Читать книгу Les voyageurs du XIXe siècle - Jules Verne - Страница 7
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Carte du Missouri.
Le détachement suivit donc cette branche, profondément enfoncée au milieu des montagnes, et qui, sur un parcours de trois ou quatre milles, se précipite entre deux murailles perpendiculaires de rochers. Le courant se divisait enfin en trois branches, qui reçurent les noms de Jefferson, Madison et Gallatin, célèbres hommes d'État américains.
Guerrier javanais.
(Fac-simile. Gravure ancienne.)
Bientôt les dernières rampes furent franchies, et l'expédition descendit le versant qui regarde l'océan Pacifique. Les Américains avaient amené avec eux une femme Sohsonée, enlevée dès sa jeunesse par des Indiens de l'Est; non seulement elle leur servit très fidèlement d'interprète, mais, dans le chef d'une tribu qui manifestait des intentions hostiles, elle reconnut son frère, et dès ce jour les étrangers furent traités avec une extrême bienveillance. Par malheur, le pays était pauvre, les habitants ne se nourrissaient que de baies sauvages, de l'écorce des arbres et d'animaux quand ils pouvaient s'en procurer, ce qui était rare.
Les Américains, peu habitués à cette nourriture frugale, durent, pour se soutenir, manger leurs chevaux, pourtant bien amaigris, et acheter aux naturels tous les chiens que ceux-ci consentirent à leur vendre. Ils en reçurent même le surnom de «Mangeurs de chiens.»
Avec la température, la nature des habitants s'adoucissait, les vivres devenaient plus abondants, et, lorsque l'on descendit l'Orégon, qui porte aussi le nom de Colombia, la pêche des saumons vint apporter à propos un supplément de vivres. Lorsque la Colombia, au cours dangereux, s'approche de la mer, elle forme un estuaire très vaste, dans lequel les lames, venues du large, luttent contre le courant de la rivière. Les Américains, avec leur frêle canot, y coururent plus d'une fois le risque d'être engloutis, avant d'avoir atteint le littoral de l'Océan.
Heureux d'avoir rempli le but de leur mission, ils hivernèrent en cet endroit, et, lorsque les beaux jours furent revenus, ils reprirent le chemin de Saint-Louis, où ils arrivèrent au mois de mai 1806, après une absence de deux ans quatre mois et dix jours. Ils avaient calculé qu'ils n'avaient pas fait moins de 1,378 lieues depuis Saint-Louis jusqu'à l'embouchure de l'Orégon.
L'élan était donné. Bientôt les expéditions de reconnaissance vont se succéder dans l'intérieur du nouveau continent et prendre, un peu plus tard, un caractère scientifique tout particulier, qui les classe à part dans l'histoire des découvertes.
Quelques années après, un des plus grands colonisateurs dont l'Angleterre puisse s'honorer, sir Stamford Raffles, l'organisateur de l'expédition qui s'empara des colonies hollandaises, avait été nommé lieutenant gouverneur de Java. Pendant une administration de cinq années, Raffles accomplit des réformes considérables et abolit l'esclavage. Mais ces travaux, si absorbants qu'ils fussent, ne l'empêchèrent pas de réunir les matériaux nécessaires pour la rédaction de deux énormes in-4, qui sont des plus intéressants et des plus curieux. Ils contiennent, outre l'histoire de Java, une foule de détails sur les populations de l'intérieur, jusqu'alors peu connues, les renseignements les plus circonstanciés sur la géologie et l'histoire naturelle. Aussi, ne faut-il pas s'étonner si le nom de «Rafflesia», en l'honneur de celui qui fit si bien connaître cette grande île, a été donné à une fleur énorme, qui mesure quelquefois un mètre de diamètre et pèse jusqu'à cinq kilogrammes.
Raffles fut aussi le premier qui pénétra dans l'intérieur de Sumatra, dont le littoral seul était connu, tantôt visitant les cantons occupés par les Passoumahs, athlétiques cultivateurs, tantôt pénétrant au nord jusqu'à Memang-Kabou, célèbre capitale de l'empire malais, tantôt traversant toute l'île de Bencoulen à Palimbang.
Mais, ce qui constitue la gloire la plus durable de sir Thomas Stamford Raffles, c'est d'avoir indiqué au gouvernement de l'Inde la position exceptionnelle de Singapour, d'en avoir fait un port franc, qui ne devait pas tarder à prendre un développement considérable.