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PRÉFACE

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EPOUSE d’un savant renommé, une des lumières de la géologie portant ses rayons dans les masses obscures de la terre et de la pierre, Mme L. Stanislas-Meunier est une femme savante. Mais elle ne l’est pas à la façon de ces insupportables Philaminte et Armande, que Molière a justement fustigées dans sa vive comédie. Elle ne montre ni ne cache son savoir, il est naturellement incorporé à sa pensée, et c’est le plus simplement du monde qu’elle dispense à tous, sans pédantisme, ce qu’elle a appris sans peine. Le titre d’un livre qu’elle a composé et écrit en collaboration avec son mari me semble significatif de sa tranquille manière d’être: Au hasard du chemin. C’est ainsi, en effet, qu’elle ramasse des cailloux et qu’elle cueille des fleurs, qu’elle admire les verdures et les nuages, les aurores et les crépuscules. Elle n’a pas haussé le ton, mais elle s’est trouvée à l’unisson de ce grand sujet lorsqu’elle a exploré le passé d’avant l’histoire avec Misère et grandeur de l’humanité primitive. De même elle a continué la conversation avec ses lecteurs lorsqu’elle leur a raconté ses impressions de voyage: De Saint-Pétersbourg à l’Ararat.

Une telle femme de lettres devait écrire des romans. Elle n’a pas failli à cette destinée. Elle a publié des romans historiques, le Roman du Mont-Saint-Michel, au magnifique décor jailli du rocher; Fra Gennaro, qui met en scène la dureté calviniste; Pour le bonheur, où le dénouement est farouchement éclairé par les feux de la Commune. Elle a publié des romans de sentiment et d’aventure: La Princesse ennuyée, Plaisir d’amour, Aimer ou vivre, Le Trésor des Ponthierry. Elle a publié des études psychologiques, L’Eau qui dort, et La Comédie secrète, sous le titre général de Confessions d’honnêtes femmes, deux livres qui auraient suffi à faire la renommée de quelque audacieux et subtil écrivain. Enfin, elle a publié un roman: La Conquête du Diamant, qui est un conte philosophique où tourbillonnent les folies et les fantaisies humaines.

Et comme il lui était demandé d’écrire, pour cette collection des «Maîtres anciens et modernes», une monographie d’artiste, elle a hardiment choisi la grave et sereine histoire de Philippe de Champaigne, le portraitiste de Richelieu, des Messieurs, des Mères et des Sœurs de Port-Royal. Le sujet peut paraître rébarbatif, il ne l’est pas avec Mme Stanislas-Meunier, parce qu’elle a le don d’animer les documents aussi poussiéreux qu’ils soient, d’en extraire la vie du passé, de la faire aussi présente que la vie d’aujourdhui. Autour de son peintre, homme de tranquille et sévère métier, portraitiste ponctuel dont le talent atteint souvent au style, elle a rassemblé ses modèles. Elle a peu de goût pour la morosité de Port-Royal, et pour un peu elle se laisserait aller à prendre parti pour les Jésuites contre les Jansénistes. Elle dit peut-être vrai lorsqu’elle relève le caractère fantastique d’accusations contre la compagnie de Jésus, mais elle devrait avouer qu’ils les ont attirées au moins par leur système de morale, d’où découle leur enseignement. Pascal, ici, est terriblement gênant pour ceux qui sont tentés de défendre les Pères contre les Messieurs: il a cherché et trouvé ses arguments de moralité chez les Jésuites eux-mêmes, et on ne peut l’accuser d’avoir dissimulé les documents et falsifié les citations. Sa démonstration a la rigueur des théorèmes, elle est claire et éloquente comme son style.

A part cette querelle immortelle, le débat théologique apporté par les gens de Port-Royal peut nous laisser indifférents, malgré les sept volumes de Sainte-Beuve, si bien criblés de flèches par Balzac, et Mme Stanislas-Meunier a beau jeu, tout en respectant les personnages respectables, à exercer à leurs dépens la malice naturelle qui est en elle, qui court comme une légère brise entre les lignes de la plupart de ses pages. J’avoue, toutes opinions laissées de côté, aimer cette liberté d’appréciation, qui n’a d’ailleurs aucune morgue, aucune pesanteur. Elle donne son avis sans trop prendre la peine de le motiver, mais sans insister davantage pour le faire accepter, et son lecteur se trouve aussi libre qu’elle. Ce sont des modèles de résumés que ses portraits, plus ou moins appuyés, de Richelieu, de Louis XIII, des Arnauld, de Saint-Cyran, de Jansénius, de Singlin, d’Antoine le Maître, de Le Maître de Saci, du duc de Roannès, de la mère Angélique, du cardinal de Retz, de M. de Péréfixe, et tous ceux qu’elle rencontre dans les ateliers de son peintre. Pascal n’y vient pas, et elle esquive cette figure qu’elle avait peut-être le désir d’aborder.

Au milieu de ce monde si intéressant, Philippe de Champaigne est parfait de vérité, de conscience, de talent sérieux. On l’estime encore davantage après avoir lu le livre de Mme Stanislas-Meunier, qui dit sur lui tout ce qu’on en peut savoir et deviner.

GUSTAVE GEFFROY.

Philippe de Champaigne

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