Читать книгу André - Жорж Санд - Страница 7

VI

Оглавление

André avait un peu trop compté sur ses forces en se chargeant de demander le char à bancs et le cheval de son père. Il fit cette pénible réflexion en quittant, vers neuf heures, la famille Marteau, et son anxiété prit un caractère de plus en plus grave à mesure qu'il approchait du toit paternel; mais ce fut une bien autre consternation lorsqu'il trouva son père dans un de ses accès de mauvaise humeur des plus prononcés. Le plus beau de ses boeufs de travail était tombé malade en rentrant du pâturage, et le marquis, se promenant d'un air sombre dans la salle basse de son manoir, répétait d'une voix entrecoupée, en jetant des regards effarés sur son fils: «Des tranchées! des tranchées épouvantables!

– Hélas! mon père, êtes-vous malade? s'écria André, qui ne comprenait rien à son angoisse.

Le marquis haussa les épaules, et, lui tournant le dos, continua à marcher à grands pas.

André, n'osant renouveler sa question, resta fort troublé à sa place, suivant d'un oeil timide tous les mouvements de son père, qu'il croyait atteint de vives souffrances.

Enfin le marquis, s'arrêtant tout à coup, lui dit d'une voix brusque:

«Quel a été l'effet de la thériaque?»

André, rassuré, et comprenant à demi, courut vers la porte en disant qu'il allait le demander.

«Non, non, j'irai bien moi-même, reprit vivement le marquis; restez ici, vous n'êtes bon à rien, vous.»

André attendit pendant une heure le retour de son père, espérant trouver un moment plus favorable pour lui présenter sa demande; mais il attendit vainement. Le marquis passa la moitié de la nuit dans l'étable avec ses laboureurs, frictionnant le triste Vermeil (c'était le nom de l'animal) et lui administrant toute sorte de potions. André se hasarda plusieurs fois de s'informer de la santé du malade, et, partant, de l'humeur de son père; mais lorsque le malade commença à se trouver mieux, le marquis accablé de fatigue et gardant sur ses traits l'empreinte des soucis de la journée, ne songea plus qu'à se reposer. Il rencontra André sous le péristyle de la maison, et lui dit avec la rudesse accoutumée de son affection:

«Pourquoi n'êtes-vous pas couché, gringalet? est-ce qu'on a besoin de vous ici? Allons vite, que tout le monde dorme; je tombe de sommeil.»

C'était peut-être la meilleure occasion possible pour obtenir le cheval et le char à bancs; mais André avait l'enfantillage de souffrir des mots grossiers ou communs que lui adressait souvent son père, et il prenait alors une sorte d'humeur qui le réduisait au silence. Il alla se coucher en proie aux plus vives agitations. Le lendemain devait être à ses yeux le jour le plus important de sa vie, et pourtant sans le cheval et le char à bancs tout était manqué, perdu sans retour. Il ne put dormir. Il fallait partir le lendemain avant le jour; comment oserait-il aller trouver son père au milieu de son sommeil, affronter ce réveil en sursaut, si fâcheux chez les hommes replets, s'exposer peut-être à un refus? Cette dernière pensée fit frémir André. «Ah! plutôt mourir victime de sa colère, s'écria-t-il, que de manquer à ma parole et perdre le bonheur de passer un jour auprès de Geneviève!»

André

Подняться наверх