Читать книгу Henri VI. 2 - Уильям Шекспир, William Szekspir, the Simon Studio - Страница 4
ACTE PREMIER
SCÈNE III
ОглавлениеToujours à Londres. – Une salle du palais
Entrent PIERRE et plusieurs autres avec des pétitions
PREMIER PÉTITIONNAIRE. – Restons là tout près, mes maîtres. Milord protecteur va bientôt passer par ici, nous pourrons alors lui présenter nos suppliques par écrit.
DEUXIÈME PÉTITIONNAIRE. – Ma foi, Dieu le conserve, car c'est un brave homme. Jésus le bénisse!
(Entrent Suffolk et la reine Marguerite.)
PREMIER PÉTITIONNAIRE. – Je crois que le voilà qui vient, et la reine avec lui. Je serai le premier, c'est sûr.
DEUXIÈME PÉTITIONNAIRE. – En arrière, imbécile. C'est le duc de Suffolk, et non pas milord protecteur.
SUFFOLK. – Eh bien, qu'y a-t-il? me veux-tu quelque chose?
PREMIER PÉTITIONNAIRE. – Je vous prie, milord, pardonnez; je vous ai pris pour milord protecteur.
MARGUERITE, lisant le dessus des pétitions. – Milord protecteur! C'est à Sa Seigneurie que vos suppliques s'adressent? Laissez-moi les voir. – Quelle est la tienne?
DEUXIÈME PÉTITIONNAIRE. – La mienne, avec la permission de Votre Grâce, est contre John Goodman, un des gens de milord cardinal, qui m'a pris ma maison, mes terres, ma femme et tout.
SUFFOLK. – Ta femme aussi? Cela n'est pas trop bien, en effet. Et vous, la vôtre? – Qu'est-ce que c'est? (Il lit.) Contre le duc de Suffolk, pour avoir fait enclore les communes de Melfort. Comment, monsieur le drôle!
PREMIER PÉTITIONNAIRE. – Hélas! monsieur; je ne suis qu'un pauvre citoyen chargé des plaintes de toute notre ville.
PIERRE, présentant sa pétition.-Contre mon maître Thomas Horner, pour avoir dit que le duc d'York était le légitime héritier de la couronne.
MARGUERITE. – Que dis-tu là? Le duc d'York a-t-il dit qu'il était l'héritier légitime de la couronne?
PIERRE. – Que mon maître l'était? non vraiment. Mais mon maître a dit qu'il l'était, et que le roi était un usurpateur.
(Entrent des domestiques.)
SUFFOLK. – Y a-t-il quelqu'un là? Retenez cet homme et envoyez chercher son maître par un huissier. Nous nous occuperons de votre affaire en présence du roi.
(Les domestiques sortent avec Pierre.)
MARGUERITE. – Et vous qui aimez à être protégé des ailes de votre duc protecteur, vous pouvez recommencer vos suppliques et vous adresser à lui. (Elle déchire leurs requêtes.) Sortez, canaille. Suffolk, renvoyez-les.
TOUS. – Allons, sortons.
(Ils sortent.)
MARGUERITE. – Milord de Suffolk, parlez. Sont-ce là vos usages? est-ce là la mode de la cour d'Angleterre, le gouvernement de votre île britannique? est-ce là la royauté d'un roi d'Albion? Eh quoi! le roi Henri demeurera-t-il éternellement sous la domination du sombre Humphroy? Et moi, reine seulement de nom et pour la forme, faut-il que je sois la sujette d'un duc? Je te le dis, Pole, quand dans la ville de Tours, tu rompis une lance pour l'amour de moi, et enlevas les coeurs des dames de France, je crus que le roi Henri te ressemblerait en galanterie, en beauté, en courage; mais son esprit est entièrement tourné à la dévotion: tout occupé à compter des ave Maria sur son chapelet, il n'a d'autres champions que les prophètes et les apôtres, d'autres armes que les passages sacrés de l'Écriture sainte, d'autre champ clos que son cabinet, d'autres amours que les images en bronze des saints canonisés. Je voudrais que le collége des cardinaux voulût le nommer pape et l'emmener à Rome, pour y placer sur sa tête la triple couronne. Tels sont les honneurs qui conviennent à sa piété.
SUFFOLK. – Madame, prenez patience. C'est moi qui ai fait venir Votre Altesse en Angleterre, et je travaillerai à ce qu'en Angleterre tous les désirs de Votre Grâce soient pleinement satisfaits.
MARGUERITE. – Outre ce hautain protecteur, n'avons-nous pas encore Beaufort, ce prêtre impérieux, et Buckingham, et Somerset, et York, qui se plaint toujours, et le moins puissant d'entre eux ne l'est-il pas en Angleterre plus que le roi?
SUFFOLK. – Et de tous, le plus puissant ne l'est pas en Angleterre plus que les Nevil, Salisbury et Warwick ne sont point de simples pairs.
MARGUERITE. – Tous ces lords ensemble ne m'irritent pas autant que cette arrogante Éléonor, la femme du lord protecteur. On la voit, suivie d'un cortége de dames, balayer les salles du palais, plutôt de l'air d'une impératrice que de la femme du duc Humphroy. Les personnes étrangères à la cour la prennent pour la reine. Elle porte sur elle le revenu d'un duché, et dans son coeur elle insulte à notre indigence. Ne vivrai-je point assez pour me voir vengée d'elle? L'autre jour, au milieu de ses favoris, cette créature de rien ne disait-elle pas insolemment, méprisante drôlesse! que la queue de sa plus mauvaise robe de tous les jours valait mieux que toutes les terres de mon père, avant que Suffolk lui eût donné deux duchés en échange de sa fille.
SUFFOLK. – Madame, j'ai moi-même disposé la glu sur le buisson où elle doit venir se prendre, et j'y ai placé un choeur d'oiseaux si propres à l'attirer, qu'elle viendra s'y abattre pour écouter leurs chants et ne reprendra plus le vol qui vous blesse. Laissez-la donc en paix, et écoutez-moi, madame, car j'ose vous donner ici quelques conseils. Quoique le cardinal nous déplaise, il faut nous unir à lui et au reste des pairs, jusqu'à ce que nous ayons fait tomber le duc Humphroy dans la disgrâce. Quant au duc d'York, la plainte que nous venons de recevoir n'avancera pas ses affaires; ainsi, nous les déracinerons tous l'un après l'autre, et de vous seule l'heureux gouvernail recevra sa direction.
(Entrent le roi Henri, York et Somerset causant avec lui, le duc et la duchesse de Glocester, le cardinal, Buckingham, Salisbury et Warwick.)
LE ROI. – Quant à moi, nobles lords, le choix m'est indifférent: ou Somerset, ou York, c'est pour moi la même chose.
YORK. – Si York s'est mal conduit en France, que la régence lui soit refusée.
SOMERSET. – Si Somerset est indigne de la place, qu'York soit régent, je suis prêt à la lui céder.
WARWICK. – Que Votre Grâce soit digne ou non, ce n'est pas là la question: York en est le plus digne.
LE CARDINAL. – Ambitieux Warwick, laisse parler ceux qui valent mieux que toi.
WARWICK. – Le cardinal ne vaut pas mieux que moi sur le champ de bataille.
BUCKINGHAM. – Tous ceux qui sont ici présents valent mieux que toi, Warwick.
WARWICK. – Et Warwick pourra vivre assez pour être un jour le meilleur de tous.
SALISBURY. – Paix! mon fils. – Et vous, Buckingham, faites-nous connaître, par quelques raisons, pourquoi Somerset doit être préféré en ceci?
MARGUERITE. – Eh! vraiment, parce que cela convient au roi.
GLOCESTER. – Madame, le roi est en âge de dire lui-même son avis; et ce n'est point ici l'affaire des femmes.
MARGUERITE. – Si le roi est en âge, qu'a-t-il besoin, milord, que vous demeuriez protecteur de Sa Majesté?
GLOCESTER. – Je suis protecteur du royaume, madame; et, quand il le voudra, je résignerai mes fonctions.
SUFFOLK. – Résigne-les donc, et mets un terme à ton insolence. Depuis que tu es roi (car qui donc est roi que toi?), l'État se précipite chaque jour vers sa ruine. Le dauphin a triomphé au delà des mers; les pairs et les nobles du royaume ne sont plus autre chose que les vassaux de ton pouvoir.
LE CARDINAL. – Tu as écrasé le peuple, appauvri, exténué la bourse du clergé par tes extorsions.
SOMERSET. – Tes somptueux palais, les parures de ta femme, ont absorbé une portion des richesses publiques.
BUCKINGHAM. – La cruauté de tes exécutions a excédé la rigueur des lois, et te livre à ton tour à la merci des lois.
MARGUERITE. – Ton trafic des emplois, et la vente des villes de France, si on pouvait faire connaître tout ce qu'on soupçonne, devraient avant peu te rapetisser de la tête 6. (Glocester sort. – La reine laisse tomber son éventail.) Donnez-moi mon éventail. – Quoi donc, beau sire, ne sauriez-vous faire ce que je vous dis? (Elle donne un soufflet à la duchesse.) Ah! madame, je vous demande pardon: quoi! c'est vous?..
LA DUCHESSE. – Si c'est moi? Oui, c'est moi, orgueilleuse Française. Si mes ongles pouvaient atteindre votre beauté, j'imprimerais mes dix commandements sur votre face.
LE ROI. – Ma chère tante, calmez-vous; c'est contre sa volonté.
LA DUCHESSE. – Contre sa volonté! Bon roi, prends-y garde à temps; elle t'emmaillotera et te bercera comme un enfant. Quoiqu'il y ait ici plus d'un homme qui ne sache pas porter le haut-de-chausses, elle n'aura pas impunément frappé dame Éléonor.
BUCKINGHAM. – Lord cardinal, je vais suivre Éléonor, et m'informer de Glocester, de tous ses mouvements. – La voilà lancée, elle n'a pas besoin maintenant d'éperons pour l'échauffer, elle va galoper assez vite à sa perte.
(Buckingham sort.)
(Rentre Glocester.)
GLOCESTER. – Maintenant, milords, qu'un tour de terrasse a dissipé ma colère, je reviens délibérer sur les affaires de l'État. Quant à vos odieuses et fausses imputations, prouvez-les, soumettez-les au jugement de la loi. Puisse Dieu dans sa miséricorde traiter mon âme selon la mesure de mon affectueuse fidélité envers mon pays et mon roi! Mais venons à l'objet qui nous occupe. Dans mon opinion, mon souverain, York est l'homme le plus propre à remplir en France l'office de régent.
SUFFOLK. – Avant qu'on choisisse, permettez-moi de vous faire comprendre, par quelques raisons qui ne sont pas de peu d'importance, qu'York est de tous les hommes le moins propre à cet emploi.
YORK. – Je te le dirai, Suffolk, pourquoi j'y suis le moins propre. D'abord, c'est parce que je ne sais point flatter ton orgueil; ensuite si le choix tombe sur moi, milord de Somerset me laissera encore sans munitions, sans argent et sans secours, jusqu'à ce que la France soit retombée entre les mains du dauphin. Dernièrement il m'a fallu attendre, tantôt sur un pied tantôt sur l'autre 7, son bon plaisir, jusqu'à ce que Paris fût assiégé, affamé et perdu.
WARWICK. – J'en puis rendre témoignage, et jamais traître n'a commis envers son pays une action plus criminelle.
SUFFOLK. – Paix donc, impétueux Warwick.
WARWICK. – Emblème d'orgueil, pourquoi me tairais-je?
(Entrent les domestiques de Suffolk amenant Horner et Pierre.)
SUFFOLK. – Parce qu'il y a ici un homme accusé de trahison. Dieu veuille que le duc d'York réussisse à se justifier!
YORK. – Quelqu'un accuse-t-il York de trahison?
LE ROI. – Que signifie tout ceci, Suffolk? Dis-moi qui sont ces hommes?
SUFFOLK. – Avec la permission de Votre Majesté, cet homme est celui qui accuse son maître de haute trahison. Il assure lui avoir entendu dire que Richard, duc d'York, était le légitime héritier de la couronne d'Angleterre, et que Votre Majesté était un usurpateur.
LE ROI, à Horner.-Dis, as-tu tenu ce discours?
HORNER. – Avec la permission de Votre Majesté, je n'ai jamais rien dit ni pensé de semblable. Dieu m'est témoin que je suis faussement accusé par ce coquin.
PIERRE, levant les mains en haut.-Par ces dix os, milords, il m'a dit cela un soir que nous étions dans le grenier à nettoyer l'armure du duc d'York.
YORK. – Infâme misérable, vil artisan, ta tête me payera tes criminelles paroles. Je conjure Votre Royale Majesté de le livrer à toute la rigueur de la loi.
(York sort.)
HORNER. – Hélas, milord, que je sois pendu si jamais j'ai prononcé ces mots. Mon accusateur est mon apprenti. L'autre jour, comme je l'avais corrigé pour une faute, il a fait serment à genoux qu'il me le revaudrait: j'ai de bons témoins du fait. Je conjure donc Votre Majesté de ne pas perdre un honnête homme sur l'accusation d'un coquin.
LE ROI. – Glocester, que pouvons-nous légalement ordonner sur ceci?
GLOCESTER. – Voici mon jugement, seigneur, s'il m'appartient de décider: donnez à Somerset la régence de la France, parce que ceci a élevé des soupçons contre York, et indiquez un jour, un lieu convenable pour le combat singulier entre ces deux hommes. Telle est la loi, telle est la sentence du duc Humphroy.
LE ROI. – Qu'il en soit ainsi. Milord de Somerset, nous vous nommons lord régent de France.
SOMERSET. – Je remercie humblement Votre Royale Majesté.
HORNER. – Et moi, j'accepte volontiers le combat.
PIERRE. – Hélas! milord, je ne saurais combattre. Pour l'amour de Dieu, prenez en pitié ce qui m'arrive; c'est la méchanceté des hommes qui m'a conduit là. O seigneur, ayez pitié de moi! Jamais je ne serai en état de porter un coup. O Dieu! ô mon coeur!
GLOCESTER. – Il faut que tu te battes ou que tu sois pendu.
LE ROI. – Conduisez-les en prison. Le dernier jour du mois prochain sera celui du combat. – Viens, Somerset: nous allons pourvoir à ton départ.
6
Would make thee quickly hop without thy head. Devraient avant peu te rendre boiteux de la tête.
7
I danc'd attendance on his will.