Читать книгу Art du charbonnier - Henri-Louis Duhamel Du Monceau - Страница 3
AVERTISSEMENT
ОглавлениеL’OUVRAGE que nous présentons au Public, est le fruit d’un travail commencé depuis long-temps par l’Académie Royale des Sciences. Cette Compagnie étoit à peine formée qu’elle conçut le projet d’examiner&de décrire successivement toutes les opérations des Arts méchaniques, persuadée que cette entreprise pouvoit également contribuer à leur progrès à celui des Sciences.
SI LES ARTS nés dans l’obscurité,&lentement avancés de siecle en siècle par les tâtonnements de l’industrie, ont précédé de beaucoup l’établissement des Compagnies savantes; on ne peut s’empêcher de reconnoître qu’ils ont fait des progrès rapides dans les temps,&dans les Etats où les Sciences ont été cultivées avec plus de succès. On en fera bien-tôt convaincu si l’on veut comparer l’état présent de l’Horlogerie, de l’Artillerie, des Arts qui concernent la Navigation, de ceux qui fournissent les Instruments de Géométrie, d’Optique, d’Astronomie, de Chirurgie, enfin de plusieurs autres Arts relatifs aux travaux ordinaires des Académies, à l’état où ces mêmes Arts étoient il y a cent ans; on y verra des différences immenses qui ne sont point dûes au hazard, mais aux efforts que l’on a faits depuis cette époque pour perfectionner la Géométrie, la Méchanique, la Chymie, l’Optique, l’Anatomie, &c.
NE DOIT-ON PAS attendre de nouveaux degrés de perfection dans les Arts, lorsque des Savants exercés sur les différentes parties de la Physique se donneront la peine d’étudier&de développer les opérations souvent ingénieuses que l’Artiste exécute dans son attelier; lorsqu’ils verront par eux-mêmes les besoins de l’Art, les bornes où il s’arrête, les difficultés qui l’empêchent d’aller plus loin, les secours qu’on peut faire passer d’un Art dans un autre,&que l’Ouvrier est rarement à portée de connoître. Le Géometre, le Méchanicien, le Chymiste, donneront des vues à l’Artiste intelligent pour surmonter les obstacles qu’il n’a point osé franchir. Ils le mettront sur la voie pour inventer des nouveautés utiles; en même temps ils apprendront de lui quelles sont les parties de la théorie auxquelles il faudroit s’appliquer davantage pour éclairer la pratique,&pour assujettir à des réglés sûres, u un nombre d’opérations délicates qui dépendent de la justesse du coup d’œil, ou d’un tour de main,&dont la réussite n’est que trop souvent incertaine.
C’EST dans cette vue que l’Académie des Sciences dirigeant toujours ses travaux vers les choses utiles, avoit inspiré aux Membres qui la composent le desir de concourir à la description des Arts. Depuis le commencement de ce siecle, elle na pas cessé de rassembler des matériaux pour y parvenir; mais l’objet est immense,&ne peut être rempli que par la suite des temps. Feu M. de Réaumur avoit été chargé de recueillir un assez grand nombre de Mémoires déjà faits par plusieurs Académiciens, ainsi que d’autres envoyés des différentes Provinces de la France, ou des Pays Étrangers. Les Mémoires sur les Arts se sont multipliés; un grand nombre d’atteliers, d’opérations, de machines, d’instruments&d’outils, ont été dessinés &gravés fous un même format;&l’Académie possède à présent plus de deux cents Planches servant à leur description. L’Ouvrage seroit plus avancé, si plusieurs morceaux ne se trouvoient pas égarés.
HEUREUSEMENT il lui reste encore assez de matériaux pour fournir incessamment les descriptions complettes d’un grand nombre d’Arts: ces matériaux ont été distribués en1759, aux Académiciens, dont les études se sont portées principalement du côté de la Méchanique&de la Physique. En se chargeant d’achever les descriptions déjà commencées,&d’ajouter à celles qui ont été faites au commencement de ce siecle les nouvelles pratiques, les nouveaux procédés qui ont été inventés depuis,&qui sont à présent en usage, ils se feront un devoir de rendre justice à tous ceux qui les auront précédés ou secondés dans ce travail, en faisant honneur à chacun d’eux des Ouvrages qu’il aura fournis: ils profiteront avec reconnoissance des Mémoires qui pourront être envoyés déformais à l’Académie, concernant la description ou la perfection des Arts. Elle nous autorise même à déclarer de sa part, que son intention est de publier fous les noms de leurs Auteurs,&d’insérer en tout ou en partie dans la Collection qu’elle prépare les Ouvrages bien faits en ce genre qui lui feront présentés, soit par d’habiles Artistes, soit par des Savants étrangers, après qu’ils auront été examinés&approuvés dans la forme ordinaire; ainsi qu’elle a déja publié en différents temps, des recueils de Dissertations Mathématiques&Physiques, soumises à son jugement par des Savants étrangers ou régnicoles, lorsqu’elle a trouvé dans leurs Ouvrages des observations&des recherches capables de contribuer à l’avancement des Sciences.
L’ACADÉMIE ayant excité, par cette espèce d’adoption, l’émulation de ceux qui cultivent les Sciences, fans appartenir à aucun Corps Académique; elle a lieu d’espérer que les Citoyens versés dans la connoissance des Arts,&les Artistes du premier ordre, s’empresseront de concourir à la perfection des monuments qu’elle veut ériger à l’industrie humaine: la carrière est trop vaste pour ne pas l’ouvrir à tous ceux qui sont en état de s’y distinguer,&l’on ne peut employer à la fois trop de mains habiles pour accélérer l’exécution d’une entreprise qui peut être utile à notre siecle,&plus encore à ceux qui le suivront; c’est épargner à la postérité beaucoup de temps&de peine, si les Arts avoient encore à subir de ces grandes révolutions qui les ont autrefois presque anéantis.
IL SEROIT à souhaiter fans doute qu’on pût dès-à-présent réunir, soit en un seul, soit en plusieurs volumes les Arts qui ont entr’eux des relations prochaines, par exemple, tous les Arts qui façonnent le fer, ceux qui travaillent l’or&l’argent; ceux qui trament des tissus de toute espece: mais comme il feroit très-difficile de faire achever en même temps les descriptions propres à former des volumes complets&suivis, avec les enchaînements nécessaires, l’Académie, pour ne point mettre de nouveaux obstacles à la publication d’un Ouvrage long-temps attendu, se borne, quant à présent, à donner les desriptions des Arts par cahiers séparés, dont chacun contiendra le tableau complet d’un Art avec tous les détails nécessaires, représentés dans des planches gravés avec soin.
EN LES PUBLIANT ainsi séparément, on ménage aux Artistes la facilité de se procurer à peu de frais les Traités des Arts qu’ils exercent, ou de ceux qu’ils voudroient connoître, fans être obligés d’en acheter en même temps d’autres qui leur seroient moins nécessaires; c’est un moyen de les répandre davantage, sur-tout dans cette classe de Citoyens utiles auxquels ils sont principalement destinés.
LORSQUE l’Ouvrage fera suffisamment avancé, pour que l’on puisse penser à en former des suites, ceux qui se feront procurés les cahiers précédemment distribués, pourront, en rangeant les différents Arts selon l’enchaînement qu’ils ont entr’eux, former des Volumes, où ils feront maîtres de choisir l’ordre qui leur paroîtra le plus convenable.