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PRÉFACE
ОглавлениеDans les contrées encore sauvages qui bordent le fleuve géant du Mechescebé, pays où la civilisation est encore à peu pès inconnue, on rencontre des hommes aux. mœurs grossières, au caractère audacieux, qui ne reculent devant aucun crime, lorsqu’il s’agit d’arriver à leur but, celui de derenir riches,
La facilité de fuir dans les prairies indiennes et de se lérober ainsi à la justice des hommes, en admettant qu’elle ixiste aux États-Unis où presque tous les crimes se rachèent avec de l’argent, a fait choisir aux forbans de tous les pays les rives fangeuses du Père de Eaux pour théâtre de leurs exploits.
Il y a peu d’années encore, avant l’époque où les bateaux a vapeur sillonnaient le Mississipi, le commerce de l’intérieur des États riverains se faisait seulement à l’aide de bateaux plats nommés arches de Noé par les Américains, le quelques vastes chaloupes, de schooners et de brigs.
Il ne fallait pas songer alors, pas plus qu’aujourd’hui, à Aventurer le long des rives du fleuve pour y conduire une harrette chargée de marchandises. On eût infailliblement léri dans les marécages et dans les fondrières qui s’ourent et se referment sous les pieds du voyageur. C’était donc par la navigation seulement que les commerçants des États-Unis et les fermiers pouvaient trouver un débouché i leurs produits et à leurs marchandises.
Il y a quelques années, une des villes du Mississipi, qu est de nos jours connue sous le no94, et que les navigateur appellent l’île Stak ou le Crow-Nest (le nid de corbeaux) servait de refuge à une bande de voleurs et de fabricants des billets de banque. Non-seulement ils faisaient le métie de pirates sur le grand chemin liquide du Mississipi mais encore ils se dispersaient dans le pays, et, à force d’échanger des faux billets avec le public, ils rapportaien dans leur caverne, abritée par une végétation luxuriante et impénétrable, une ample moisson de dollars et de marchandises.
Ces mécréants étaient parvenus, à l’aide de la corruption comme aussi par intimidation, à affilier à leur bande un certain nombre d’individus qui occupaient un rang et une position honorables dans les villes et les bourgades près desquelles ils résidaient. Il leur était donc facile de cachei leurs méfaits et d’échapper aux rigueurs de la loi, toutes les fois qu’ils étaient surpris en flagrant délit, car le juge du comté, le shériff et le geôlier même faisaient partie de l’association et prêtaient la main à l’évasion des prévenus.
A deux reprises différentes pourtant le gouvernement de Washington s’émut de cet état de choses: ce fut en184C et en1847. Le succès des pirates, leur impunité les avaien rendus moins prudents; ils s’étaient ralentis dans leur système d’astuce. Il fut donc facile de découvrir ce nid d’ corbeaux, et, afin de faire un exemple, on en pendit envi ron une trentaine aux arbres du rivage témoins de le un exploits sanguinaires.
Malheureusement quelques-uns des plus audacieux bans dits étaient parvenus à s’échapper; ils se rassemblèrent dans e Texas, et là, ayant organisé une troupe recrutée parmi ous les mécréants du pays, il rentrèrent sur le territoire Américain et s’établirent dans l’île no61, dont il est quesion dans ce volume.
Quelque temps après, lorsque les crimes de cette nourelle association de brigands eurent jeté l’alarme dans les États mitoyens, les fermiers formèrent entre eux une ligue, afin de se rendre justice eux-mêmes, puisque les juges des : omtés étaient ou trop faibles ou trop impuissants pour détruire le mal. Les Régulateurs procédaient à l’aide de cette condamnation expéditive que l’on appelle la loi de Lynch, c’est-à-dire qu’à l’exemple du premier fondateur de cette justice sommaire, un nommé Lynch, dès qu’on s’était emparé d’un voleur, on lui donnait un quart d’heure pour se réconcilier avec Dieu, si cela était possible, puis on le lançait dans l’éternité, à l’aide d’une corde de chanvre ou d’une lanière de cuir. Le premier venu remplissait l’office de trois Échelles, autrement dit du bourreau, et on se faisait une gloire, parmi les Régulateurs, d’avoir pendu un, deux, trois, six ou dix individus et même davantage.
La ligue des fermiers parvint ainsi à s’emparer des habitants de l’île no61et surtout du célèbre John Murray, le chef de ces terribles pirates, qui fut conduit à Saint-Louis, jugé sérieusement, condamné à la potence par des juges incorruptibles (à qui probablement on n’offrit pas assez d’argent pour les acheter); et enfin exécuté dans la prison de la ville.
Les complices de Murray n’étaient point venus visiter l’a geôle de Saint-Louis: les Régulateurs croyant plus prudent de se rendre justice eux-mêmes, les avaient tous appendus, les uns aux arbres de l’île no61les autres à des pote aux dressés à cet effet sur les quais d’Héléna, de Memphis, d Fourche-la-Fave, et des autres villages bâtis sur les bords du Mississipi.
De nos jours encore, il paraît que les pirates américain ont reparu sur les eaux du fleuve majestueux. Il y a six mois à peine, les journaux des États-Unis mentionnaient les crimes de forbans dont l’asile était encore inconnu, et l’on citait surtout le nombre incalculable de faux billets de banque répandus dans tous les États de l’Ouest. Là s’arrêtent les documents qui sont parvenus en mes mains.
Cet avant-propos m’a paru nécessaire pour initier le lecteur à l’étrange étude de mœurs que je lui offre aujourd’hui. L’auteur de cet ouvrage, M. Frédérick Gafstaëoker, est un Allemand de Gobourg qui a déjà produit plusieurs ouvrages parmi lesquels je citerai: Un voyage dans le Far-West, un autre roman dont l’action se passe en Australie, intitulé: Les deux convicts, et deux autres volumes dont le titre est: La flèche empennèe et La vie d’un matelot; qui tous quatre sont devenus nôtre propriété par le bon Vouloir de notre: nouvel ami. L’imagination de Gerstaëéker ne lui fait jamais défaut, et son nom marquera bientôt dans la littérature européenne, car l’auteur des Pirates du Mississipi, une fois-connu en France, deviendra infailliblement un des romanciers les plus populaires de notre époque.
BÉNÉDICT H. RÉVOIL
Paris, 15septembre1857.