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INTRODUCTION. PROPRIÉTÉS DES FONCTIONS .

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Table des matières

1. Les deux espèces de points de discontinuité. — Parmi les discontinuités que peut présenter une fonction f(x), d’une seule variable réelle, il y a lieu de distinguer un mode simple de discontinuité qui se rencontrera souvent dans la suite.

x0 est point de discontinuité de première espèce pour f(x) si, quand x croit vers x0, f(x) tend vers une limite bien déterminée qu’on notera, avec Dirichlet, f(x0 – 0) et si, quand x décroit vers x0, f(x) a une limite qu’on notera f(x0+ 0) .

La propriété essentielle des points de discontinuité de première espèce est d’être toujours comparables entre eux; j’entends par là que, si ϕ a, en x0, un point de discontinuité de première espèce pour lequel ϕ(x0+0) et ϕ(x0 – 0) diffèrent, quelle que soit f, admettant aussi x0 comme point de discontinuité de première espèce, on pourra toujours trouver la constante K de manière que pour F= f+ Kϕ on ait F(x0+0)=F(x0 – 0). C’est-à-dire que, au point x0, il ne subsiste plus qu’une discontinuité en quelque sorte artificielle. Rien de pareil n’existe pour les autres points de discontinuité qu’on appelle points de discontinuité de seconde espèce.

Cette propriété permet, dans certains cas, de conclure pour tous les points de première espèce en s’appuyant sur l’étude d’un point de première espèce particulier (n° 31).

2. Points réguliers. — Nous dirons que x0 est un point régulier pour f si f(x0 + 0) et f (x0 – 0) existent et sont tels que

f(x0+0) + f(x0 — 0) = 2f (x0);

tous les points de continuité sont des points réguliers.

Tous les points réguliers sont comparables au sens du numéro précédent; la discontinuité artificielle dont il a été parlé n’existe même plus. La propriété de ces points qui nous servira le plus est la suivante: la fonction ϕ(t) définie par l’égalité

ϕ(t) =ƒ (x0+2t) + f (x0—2t) — 2f(x0),

est continue pour t = 0.

3. Fonctions monotones; conditions de Dirichlet. — On dit que f(x) est une fonction partout non décroissante ou, plus brièvement, que f(x) est une fonction croissante si, quels que soient x, et x2, on a

(x1 — x2) [ƒ(x1) — f(x2)] ≧0.

f(x) ne décroissant jamais, quand x croît, et ne croissant jamais quand x décroît, f(x0+ 0) et f(x0 — 0) existent toujours; une fonction croissante n’a donc jamais de points de discontinuité de seconde espèce. Ses points de discontinuité forment d’ailleurs toujours un ensemble dénombrable, car, si l’on a

a < x1 < x2 <... <xn< b,

on a aussi


et cela montre que les points en lesquels la différence

f(x+0) — f(x — 0)

surpasse ε sont, quel que soit ε> 0, en nombre fini.

Les fonctions décroissantes, qu’on obtient en changeant x en — x dans les fonctions croissantes, jouissent évidemment de propriétés analogues. Les fonctions croissantes et décroissantes constituent l’ensemble des fonctions monotones.

On dit qu’une fonction bornée satisfait aux conditions de Dirichlet si elle n’a qu’un nombre fini de points de discontinuité dans l’intervalle (a, b) qu’on considère et si cet intervalle peut être partagé en un nombre fini d’intervalles partiels dans chacun desquels la fonction est monotone. Une telle fonction n’a évidemment que des points de discontinuité de première espèce.

4. Fonctions à variation bornée. — M. Jordan a appelé ainsi toutes les fonctions bornées qu’on peut obtenir en faisant la somme d’une fonction croissante et d’une fonction décroissante ou, si l’on veut, en faisant la différence de deux fonctions croissantes.

Une telle fonction n’a tout au plus qu’une infinité dénombrable de points de discontinuité, qui sont de première espèce, et l’on peut remarquer qu’il suffit de modifier la fonction tout au plus en ses points de discontinuité pour que tous ses points soient réguliers.

On peut encore dire qu’une fonction f est à variation bornée si elle varie moins vite qu’une fonction croissante bornée, entendant par là qu’il existe une fonction croissante bornée F telle que l’on ait toujours, pour h > 0,


Si, en effet, cette condition est remplie, f est la différence des deux fonctions croissantes F et F — f, et d’autre part, si f est la différence des deux fonctions croissantes ϕ et ψ, elle croît moins vite que ϕ + ψ. Cette seconde définition est souvent commode, elle montre en particulier qu’une fonction satisfaisant aux conditions de Dirichlet est à variation bornée.

f étant à variation bornée, on peut, d’une infinité de manières, écrire, pour x > a,

f(x) = f(a) + P (x) — N (x),

P (x) et N (x) étant deux fonctions non négatives et croissantes. Soient p(x) et n(x) les limites inférieures, pour x donné, des valeurs de P(x) et N(x); on a évidemment

f(x) = f(a)+p(x) — n(x);

p(x) et n(x) sont les plus petites fonctions P(x) et N(x).

Ces quantités p(x) et n(x) s’appellent les variations totales positive et négative de f dans (a, x); v(x) = p (x) + n (x) est la variation totale de f dans (a, x); elle est au plus égale à F (x) — F (a).

Il est évident que les deux différences p (x0) — p (x0 — 0) et n(x0) — n(x0 — 0) ne peuvent être différentes de 0 en même temps, sans quoi, en appelant d la plus petite des deux, les fonctions p1 (x) et n1 (x), égales à p(x) et n(X) pour x<x0 et à p (x) — d, n(x) — d pour x ≧ x0, seraient des fonctions P et N plus petites que p et n. De même les différences p [x0 + 0) — p (x0), n(x0+0)—n(x0) ne peuvent différer de 0 en même temps et, comme ces différences sont égales deux à deux quand x0 est point de continuité pour f, on en déduit que, pour un tel point, p(x), n(x) et v(x) sont continues.

Il est facile de voir que la somme, la différence, le produit de deux fonctions à variation bornée est à variation bornée; cela est vrai aussi pour le quotient de deux fonctions pourvu que le module du dénominateur ne descende pas au-dessous d’une certaine limite différente de zéro. J’examine seulement le cas du produit; en conservant les notations précédentes et en affectant de l’indice 1 les quantités relatives à une seconde fonction, on a

ff1= [f(a) + p — n] [f1(a) + p1 — n1 ]

= pp1 + nn1 + p1f(a) + pf1 (a) — [pn1 + np1 + n1 f(a) + nf1 (a)], +f(a) f1(a)

ce qui démontre la propriété et fait voir en même temps que la variation totale du produit est au plus égale à

[v + | f(a) |] [v1 + |f1 (a) |]

C’est une expression qui nous servira plus loin; mais nous y remplacerons l’origine a de (a, x) par l’extrémité x, ce qui est évidemment permis .

5. Nombres dérivés. — On appelle nombres dérivés de la fonction continue f au point x, les plus petites et plus grandes limites vers lesquelles tendent le rapport , quand on fait tendre h vers zéro positivement d’une part, négativement d’autre part. Ainsi, en chaque point, une fonction continue a quatre nombres dérivés finis ou non. Lorsque ces quatre nombres sont finis et égaux, f(x) a une dérivée, au sens ordinaire, égale à ces nombres dérivés.

Les fonctions ƒ, qui satisfont à la condition, si connue dans la théorie des équations différentielles sous le nom de condition de Lipschitz, qui s’exprime par l’inégalité

|f(x+h) — f(x)| < k | h |,

où k est une constante, ont évidemment leurs nombres dérivés bornés; la réciproque est vraie .

6. Dérivée seconde généralisée. Théorème de M. Schwarz. — D’autres généralisations de la notion de dérivée pourraient être utiles. C’est ainsi que, pour le n° 37, il y aurait avantage à définir la dérivée de f en x par la considération du rapport au lieu du rapport ordinaire; cela conduit à une définition de la dérivée, qui comprend la définition classique comme cas particulier, mais qui est plus générale puisque, par exemple, elle conduit à attribuer une dérivée nulle à pour x = 0. Je n’insiste pas sur ce point et j’indique une généralisation plus importante.

La dérivée première est définie comme la limite du rapport de la différence première de f à l’accroissement de la variable; considérons maintenant le rapport de la différence seconde de f au carré de l’accroissement de la variable. Ce rapport s’écrit :


Quand la dérivée seconde ordinaire existe, elle est la limite du rapport précédent, pour h = 0; mais il se peut que cette dérivée seconde n’existe pas et que la limite existe. Ce serait le cas, pour x= 0, si f était une fonction continue sans dérivée première telle que f(h) = — f( — h). On convient d’appeler dérivée seconde généralisée la limite de , toutes les fois qu’elle existe. Remarquons que cette dérivée seconde généralisée est, d’après la première forme du rapport , positive ou nulle en tout point x où f est maximum; cela va nous servir à démontrer une propriété analogue au théorème des accroissements finis: si la fonction f a en tout point une dérivée seconde généralisée ϕ, la quantité est comprise entre les limites inférieure et supérieure de ϕ dans (x0 — h, x0 + h).

Il suffira, par exemple, de démontrer que ne surpasse pas la limite supérieure de ϕ. Posons


la fonction continue λ(x) = f(x) — ψ(x) s’annule pour x0 — h, x0, x0+ h, donc elle atteint son maximum pour une valeur x1 intérieure à (x0 — h, x0 + h); x1 pourra, d’ailleurs, égaler x0. La dérivée seconde d’un trinome du second degré étant constante, on a


d’où


d’après notre remarque la limite du second membre, pour k = 0, est au moins , donc on a


Le théorème est démontré.

Supposons, en particulier, que ϕ soit constamment nulle; alors Δ2f(x0) est constamment nulle. Quels que soient x, x1, h, on a donc


C’est dire que les deux différences f(x1 + h) — f (x1) et f(x+h) — f(x) sont égales ou, en d’autres termes, que f(x) s’accroît de quantités égales quand la variable s’accroît toujours de la même quantité. D’après un raisonnement bien connu et qu’on développe ordinairement à l’occasion du mouvement uniforme on doit conclure de là que f est une fonction linéaire. D’où le théorème de M. Schwarz: les seules fonctions continues qui ont une dérivée seconde généralisée constamment nulle sont les fonctions linéaires. La dérivée d’une différence étant la différence des dérivées, on peut encore dire: deux fonctions continues dont les dérivées secondes généralisées sont partout finies et égales ne diffèrent que par une fonction linéaire. Cela fixe le degré d’indétermination du problème qui consiste à chercher une fonction connaissant sa dérivée seconde généralisée; ce problème sera étudié au Chapitre V.

7. Ensembles de points. — C’est à l’occasion de la théorie des séries trigonométriques (voir n° 61) que M. G. Cantor a commencé l’étude des ensembles de points. Je me contenterai de rappeler ici un certain nombre des définitions posées par M. Cantor, renvoyant pour une étude plus complète à la Note qui termine mes Leçons sur l’Intégration.

Un point P est point limite de l’ensemble E si tout domaine , contenant P à son intérieur, contient aussi des points de E. L’ensemble des points limites de E constitue le dérivé E′ de E. Le dérivé E″ de E′ est le second dérivé de E. On forme ainsi une suite finie ou même transfinie de dérivés. Si l’un d’eux ne contient aucun point, E est dit réductible.

8. Ensembles mesurables; fonctions mesurables . — Appelons intervalle les domaines spéciaux obtenus en assujettissant chacune des coordonnées à une inégalité telle que ai<xi<bi. La mesure d’un tel intervalle, les axes étant rectangulaires, est par définition le produit des différences (bi — ai).

Soit E un ensemble de points tous contenus à l’intérieur d’un intervalle 1. Enfermons les points de E dans une infinité dénombrable d’intervalles i et soit α la limite inférieure de la somme des mesures des i quand on choisit ces intervalles de toutes les manières possibles. Soit β la limite analogue relative à l’ensemble des points de I ne faisant pas partie de E. Si α + β est égale à la mesure de I, E est dit mesurable et sa mesure est égale à α. La mesure d’un ensemble ne dépend ni des axes de coordonnées ni, ce qui est la même chose, de la position de l’ensemble par rapport à ces axes.

L’ensemble somme de E et de E1, c’est-à-dire celui qui est formé à l’aide des points de E et de E1, est mesurable si E et E1 le sont. La mesure de E+ E1 est la somme des mesures de E et de E,, si E et E, n’ont pas de point commun. Ce théorème s’étend à la somme d’un nombre fini quelconque d’ensembles et même à la somme d’une infinité dénombrable d’ensembles.

Si l’on considère les ensembles mesurables E1, E2,... en nombre fini ou dénombrable, l’ensemble εdes points appartenant à la fois à tous les Ei est aussi dénombrable; sa mesure est la limite inférieure des mesures des Ei dans le cas particulier où chaque ensemble Ei contient les ensembles d’indices plus grands, Ei+1, Ei+2,....

A l’aide de ces énoncés on s’assurera facilement que tous les ensembles actuellement connus sont mesurables.

On dit qu’une fonction f d’une ou plusieurs variables, définie dans un certain intervalle, est mesurable si, quels que soient a et b, l’ensemble des points pour lesquels on a a < f < b est mesurable. Les fonctions continues sont évidemment mesurables, puisque, pour les fonctions continues, les ensembles considérés peuvent être obtenus en formant des sommes d’intervalles. De même, les fonctions croissantes sont mesurables, donc les fonctions à variation bornée le sont aussi, car la somme et le produit de deux fonctions mesurables sont des fonctions mesurables; la limite d’une suite de fonctions mesurables est mesurable. Démontrons, par exemple, cette dernière propriété ; soit f la limite des fonctions mesurables f1, f2,.... Désignons par En l’ensemble des points en lesquels on a a <fn < b; En est mesurable. Soit En l’ensemble, mesurable, des points communs à En, En+1, En+2,.... Soit enfin E la somme E1 + E2 +...: il est évident que E est mesurable, et c’est l’ensemble des points en lesquels on a a <f< b.

De là résulte, en particulier, qu’une série trigonométrique convergente ne peut représenter qu’une fonction mesurable; d’ailleurs, toutes les fonctions actuellement connues sont mesurables.

9. Théorème sur la convergence des séries. — Soit une suite f1, f2,... de fonctions mesurables, l’ensemble des points où elle converge est mesurable. On obtient, en effet, cet ensemble £ par le procédé suivant. On forme les ensembles En,p,N à l’aide des points en lesquels on a |fn — fn+p | < ; on prend les points communs à tous les ensembles En,P,N, ayant les mêmes indices n et N, ils forment un ensemble En,N; on forme les sommes EN de tous les ensembles En,N ayant N pour second indice; on prend enfin l’ensemble ε des points communs à tous les EN, où N est entier. Tous les En,P,N, En,N, EN, Ɛ sont mesurables.

Ceci posé, soient ep l’ensemble mesurable des points en lesquels on a |fP — f| < ε et ƐP l’ensemble mesurable des points communs à ep, ep+1,.... L’ensemble mesurable Ɛ1 + (Ɛ2 — Ɛ1) +(Ɛ3 — Ɛ2)+.... contient Ɛ, il est formé d’ensembles sans point commun, donc, en prenant dans la série précédente un nombre n, suffisamment grand de termes, on a un ensemble somme (qui n’est autre que £p) dont la mesure est au moins égale à celle de Ɛ.

De ce raisonnement général tirons deux énoncés particuliers qu’on utilisera plus loin . Pour cela remarquons que f est la somme de la série convergente f1 + (f2 — f1) +....

Pour les points de Ɛn tous les restes de cette série, à partir du nième, sont inférieurs en valeur absolue à ε, et tous les termes, à partir du nième, sont inférieurs en valeur absolue à 2ε. Donc: si une série de fonctions mesurables converge en tous les points d’un intervalle, les points de cet intervalle pour lesquels l’un des restes, à partir du nième, n’est pas inférieur à ε > 0, en valeur absolue, est de mesure aussi petite que l’on veut, à condition de prendre n assez grand; ou encore: Soit Γn l’ensemble des points en lesquels le nième terme d’une série de fonctions mesurables ne surpasse pas, en valeur absolue, un nombre positif 2ε ; s’il existe une infinité d’ensembles Γn dont la mesure ne surpasse pas η, on peut affirmer que la mesure de l’ensemble des points de convergence est au plus égale à η.

10. Définition, de l’intégrale. — Soit f une fonction mesurable; divisons l’intervalle à une dimension ( — ∞, + ∞) en une infinité dénombrable d’intervalles partiels à l’aide de nombres croissants li (i= 0, 1, 2,... d’une part, — 1, — 2,... d’autre part), tels que li+1 — li ne surpasse jamais η. Soit ei la mesure de l’ensemble des points en lesquels on a

li≦ ƒ<li+1 ;

formons la série infinie dans les deux sens


En général, cette série ne sera pas absolument convergente, mais elle le sera toutes les fois que f sera bornée, puisque la série se réduit alors à une suite finie; elle sera aussi convergente pour certaines fonctions non bornées. A toutes ces fonctions on donne le nom de fonctions sommables; toute fonction mesurable bornée est sommable.

Supposons f sommable et intercalons entre les li d’autres nombres; la série A sera remplacée par une série analogue A,, qu’on vérifiera facilement être absolument convergente, plus grande que A et, plus petite que A + η × mesure de I = B. Opérant encore de même on trouve A2 au moins égale à A1, au plus égale à B. En continuant ainsi, de manière à faire tendre vers zéro les nombres analogues à η, on a une suite de nombres A, A,, A2,... non décroissants qui tendent vers une limite au plus égale à B; cette limite est appelée l’intégrale de f dans I.

Par le raisonnement classique on vérifie que cette intégrale est indépendante des nombres li choisis. Pour le développement de la démonstration, je renverrai à mes Leçons sur l’Intégration déjà citées; on y trouvera aussi les démonstrations d’un certain nombre de propriétés qui seront utilisées dans la suite et que je vais énoncer.

La définition de l’intégrale qui vient d’être donnée, et qui est la seule adoptée dans la suite, est plus générale que celle à l’aide de laquelle Riemann définit l’intégrale des fonctions bornées. Toutes les fonctions intégrables au sens de Riemann sont sommables et la définition ci-dessus indiquée conduit à leur attribuer la même intégrale que la définition de Riemann.

La définition classique, que nous n’adoptons pas ici, conduit à attribuer à une fonction f(x) non bornée autour de x = 0, et autour de ce point seulement, une intégrale dans (0, 1) égale à la limite, si elle existe, de l’intégrale dans (ε2, 1), quand ε tend vers zéro. Il importe de remarquer que cette définition peut s’appliquer sans que la définition adoptée ici s’applique; la fonction en est un exemple. Avec la définition adoptée, si ƒ(x) a une intégrale, |ƒ(x)| en a une aussi, ce qui n’est pas vrai nécessairement avec la définition classique ; plus généralement, si f est sommable, et si ϕ est sommable et bornée, fϕ est sommable. Cela nous permettra d’affirmer que f cos p x et f sin p x sont sommables dès que f l’est.

On démontre aussi que f + ϕ est sommable quand f et ϕ le sont, et que l’intégrale de la somme est la somme des intégrales. Nous utiliserons aussi ce fait que le domaine d’intégration peut être divisé en autant de domaines partiels que l’on veut, à condition de faire la somme des intégrales étendues à ces domaines. On peut même diviser le domaine en ensembles mesurables et faire la somme des intégrales étendues à chacun de ces ensembles, en entendant par intégrale de f dans l’ensemble E l’intégrale de la fonction ϕ égale à f pour les points de E et nulle pour les autres points.

Ce sont les intégrales qui viennent d’être définies que je désignerai par les notations classiques


Relativement aux intégrales multiples, il est utile aussi de savoir qu’on peut les calculer à l’aide d’intégrales simples successives, comme s’il s’agissait de fonctions continues, toutes les fois que les intégrales simples auxquelles on est conduit existent, ce qui arrive, en particulier, toutes les fois qu’il s’agit d’une fonction bornée représentable par une série de fonctions continues, et c’est le seul cas que nous rencontrerons .

11. Propriétés de l’intégrale indéfinie. — Je n’ai pas énoncé toutes les propriétés de l’intégrale qui seront employées; celles que j’ai indiquées suffiront à montrer combien l’intégrale des fonctions sommables se rapproche de l’intégrale des fonctions continues. Voici maintenant quelques propriétés fondamentales de l’intégrale indéfinie d’une fonction sommable f d’une seule variable x.

On appelle ainsi la quantité ; cette fonction de x est continue; de plus, comme elle croît moins vite que la fonction croissante |ƒ|dx, elle est à variation bornée, et nous avons une limite supérieure de sa variation totale (n° 4).

Une autre propriété fondamentale est la suivante: f est la dérivée de son intégrale indéfinie en tous les points, sauf, tout au plus, pour ceux d’un ensemble de mesure nulle (§ VI, Chap. VIII, de mes Leçons sur l’Intégration); complétons ce résultat.

Les points où f(x) — a n’est pas la dérivée de son intégrale indéfinie forment un ensemble de mesure nulle E(α). Soit £ l’ensemble somme des E (x) correspondant aux α rationnels. Soient x0 une valeur n’appartenant pas à Ɛ, α un nombre irrationnel quelconque, β un nombre rationnel voisin de α. On a


d’où


Or, d’après nos hypothèses, le second terme du premier membre diffère de |f(x0) — β| de moins de ε pourvu que x soit pris dans un intervalle (x0 — h, x0+h) assez petit. Donc on a


et, puisque ε et β — α sont aussi petits que l’on veut, |f(x) — α| est pour x = x0 la dérivée de son intégrale indéfinie. Ainsi, sauf tout au plus quand x0 appartient à un ensemble Ɛ de mesure nulle, |f(x) — α| est, pour x = x0, la dérivée de son intégrale indéfinie, quel que soit α et, en particulier, pour α=f(x0).

On utilisera plus loin la formule d’intégration par parties:


dans laquelle U et V désignent des intégrales indéfinies de u et ν. On verrait en effet, en remplaçant U et V par les intégrales qu’elles représentent, que la formule précédente exprime seulement, dans un cas particulier, la possibilité de remplacer une intégrale multiple par des intégrales simples successives.

On admettra facilement aussi que si f(x) est compris constamment entre m et M on a, pour a < b,


si l’on applique cette égalité à (x, x + h) on voit que l’on a, pour l’intégrale indéfinie F de f,


De même, en intégrant F, on obtient telle que


12. Théorème sur l’intégration des séries. — Soit une suite convergeant dans un intervalle I vers une fonction f et formée de fonctions mesurables f1, f2,... toutes inférieures en valeur absolue à une constante K. Soit En l’ensemble des points de 1 en lesquels quelqu’une des différences | fn+p — f| est supérieure à e; soit en = I — En. On a


La première intégrale du second membre diffère de ff dx au en plus de ε multiplié par la mesure de en, donc au plus de ε i, i désignant la mesure de I. La seconde intégrale du second membre est inférieure en valeur absolue à K multiplié par la mesure mn de En et cela est vrai aussi de ∫En fdx. Donc on a


et, puisque mn tend vers zéro et que ε est aussi petit que l’on veut, il est démontré que, dans les conditions indiquées, l’intégrale de f est la limite de l’intégrale de fn.

Si l’on écrit, f = f1 + ( f2 — f1,) +... on a un théorème sur l’intégration des séries qui comprend, comme cas particulier, le théorème bien connu sur les séries uniformément convergentes.

Remarquons encore qu’il importerait peu que la suite ne tendît pas vers f pour les points d’un ensemble de mesure nulle ε, car, d’une part, il suffirait de faire rentrer les points de ε dans En et, d’autre part, quelles que soient les valeurs attribuées à f pour les points de ε, l’intégrale de f restera la même.

13. Théorème général sur les fonctions sommables. — Ce théorème va nous faire connaître une propriété de toutes les fonctions sommables qui, dans le cas particulier des fonctions continues, résulte immédiatement de la continuité uniforme. J’énonce ce théorème pour le cas d’une seule variable: Si f (x) est sommable, l’intégrale


tend vers zéro avec δ.

Remarquons que l’énoncé suppose f définie dans (α, γ) plus grand que (α, β) et qu’on doit prendre δ au plus égal à γ — β. Maintenant on a, f et f1 étant sommables,


d’où


Ceci posé, si l est assez grand, en appelant f1 la fonction égale à f pour |f| < l et à zéro pour |f| > l, sera plus petite que ε, d’où

J ( f, δ ) ≦ J (f1, δ) + 2ε,

et il suffit de démontrer le théorème pour la fonction bornée f1. Divisons ( — l, +l) en 2p parties égales et soit (λ prend les valeurs — p, — p + 1,..., p – 1, p) la fonction égale à f1 pour les points où l’on a et nulle ailleurs. Des formules du début, il résulte que l’on a


et comme, dès que p est assez grand, le second terme du second membre est aussi petit que l’on veut, il suffit de démontrer la propriété pour une fonction, telle que , ne prenant que deux valeurs 0 et A.

Soit ϕ une telle fonction ne prenant que les valeurs 0 et A. Soient E l’ensemble des points où ϕ diffère de zéro, ε un ensemble d’intervalles contenant E et dont la mesure ne diffère de celle de E que de η au plus; soit Ɛ1 un ensemble formé à l’aide d’un nombre fini des intervalles de ε et dont la mesure ne diffère de celle de Ɛ que de η au plus. Soient enfin Φ et Φ1 deux fonctions égales à A pour les points de Ɛ et Ɛ1 respectivement et nulles pour les autres points. Alors on a


d’où


et il suffit de démontrer le théorème pour Φ1. Mais Φ1 n’ayant qu’un nombre fini de points de discontinuité on peut trouver Φ2 continue et telle que soit inférieure à ε, alors on a a

J ( Φ1, δ) ≦ J (Φ2, ò) + 2ε ;

et, comme le théorème est vrai pour Φ2, la démonstration est achevée.

Leçons sur les séries trigonométriques : professées au Collège de France

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