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NOTICE SUR SCHILLER

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Schiller naquit en 1759, à Marbach, en Würtemberg, et mourut le 9 mai 1805 à Weimar. Parmi ses biographies, celle de Scherr, Schiller und seine Zeit, est une des meilleures1. Quelle différence, entre sa vie et celle de Gœthe, son émule et son ami! Mais toutes les difficultés accumulées devant lui, loin d'arrêter son génie, en hâtèrent l'essor. Le duc de Würtemberg eut beau le forcer à se faire chirurgien militaire; il eut beau lui défendre de s'occuper de philosophie et de poésie: Schiller persévéra. «Chassez le naturel, il revient au galop.»

Le jeune poëte s'enfuit de son pays pour échapper à son tyrannique protecteur. Déjà il s'était fait mettre aux arrêts pour être allé assister à Mannheim à la représentation de ses Brigands (1781). Ses autres tragédies sont la Conjuration de Fiesque, Intrigue et Amour, Don Carlos, la Trilogie de Wallenstein, Marie Stuart, la Pucelle d'Orléans, et son chef-d'œuvre Guillaume Tell. Sa première pièce fit une sensation prodigieuse en Allemagne; plus d'un jeune homme, voulant en imiter le héros, Charles Moor, déclara comme lui la guerre à la société existante et alla vivre dans les forêts. Mais plus se calmait en Schiller le feu de la jeunesse, plus son goût et son génie s'épurèrent. Ne pouvant analyser ici ses œuvres dramatiques, nous renverrons nos élèves à l'Allemagne de Mme de Stael2, aux traductions en vers français de M. Braun, et à la thèse que notre regrettable ami, M. Blanchet3, ancien élève de l'École normale, professeur de rhétorique au lycée de Strasbourg, a soutenue, en 1855, devant la Faculté des lettres de Paris: il y a développé cette pensée de M. Saint-Marc Girardin4, qu'il a prise pour épigraphe de son opuscule: «Schiller est, selon moi, le plus dramatique de tous les poëtes allemands. Cependant, ses drames ont besoin d'un commentaire, parce qu'ils renferment toujours quelque pensée profonde que le poëte a voulu mettre en relief.»

Schiller n'est pas placé moins haut comme poëte lyrique. Mais à ses poésies lyriques aussi on peut appliquer ce que M. Saint-Marc Girardin a dit de ses drames; il ne sait pas, comme Gœthe, dans le Pêcheur, dans le Roi de Thulé, reproduire le ton simple de la vieille ballade; sa poésie est savante, je dirais presque artificielle, pour me servir de la distinction si vraie, faite d'abord par Herder. On y voit le poëte, tandis que chez Gœthe il s'efface. Ce n'en sont pas moins d'admirables poëmes que la Cloche, le Plongeur, la Caution, Rodolphe de Habsbourg, les Grues d'Ibycus, l'Anneau de Polycrate, le Lot du poëte, Hector et Andromaque; pas une anthologie n'omet de les citer.

En philosophie, Schiller est élève de Kant. Il passa plusieurs années à se pénétrer des doctrines si élevées de la Critique de la raison pure et de la Critique du jugement; ce dernier ouvrage renferme l'esthétique du philosophe de Kœnigsberg. C'est dans ces études évidemment qu'il faut chercher l'origine du caractère philosophique de toutes ses œuvres. Il appliqua surtout les principes de son illustre maître dans ses Lettres sur l'éducation esthétique de l'homme.

Schiller fut quelque temps professeur d'histoire à Iéna. De là ses travaux historiques5. Pourtant il s'y livrait encore dans un autre but; c'étaient souvent des études préliminaires pour ses tragédies. Les chœurs de la Fiancée de Messine, la traduction métrique du deuxième livre de l'Énéide et celle de la Phèdre de Racine, prouvent à quel point il avait saisi les beautés des chœurs grecs, celles de Virgile et de notre grand tragique. Dans les vers lyriques de la Fiancée respire le souffle de Sophocle et d'Eschyle.

Comme Klopstock, l'auteur de la Messiade, Schiller, en 1792, fut nommé citoyen français par l'Assemblée nationale. Mais le diplôme, portant cette suscription: Au sieur Gille, publiciste allemand, ne lui parvint qu'en 1798.

1

Leipzig, chez Wigand, 1859.

2

Chapitres XVII à XX de la seconde partie.

3

Mort, à trente-huit ans, en 1861. Auteur d'une excellente étude sur le Faust de Gœthe.

4

Cours de littérature dramatique, 20.

5

Nous citons plus loin les deux principaux.

Histoire de la Guerre de Trente Ans

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