qui n'avaient point le caractère d'un château, c'est-à-dire qui ne possédaient point de droits féodaux.
La résidence des souverains dans Paris s'appelait le palais. Le Louvre, bâti hors les murs, était un château. On désignait les autres résidences souveraines établies dans Paris, mais qui n'avaient point un caractère féodal, non plus sous le nom de palais, mais sous celui d'hôtel. On disait l'hôtel Saint-Pol, l'hôtel des Tournelles. On disait aussi l'hôtel de Cluny, l'hôtel de Sens, l'hôtel de Bourbon, l'hôtel de Nevers, l'hôtel de la Trémoille. À Bourges, l'habitation de Jacques Coeur est un véritable hôtel. Toutefois, pour ne pas mettre de la confusion dans l'esprit de nos lecteurs, nous avons rangé les hôtels dans l'article MAISON, la différence entre l'hôtel et la maison étant souvent difficile à établir.
HÔTEL DE VILLE, s. m. Maison commune. Le mouvement politique qui se manifesta, dès le XIe siècle, dans un certain nombre de villes, et qui eut pour résultat l'affranchissement de la commune, chercha naturellement à centraliser la conjuration en élevant un édifice propre à contenir les jurés. Toutes fois qu'une charte de commune était octroyée, le droit d'ériger une maison commune et un beffroi s'y trouvait compris. Mais, jusqu'au XIVe siècle, les communes ont à subir des vicissitudes si diverses, aujourd'hui octroyées, demain abolies, qu'il nous reste bien peu de maisons de ville antérieures à cette époque, le premier acte de l'autorité qui abolissait la commune étant d'exiger la démolition de l'hôtel et du beffroi. «Les maisons communes, dit M. Champollion-Figeac 38, appartenaient quelquefois au roi ou aux seigneurs suzerains qui en permettaient l'usage à de certaines conditions. En 1271, celle de Carcassonne provint d'un don royal, et le sénéchal y exerçait la police au nom du monarque 39... Celle de la ville de Limoges appartenait, en 1275, au vicomte de ce nom, qui permettait aux consuls de s'y assembler avec le prévôt pour discuter les affaires municipales, et elle portait le nom de Consulat. Elle avait cependant été construite par la commune; mais il fut reconnu que c'était sur un emplacement appartenant au vicomte, ce qui fut cause que la propriété lui fut adjugée sur sa réclamation.»
L'état précaire des communes, le peu de ressources dont elles disposaient pour subvenir à toutes les charges qui leur étaient imposées, devaient les arrêter souvent dans leurs projets de constructions de maisons de ville. Cependant certaines grandes cités, comme Bordeaux, par exemple, possédaient des édifices bâtis pour servir de maisons de ville, vers la fin du XIIe siècle 40. Il est certain que les villes de la Gaule situées au midi de la Loire avaient conservé, beaucoup mieux que celles du nord, les traditions municipales des derniers temps de l'Empire romain. «C'est là seulement, dit M. Aug. Thierry 41, que les cités affranchies atteignirent à la plénitude de cette existence républicaine, qui était en quelque sorte l'idéal auquel aspiraient toutes les communes.» Aussi ces villes possédaient-elles des édifices auxquels on peut donner le nom de maison commune, à une époque où, dans le Nord, on n'avait eu ni le loisir ni les moyens matériels nécessaires à leur érection. Certaines parties du Capitole de Toulouse indiquent une date fort ancienne, et cet hôtel municipal était une véritable forteresse dès le XIIe siècle.
Dans la petite ville de Saint-Antonin, située dans le département de Tarn-et-Garonne, cité autrefois importante et riche, il existe encore un hôtel de ville du milieu du XIIe siècle, qui est certainement l'un des plus curieux édifices civils de la France. Il servait de halle à rez-de-chaussée.
Le premier et le second étage contenaient chacun une salle et un cabinet. Une tour servant de beffroi couronnait un des côtés de la façade. Voici (1), en A, le plan du rez-de-chaussée. L'espace H servait de halle couverte et était mis en communication avec un marché M existant autrefois sur ce point; en P était le passage d'une voie publique sous le beffroi. L'escalier pour monter aux étages supérieurs était primitivement bâti en E; mais cet escalier, détruit depuis longtemps, a été remplacé par une vis qui est disposée en V. Le dessous du beffroi a subi quelques changements, afin de consolider les piles qui étaient fort altérées; mais ces changements laissent parfaitement voir la construction primitive. En B est tracé le plan du premier étage, auquel on arrivait par la porte F donnant sur l'ancien escalier. Ce premier étage se compose d'une salle S et d'un cabinet N ayant vue sur la place publique par la fenêtre R et sur une rue principale par celle T. Le sol de ce cabinet est élevé de quelques marches au-dessus de celui de la salle. Le plan C est celui du second étage. La porte d'entrée étant autrefois percée en F', du cabinet N' on montait à la guette du beffroi par un escalier en bois ou plutôt une sorte d'échelle de meunier passant à travers la voûte en berceau tiers-point qui couvre l'espace a,b,c,d. La salle principale S, au premier étage, est largement éclairée par une belle claire-voie qui a toujours été disposée pour être vitrée.
Nous donnons (2) l'élévation de cet édifice, dont la partie supérieure X seule est moderne 42, et (3) un détail de la claire-voie du premier étage.
En A est tracée la coupe de cette claire-voie avec le plancher B et l'arc C de rez-de-chaussée. En D, nous avons présenté la face extérieure d'une partie (1/3) du fenestrage, et, en E, sa face intérieure. Des châssis ouvrants viennent battre sur des traverses en bois hautes et basses G. La construction de tout le monument est traitée avec soin, faite en pierre très-dure du pays; la sculpture est d'une finesse et d'une pureté remarquables, tous les profils sont d'un excellent style et taillés en perfection. Des cuvettes en faïence émaillée, incrustées dans la pierre, ornaient certaines parties de la façade 43. Sur l'un des deux piliers qui coupent la claire-voie en trois travées, on remarque une statue d'un personnage couronné tenant un livre de la main droite et de la gauche un long sceptre terminé par un oiseau; sur l'autre, un groupe d'Adam et d'Ève tentés par le serpent. Ces figures en ronde-bosse, petite nature, sont d'un beau caractère et sculptées avec une extrême délicatesse de détails. La figure du personnage couronné a été l'occasion de quelques discussions. Quelques-uns ont voulu voir là Moïse, d'autres Charlemagne, d'autres encore un roi contemporain du monument. À grand'peine, sur le livre ouvert, nous avons pu, il y a quelques années, découvrir les fragments d'une inscription peinte.
Nous donnons ici les traces visibles de cette peinture sur les deux pages (4); traces dont nous n'avons pu déchiffrer le sens. Peut-être quelques archéologues seront-ils plus heureux que nous. Sans donner ici notre opinion pour autre chose que comme une hypothèse nouvelle, nous verrions dans cette statue le Christ dominateur: Christus regnat, Christus imperat.
Les colonnettes et chapiteaux de la claire-voie, son encadrement et les fenêtres, étaient colorés; sur les murs des salles recouverts d'enduits, nous avons pu constater des traces de peintures de deux époques (XIIe et XVe siècle). Derrière le portique du rez-de-chaussée était une place ayant toujours servi de marché; autrefois on ne pouvait y arriver qu'en passant sous les arcades du rez-de-chaussée.
Si nous voyons encore, dans le nord de l'Allemagne et en Belgique, des hôtels de ville d'une époque assez ancienne, comme ceux de Lubeck, d'Aix-la-Chapelle, bâtis au XIIIe siècle, ceux de Brunswick, de Dantzig, de Munster, de Ratisbonne, élevés pendant les XIVe et XVe siècles, nous ne possédons plus en France d'édifices de ce genre, sauf celui de Saint-Antonin, antérieurs à la fin du XVe siècle et au commencement du XVIe. On peut encore étudier les hôtels de ville de cette époque à Orléans, à Compiègne, à Saumur, à Luxeuil, à Beaugency, à Saint-Quentin. Entre tous, le plus complet, le plus remarquable, est certainement l'hôtel de ville de Compiègne, gravé avec beaucoup de soin dans l'ouvrage de MM. Verdier et Cattois 44.
Cet édifice se compose d'un seul corps de logis, avec grand escalier à vis dans la partie antérieure centrale; cet escalier est couronné par un très-joli beffroi. Au rez-de chaussée, au premier et au second étage, de grandes salles sont disposées à droite et à gauche de la tour centrale. Au-dessus de la porte, une large niche avait été remplie par une statue équestre de Louis XII. Deux échauguettes saillantes flanquent les deux angles du bâtiment. On observera que cette tradition avait été suivie encore dans l'hôtel de ville de Paris, élevé pendant le XVIe siècle et terminé sous Henri IV.
Les maisons de ville du Nord possédaient toujours un balcon saillant, une bretèche, d'où l'on pouvait parler au peuple assemblé sur la place. À Compiègne, ce balcon n'est déjà plus qu'une petite loge disposée à la base du beffroi, au niveau de la balustrade du comble. À Paris, la bretèche est remplacée par le large escalier avec perron qui donne accès à la cour centrale; mais à Arras, bien que l'édifice municipal date de la fin du XVIe siècle, la bretèche traditionnelle existe encore ou existait il y a peu d'années.
Plusieurs causes avaient contribué à priver les villes françaises situées au nord de la Loire des bâtiments destinés aux réunions municipales. Jusqu'au XIVe siècle, l'affranchissement des communes, bien qu'il eût eu des conséquences considérables au point de vue politique, n'avait pu que très-difficilement s'établir d'une manière durable. Vers la fin du XIIe siècle, des évêques, soit pour reconquérir l'autorité diocésaine qui leur avait été en grande partie enlevée par les établissements religieux, soit pour trouver un point d'appui dans leurs tentatives d'empiétement sur le pouvoir féodal laïque, s'étaient mis à élever à Noyon, à Senlis, à Sens, à Paris, à Amiens, à Chartres, à Troyes, à Bourges, à Reims, à Soissons, à Laon, à Cambrai, à Arras, à Beauvais, à Auxerre, à Rouen, d'immenses églises cathédrales, à la construction desquelles les populations urbaines avaient apporté une ardeur d'autant plus active, que ces édifices prenaient alors à la fois un caractère civil et religieux. Les citadins appelés par les évêques à concourir à l'édification du monument, avec l'assurance que ce monument leur serait ouvert pour leurs assemblées, regardèrent longtemps, dans ces villes dépendantes ou voisines du domaine royal, la cathédrale comme un édifice municipal. Et nous voyons en effet que, jusqu'au XVe siècle, les cathédrales servent non-seulement au service religieux, mais à des réunions politiques et profanes (voy. CATHÉDRALE). Cette habitude prise, les populations urbaines du nord de la France sentaient moins le besoin d'élever des maisons de ville, d'autant qu'ils savaient par expérience que ces édifices municipaux excitaient la défiance des seigneurs suzerains. L'ombre des cathédrales leur suffisait. Ainsi, ce n'est qu'en 1452 que Jean de Bourgogne accorde les permissions nécessaires pour bâtir un hôtel de ville à Auxerre. «Les habitants, dit Lebeuf 45, n'en avaient point eu jusqu'alors: quand il leur fallait traiter de leurs affaires, ils étaient obligés de tenir leurs assemblées dans les places publiques ou dans les églises, dans les chapitres de communautés ou dans les cloîtres religieux. C'était aussi dans ces lieux qu'on représentait les fêtes qui servaient de divertissements publics.» La cathédrale de Laon servit, jusqu'au XVIe siècle, de lieu de réunion pour les habitants de la ville. Des assemblées se tiennent pendant les XIVe et XVe siècles dans les cathédrales d'Auxerre, de Paris, de Sens, lorsqu'il s'agit de délibérer sur les affaires publiques. Ces édifices avaient conservé quelque chose de la basilique romaine; des marchés s'installaient sous leurs porches, et même, sous leurs voûtes, on vendait. Les évêques s'élevèrent naturellement contre ces habitudes; mais ce ne fut que bien tard qu'ils parvinrent à les détruire entièrement. Il ne faut pas, par conséquent, demander à la France des XIIe, XIIIe et XIVe siècles, ces vastes bâtiments municipaux des villes de l'Italie et de la Flandre; ils n'ont jamais existé parce qu'ils n'avaient pas lieu d'exister. Mais aussi est-ce dans ces provinces françaises situées au nord de la Loire que l'on voit s'élever, sous une puissante impulsion, les plus grandes cathédrales qui aient été construites dans la chrétienté à cette époque.
Pour se faire une idée exacte de ce qu'il y avait de précaire dans l'établissement municipal de la ville de Paris, par exemple, il suffit de lire ce qu'écrit Sauval sur ce qu'était la maison de ville avant le milieu du XIVe siècle. Ce ne fut qu'en 1357 que le receveur des gabelles vendit au prévôt des marchands, Étienne Marcel, la maison qui devint définitivement l'hôtel de ville. «Pour ce qui est du bâtiment, ajoute Sauval, c'étoit un pelit logis qui consistoit en deux pignons, et qui tenoit à plusieurs maisons bourgeoises.» Ce fait seul donne assez à entendre que les hôtels de ville, en France, ne différaient guère, pour la plupart, jusqu'au XVe siècle, des maisons de particuliers. Cependant Bourgueville 46 prétend que la ville de Caen possédait une maison commune «de fort ancienne et admirable structure, de quatre estages en hauteur, en arcs-boutans fondez dedans la rivière sur pilotins, laquelle flue par trois grandes arches (cet hôtel de ville était bâti sur le pont Saint-Pierre); et aux coings de cest édifice et maison sont quatre tours qui se joignent par carneaux, en l'une desquelles (qui faict le befroy) est posée la grosse orloge: ceste quelle maison, pont et rivière, séparent les deux costez de la ville, de façon que les quatre murailles d'icelle commencent, finissent et aboutissent sur ce pont, anciennement appellé de Darnetal, comme il se treuve par certaine chartre, estant au matrologe ou chartrier de la ville, de l'an 1365.» En effet, dans de vieux plans de la ville de Caen 47, on voit, figuré sur le pont Saint-Pierre, un bâtiment en forme de châtelet (car il fallait passer sous l'hôtel de ville pour traverser l'Orne) dont la face orientale est ouverte en face la grande rue qui servait de lieu de foire. Le bâtiment est flanqué de quatre tourelles et couvert en pavillon; la tour du beffroi était bâtie à l'angle sud-ouest. La salle d'assemblée, située au premier étage, avait ses fenêtres ouvertes sur la rivière, du côté de l'arrivée des navires, au nord, et, au sud, sur des prairies. La situation de cette maison commune était donc des mieux choisies pour une ville marchande et industrielle.
La disposition des maisons communes, à dater de la fin du XIIIe siècle, paraît avoir été à peu près la même dans les villes du Nord, depuis la Picardie jusqu'à Lubeck. Un beffroi s'élevait au centre de la façade et était flanqué latéralement de deux grandes salles où pénétrait un grand logis à pignons latéraux. Le beffroi servait de prison commune, de dépôt des archives et de guette avec carillon. Devant la façade s'ouvrait, à rez-de-chaussée, un portique avec grands escaliers et loge ou bretèche pour les cris publics. La ville de Lubeck possède encore les restes d'un vaste hôtel de ville qui, au XIIIe siècle, se composait de trois grands logis accolés, avec trois pignons sur la face antérieure et trois autres sur la face postérieure. Ces pignons étaient percés de très-grandes fenêtres à meneaux qui éclairaient largement ces trois salles. Le rez-de-chaussée était occupé par des services secondaires. Il n'est pas besoin de rappeler ici que les maisons des villes du Nord du XIIIe au XVIe siècle présentaient leurs pignons sur la rue. Ce parti avait été adopté pour les hôtels de ville, et à Saint-Quentin encore la maison commune, dont la construction est du XVIe siècle, conserve le principe de cette disposition. En réunissant les documents épars que nous avons pu nous procurer sur les maisons communes de ces villes riches et commerçantes du Nord, il est possible de présenter un type de ces constructions qui, plus qu'aucune autre, ont été soumises à tant de changements et de catastrophes. Comme il serait beaucoup trop long et fastidieux de donner séparément ces renseignements épars, nous avons pensé que nos lecteurs ne nous sauraient pas mauvais gré de les réunir en un faisceau et de présenter un type complet d'un hôtel de ville de la fin du XIIIe siècle.
C'est ce que nous avons essayé de faire en traçant la fig. 5, qui donne, en A, le plan du rez de-chaussée d'un édifice municipal, et en B le plan du premier étage. Sous le portique antérieur C, à droite et à gauche, montent deux rampes qui arrivent au vestibule D, précédé de la loge E. On entre à rez-de-chaussée, sous les voûtes du vestibule, dans les prisons F du beffroi, et par les portes C dans les salles H destinées à des services journaliers. Au premier étage, du vestibule D on pénètre dans la pièce I située sous le beffroi, et de là dans une première salle K servant de vestibule aux deux grandes salles L, largement éclairées par les fenestrages M.
La fig. 6 présente l'élévation perspective de cet édifice.
Toutefois il arrivait fréquemment, avant le XVe siècle, que les beffrois étaient indépendants de l'hôtel de ville. Celui de Tournay, qui date du XIIe siècle, est isolé. Celui d'Amiens, dont la partie basse remonte au XIVe siècle, était également indépendant de la maison commune, ainsi que ceux de Commines et de Cambrai. Millin, dans le tome V de ses Antiquités nationales, donne une vue de l'hôtel de ville de Lille, démoli en 1664, et reproduite d'après un dessin de la bibliothèque de Saint-Pierre. D'après ce dessin, le bâtiment principal, sans beffroi, se compose d'un corps de logis à trois étages, avec deux grands pignons et échauguettes aux angles. La base du comble est crénelée. À la suite de ce bâtiment s'élève un logis plus bas avec crénelages surmontés de lions et de deux statues de sauvages, dont l'une porte l'étendard de la ville. Ces constructions, autant que l'imperfection du dessin permet de le reconnaître, paraissent appartenir au XIIIe siècle. Si beaucoup de beffrois très-anciens des villes du Nord étaient isolés, celui de Bergues Saint-Winox (Nord), qui datait du XIVe siècle, se trouvait autrefois disposé, relativement à la maison commune de cette ville, comme l'est celui de notre fig. 6. On observera qu'à Compiègne le beffroi est au centre du bâtiment principal et sur sa face; seulement il pénètre un gros et profond logis dont les deux pignons sont placés latéralement, de manière toutefois à présenter, au premier étage, un plan pareil à celui de la fig. 5.
HOTEL-DIEU, s. m. Maison-Dieu, maladrerie, hospice, hôpital, léproserie. Rien n'établit que les anciens eussent des maisons de refuge pour les malades où ceux-ci pouvaient recevoir les soins des médecins et attendre leur guérison. À Athènes, les soldats mutilés étaient entretenus aux frais de la république 48; mais il n'est pas dit que ce secours fût autre chose qu'une pension; d'ailleurs ce fait ne paraît pas avoir existé dans les autres villes de la Grèce. À Sparte, après la bataille perdue par les Lacédémoniens contre Antigone, les maisons des citoyens furent ouvertes pour recevoir les blessés 49. Les Romains, en campagne, avaient des espaces réservés aux hommes et aux chevaux malades; mais aucun auteur ne signale, ni à Rome ni dans les villes de l'Empire, des hôpitaux destinés soit aux soldats blessés, soit aux pauvres malades. Saint Jérôme, le premier, parle d'une certaine Fabiola, dame romaine fort riche, qui fonda, vers l'an 380, un hôpital dans lequel on recevait les malades, jusqu'alors gisant abandonnés dans les rues et sur les places publiques. Dans les premiers temps du moyen âge, en effet, dans les villes de l'Italie, de la France, de l'Allemagne, il se fait de nombreuses fondations pour soigner et loger les malades, les voyageurs, les pauvres. Dans l'origine, ces fondations consistent en l'abandon d'une maison, d'un local, avec une rente perpétuelle. Naturellement, les établissements religieux réguliers, les chapitres, les paroisses même, étaient les conservateurs de la fondation. «La plus ancienne mention, peut-être, de l'Hôtel-Dieu de Paris remonte, dit M. Guérard dans sa préface aux cartulaires de l'église Notre-Dame de Paris 50, à l'année 829.» Du Breul 51 admet que cet établissement fut fondé par saint Landry, vingt-huitième évêque de Paris, vers l'an 660. Guillaume de Nangis dit, dans la Vie du roi saint Louis, que ce prince l'augmenta considérablement en 1258. Lebeuf 52 prétend que cet hôpital portait encore le nom de Saint-Christophe dans le Xe siècle; il ne trouve point de preuves que saint Landry ait établi proche de la cathédrale une maladrerie ou un Hôtel-Dieu. «On doit distinguer, dit-il, entre un Hôpital, un Hôtel-Dieu ou une Maladrerie. J'ai beaucoup de peine à croire que les Maladreries ayent été originairement proche les cathédrales qui étoient bâties dans l'intérieur des cités. Pour ce qui est des indigens qui ne faisoient que passer, j'avoue qu'on a pu leur donner l'hospitalité dans ce quartier-là sous la seconde race de nos rois... Peut-être, ajoute-t-il, qu'avec de plus profondes recherches on trouveroit l'époque du changement de l'hôpital ou maison de l'hospitalité de cette cathédrale en Maladrerie ou Hôtel-Dieu.» En 1168, sous l'épiscopat de Maurice de Sully, le nombre des lits fut augmenté par suite d'un statut du chapitre de Notre-Dame. Il fut décidé que tous les chanoines qui viendraient à mourir ou qui quitteraient lenr prébende donneraient à cet hôpital un lit garni. Trente ans après ce règlement, Adam, clerc du roi Philippe Auguste, fit don à l'Hôtel-Dieu de deux maisons dans Paris, afin que, sur le revenu de ces maisons, le jour de son anniversaire, on fournirait aux malades «tout ce qu'il leur viendroit dans la pensée de vouloir manger.»
Pendant les XIe, XIIe et XIIIe siècles, il est fondé une quantité prodigieuse d'hospices; presque toutes les abbayes avaient un hôpital dans leur enceinte. De plus, on fonda un grand nombre de léproseries hors les villes. «La maison de Saint-Lazare, dit Lebeuf 53, ne doit être considérée que comme une célèbre Léproserie. Autant la ville de Paris étoit fameuse, autant sa Léproserie l'étoit en son espèce. Ce fut dans le XIIe siècle que l'on commença à avoir une attention plus singulière de séparer les lépreux d'avec le reste du peuple: de là l'époque de l'origine de toutes ces maladreries du titre de Saint-Lazare, dont on voit encore des restes proche une infinité de bourgs et de villages du royaume... Dès le règne de Louis le Jeune, il y avoit entre Paris et Saint-Denis un hôpital de lépreux, qui consistoit en un assemblage de plusieurs cabanes où ils étoient renfermés. Odon de Dueil, moine de Saint-Denis, écrit qu'il fut témoin, comme, en l'an 1147, le mercredi onzième de juin, ce même roi, venant prendre l'étendard à Saint-Denis avant de partir pour la croisade, entra dans cet hôpital situé sur sa route, et prit la peine d'y rendre visite aux lépreux dans leurs cellules, accompagné seulement de deux personnes.» Cette célèbre léproserie, dès la fin du XIIe siècle, était gouvernée par des religieux de l'ordre de Saint-Augustin. Les léproseries étaient au nombre de 2,000 dans les États du roi de France, au XIIIe siècle, ainsi que le prouve une donation faite par Louis VIII, dans son testament du mois de juin 1225 54. Nous ne chercherons pas à établir si la lèpre fut importée en France par les croisés revenus de Palestine, ou si, comme le prétendent quelques auteurs, cette maladie existait déjà, dès l'époque celtique, sur le sol occidental de l'Europe 55. Ce qu'il est difficile de nier, c'est que cette maladie, ou une maladie certainement analogue, qui était ou que l'on croyait contagieuse, existait sur toute la surface de l'Europe au XIIe siècle, même dans les contrées qui n'avaient envoyé personne en Palestine, puisque, d'après Mathieu Pâris, on ne comptait pas moins de 19,000 léproseries en France, en Allemagne, en Angleterre, en Italie, en Espagne, en Brabant, en Suisse, en Hongrie, en Pologne, en Bohême et dans les États du Danemark. Ces établissements, situés hors des villes, ainsi que nous venons de le dire, consistaient en une enceinte dans laquelle s'élevaient des cellules assez semblables à celles des chartreux, avec une chapelle commune. Les religieux qui avaient cure du temporel et du spirituel des léproseries logeaient dans des bâtiments voisins de l'église.
Il est clair que les dispositions architectoniques n'avaient rien à voir dans ces enclos parsemés de cabanes. Il n'en est pas de même pour les hôpitaux. Il nous reste, de l'époque du moyen âge et particulièrement des XIIe et XIIIe siècles, d'admirables bâtiments affectés aux malades recueillis dans les monastères, dans le voisinage des cathédrales, ou même dans des cités florissantes. Chaque monastère possédait son aumônerie, c'est-à-dire un personnel chargé d'exercer l'hospitalité. Pendant le moyen âge, l'hospitalité était obligatoire. Dès l'époque carlovingienne, il existait des impôts destinés à secourir les pauvres, les pèlerins, les malades. Charlemagne avait, dans ses ordonnances et capitulaires, recommandé à ses sujets d'offrir l'hospitalité, et «il n'était pas permis alors de refuser aux voyageurs le couvert, le feu et l'eau 56.» Les communes rivalisèrent avec les rois, les seigneurs et les simples particuliers, dans ces oeuvres de bienfaisance. Beaucoup de villes établirent des hospices, à leurs dépens, soit dans des bâtiments neufs, soit dans des édifices abandonnés que l'on faisait restaurer en vue de cette destination. Des hospices furent même bâtis dans des lieux isolés pour servir de refuges aux voyageurs et les garantir contre les voleurs qui infestaient les routes; ces bâtiments étaient souvent fondés par des cénobites et sous la garde de religieux. Les villes étant habituellement fermées le soir, les voyageurs attardés étaient contraints de passer la nuit à la belle étoile; des maisons de refuge, sortes de caravansérails gratuits, s'élevèrent non loin des portes. «En 1202, deux nobles allemands voulurent remédier à ce grave inconvénient, et firent construire un hospice hors la porte de Saint-Denis à Paris. Un emplacement d'une contenance de deux arpents fut promptement couvert de bâtiments. Une grande salle en pierre de taille, élevée au milieu du sol au moyen d'arcades formées à croix d'osier, y fut construite pour y coucher les pauvres; elle avait vingt-deux toises et demie de long et six toises de largeur 57.» En 1310, le nombre des maisons-Dieu, maladreries et léproseries qui recevaient des secours en argent sur la cassette particulière du roi de France, était de cinq cents environ; dans la banlieue de Paris seulement, quarante-huit maladreries profitaient de ces dons. La charité publique et privée sut encore rendre son assistance plus efficace, en fondant des hôpitaux pour certaines infirmités particulières. Saint Louis donna l'exemple en faisant bâtir l'hospice des Quinze-Vingts pour les aveugles de Paris; sans parler des léproseries, on fonda, dans beaucoup de villes, des hospices pour les boiteux, pour les fous, pour les vieillards indigents, pour les femmes en couche. Les confréries voulurent aussi avoir leurs maisons de refuge, leurs hospices, et enfin, pendant les pestes qui désolèrent les villes du moyen âge, des évêques, des seigneurs laïques prêtèrent des locaux dépendant de leurs résidences pour soigner les malades, et voulurent souvent eux-mêmes les assister. À côté des désordres de toute nature et des abus sans nombre qui signalèrent cette époque, il faut donc reconnaître que tous, petits et grands, cherchaient à adoucir le sort des classes souffrantes par les moyens les plus efficaces, et que l'esprit de charité ne fut jamais plus actif que dans ces temps. Il faut dire que, souvent, tel seigneur qui fondait un hospice en mourant avait, sa vie durant, fait plus de malheureux qu'on n'en pouvait secourir de longtemps dans la maison élevée par lui. Le moyen âge est ainsi fait: c'est un mélange sans mesure de bien et de mal; aussi y a-t-il autant d'injustice à présenter cette époque comme un temps de misères continuelles que comme un âge de foi vive, de charité et de sagesse. Partout, à côté d'un mal, d'un abus monstrueux, trouve-t-on le sentiment du droit, le respect pour l'homme, pour ses malheurs et ses faiblesses. Le mot de fraternité n'est pas seulement dans les discours, il trouve partout une application pratique, et si la passion ou l'intérêt font trop souvent enfreindre cette loi sacrée, du moins son principe n'est jamais méconnu. Par le fait, nos grandes institutions de charité nous viennent du moyen âge et lui survivent; il est bon de ne pas trop l'oublier: ayant profité de la belle partie de l'héritage, peut-être serait-il juste d'être indulgents pour son côté misérable.
On comprendra que parmi tant d'édifices élevés sous l'inspiration d'une charité vive et voulant immédiatement porter remède au mal, beaucoup n'étaient que des bicoques, des maisons que l'on appropriait tant bien que mal au service des pauvres et des malades; car nombre de ces hospices se composaient d'une maison donnée par un simple bourgeois, avec une rente à prendre sur son bien. Peu à peu ces modestes donations s'étendaient, s'enrichissaient par les quêtes et devenaient des établissements importants. Cependant il nous reste encore quelques hôpitaux du moyen âge qui, au point de vue de l'art, sont remarquables. Bien bâtis, bien aérés, spacieux, ils ont aussi cet avantage, sur les constructions analogues que nous élevons aujourd'hui généralement, de laisser à l'art une large place, de ne point attrister les malades par cet aspect froid et désolé qui caractérise de notre temps (sauf de rares exceptions) les édifices publics de charité 58.
Parmi les hôpitaux les plus anciens qui existent encore en France, il faut citer l'Hôtel-Dieu de Chartres, situé près de la cathédrale, et l'hôpital d'Angers. Ce dernier surtout est remarquable par son étendue et par les services qui l'entourent. En voici le plan (1).
Il se compose d'une grande salle à trois nefs A, précédée d'un cloître, d'une chapelle voisine B, de logements, dénaturés aujourd'hui, et d'un vaste magasin ou grenier C, propre à renfermer des provisions de toutes natures. La construction de cet établissement date de 1153. La chapelle est un peu plus moderne (1184). C'est aussi vers cette dernière époque que fut élevé le grand bâtiment aux provisions.
La fig. 2 présente la coupe transversale de la grande salle, dans laquelle quatre rangées de lits peuvent facilement trouver place. La construction de ces bâtiments est excellente, traitée avec soin, les chapiteaux des piliers d'un excellent style. Le bâtiment des provisions est un édifice remarquable par ses dispositions et ses détails 59.
L'Hôtel-Dieu de Chartres date à peu près de la même époque et consiste aujourd'hui en une grande salle à trois nefs, séparées par deux rangs de colonnes et portant des charpentes lambrissées. Au fond, trois voûtes en pierre ferment les trois dernières travées. C'est une disposition analogue à celle de l'hôpital d'Angers, et qui paraît avoir été généralement suivie pendant les XIIe et XIIIe siècles.
Dans les bâtiments abbatiaux de Saint-Jean-des-Vignes de Soissons et d'Ourscamp, on voit encore de belles salles qui ont été affectées aux malades. La salle dite des Morts, à Ourscamp, est, entre toutes ces constructions hospitalières, la plus belle et la mieux entendue. C'est toujours un grand vaisseau divisé en trois nefs, celle du milieu plus large que les deux autres; le tout est couvert par des voûtes d'arête et un vaste grenier.
La fig. 3 présente le plan de cette salle avec son annexe, qui servait probablement de cuisine et de laboratoire; la fig. 4 la coupe transversale de la grande salle des malades, et la fig. 5 une de ses travées.
On observera que les fenêtres sont disposées de manière à donner beaucoup de jour à l'intérieur, celles du haut étant à vitrages fixes et celles du bas pouvant s'ouvrir pour aérer la salle. Suivant la disposition généralement adoptée à cette époque, il devait y avoir quatre rangées de lits disposés ainsi que l'indique notre plan en A; la salle pouvait en contenir facilement cent. Le long du mur, au droit des colonnes, sont percées de petites niches à hauteur de la main, pour déposer les boissons ou les pansements des malades. Une grande cheminée, s'ouvrant contre le pignon B, permettait d'assainir et de réchauffer ce vaste intérieur 60. Le bâtiment et son annexe sont isolés. Le pignon G seul est rapproché des bras de croix de l'église, à laquelle on pouvait probablement communiquer par le petit passage H. Toute la construction date des premières années du XIIIe siècle; et l'intérieur était peint de joints rouges avec archivoltes festonnées en petites arcatures.
À l'article CONSTRUCTION, fig. 123 et suivantes, nous avons donné un bâtiment dépendant de l'abbaye Sainte-Marie de Breteuil, dont une partie servait d'hospice pour les pauvres. Presque toutes les abbayes possédaient ainsi des bâtiments assez vastes pour donner asile aux voyageurs, ou même de véritables hôpitaux, comme cette grande salle d'Ourscamp 61.
La ville de Tonnerre possédait, au XIe siècle déjà, un Hôtel-Dieu situé, suivant l'usage, à côté de l'église Notre-Dame, qui servait de chapelle à cet établissement; un autre hôpital, également de la même époque, existait dans le faubourg de Bourberault. «Les dépendances de cet hôpital, dit M. Camille Dormois 62, ne consistaient qu'en une petite chapelle obscure, une très-petite maison et un jardin.» En 1204, Eudes III, duc de Bourgogne, fonda, dans la même ville, l'hôpital du Saint-Esprit; mais Marguerite de Bourgogne, belle-soeur de saint Louis, reine de Sicile, voulut doter la ville de Tonnerre d'un hôpital magnifique. En 1293, elle acheta un vaste clos près d'une source appelée Fontenille, le long de l'Armençon et des murs de la ville. Dans l'acte de fondation, il est dit que les pauvres seront hébergés dans l'établissement, les convalescents nourris sept jours et renvoyés avec chemise, cotte et soulier; qu'une chapelle sera bâtie avec quatre autels; que les frères et soeurs, au nombre de vingt, chargés des soins intérieurs, auront pour mission de donner à manger et à boire à ceux qui auront faim et soif, de recevoir les étrangers et pèlerins et de les héberger, de vêtir les pauvres, de visiter les malades, de consoler les prisonniers et d'ensevelir les morts; que les frères et soeurs auront des dortoirs et réfectoires séparés, et ne devront prendre leurs repas qu'après le service des malades. L'hôpital fut-promptement élevé, et Marguerite se fit bâtir, à côté, un logis pour pouvoir surveiller elle-même son établissement; lorsqu'elle mourut, en 1308, les bâtiments et leurs dépendances étaient complétés depuis longtemps. Il nous reste de cet hôpital la grande salle et quelques dépendances, et nos lecteurs ne nous sauront pas mauvais gré probablement de leur donner un ensemble ainsi que des détails de la partie principale de cette grande salle, en même temps chapelle et hospice.
La figure 6 présente le plan à l'échelle de 0,001m pour mètre. En A est la grande salle, autrefois précédée d'un porche B avec escalier, dont nous allons indiquer la destination. Cette salle contenait quarante cellules de boiseries, sortes d'alcôves dans chacune desquelles était placé un lit (voir en C). En D était un autel principal sous une voûte, et en F deux chapelles également voûtées. Le tombeau de la fondatrice était en E, et se composait d'une figure de bronze couchée sur un sarcophage. La sacristie des chapelles était en G. En H, un jubé, posé devant le choeur, mettait en communication deux galeries latérales qui, établissant une circulation continue au-dessus des alcôves, permettaient d'ouvrir les fenêtres et de surveiller l'intérieur des cellules. On pouvait monter à ces galeries par l'escalier latéral du porche 63 et par un escalier I qui était mis en communication avec une galerie réunissant le logis L de la reine à la grande salle. De ses appartements, situés au premier étage de ce logis, cette princesse pouvait ainsi, soit descendre dans la salle, soit inspecter les cellules en se promenant sur la galerie qu'elles portaient. En Z était une petite chapelle. Les bâtiments de service de l'hôpital sont situés en K et la cuisine en M. On communiquait de ces bâtiments avec la salle au moyen d'une autre galerie N aboutissant à une petite porte. La voie publique passe en O. En P était le cimetière; en J, le jardin de la reine, borné par la muraille de la ville et par le ruisseau de Fontenille. En R, un lavoir; en V, un bras de l'Armençon, et en S le prieuré. Deux canaux souterrains passant des deux côtés de la grande salle entraînaient dans la rivière les vidanges de l'établissement. Outre les murailles de la ville, des remparts entouraient les autres parties du clos. En X était un puits public.
La fig. 7 donne la coupe transversale de ce magnifique vaisseau, qui n'a pas moins de 18m,60 de largeur dans oeuvre sur 88m,00 de long depuis le porche jusqu'au sanctuaire. La coupe (fig. 7) montre, en A, les alcôves avec la galerie supérieure B, passant par-dessus le jubé. On aperçoit au fond les trois absides. La charpente en chêne, bien conservée, nous donne des bois d'une longueur extraordinaire; les entraits, d'un seul morceau, ont 21m,40; les arbalétriers et chevrons portant ferme, 19m,00. Elle est entièrement lambrissée en berceau plein cintre légèrement surbaissé à l'intérieur. En C, nous avons tracé l'un des chevrons portant ferme, et en D une coupe d'une travée de charpente avec le lambrissage et les ventilateurs E, de 0m,10 d'ouverture. Les fenêtres latérales, à meneaux, sont disposées pour pouvoir être ouvertes du bas jusqu'à la naissance des tiers-points, et des marches, ménagées dans l'appui, permettent de tirer les targettes. Ce vaisseau, qui existe à peu près intact, sauf le porche, produit un grand effet. C'est un des plus beaux exemples de l'architecture civile de la fin du XIIIe siècle; il n'a pas moins fallu que toute l'insistance de la Commission des monuments historiques pour obtenir de la ville de Tonnerre sa conservation. Pourquoi la ville de Tonnerre voulait-elle démolir cet édifice? C'est ce qu'on aurait beaucoup de peine à savoir probablement. Pourquoi la ville d'Orléans a-t-elle démoli son ancien Hôtel-Dieu, l'un des plus beaux édifices de la Renaissance? Combien de villes se sont ainsi, sans raison sérieuse, dépouillées des monuments qui constataient leur ancienneté, qui leur donnaient un intérêt particulier et qui retenaient des étrangers dans leurs murs! Beaucoup regrettent, un peu tardivement, ces actes de vandalisme, et s'étonnent de ce que les voyageurs passent indifférents au milieu de leurs rues neuves, n'accordant pas même un regard au frontispice à colonnes du palais de justice, ou à la façade de l'hôpital nouveau que l'on confond volontiers avec une caserne.
La disposition des lits de l'hôpital de Tonnerre, logés chacun dans une cellule avec galerie de service supérieure, mérite de fixer notre attention. Chaque malade, en étant soumis à une surveillance d'autant plus facile qu'elle s'exerçait de la galerie, se trouvait posséder une véritable chambre. Il profitait du cube d'air énorme que contient la salle et recevait du jour par les fenêtres latérales; sa tête étant placée du côté du mur et abritée par la saillie du balcon, il ne pouvait être fatigué par l'éclat de la lumière. On objectera peut-être que la ventilation de ces cellules était imparfaite; mais la salle ne contenant que quarante lits, les fenêtres latérales pouvant être ouvertes, et le vaisseau étant fort élevé, ventilé par les trous percés dans le lambrissage de la charpente, on peut admettre que les conditions de salubrité étaient bonnes.
Pour faire saisir à nos lecteurs la disposition des cellules et des galeries de surveillance, nous présentons(8) une vue perspective d'une des travées de la salle.
Les fenêtres de la galerie étaient garnies de vitraux en grisaille, celles du sanctuaire en vitraux colorés. Une longue flèche en charpente surmontait ce sanctuaire; elle était couverte de plomberie peinte et dorée, et ne fut détruite qu'en 1793. Toute la charpente de la salle est couverte en tuiles vernies avec faîtières en terre cuite émaillée.
Par l'escalier carré pratiqué vers le nord, à côté de l'une des deux chapelles du chevet, on arrivait à une salle voûtée bâtie au-dessus de cette chapelle, et servant autrefois, comme encore aujourd'hui, de trésor et de chartrier. Le tympan de la porte principale s'ouvrant sous le porche du côté de la rue était décoré d'un bas-relief représentant le Jugement dernier, dont il existe encore quelques fragments 64.
Tous ceux qui s'intéressent quelque peu à nos anciens édifices ont visité le charmant Hôtel-Dieu de Beaune, fondé en 1443 par Nicolas Rolin, chancelier du duc de Bourgogne. Cet établissement est à peu près tel que le XVe siècle nous l'a laissé, bien qu'il soit construit, en grande partie, en bois. Il se compose de trois corps de logis élevés autour d'une cour quadrangulaire. Dans le bâtiment qui donne sur la rue est placée la grande salle, avec sa chapelle à l'extrémité, la porterie et quelques pièces voûtées destinées aux provisions. Les deux autres corps de logis, devant lesquels passe une galerie à deux étages, contiennent le noviciat des soeurs, trois salles, la cuisine et la pharmacie. De grands gâbles en charpente, vitrés, donnent du jour dans les salles par-dessus les galeries du dehors, tandis que l'aération se fait par les galeries mêmes et par les faces opposées (voy. l'Architecture civile et domestique de MM. Verdier et Cattois, t. I). La cour de cet établissement, d'un aspect riant, bien proportionnée, contenant encore son puits du XVe siècle, son lavoir et sa chaire, donnerait presque envie de tomber malade à Beaune. La porte sur la rue est protégée par un auvent en charpente couvert en ardoise (voy. AUVENT).
Nous donnons (9) le plan de l'Hôtel-Dieu de Beaune, et (10) la vue de l'angle de la cour du côté de l'escalier principal desservant les deux étages. En A (voy. le plan) est l'entrée; en B, un passage de service; en C, la grande salle lambrissée 65 avec sa chapelle D, maintenant séparée de la salle; en E, le réfectoire des soeurs et le salon de la supérieure; en F, les salles aux provisions; en G, le noviciat des soeurs; en H, des salles de malades; en I, un passage donnant sur un jardin; en K, la cuisine, et en L la pharmacie; le puits est placé en O, la chaire en M, et le lavoir en P.
Examinons maintenant un de ces établissements plus modestes qui, éloignés des grands centres, voisins de quelque abbaye ou de quelque prieuré, étaient si fort répandus sur le sol français au moyen âge. Entrons dans la maladrerie dite du Tortoir, non loin de la route qui mène de Laon à la Fère (Aisne). Nous allons retrouver là les curieuses dispositions intérieures de l'hôpital de Tonnerre. La maladrerie du Tortoir date, croyons-nous, de la première moitié du XIVe siècle 66.
L'ensemble de l'établissement, compris dans un carré, contient encore trois bâtiments de l'époque de la construction (11). A, la salle des malades; B, une chapelle; C, un corps de logis à deux étages, pour les religieux probablement et pour la cuisine. Les autres bâtiments qui existent aujourd'hui dans l'enceinte sont d'une époque assez récente. Occupons-nous de cette salle A. Ses deux extrémités sont fermées par deux pignons avec cheminées. Sur le préau, à l'intérieur de l'enceinte, s'ouvre une large porte, avec guichet à côté; sur cette face, pas d'autres ouvertures que deux fenêtres relevées. Devant cette large porte était suspendu un appentis très-saillant (si l'on en juge par ses amorces et les entailles de la charpente), qui servait d'abri aux chariots amenant les malades. Pour l'usage ordinaire, on se contentait de passer par la petite porte. Sur les dehors, au contraire, cette salle de malades était percée de deux rangs de larges fenêtres disposées de telle façon que celles du bas éclairaient des cellules en bois, semblables à celles de l'hôpital de Tonnerre, et celles du haut s'ouvraient sur une galerie, à laquelle on montait par un escalier ménagé dans la travée I (voy. le plan) dépourvue de fenêtre. À Tonnerre, l'intervalle entre chaque cloison est de 2 toises (3m,95); même espace entre les axes des contre-forts de la salle du Tortoir (voy., fig. 12, un angle de la face de la salle du côté extérieur).
En supposant les cloisons des cellules de la même profondeur que celles de l'hôpital de Tonnerre, et plaçant sept cloisons dans l'axe de chaque contre-fort, la salle ayant dix mètres de large, il restait six mètres pour la circulation du côté de l'entrée, en dehors des cellules (voy. le plan), et on pouvait placer sept lits dans celles-ci, l'escalier de la galerie prenant la place d'une cellule. Or ce nombre de sept lits est très-fréquemment admis dans ces petits établissements de charité. Si nous nous rappelons que les maladreries étaient spécialement réservées aux malheureux affectés de maladies contagieuses, et que des précautions minutieuses étaient prises non-seulement pour les séparer des populations, mais aussi pour les isoler entre eux, nous comprendrons ici cette disposition des cellules avec fenêtres, qui permettaient à ces pauvres gens de voir la campagne et de se réchauffer aux premiers rayons du soleil, car ces fenêtres donnent au levant. Elles étaient d'ailleurs munies de volets à l'intérieur, de manière à éviter la trop grande chaleur. Un chemin de ronde avec mâchicoulis réunissait les bâtiments et était mis en communication, par des portes percées dans les pignons, avec la galerie intérieure. Un fossé entourait l'enceinte, ainsi qu'on peut le reconnaître en examinant les soubassements extérieurs de la grande salle. On n'arrivait au sommet des quatre tourelles que par la galerie et des échelles posées dans ces tourelles servant d'échauguettes.
Le moyen âge montrait donc dans la composition de ces établissements de bienfaisance l'esprit ingénieux qu'on lui accorde dans la construction des monuments religieux. C'est un singulier préjugé, en effet, de vouloir que ces architectes eussent été si subtils lorsqu'il s'agissait d'élever des églises, et en même temps si grossiers lorsqu'il fallait élever des édifices civils. Ce n'est pas leur faute si l'on a détruit, depuis le XVIe siècle, la plupart de ces établissements de bienfaisance divisés à l'infini, mais généralement bien disposés d'ailleurs, pour les remplacer par des hôpitaux dans lesquels, au contraire, on a cherché, peut-être à tort, à concentrer le plus grand nombre de malades possible. Louis XIV, le grand niveleur de toute chose et de tout état en France, a gratifié les hôpitaux élevés sous son règne des biens de ces nombreuses maladreries et léproseries qui n'avaient plus guère de raison d'exister, puisque, de son temps, il n'y avait pas de lépreux à soigner; mais ce n'est pas à dire que les hôpitaux du XVIIe siècle soient des modèles à suivre comme disposition, au point de vue de la salubrité, de l'hygiène, et du respect que l'on doit avoir pour les malades pauvres. Dans le peu d'hôpitaux du moyen âge qui nous sont restés, nous trouvons un esprit de charité bien entendu et délicat. Ces bâtiments sont d'un aspect monumental sans être riches; les malades ont de l'espace, de l'air et de la lumière; ils sont souvent séparés les uns des autres, comme on peut le constater dans les exemples précédents; leur individualité est respectée, et certes s'il est une chose qui répugne aux malheureux qui trouvent un refuge dans ces établissements, malgré les soins si éclairés qu'on leur donne abondamment aujourd'hui, c'est la communauté dans de vastes salles. Souvent alors la souffrance de chaque malade s'accroît par la vue de la souffrance du voisin. Sans prétendre que le système cellulaire, appliqué fréquemment dans les hôpitaux du moyen âge, fût préférable matériellement au système adopté de notre temps, il est certain qu'au point de vue moral il présentait un avantage. Nous tenons à constater qu'il émanait d'un sentiment de charité très-noble chez les nombreux fondateurs et constructeurs de nos maisons-Dieu du moyen âge.
Avant de terminer cet article, nous tenterons encore de détruire une erreur fort répandue, touchant l'établissement des léproseries. On a prétendu que la lèpre avait été rapportée d'Orient en Occident au moment des croisades; mais, ainsi que nous l'avons dit plus haut, il y avait, du temps de Mathieu Pâris, 19,000 ladreries en Europe, la plupart bâties dans des contrées qui n'avaient eu aucun rapport avec l'Orient. De plus, des 300,000 hommes conduits en Orient par le frère de Philippe 1er, 5,000 à peine parvinrent en Palestine, et très-peu revinrent en Europe. De l'armée de l'empereur Conrad III, il ne resta qu'un bien petit nombre de croisés en état de revoir leur patrie. Louis le Jeune et Richard Coeur-de-Lion revinrent presque seuls de Palestine. Comment donc ces armées, qui furent englouties en Orient, auraient-elles pu rapporter et répandre la lèpre en Occident, de manière qu'on fût obligé de fonder 19,000 maisons pour soigner les lépreux? Sans entrer dans une discussion qui ne serait pas à sa place ici, à propos de l'invasion de cette maladie en Europe et particulièrement en France, on peut toutefois reconnaître comme certain qu'elle existait. bien avant les croisades 67.
Voici la liste des principaux hôpitaux fondés à Paris du VIIe au XVIe siècle:
Hôtel-Dieu, fondé, dit la tradition. par saint Landry (VIIe siècle).
Hôpital des Haudriettes, fondé sous Clovis, et où l'on prétend que mourut sainte Geneviève. Au XIIIe siècle, la famille Haudry reconstruisit cet établissement.
Hôpital de Saint-Gervais, fondé par Gatien Masson, prêtre, en 1171, la chapelle de cet hôpital ne fut dédiée qu'en 1411.
Hôpital de Sainte-Catherine, appelé primitivement de Sainte-Opportune (1180 environ), La chapelle fut construite en 1222, puis réparée en 1479.
Hôpital de la Sainte-Trinité, rue Saint-Denis, fondé par les deux frères Escuacol en 1202. Cet hôpital possédait une fort belle salle pour coucher les pauvres. En 1210, on y ajouta une chapelle. Les enfants des pauvres étaient recueillis et élevés dans l'établissement. Cet hôpital fut successivement augmenté jusqu'en 1598.
Hôpital des Quinze-Vingts, fondé par saint Louis en 1254.
Hôpital de Saint-Marcel (anciennement de l'Oursine), fondé par Marguerite de Provence après la mort de saint Louis.
Hôpital des Jacobins, fondé en 1263. En 1366, Jeanne de Bourbon, femme de Charles V, l'augmenta.
Hôpital de Saint-Jacques-du-Haut-Pas, fondé par Philippe IV en 1286.
Hôpital tenant au prieuré de la Charité (Notre-Dame-des-Billettes), fondé par le bourgeois de Paris Roger Flamming, en 1299.
Hôpital Saint-Jacques-aux-Pèlerins, rue Saint-Denis, fondé en 1315 par Louis X. La chapelle fut terminée en 1323.
Hôpital Saint-Julien-aux-Ménétriers, fondé par deux ménétriers en 1330. En 1334, les fondateurs augmentèrent cet hôpital par l'acquisition de plusieurs maisons voisines.
Hôpital du Saint-Sépulcre, fondé par Philippe de Valois en 1333.
Hôpital du Saint-Esprit, fondé en 1361 pour les enfants.
Hôpital conventuel ou commanderie du Petit-Saint-Antoine, fondé en 1368, sous Charles V.
Il existait encore, en dehors de ces établissements, dans un grand nombre de communautés et dans les paroisses, des maisons ou salles pour les malades, les pauvres et les pèlerins.
HÔTELLERIE. Il existait, à l'époque gallo-romaine, sur les grands chemins, des hôtelleries à distances assez rapprochées pour que le voyageur pût trouver un gîte à la fin de chaque journée. Ces auberges, mansions, étaient de grandes hôtelleries dans lesquelles on trouvait des chevaux de poste, un gîte, à boire et à manger. Elles servaient d'étapes pour les soldats et étaient placées sous la surveillance d'inspecteurs, frumentarii et curiosi, qui veillaient à leur bonne tenue et qui étaient chargés d'espionner les voyageurs. Les hôtelleries devenaient ainsi des lieux utiles à la police secrète des préfets du prétoire, et cependant, pour avoir droit de gîte dans les mansions, il fallait se munir d'une sorte de carte de circulation, diploma tractatorium. D'ailleurs, les mansions servaient de gîte non-seulement aux simples particuliers et aux soldats, mais aux magistrats et préteurs en tournée, et à l'empereur lui-même lorsqu'il voyageait. C'est dans une mansion du pays des Sabins que Titus fut pris de la fièvre dont il mourut peu de jours après. S'il fallait montrer sa carte de circulation pour coucher dans une mansion, à plus forte raison ne pouvait-on se procurer des chevaux de relais qu'avec des lettres de poste.
Après l'invasion des barbares, cette institution des hôtelleries impériales fut, bien entendu, entièrement ruinée. Les races germaines pratiquaient largement l'hospitalité. Un Franc, un Bourguignon, ne croyaient pas pouvoir refuser l'entrée de sa maison à un étranger; aussi, dans les voyages, pendant les premiers siècles du moyen âge, avait-on pour habitude, à chaque couchée, de demander le gîte et la nourriture dans les habitations que l'on rencontrait sur son chemin. Si le propriétaire auquel on s'adressait était trop pauvre ou trop à l'étroit pour pouvoir vous satisfaire, il vous accompagnait chez un voisin mieux partagé, et tous ensemble prenaient leur repas. «Aucune autre nation, dit Tacite en parlant des Germains 68, n'accueille ses convives et ses hôtes avec plus de générosité; fermer sa maison a une personne, quelle qu'elle fût, serait un crime 69. Selon sa fortune, chacun reçoit l'hôte, offre un repas; et lorsque les provisions sont épuisées, celui qui, tout à l'heure, recevait, indique un autre asile et y conduit: ils entrent chez ce nouvel hôte sans invitation, et sont accueillis avec une égale bonté: connus, inconnus, sont, quant aux droits d'hospitalité, traités avec les mêmes égards.» En faisant la part de l'exagération dans le tableau tracé par Tacite, il est certain toutefois que les conquérants barbares des Gaules regardaient l'hospitalité comme un devoir dont on ne pouvait s'affranchir.
Cependant, du temps de Grégoire de Tours, il existait des auberges, puisqu'il en signale quelques-unes. Les établissements monastiques répandus sur le sol des Gaules dès le IXe siècle exerçaient l'hospitalité, et dans les abbayes ou prieurés des XIe et XIIe siècles il est toujours fait mention de la maison des hôtes, bâtie proche la porte d'entrée. Il n'en existait pas moins, au XIIe siècle, un nombre prodigieux d'hôtelleries sur les grands chemins et dans les faubourgs des villes, et ces hôtelleries, moins bien surveillées que ne l'étaient celles du temps de l'Empire, étaient le refuge des voleurs, des assassins, des femmes perdues, des joueurs et des débauchés. La légende de l'Enfant prodigue le représente toujours, à cette époque, dans une hôtellerie, au milieu de femmes qui l'enivrent et lui dérobent son argent. Courtois d'Arras est dépouillé dans une auberge où on lui présente tout ce qui peut séduire un jeune homme: car les hôtelleries alors étaient bien garnies, pourvues de bons lits mous de plumes, de bon vin à foison, souvent frelaté cependant, de volaille et de venaison; des filles étaient attachées à l'établissement et servaient d'appât pour attirer, retenir et dépouiller les voyageurs.
Au XIIIe siècle, les hôtelleries, tavernes, étaient le refuge de la lie des villes, et les ordonnances des rois restaient sans effet devant ces repaires de la canaille. Sous Philippe Auguste, en 1192, et pendant la régence de la reine Blanche de Castille, en 1229, des rixes terribles eurent lieu entre des écoliers de l'Université et des cabaretiers de Paris; le prévôt fut incarcéré à la suite de la première, et l'Université renvoya les clercs à la suite de la seconde, sous le prétexte qu'on ne leur rendait pas justice. Au XIVe siècle, ces désordres ne firent que s'accroître; la plupart des hôteliers étaient coupeurs de bourses, détrousseurs de passants; si bien qu'en 1315, pour ôter aux aubergistes l'envie d'assassiner les étrangers qui s'arrêtaient chez eux, il fut rendu une ordonnance dans laquelle il était dit que «l'hoste qui retient les effets d'un étranger mort chez lui doit rendre le triple de ce qu'il a retenu 70.» C'est dans une hôtellerie de la rue Saint-Antoine, à l'enseigne de l'Aigle, que Jeanne de Divion vint s'installer pour fabriquer les faux à l'aide desquels Robert d'Artois prétendait s'emparer de la succession de la comtesse de Mahaut. Ce lieu, dit M. Le Roux de Lincy, «était un petit séjour situé au bord de la rivière et plus loin que la Grève, partie de la ville alors presque déserte.» Les hôtelleries servaient aussi de repaire aux faux monnayeurs, ainsi que le témoigne ce passage du Renart contrefait 71:
«C'est hostel de gloutonnie
Plain de trestoute ribandie
Recept de larrons et houlliers
De bougres, de faux monnoiers.
Quant tous malvais voeullent trichier
Es tavernes se vont muchier
Hostel de bourdes et vantance
Plain de male perseverance.»
C'était aussi dans les hôtelleries que venaient discourir les fauteurs de troubles publics, que se cachaient les espions 72.
On comprendra que ces établissements n'étaient autre chose que des maisons, le plus souvent isolées, et n'ayant d'autre marque distinctive qu'une enseigne pendue à la porte.
HOURD, s. m. Hourt, hour, ourdeys, gourt. Échafaud fermé de planches; appliqué à l'architecture militaire, est un ouvrage en bois, dressé au sommet des courtines ou des tours, destiné à recevoir des défenseurs, surplombant le pied de la maçonnerie et donnant un flanquement plus étendu, une saillie très-favorable à la défense. Nous avons expliqué, dans l'article ARCHITECTURE MILITAIRE (voy. fig. 14, 15, 16 et 32), les moyens de construction et l'utilité des hourds; toutefois l'objet prend une si grande importance dans l'art de la défense des places du XIe au XIVe siècle, que nous devons entrer dans des développements.
Il y a tout lieu de croire que, dès l'époque romaine, les hourds étaient en usage, car il est question, dans les Commentaires de César, d'ouvrages en bois qui sont de véritables hourds. Nous en avons donné un exemple à l'article FOSSÉ, fig. 1. Dans l'ouvrage en bois qui couronnait les fossés du camp de César devant les Bellovaques, les galeries réunissant les tours sont des hourds continus protégeant un parapet inférieur 73. La nécessité pour les défenseurs de commander le pied des remparts, d'enfiler les fossés et de se mettre à l'abri des projectiles lancés par les assiégeants, dut faire adopter les hourds dès l'époque gallo-romaine. Les crénelages supérieurs ne pouvaient, en cas de siége, présenter une défense efficace, puisque en tirant, les archers ou arbalétriers étaient obligés de se découvrir. Si l'assiégeant se logeait au pied même des murs, il devenait de toute impossibilité aux assiégés non-seulement de lui décocher des traits, mais même de le voir, sans passer la moitié du corps en dehors des créneaux. À la fin du XIe siècle déjà et au commencement du XIIe, nous remarquons, au sommet des tours et remparts, des trous de hourds percés au niveau des chemins de ronde 74. Souvent alors ces trous sont doubles, de manière à permettre de poser, sous la solive en bascule, un lien destiné à soulager sa portée.
Les merlons des tours et courtines du château de Carcassonne (1100 environ) sont hauts (1m,60 à 1m,80); les trous de hourds sont espacés régulièrement, autant que le permet la courbe des tours ou les dispositions intérieures; sous leurs pieds-droits sont percés, tout à travers, quatre trous: deux un peu au-dessous de l'appui des créneaux, deux au niveau du chemin de ronde.
26
L. IV.
27
Li Romans de Berte aus grans piés, ch. XLV. Édit. Techener; 1832.
28
Histoire de la ville et du diocèse de Paris, t. I, p. 374.
29
Cymbalum mundi.
30
Heurtoir qui nous paraît être du XIVe siècle, et qui provient d'une porte d'une maison de Vézelay.
31
Voy. l'Archit. viv. et domest. par MM. Verdier et Cattois, t, I, p. 6.
32
La Chronique de Rains (XIIIe siècle), ch. XXXI. Publ. d'après le manuscrit de la Bib. imp., par Louis Pâris; 1837.
33
Rutebeuf, Du segrestain et de la famme au chevalier (XIIIe siècle).
34
Cap. I, § XXXV.
35
Hist. de l'abbaye de Cluny, par M. P. Lorain, p. 203.
36
Voy. Descript. abrégée de l'horloge astron. de la cathéd. de Strasbourg, 1847.
37
L'Architecture du Ve au XVIIe siècle, t. IV.
38
Droits et usages concernant les travaux de construction, etc., sous la troisième race des rois de France. Paris, 1860.
39
On observera que les Carcassonnais, chassés de l'ancienne ville après le siége mis par Trincavel, obtinrent du roi saint Louis de rebâtir une ville de l'autre côté de l'Aude (voy. ARCHITECTURE MILITAIRE).
40
Voy. le Bulletin des comités historiques, février 1854; Notice sur l'hôtel de ville de Bordeaux, par M. Lamothe.
41
Lettres sur l'histoire de France (XIIIe siècle).
42
Cet édifice a été restauré sous la direction des Monuments historiques. La restauration s'est bornée toutefois à la construction de l'escalier postérieur, au couronnement de la tour qui menaçait ruine et à la réfection des planchers. Voy. l'Archit. civ. et domest. de MM. Verdier et Cattois.
43
Nous n'avons pu trouver que des fragments de ces cuvettes de faïence, qui avaient de 0,30 c. à 0,40 c. de diamètre.
44
Archit. civ. et domest. au moyen âge et à la Renaissance, t. I.
45
Mém. sur l'hist. civ. et ecclés. d'Auxerre (sous la dépend. du duc de Bourgogne), t. III, p. 319.
46
Les Recherches et antiquitez de la province de Neustrie, à présent duché de Normandie, etc., par Ch. de Bourgueville, sieur de Bras. Nouv. édit. Caen, 1833.
47
Notamment celui de Mérian et celui gravé en fac-simile dans l'ouvrage de Bourgueville, édit. de 1833.
48
Plutarque, l'ie de Solon, cap. XXXI.
49
Justin, Historia, lib. XXVIII.
50
Collection des docum. inéd. sur l'hist. de France. Paris, 1850. T. I.
51
Le Théât. des antiq. de Paris, 1612. L. I, p. 71.
52
Hist. de la ville et du dioc. de Paris, t. I, p. 22.
53
Hist. de la ville et du dioc. de Paris, t. I, 2e partie, p. 481.
54
«Art. 13. Donamus et legamus duobus millibus domorum leprosorum decem millia librarum, videlicet cuilibet earum centum solidos.»
55
Voy. le curieux ouvrage de M. Labourt, Recherches sur l'origine des ladreries, maladreries et léproseries, Paris, 1854.
56
Voy. Droits et usages concern. les travaux de construction publ. ou privées sous la troisième race des rois de France, par M. A. Champollion-Figeac, p. 166. Paris, 1860.
57
Ibidem.
58
Il faut reconnaître que depuis peu on a fait chez nous de grands progrès en ce genre. L'hospice de Charenton, ceux de Vincennes et du Vézinet, sont non-seulement parfaitement appropriés à leur destination; mais ce sont aussi, comme oeuvres d'architecture, des édifices faits pour donner aux malades des idées plutôt agréables que tristes.
59
Voy. l'Archit. civ. et domest. de MM. Verdier et Cattois, t., II.
60
Voy., pour de plus amples détails, les gravures des Archives des monum. hist., publiées par les ordres du ministre d'État; aussi l'ouvrage précédemment cité de MM. Verdier et Cattois, t. II, p. 104.
61
L'abbaye d'Ourscamp appartient aujourd'hui à M. Peigné-Delacour, qui, heureusement, conserve avec un soin particulier ces restes remarquables.
62
Notes hist. sur l'hôpital de Tonnerre. Auxerre, 1853.
63
Les comptes de 1556, d'après l'excellent travail de M. C. Dormois cité plus haut, présentent des dépenses occasionnées par la réfection de l'une de ces galeries.
«Payé à Jehan Desmaisons, charpentier, la somme de 91 liv. 40 s. pour la fasson de la grande gallery dudit hospital, contenant 20 toises de long et 2 de large... À Nicolas..., maçon, pour avoir fait la massonnerie pour soutenir les poteaux d'icelle gallery... À Jehan et Pierre les Mathieux, couvreurs, la somme de 8 liv. 13 s. pour avoir couvert l'escalier de la d. gallery... À Jehan, marchand,... pour ferrer les portes de l'hospital et les chevrons de la grande gallery,...» etc.
64
C'est à M. Lefort, architecte à Sens, que nous devons un relevé minutieux de cette grande salle de l'hôpital de Tonnerre. M. Lefort a eu l'obligeance de mettre tous ses dessins à notre disposition.
65
Un plafond a été établi sous la voûte en bardeau et a détruit l'aspect grandiose de cette salle.
66
Voy. l'Archit. civ. et domest. de MM. Verdier et Cattois, t. II, p. 107.
67
Voy. à ce sujet les Recherches sur l'origine des ladreries, maladreries et léproseries, par L. A. Labourt. Paris, 1854.
68
Germania, cap. XXI.
69
La loi ripuaire faisait de l'hospitalité un devoir impérieux, et punissait d'une amende ceux qui y manquaient.--Les Capitulaires de Charlemagne commandent l'hospitalité sous les mêmes peines.
70
Laurière.
71
Manuscrit de la Bib. imp., nº 6985, f. Lancelot, fº 32.
72
Voy. les Hôtelleries et Cabarets au moyen âge, par Franc. Michel et Éd. Fournier: t. I. Le Livre d'or des métiers.
73
De Bello Gallico, I. VIII, c. IX.
74
Au château de Carcassonne, par exemple, où les trous de hourds sont partout conservés.