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UN HÉRITIER

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Côme-Pantaléon Coquelicot était, contrairement aux suppositions de l’aîné de la famille, un petit homme assez replet, ne rappelant les Avoine que par la myopie et par une timidité native qui le portait à s’isoler. Quant au profil grec des Grandchamp, il s’était, en sa personne, converti en un gros nez et un menton de galoche.

Évidemment, à aucun âge Pantaléon n’avait dû poser pour la beauté virile; mais à l’approche de la soixantaine il avait achevé de perdre la touffe de cheveux qui figurait encore au sommet de sa tête, touffe qu’il ramenait d’ailleurs assez heureusement jusqu’à la naissance du front. Au moment où il se présente à nous, il est absolument chauve, assez lourd d’allures et ennemi-juré du mouvement.

De petites circonstances décident souvent de la vocation d’un individu. Côme-Pantaléon, craintif par caractère, peu favorisé de la nature, n’aimant ni le bruit, ni l’animation, et ne voyant pas plus loin que son nez, qui encore n’était pas long, se trouva disposé par ces causes à chercher, non dans les hommes, mais dans les livres, un entourage qui convînt à son esprit studieux et patient.

En conséquence, il s’était livré à l’élude; et l’amour de l’étude étant devenu chez lui une passion, le Coquelicot du Nord avait tourné en savant, mais en savant exclusif, ne tenant ni aux usages reçus, ni aux modes adoptées par ses contemporains, ni aux satisfactions de la vanité.

Toujours absorbé par les graves pensées que lui inspirait la science, il se moquait des appréciations du vulgaire, et méprisait le qu’en-dira-t-on? On le voyait passer dans les rues de Dunkerque, avec un paletot luisant, déchiré aux poches, et privé d’une partie de sa doublure. Son chapeau, de quatre années en retard sur les autres chapeaux, était d’un ridicule achevé. Il faisait fi de la toilette et trouvait que tout était bien, pourvu qu’il eût sous son bras quelque bouquin traitant des faits et gestes oubliés depuis trois mille ans, ou des premières notions des peuples anciens sur une foule de procédés, aujourd’hui bien connus.

Le savant, dans sa jeunesse, avait fui la société des jeunes gens, et son existence exceptionnelle l’avait soustrait aux plaisirs de son âge, dont il ne se souciait point. La maturité n’avait fait qu’augmenter cet éloignement de la vie commune; mais la vieillesse exagérant encore cette disposition, le bon monsieur trouvait fastidieux, irritants, insupportables les habitants de Dunkerque qui, à toute heure, passaient dans les rues où il passait lui-même. Ces gens bien mis, bien portants, causant souvent entre eux, et ne s’intéressant en général qu’aux actualités, lui semblaient ridicules. Il les plaignait; il en vint à les prendre en grippe, et à souhaiter passionnément le repos de la campagne, le silence des bois, le chant. des oiseaux, le doux bourdonnement des insectes et ces senteurs embaumées que nous envoie la nature dans la corolle de ses fleurs.

Au lieu de tout cela, Pantaléon voyait Dunkerque, avec ses vingt-quatre mille habitants et sa population flottante; avec sa rade magnifique, son port marchand, ses fabriques, son collège, son école navale, ses allées et venues perpétuelles dues à son commerce, à sa situation; c’était insoutenable. Il en gémissait tous les jours, et ses nerfs s’agaçaient au point de ne plus le laisser travailler sept ou huit heures de suite comme autrefois. Le calme lui manquait. Où le rencontrerait-il?

Dans les profondeurs de l’étude et les révélations de la science, il avait recueilli assez de lumières, assez de satisfactions intellectuelles, pour que son esprit fût saturé de jouissances; mais il faut convenir que le bien-être matériel n’avait jamais été son lot.

Jeune étudiant, il avait d’abord habité volontiers à Paris une mansarde, toute peuplée de livres et de papiers sur lesquels il déposait des notes et des observations. Déjeunant et dînant chez un petit traiteur, il n’avait excédé en rien les dépenses les plus modestes; cependant aucune épargne n’avait pu se faire; ou plutôt, dès que le jeune savant avait dans son secrétaire quelques économies, on voyait des dictionnaires, des in-folio, des livres de toute grandeur disparaître de la vitrine des libraires; et le logis étroit du pauvre Pantaléon s’enrichissait de jour en jour aux dépens de son maître.

Les rares amis du savant, le voyant vieillir et s’attrister, lui conseillaient de quitter Dunkerque, de se fixer dans un village, d’habiter une maison isolée et d’y finir tranquillement sa paisible carrière. Il souriait à ce projet et ne répondait pas; car il ne voulait pas convenir, devant l’amitié, de la pénurie où il se trouvait. Effectivement, s’il pouvait vivre dans les conditions médiocres qui lui suffisaient, il lui aurait été impossible de modifier sa situation et de pourvoir à une installation nouvelle.

Les choses ne devaient donc jamais changer, à moins qu’un événement tout à fait extraordinaire ne se produisît, au moment le plus inattendu, sur le chemin de ce brave Côme-Pantaléon Coque licot.

Et pourtant!... Ah! certes! il ne s’y attendait pas. Un jour qu’il était plongé, depuis deux heures, dans une lecture des plus intéressantes, au détriment de ses yeux fatigués, il reçut une lettre de Bretagne. Écriture absolument inconnue.

«De qui cela peut-il venir? Je ne connais personne en Bretagne, ni même ce Kérouët que porte le timbre de la poste; qu’est-ce qui vient me déranger? moi qui me suis à peu près affranchi de toute correspondance, parce que c’est une perte de temps.»

Pendant ce monologue, Pantaléon déchirait l’enveloppe, bien décidé à ne pas même se donner la peine de répondre, à moins d’urgence. Mais voyez combien nos facultés se modifient, selon l’usage auquel nous les appliquons. Ce savant, si accoutumé à déchiffrer des manuscrits presque indéchiffrables, cet homme d’expérience et d’étude, cet infatigable chercheur, Pantaléon enfin, ne fit d’abord que parcourir le message, n’y comprit rien, en recommença trois fois la lecture, et, en définitive, fut sur le point de le mettre au panier, croyant à une mystification de très mauvais goût.

Il y était question d’un individu nommé Gilles Coquelicot, qui venait de mourir au château de Kérouët, en Morbihan. Ce M. Gilles était cousin éloigné de M. Pantaléon, et le désignait comme héritier, conjointement avec un autre cousin, nommé Leu-Ildefonse Coquelicot.

«Mais... qu’est-ce que cela? disait Côme en se frottant les yeux pour mieux voir. Je ne connais ni Gilles, ni Leu-Ildefonse,... rien ne me dit que nous soyons cousins. Y a-t-il un de nous trois qui soit fou? serait-ce moi, par hasard?»

Il relut encore cette écriture désespérante, vulgairement appelée «pattes de mouche», et demeura convaincu que cette lettre, partant d’une étude de notaire, l’avertissait qu’un héritage lui tombait du ciel, comme tombent, dit-on, les cailles toutes rôties, ce qui n’est pas vrai du tout.

M. Corbin, consciencieux en toute circonstance, était, en outre, fort obligeant. Il avait cru bien faire en entrant dans quelques détails sur le genre de fortune de feu M. Gilles Coquelicot. Le cousin savant recevait commotion sur commotion en relisant ces mots: campagne boisée,... charmilles,... ombrages,... vastes champs,... plaines,... collines, etc., etc. Tout cela voulait dire que, dans ce séjour inconnu, on pouvait enfin trouver l’éloignement des hommes, le silence, la cessation de tout bruit, de toute agitation. Le solitaire en fut tellement ému, qu’il eût souhaité faire part à toute la terre de ce qui lui arrivait.

il prit son vieux paletot, son vieux chapeau, et s’en alla chez un petit rentier, son voisin, qui s’occupait volontiers des découvertes scientifiques, pourvu qu’elles fussent faites, car ce n’était pas un génie chercheur. Entré d’un air mystérieux, il déplia la lettre et la mit sous les yeux du voisin.

Celui-ci la lut attentivement, non sans pousser quelques exclamations, et dit:

«Mon cher Coquelicot, pendant que vous ne pensiez qu’aux labeurs de l’esprit, la fortune vous cherchait. Soyez donc heureux dans votre vieillesse. Parlez, allez en Bretagne, vous y serez riche....

— Peu m’importe; je sais me passer des richesses; mais je vous avoue que vivre en paix, sous les voûtes silencieuses d’un château gothique; respirer les parfums des champs; me sentir délivré du bruit que font les hommes; pouvoir travailler à mon aise, sans obstacle, sans dérangement, cela me paraît la traduction la plus vraie du bonheur sur la terre. Qu’en pensez-vous, mon cher?

— Je pense que nous retournons au temps des fées.... Cependant je regrette pour vous qu’un autre Coquelicot partage ces biens. Il se pourrait que certaines nuances de caractère vous empêchassent de marcher de front, et alors....

— Non, non, ne craignez rien. Je suis homme à m’arranger de tout; je n’ai besoin de personne, et je compte bien vivre à ma guise, comme vivra à la sienne mon cousin Leu, ou Ildefonse, comme on voudra. Ces deux noms se trouvaient d’ailleurs dans la famille de ma grand’tante Coquelicot, née Avoine.

— Ainsi, vous ne redoutez pas cet autre héritier?

— Pas du tout. J’ai toujours vécu seul; je continuerai; et je serai parfaitement content, pourvu que Leu me laisse tranquille.

— Allons, c’est bien.

— Il faut convenir que la chose est singulière. Je ne connaissais de Coquelicot que moi; et voilà qu’il en arrive deux, l’un mort, l’autre vivant; Gilles qui me laisse sa fortune et Leu qui la partage avec moi. Par exemple, je ne veux pas de casse-tête, c’est le notaire qui prendra soin de gérer la propriété, Je ne m’entends qu’aux affaires d’autrefois.

— Vous allez répondre?

M. Coquelicot était entré d’un air mystérieux.


— Aujourd’hui même. Le notaire attend ma lettre pour m’envoyer une copie du testament. Il a voulu sans doute s’assurer d’abord de mon existence.

— C’est probable.

— Mais comment a-t-on pu découvrir un Coquelicot à Dunkerque? Moi qui tiens si peu de place, qui suis si parfaitement inconnu! Ah! quel coup! J’en suis malade.

— Ce n’est pas le moment, mon cher. La fortune vous tend les bras, courez vous y jeter.»

Pantaléon rentra chez lui en toute hâte, écrivit quelques lignes à M. Corbin, y joignant son acte de naissance, comme pièce justificative, et sortit une seconde fois pour aller à la poste.

Sa démarche était déjà toute changée. Il commençait à prendre plus d’assurance par l’effet de ce Kérouët qui tombait dans ses mains. Ce n’était pas l’impudence du riche orgueilleux et égoïste. Loin de là, c’était le naïf contentement d’un homme qui enfin va respirer l’air des champs et des bois, et surtout va trouver, dans une ntique demeure, un lieu de repos parfait où, entouré d’Assyriens, d’Égyptiens, à l’état de génies peu encombrants, il pourra les interroger à son aise.

Le voisin n’avait pas promis le secret, que d’ailleurs on ne lui avait pas demandé. Il dit donc simplement un mot à l’un, un mot à l’autre, et la nouvelle se répandit comme une traînée de poudre. M. Pantaléon Coquelicot, le petit savant original, héritait d’un château breton. Trois ou quatre personnes le saluèrent la première fois qu’il les rencontra.

Deux jours plus tard, M. Corbin envoyait une copie du testament. L’héritier fut bien un peu surpris en lisant ce que son riche cousin avait si minutieusement élaboré.

«C’était un drôle d’homme que ce Gilles! se dit-il à lui-même. Mais faut-il s’en étonner? Les Grandchamp étaient des originaux de la grande espèce; et parmi les Avoine, j’en ai connu que leur bizarrerie avait rendus maniaques. Il est tout naturel que les Coquelicot s’en ressentent. Au fait, moi aussi, je suis un drôle d’homme, je ne vois personne qui me ressemble. Bah! qu’a-t-on besoin d’être comme tout le monde?»

Par la lettre qui accompagnait la copie du testament, M. Corbin demandait à l’héritier de fixer lui-même l’époque de son arrivée à Kérouët.

C’était là une grosse question. Il s’agissait de déménager. Cela ne voulait pas dire, comme de coutume, faire passer son ménage d’un lieu dans un autre; mais retirer de leur vénérable poussière ces volumes qui n’avaient pas remué depuis si longtemps. Le très petit appartement de M. Coquelicot s’était peu à peu transformé en bibliothèque. Il avait fait mettre des planches de bas en haut, tout autour de sa chambre, sauf l’emplacement du lit; et là il avait peu à peu installé ses précieux et poudreux trésors. Les déplacer, les épousseter, les envoyer en Bretagne, ce n’était pas une petite affaire.

Le pauvre Pantaléon eut un moment de découragement devant cette besogne; mais, ayant appris des anciens à lutter et à triompher patiemment des obstacles les plus redoutables, il regarda bien an face cette multitude de volumes, et se dit que lui, Pantaléon, par son sang-froid, par sa persévérance, lutterait, sans auxiliaires, sans alliés, centre leur nombre et leur poussière et les transporterait de Dunkerque à Kérouët. Même il ajouta chez moi, tant se prend facilement l’habitude d’être riche.

On a beau avoir du courage, l’âme la mieux trempée a besoin d’être secondée par l’être physique qui lui est uni pour la servir, et qui, parfois, la sert très mal. M. Coquelicot, en entreprenant seul son déménagement, n’avait compté ni avec sa myopie héréditaire, venant des Avoine, ni avec sa fort petite stature, ni avec la faiblesse de son tempérament, usé de bonne heure par l’excès de l’étude et la privation d’air et d’exercice.

Il lui fallait, à chaque instant, monier à l’échelle, changer de place cette échelle, avoir recours à son lorgnon pour relire, du moins en passant, les titres qu’il avait oubliés. Ceci n’était pas une nécessité, mais un plaisir irrésistible. Tout se fatiguait en même temps: les pieds par les échelons, les yeux par le lorgnon, les bras par le plumeau. Mais il arriva quelque chose de pire, et l’on ne s’y attendait pas. C’est que le savant, passé de l’état de chercheur à l’état de déménageur, était, à son insu, invinciblement entraîné vers sa première profession. Il se retrouvait, tout étonné de la chose, assis sur le coin d’une chaise, dans l’embrasure de sa fenêtre, feuilletant un volume, y rencontrant au passage des lignes tellement intéressantes que le plumeau et l’échelle retombaient dans l’inaction et que Côme-Pantaléon, au lieu de déménager, étudiait encore, en dépit de ses bonnes résolutions.

Les affaires n’avancent pas quand on les fait ainsi. Les Assyriens le savaient bien. Côme le savait aussi, mais quand le cœur est pris!... Enfin, il eut la force de se surmonter lui-même, et d’aller demander au petit rentier son ami d’avoir la bonté de venir l’aider. Ce n’était ni pour transporter l’échelle, ni pour faire usage du plumeau, mais seulement pour l’empêcher de feuilleter et de lire. Il vint, le bon monsieur, et la bibliothèque finit par descendre tout entière au milieu de la chambre, entrer dans des caisses, et prendre le chemin de fer, petite vitesse.

Cette grande œuvre achevée, M. Coquelicot avait à se transporter lui-même en Bretagne. Tout homme tient à la ville qu’il a longtemps habitée. Quel ne fut pas l’étonnement de l’héritier quand, au moment de dire à Dunkerque un éternel adieu, il se sentit ému, mais ému jusqu’à jeter sur tout ce qui l’entourait un regard de tristesse. Quand on est troublé, on a besoin de parler à quelqu’un, de trouver pour ainsi dire un déversoir où tombe le trop-plein. C’est pourquoi l’héritier disait à son complaisant voisin:

«Mon cher ami, j’éprouve un sentiment nouveau et pénible. Après trente-cinq ans passés dans celte ville, car je n’avais guère plus de vingt-neuf ans lorsque j’ai quitté Paris et le quartier latin, je me prends à regretter tout ce que j’y laisse: vous d’abord; et puis cette superbe rade, cette mer du Nord, sillonnée par une si grande quantité de bateaux, cette....

— Allons, allons, répondit le voisin, qui avait le rare talent de voir les choses comme elles sont, il y a là beaucoup d’imagination, ce qui me surprend de votre part, car vous êtes un homme sérieux. Ne pensez pas à moi; nous serons toujours amis, de loin comme de près. Quant à cette rade superbe, cette mer du Nord, ces bateaux qui la sillonnent,... avez-vous oublié, mon cher Pantaléon, que vous êtes myope?»

L’héritier, brusquement replacé dans le positif, répondit modestement:

«Vous avez raison; je n’ai jamais joui de ces biens que je regrette. Je me suis plaint de tout. Et pourtant, à l’heure du départ, il me semble faire un sacrifice.

— C’est toujours comme cela. On tient au sol par quelques fils, et l’on souffre quand ces fils se brisent. Ne vous tourmentez pas; une fois installé dans votre beau Kérouët, vous ne penserez plus guère à nous.»

Pantaléon lendit la main au voisin, et l’assura que l’air des champs et les délices de la retraite ne lui feraient pas perdre la. mémoire. Puis il surmonta sa sensibilité intempestive et fit ses malles, ce qui n’était pas un grand travail, car le savant avait toujours traité légèrement la question des vêtements et de la lingerie.

Quand vint le jour fixé, M. Coquelicot crut partir pour les Antipodes. Il était affairé, embarrassé comme un homme qui n’a guère voyagé que des yeux, tenant en main un allas. Il était venu autrefois de Paris à Dunkerque et n’avait plus bougé, aussi se prépara-t-il au voyage comme à une affaire de haute importance.. Son obligeant voisin le conduisit à la gare et lui prit son billet, pensant qu’il ne s’en tirerait pas, car il y avait foule au guichet; el les contemporains réunis en grand nombre faisaient toujours perdre la tète à ce bon M. Coquelicot. Il eût été capable de prendre un billet pour tomber dans le Finistère, au lieu du Morbihan.

Cela fait, on se dit adieu, et la vapeur emporta l’héritier vers la vieille Armorique. Les premiers instants se passèrent à s’installer, et, comme c’était le soir, le pacifique Pantaléon ne trouva rien de mieux à faire que de dormir.

De quels doux rêves ne fut-il pas bercé ! Tantôt c’était une belle solitude qui s’offrait à lui, avec son silence et sa fraîcheur. Nulle voix humaine n’y pénétrait. On n’entendait, car c’était l’automne que le bruit des feuilles gémissantes, foulées par les pieds du maître. Tantôt il voyait des plaines sans limites, des ruisseaux limpides, un moulin, une ferme, tout un paysage enchanteur. Puis la scène changeait. Il était assis dans une chambre spacieuse et bien éclairée; il y avait autour de lui des livres à profusion; et il apercevait, dans la pénombre, des Assyriens, des Égyptiens, des Pélasges, des Mèdes, des Perses, des Grecs, des Romains, tous lui racontant un peu de leur histoire. Un des bienfaits de l’héritage était de lui rendre tout facile; il avait une clef d’or à laquelle rien ne résistait.

Il est vrai qu’à chaque station le voyageur se réveillait au milieu des compagnons de route, des couvertures, des sacs et des paquets; mais il se rappelait délicieusement son rêve, et fermait les yeux pour en faire un autre.

Ce voyage fut heureux, et l’héritier fatigué, mais fort aise, finit par se trouver en face de la terre antique et seigneuriale de Kérouët, naguère tombée si à propos dans les mains du cousin Gilles.


La famille Coquelicot

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