Читать книгу L'Océan De Tes Yeux Bleus - Gabriella Rose - Страница 7
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Pardonne-moi.
Je ne devrais jamais t’écrire comme ça, dans ce geste égoïste qui ne sert à rien, mais ici je suis en train de devenir folle. Les journées avancent à la vitesse d’un escargot et je n’ai rien d’autre à faire qu’étouffer (il fait une chaleur atroce et personne n’ouvre jamais de fenêtre) en fixant à travers la vitre du salon la vie de la rue, frénétique, indifférente et toujours pareille.
En réalité, pour la première fois aujourd’hui, il s’est passé quelque chose : deux jeunes se sont embrassés, juste devant la porte de l’hôpital. Je les ai aperçus de loin, au moment où je buvais ma camomille du matin sans sucre et sans goût.
J’ai senti une brûlure au fond de moi : ils ne pouvaient pas trouver un autre endroit que l’hôpital public de Milan pour se bécoter ? Là-dedans chaque instant qui passe nous rapproche de plus en plus de notre fin, nous n’avons vraiment pas besoin qu’on nous rappelle que nous ne pourrons plus jamais être heureux, que personne ne nous prendra plus jamais dans ses bras en éprouvant autre chose que du dégoût, de la pitié et de la peur !
Et puis j’ai pensé que j’étais bête : peut-être que m’était donnée la possibilité de me souvenir de nous deux. Toi et moi, cet été magique. Tout revivre.
Et ainsi, entre les examens et les visites des médecins, au milieu du va-et-vient des assistants et des patients, en cherchant tous les jours de nouvelles tactiques pour soulager la douleur, j’ai pensé que... ce serait beau de me souvenir de toi.
Les mots qui courent sur le cahier blanc que m’a apporté ma douce Jameia me rapprochent un peu de toi (tu te souviens, j’avais toujours rêvé d’écrire un livre); ils me donnent la sensation que d’une certaine façon un peu fantastique, tu pourrais les lire, peut-être en t’endormant le soir sur ton canapé, épuisé par ton travail, et pendant que tu rêves mes mots pourraient venir à toi, de petites mouettes solitaires dont les ailes mouillées rafraîchiraient délicatement tes tempes.
Grâce à ces mots, un peu confus, fatigués, illogiques, maladroits, peut-être qu’un jour tu apprendras que quelque part il y a eu une fille dont l’unique et ultime désir aurait été de t’étreindre à nouveau.