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SUR LE PASSAGE. — Dans les rapports avec les personnes qui ont de la pudeur à l’égard de leurs sentiments il faut savoir dissimuler ; elles éprouvent une haine soudaine contre celui qui les prend sur le fait d’un sentiment tendre ou enthousiaste ou élevé, comme si l’on avait vu leurs pensées les plus secrètes. Si l’on veut leur faire du bien, en de pareils moments, il faut les faire rire ou bien leur glisser, en plaisantant, une froide méchanceté : — leur sentiment s’y glace et elles sont de nouveau maîtresses d’elles-mêmes. Mais je donne la morale avant l’histoire. — Nous avons une fois été si près l’un de l’autre, dans la vie, que rien ne semblait plus entraver notre amitié et notre fraternité et qu’il n’y avait plus entre nous qu’un petit passage. Au moment où tu voulus t’y engager, je t’ai demandé : « Veux-tu prendre le passage pour venir auprès de moi ? » — Mais alors tu changeas d’avis et, lorsque je t’en ai prié encore une fois, tu ne me répondis rien. Depuis lors des montagnes et des fleuves et tout ce qui peut séparer et rendre étranger s’est précipité entre nous, et, si nous voulions nous rejoindre, nous ne le pourrions plus. Mais lorsque tu songes maintenant à ce petit passage, tu ne trouves plus de paroles, — il ne te vient que des sanglots et de l’étonnement.

Le Gai Savoir

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