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AVANT-PROPOS

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La Société des conférences m’a fait l’honneur, l’hiver dernier, de me demander un cours de quatre leçons sur Watteau, à l’occasion du deuxième centenaire de la mort de ce grand peintre. Ce sont ces leçons qu’on va lire, dans un texte un peu remanié et assez différent de celui qui a paru dans la Revue de la Semaine.

Dans les conditions actuelles de la librairie, il eût coûté trop cher d’illustrer cet ouvrage. Mon dessein n’était de faire ni un livre de luxe ni un manuel scolaire. Un recueil de documents et une étude littéraire sont deux choses très différentes. Les Maîtres d’autrefois sont un livre sans images. Les œuvres de Watteau sont assez connues de tout le monde pour qu’il soit inutile de reproduire une fois de plus un choix des plus célèbres. Il m’a paru préférable de m’en tenir à un frontispice. Je remercie M. Georges Dormeuil qui a bien voulu, pour orner cet ouvrage, me permettre de publier un des plus beaux dessins de Watteau.

Ce petit livre n’est pas une étude scientifique. Je n’avais ni le temps ni les moyens de la faire-La condition indispensable pour une telle entre prise serait un catalogue de Watteau, et ce catalogue n’existe pas. Il me semble qu’un tel travail ne serait pas impossible. Il devrait être aisé de refaire aujourd’hui avec des procédés plus sûrs et plus rapides ce que M. de Julienne n’a pas hésité à entreprendre avec les procédés lents et coûteux de son temps. Ou aurions-nous moins qu’autrefois le soin de cette gloire dont nos artistes forment une large part?

En prenant pour base l’œuvre de Julienne, on tracerait sans peine le programme d’un tel ouvrage . Il faudrait rechercher d’abord tout ce qui subsiste de Watteau, épars dans les galeries d’Europe et d’Amérique. Un très grand nombre de ces œuvres se trouve encore en Angleterre. Sait-on qu’à Paris même il existe, en dehors du Louvre, près de vingt-cinq tableaux de Watteau? Il faudrait classer ces peintures, distinguer les répliques des œuvres originales, instituer les linéaments d’une chronologie, toutes choses inexécutables avant que les documents aient été rassemblés. L’ensemble de ces peintures conservées serait à compléter par les gravures des œuvres disparues, en ajoutant d’ailleurs à celles du recueil de Julienne les œuvres qui n’y figurent pas et qu’ont gravées Baron et Philippe Mercier.

La seconde partie du travail aurait pour objet la collection des dessins de Watteau. La première chose à faire serait une édition critique des dessins gravés, ou des Figures de différents caractères. Cette édition comprendrait: I° la mention de tous ceux de ces dessins qui sont venus jusqu’à nous, avec un mot de leur histoire et les notes de l’exemplaire de l’Arsenal; 2° l’indication des tableaux pour lesquels a servi chacun de ces dessins. Peut-être cette partie du travail serait-elle même la plus utile pour commencer. Enfin, un dernier recueil reproduirait tous les dessins qui nous sont parvenus, avec des notes historiques dont les publiions de M. P.-J. Heseltine nous offrent le modèle,

Je ne désespère pas, s’il plaît à Dieu, d’entreprendre un jour cet ouvrage avec l’aide de mon ami M. Paul Alfassa. Rien ne nous manque tant que ce genre d’inventaires et de répertoires. L’histoire de l’art en France demeurera impossible aussi longtemps qu’on n’en aura pas constitué les archives. Il faut commencer par faire le compte de nos richesses. Ce travail devrait être fait depuis longtemps pour des maîtres tels que Poussin, Watteau, Fragonard, Ingres, Prud’hon, Delacroix, Houdon. Tant qu’il n’existera pas un Corpus artistique, embrassant la statuaire du moyen âge et de la Renaissance, les vitraux, les grandes œuvres de la sculpture et de la peinture classiques, il sera inutile de parler d’une véritable histoire. Un siècle d’érudits, en se consacrant à mettre au jour les monuments de notre passé, a rendu possible l’école historique du dix-neuvième siècle. En détruisant ces admirables instruments de travail, ces laboratoires de la science qu’étaient les vieilles congrégations, les sociétés modernes n’ont rien fait pour les remplacer. Nos corps savants, nos universités et nos académies paraissent peu propres à ces grandes œuvres impersonnelles, dont celle des Bollandistes est aujourd’hui le der’ nier exemple. Est-ce qu’en créant l’outillage qui. semblerait devoir faciliter la tâche, le monde contemporain n’aurait pas brisé par mégarde les vertus morales, le désintéressement qui en étaient la condition? Aurions-nous perdu le dévouement qui plaçait son honneur dans le travail obscur qui s’accomplit pour l’avenir, et dont celui qui le fait ne cueille pas les fruits?

Ces mérites nous seraient pourtant plus que jamais nécessaires. Trop de ruines récentes le prouvent: l’œuvre de la civilisation est fragile. Elle est à la merci de la première bourrasque. Combien de merveilles touchantes, combien d’églises adorables, combien d’harmonieuses demeures d’autrefois, détruites brusquement par la plus brutale des guerres! Veuves de leurs beautés, les vallées de l’Aisne, les plaines lorraines ou champenoises, les collines de la Picardie pleurent des centaines de chefs - d’œuvre, dont elles cherchent en vain la forme dans les décombres. Que deviennent les trésors de notre dix-huitième siècle dont se parait la Russie? Qui oserait garantir que le reste est à l’abri de l’orage? Il est temps d’y songer: c’est un devoir pour nous de veiller sur le capital de noblesse qui nous vient de nos pères et de pourvoir au salut de la beauté menacée.

Watteau : un grand maître du XVIIIe siècle

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