Читать книгу Histoire des salons de Paris. Tome 3 - Abrantès Laure Junot duchesse d' - Страница 3
SALON DE Mme DE SAINTE-AMARANTHE
ОглавлениеAprès avoir parlé de madame de Sainte-Amaranthe et de sa fille, il faut donner quelques détails sur ces deux femmes d'autant plus intéressantes à bien connaître qu'on peut regarder leur maison comme le dernier refuge de ce qui s'appelait encore société en France.
Au moment de la Révolution, madame de Sainte-Amaranthe n'était plus une jeune femme, et depuis longtemps Paris connaissait et son nom et ses aventures. En voici un aperçu:
Madame de Sainte-Amaranthe était d'une bonne famille de Franche-Comté16. Élevée par une mère très-sévère qui ne s'occupait cependant pas d'elle, la jeune fille écouta un capitaine de cavalerie, jeune, beau et riche, fut enlevée ou quelque chose de semblable, et Paris vit arriver bientôt M. et madame de Sainte-Amaranthe, dans tout le premier bonheur d'une lune de miel qui ne devait même pas fournir tous ses quartiers… M. de Sainte-Amaranthe était joueur, passablement mauvais sujet, et il s'ennuya bientôt d'une femme, artiste par l'âme, et qui sentait vivement tout ce qui s'offrait à elle avec une apparence de supériorité. La pauvre enfant avait cru voir de cette manière, dans l'atmosphère qui entourait le bel officier de cavalerie; mais l'illusion fut courte et le réveil prompt. Avec la même sincérité qu'elle avait révélé le secret de son amour, elle laissa voir son désenchantement. Le mari trouva mauvais de n'être plus aimé; il s'éloigna. Il était riche17; mais comme il le savait et n'avait aucun jugement, ce fut bientôt comme s'il ne l'était pas, et un jour il se trouva ruiné. Il avait des enfants; mais, avec un tel homme, les liens de famille étaient nuls. Il quitta la France et passa en Espagne, où il mourut dans la misère.
C'était une singulière personne que madame de Sainte-Amaranthe: tout en elle était étrange et difficile à expliquer. Un homme18 que je voyais journellement, et qui fut longtemps lié avec elle, m'en a si souvent parlé, que je la connais comme si moi-même j'avais fait partie de sa société intime. Cet homme racontait à ravir et peignait, surtout en parlant des gens qu'il voulait faire connaître, et les couleurs avec lesquelles il coloriait le portrait d'une femme autrefois bien-aimée avaient une teinte encore plus vive et plus naturelle.
Il est généralement reçu que madame de Sainte-Amaranthe était fort belle; ceux qui le disent ne la connaissaient pas. Elle était aussi bizarre au physique qu'au moral. Elle se levait avec un visage, une heure après elle en avait un autre: ce visage mobile, ou plutôt cette physionomie était aux ordres d'un sentiment ou d'un effet produit au hasard, ce qui rendait la chose encore plus surprenante. Sa tête était mauvaise et sans aucun raisonnement; mais son âme était noble et grande, son cœur excellent; et, à côté de mille défauts, il y avait en elle une foule de qualités qui les éclipsaient, pour ne montrer après tout qu'une femme qu'on pouvait peut-être blâmer, mais qu'il fallait aimer en même temps, et aimer avec dévouement.
Son esprit n'a jamais été constaté d'une façon positive, mais cela était indifférent; elle savait en faire trouver aux autres. C'est déjà un grand esprit que celui-là. Sa physionomie était vive, animée, flexible sous chaque impression qui la venait toucher. David, qui voulut la peindre plusieurs fois, ne put jamais y parvenir.
– Si je le pouvais en une heure! disait-il… mais l'heure d'ensuite ce n'est plus la même femme.
– Cela est si vrai, disait Sainte-Foix, que je l'ai vue quelquefois n'avoir que trente ans, vingt-cinq ans le matin, et le soir en avoir quarante. – Une telle mobilité ne se conçoit pas.
Après la mort de son mari, restant sans une fortune suffisante pour habiter Paris, elle écouta les vœux du prince de Conti. Ce fut ce qui la perdit dans le monde; l'éclat de cette liaison lui fit un tort qu'elle ne put ensuite réparer; et pourtant elle était bien plus estimable peut-être que beaucoup de femmes qui ne daignaient pas lui rendre son salut… Elle avait une fille qu'elle idolâtrait et qui était un ange de beauté et de bonté. Je ne sais si on connaît ce trait d'elle à l'âge de neuf ans: – Un pauvre ouvrier était sans ouvrage dans ce terrible hiver de 83 à 84, et mourait de froid et de faim dans un grenier, à côté de sa femme et de ses enfants. La petite Émilie apprend le fait. Sa mère était absente, et pour quelques jours l'avait confiée à une vieille parente avare qui n'aurait pas donné une obole, et l'enfant n'avait rien… Je me trompe…; elle avait un trésor, les plus beaux cheveux blond-cendré qu'on pût voir; elle l'avait entendu dire fort souvent. Elle fut chez un coiffeur, les lui vendit pour quelques écus, et fut aussitôt porter la joie dans la mansarde où la mort allait entrer sans elle… Ce trait peint à lui seul toute l'âme d'une femme. Une telle âme ne s'altère jamais.
Émilie était adorée de sa mère, et l'adorait aussi… C'était pour elle que, tout en sachant fort bien qu'elle était sa maîtresse et s'appartenait en propre, madame de Sainte-Amaranthe ne faisait usage de sa liberté que d'une manière convenable, à cause de sa fille. À la vérité, son salon était étrangement composé. On y voyait de toutes les classes de la société: diplomates, ecclésiastiques, militaires, noblesse d'épée, noblesse de robe… enfin son salon était une galerie où chacun passait, où beaucoup revenaient, parce qu'on s'y trouvait bien; et si le préjugé du monde, cette loi tyrannique, n'avait retenu beaucoup de femmes, elles y auraient été également. On jouait très-gros jeu chez madame de Sainte-Amaranthe: toutefois cette partie de l'amusement de sa maison qu'on a depuis blâmée avec tant d'acharnement, était alors une chose assez commune que la fortune et le nom pouvaient faire excuser19, mais qui était blâmée dans une femme qui n'avait ni l'une ni l'autre.
Quoi qu'il ait été dit de madame de Sainte-Amaranthe et de madame de Sartines, je crois qu'il faut revenir sur le jugement que le monde avait porté sur elles. Des femmes qui inspirent de l'amour, cela se voit chaque jour en France, et l'on voit aussi que cela ne dure pas. Mais des amitiés saintes et prolongées, qui survivent au temps et à l'absence, voilà ce qui fait l'éloge d'une âme de femme, et madame de Sainte-Amaranthe avait de ces amis-là.
Pour blâmer une femme avec rigueur, il faut bien connaître sa vie… l'origine de ses fautes… leur motif… Madame de Staël disait:
– Je pardonne, parce que je comprends.
Et c'était en vieillissant qu'elle disait cela; parce qu'en effet, en vieillissant, elle apprenait à connaître la valeur des jugements du monde, et surtout leur vérité.
Au moment où la Révolution commença, en 1789, la maison de madame de Sainte-Amaranthe avait reçu un nouvel ornement: c'était sa fille Émilie. La mère était charmante dans sa vivacité, son mouvement, et cette sorte d'inconstance même dans sa personne comme dans sa pensée; elle était attrayante et plaisait plus généralement que sa fille: mais Émilie plaisait plus fortement. Que de passions profondes cette jeune fille inspira aussitôt qu'elle parut dans le monde! Entourée d'une foule admiratrice, elle fut aimée comme on aime et adore les anges…! Simple, naturelle, pensive et mélancolique, elle ne paraissait pas aimer le monde comme sa mère l'aimait… Souvent elle restait dans la partie la plus solitaire du salon, pendant qu'à l'éclat de cent bougies, autour d'une table de jeu, sa mère perdait ou gagnait des sommes énormes, occupée à une douce conversation avec Gossec, le fameux musicien, ou David, ou quelque artiste en premier renom. Jamais un mot amer ne sortit de sa bouche, et, par son rare et doux sourire, on voyait qu'elle était loin de partager cette gaieté folle qui l'entourait et qui même souvent paraissait la fatiguer.
Un mot de Gossec sur la mère et la fille peut contribuer à en donner une idée assez juste: je le trouve spirituel.
– Lorsque je vois madame de Sainte-Amaranthe, disait-il à David et à Sainte-Foix, je me sens disposé à la gaîté, je composerais une gavotte…; mais quand j'aborde Émilie, quand je vois son sourire triste et doux, son regard voilé par de si longues paupières qui semble interroger un objet inconnu… alors je me sens tout saisi de respect… il me semble que j'entends un hymne religieux.
Il paraît, d'après ce que j'ai entendu dire à M. de Sainte-Foix, M. de Narbonne et surtout le comte de Tilly20, que rien ne pouvait être comparé au regard d'Émilie de Sainte-Amaranthe: c'était le ciel ouvert que ses yeux, lorsqu'ils s'arrêtaient sur vous, en y ajoutant une grâce charmante, une angélique douceur, des traits ravissants, une tournure et une taille de nymphe; on peut facilement croire qu'elle fût, en effet, bien aimée!..
Pour en revenir à la mère, qui était l'âme de son salon, c'était surtout le soir qu'elle était adorable, à son tour… Madame de Sainte-Amaranthe était éminemment la femme des heures nocturnes: tant que le jour éclairait Paris, elle dormait ou bien se tenait si bien enfermée qu'elle ne l'apercevait pas; ce n'était qu'au moment où les bougies s'allumaient qu'elle redevenait elle-même: alors sa tête se relevait, son regard, son sourire, s'animaient; elle était gaie, contente de vivre; sa parole montait ses esprits à elle-même en même temps qu'elle agitait les autres; M. de Champcenetz, qui allait chez elle fort souvent, l'avait nommée une machine à salon… Et la grande variété qu'elle laissait voir dans ses manières avait peut-être inspiré ce mot. Elle parlait à une femme qui entrait, disait adieu à une autre qui partait, donnait un coup d'œil gracieux à un homme tandis qu'à un autre elle envoyait un regard de mépris ou de colère, elle faisait une révérence à un duc et pair, adressait un signe à un peintre, et tout cela en même temps… C'était merveille de voir comme elle tenait le sceptre de souveraine dans son salon!.. Elle y maintenait un continuel mouvement; elle aimait qu'on y parlât, mais très-haut. Elle défendait strictement les conversations à voix basse; lorsque la conversation s'établissait ainsi à voix basse, rien n'était plaisant, me racontaient les amis qui étaient toujours chez elle, comme de la voir partir de sa bergère et courir dans tous les sens, parlant à tort et à travers à ceux qui causaient à voix basse, et transformant en un instant son salon en un lieu bruyant et animé: c'était comme une fusée qui mettait le feu à un bouquet d'artifice.
Sa fille et elle ne s'entendaient sur aucun point: elles avaient souvent des discussions, mais jamais sérieuses, car elles s'aimaient tendrement et avaient même l'une pour l'autre une adoration entière et profonde; leurs caractères étaient différents comme leur genre de beauté: l'une était jolie, l'autre belle, et toutes deux plaisaient.
Tous les hommes ayant un nom, une fortune, une position dans le monde, se faisaient présenter chez madame de Sainte-Amaranthe. Les étrangers de distinction, tout ce qui arrivait à Paris allait chez elle. M. de Bourgoing, notre ministre en Espagne, vint chez madame de Sainte-Amaranthe, dans un voyage qu'il fit de Madrid à Paris; il ne connaissait encore ni la mère ni la fille. La mère, ce jour-là, était dans une de ces journées radieuses dans lesquelles elle paraissait à peine vingt ans. Il crut que madame de Sainte-Amaranthe n'était pas encore sortie de son appartement, et lui parla à elle-même comme si elle eût été sa fille… Les deux femmes rirent beaucoup… et madame de Sartines passant un bras autour de la taille de sa mère…: Vous avez raison, monsieur, dit-elle à M. de Bourgoing; en effet, c'est une sœur pour moi…!
Et riant toujours elle embrassait sa mère, et toutes deux avaient l'air de deux jeunes filles.
Le comte Louis de Narbonne, M. de Vaudreuil, M. de Condorcet, M. de Sainte-Foix, le marquis de La Vaupalière, le marquis de Ximénès, M. de Champcenetz, M. de Jaucourt (Clair de Lune), le comte de Tilly, le prince de Larency, le prince de Rohan, l'abbé Delille, et encore des poëtes, des peintres, des sculpteurs, des artistes, tout cela formait le fond de la société de madame de Sainte-Amaranthe avant 92. Mais lorsque la tempête gronda, le salon changea d'habitants, excepté pourtant les artistes, qui furent fidèles jusqu'au jour où le tocsin sinistre tinta aussi pour eux, et les artistes seuls demeurèrent fidèles; et cette maison, jadis si brillante, devint presque silencieuse.
Mais les revers devinrent plus répétés à mesure que la Révolution marchait dans la voie. La fortune de madame de Sainte-Amaranthe, qui n'était que fort éphémère, et reposant en grande partie sur l'état lui-même qu'elle tenait, disparut entièrement en 1792. Ce fut alors cependant qu'Émilie se maria et épousa le jeune monsieur de Sartines, fils de l'ancien ministre et maître des requêtes.
Pour remplacer ce qu'elles avaient perdu, et peut-être aussi pour avoir un état apparent qui détournât l'attention des yeux de tigre des hommes du pouvoir, madame de Sainte-Amaranthe et sa fille devinrent maîtresses de pension, non pas d'une maison d'éducation, mais d'une table d'hôte enfin. Cette mesure donnait à la mère une illusion de fortune et de maison, et puis la mettait, du moins elle le croyait, à l'abri des persécutions du moment. Une autre femme aurait vécu dans la solitude; elle ne le pouvait pas… l'infortunée le paya cher!..
Tout ce qui avait échappé à l'exil, à la prison, à la fuite, à la mort, venait alors chez madame de Sainte-Amaranthe. Ce fut vers cette époque que M. de Sartines, jeune maître des requêtes, et fils de l'ancien lieutenant de police et ministre de la Marine, devint épris d'Émilie; il la demanda pour femme. Il l'avait admirée chez sa mère lorsque son air doux et mélancolique contrastait avec le mouvement de cette maison si bruyante; maintenant il la retrouvait plus belle encore de la résignation d'une existence brillante et perdue. Continuellement en crainte, et presque toujours en deuil d'amis morts sur l'échafaud permanent, Émilie semblait un ange pleurant sur des tombeaux; M. de Sartines se proposa… Madame de Sainte-Amaranthe, redoutant continuellement un malheur, n'hésita pas un moment. Émilie, interrogée seulement pour la forme, ne répondit que par le silence; on le prit pour un consentement, et elle devint la femme de M. de Sartines.
Les hommes d'alors étaient odieux à madame de Sainte-Amaranthe: elle leur préférait toute autre société; mais celle qu'elle avait toujours le plus aimée, au reste, lui était toujours restée fidèle. Les artistes étaient reconnaissants de ce qu'elle avait été pour eux dans le temps de sa prospérité; ils ont de nobles cœurs! J'ai pu admirer moi-même à quel degré les artistes supérieurs portent la reconnaissance; madame de Sainte-Amaranthe l'éprouva comme moi.
Mais elle était triste, et leur talent n'était plus invoqué.
– Lorsque j'entends chanter, les larmes me viennent aux yeux, disait-elle…
Parmi les artistes qui allaient chez elle dans les premières années de la Révolution, un surtout s'était fait distinguer parmi tous les autres: il n'avait que vingt-deux ans, il était parfaitement beau; sa voix avait un charme qui ravissait, et son jeu annonçait qu'il surpasserait et ferait oublier Clairval et Michu21; quant à sa naissance et à sa position sociale, elles étaient toutes deux de nature à le faire accueillir partout, et surtout dans la maison de mesdames de Sainte-Amaranthe. La mère l'avait reçu avec cette grâce qu'elle mettait toujours à recevoir les hommes remarquables ou qui annonçaient du talent, et, certes, les essais de celui-là étaient de nature à faire prévoir ce qu'il serait un jour. Reconnaissant de la bienveillance qu'on lui montrait, le jeune homme vint d'abord pour le témoigner, ensuite un sentiment plus profond l'attira dans cette maison; un seul mot l'expliquera: mademoiselle de Sainte-Amaranthe n'était pas mariée alors.
C'est une figure si suave et si belle que celle de madame de Sartines, que je ne puis me résoudre à parler d'elle sous un rapport qui pourrait ternir l'auréole qui entoure son céleste visage. Je veux donc faire comprendre que le sentiment qui unissait à elle le jeune et bel artiste était aussi pur que l'âme de celle qui éprouvait pour lui un sentiment aussi profond qu'il était tendre. Mais ni l'un ni l'autre n'avait parlé; les yeux d'Émilie, même, étaient demeurés muets devant un bonheur que devait suivre un remords. Tant qu'elle fut libre, elle garda le silence, bien certaine que sa mère n'aurait jamais consenti à ce mariage; et lorsqu'elle fut mariée, elle était encore plus empêchée, car alors le devoir de la femme lui commandait de fuir l'adultère.
Cet amour chaste et pur comme celui des anges fut donc presque ignoré; car on ne pouvait que le présumer à une émotion plus vive ressentie en entendant prononcer un nom. Oh! de telles affections sont grandes et saintes! et peut-être donnent-elles au cœur plus de joies divines qu'un sentiment sanctionné par la voix de tous. Les mystères de l'âme ont un charme inconnu à ceux qui n'ont pas aimé pour le bonheur seul d'aimer, et dont l'égoïsme du cœur se tait devant la puissance de cet amour silencieux, heureux de dire: Je l'aime!.. et non: Je suis aimé!
L'artiste déjà célèbre dont je parle venait habituellement chez madame de Sainte-Amaranthe; il avait deviné le chagrin de la mère et de la fille au moment où leur maison avait cessé d'être ce qu'elle était, et voulait leur apporter à toutes deux une consolation que leur cœur comprit… Ce fut alors que les Girondins, reconnaissant tout le charme de la maison de madame Sainte-Amaranthe, y vinrent en foule pour y jouir de cette douce causerie et des entretiens élevés qu'on y trouvait. Cette Gironde, dans laquelle étaient les esprits les plus remarquables de l'assemblée, partageait son temps entre ses devoirs parlementaires, madame Roland et madame de Sainte-Amaranthe; insensiblement les hommes mal pensants s'éloignèrent d'eux-mêmes, et les artistes et les Girondins demeurèrent, avec quelques anciens et nobles amis qui avaient échappé au couteau révolutionnaire, les seuls commensaux de la maison de madame de Sainte-Amaranthe… le génie sous toutes les formes y ralluma de nouveau son flambeau.
Cependant tous les artistes n'étaient pas demeurés chez madame de Sainte-Amaranthe; quelques-uns en avaient été éloignés par elle-même: de ce nombre était David.
– Pour vous-même, lui avait-elle dit, il y a ici trop de gens qui vous blâment.
– J'ai fait mon devoir, répondit David.
– Ne me parlez pas ainsi, voyez-vous! Votre devoir!.. tenez, laissez-moi! n'insistez pas sur la continuation de nos relations, elles ne nous conviendraient plus.
Madame de Sainte-Amaranthe voulait parler non-seulement de la mort du Roi et du vote de David22, mais des deux tableaux qu'il avait faits depuis ce moment, l'un pour Lepelletier de Saint-Fargeau, l'autre pour Marat.
Lorsque le procès du Roi fut terminé et qu'on dut procéder aux votes, plusieurs membres de la Convention reçurent des avis pour ne pas voter, et cela avec menaces; Lepelletier reçut deux lettres, dont l'une était anonyme, et l'autre signée du nom d'un garde-du-corps du Roi appelé Paris. Dédaignant les avertissements donnés, Lepelletier vota la mort… Le lendemain, se trouvant chez Février, restaurateur au Palais-Royal, il y rencontra Paris.
– Je t'avais averti, lui dit ce dernier, en lui plongeant un couteau dans le cœur!..
Lepelletier tomba mort.
David fit un tableau sur cet événement; il aimait Lepelletier, et voulut consacrer ce qu'il appelait son martyre. Il fit un grand tableau représentant Lepelletier étendu sur son lit mortuaire; au-dessus de sa tête, on voyait un sabre suspendu par un cheveu et traversant un papier sur lequel est écrit:
Je vote pour la mort du tyran.
En haut du portrait est placée l'inscription suivante,
L'an 1793, 2e de la République,
À Michel Lepelletier,
Assassiné pour avoir voté la mort du tyran,
L. – J. David, son collègue
Quelques mois après, la France gémissait sous la plus épouvantable faction que les troubles politiques aient jamais fait éclore. Quelques victimes crièrent au secours; leur cri de détresse fut entendu par une noble femme. Elle apprit en même temps que Marat avait dit:
– Le mal du système actuel, c'est qu'il est trop doux. Il faut que le sang coule… non par gouttes, mais à TORRENTS.
– Voilà celui que je dois frapper, se dit-elle!
Et Charlotte Corday arrive à Paris le 12 juillet 1793. Le lendemain, Marat n'existait plus, et nos fers étaient rivés encore plus fortement, car les décemvirs qui décimaient la France vengèrent sa mort sur des innocents. À l'occasion de la mort de Marat, il vint une députation conduite par Guirault, qui s'écria en entrant dans la Convention:
– Où es-tu, David? tu as transmis à la postérité l'image de Lepelletier mourant pour la patrie… Il te reste encore un tableau à faire!..
– Je le ferai! s'écrie à son tour David d'une voix tremblante d'émotion…
Et ces deux hommes s'embrassent en pleurant!.. Ils auraient pu faire croire, en vérité, si l'histoire n'avait pas été LÀ, que Marat était le premier citoyen de la France!..
Il fit donc ce tableau dont j'ai vu l'esquisse23, et le fit effrayant de vérité. Le monstre est mourant dans sa baignoire, pâle, livide, coiffé d'un mouchoir!.. il était hideux.
Cette volonté de faire servir son talent à représenter, à perpétuer le souvenir des horreurs de l'époque, paraissait coupable plus que tout le reste à madame de Sainte-Amaranthe: elle le témoigna à David; quant à Émilie, cet homme lui avait toujours été odieux. Le jour où il revint chez sa mère, elle tressaillit en le voyant; David s'aperçut de ce mouvement… – Vous devriez venir voir mon dernier ouvrage, dit-il à madame de Sartines, en s'approchant d'elle… il est assez héroïque pour plaire à une femme comme vous!.. Voulez-vous le voir?..
Émilie demanda en frémissant quel était le sujet?
– Il est touchant, répondit David.
Et il lui raconta qu'un jeune enfant âgé de douze ans, Joseph Barra, natif du village de Palaiseau, appartenant à une pauvre famille, s'engagea comme tambour afin de soulager sa pauvre mère… il partit pour la sanglante guerre de la Vendée… Un jour, il fut entouré par les troupes vendéennes.
– Rends-toi, lui dit-on, et crie vive Louis XVII! – Vive la République! s'écrie l'héroïque enfant, tandis que vingt baïonnettes étaient croisées sur sa poitrine… Au même instant il tomba mort… Cependant il eut le temps de presser sur son cœur sa cocarde tricolore.
C'était ce moment que David avait représenté. Émilie le remercia, en lui promettant d'aller visiter son atelier lorsqu'il aurait des sujets plus gais: car, ajouta-t-elle en souriant, nous n'avons sous les yeux que de tristes images; pourquoi les multiplier encore?
David sortit de cette maison avec un sentiment pénible: on l'avait presque humilié… Il n'était pas aussi méchant qu'on le dépeint sans doute; cependant il l'était assez pour effrayer ceux qu'il pouvait vouloir perdre… Ce n'était pas son intention de nuire aux dames de Sainte-Amaranthe; mais, sans le vouloir, il parla d'elles dans un sens malveillant. Saint-Just et Robespierre le questionnèrent: il raconta l'intérieur de cette maison, l'accueil fait toujours de préférence aux nobles et aux gens d'autrefois, et tout récemment à la Gironde tout entière.
– J'y ai dîné, leur dit-il, avec Guadet, Gensonné, Boyer-Fonfrède, Valazé, et cinq ou six autres.
Robespierre fronça le sourcil… Dès ce moment, la maison de madame de Sainte-Amaranthe fut entourée d'une triple surveillance.
La Gironde mourut… En perdant ses nouveaux amis, madame de Sainte-Amaranthe fut désespérée!.. l'inertie de la nation lui parut criminelle.
– Oh! que n'avons-nous encore des Charlotte Corday! s'écriait-elle.
Un jour, David revint chez elle.
– Je viens vous avertir, comme ami, lui dit-il. Prenez garde aux hommes que vous recevez: Robespierre m'a chargé de vous parler de cela.
– Eh! grand Dieu! demanda madame de Sainte-Amaranthe, comment des personnes aussi obscures que nous le sommes peuvent-elles marquer devant le chef du pouvoir?.. Je ne vois que peu de monde, j'en verrai encore moins.
On allait peu au spectacle; les théâtres étaient devenus des lieux indignes de recevoir une femme qui se respectait encore… Émilie était un jour à l'Opéra-Comique: heureuse d'oublier un moment ses douleurs, la charmante créature était belle comme une de ces péris radieuses que nous offrent nos rêves.
– Quelle belle personne, dit Robespierre à Saint-Just…
– C'est mademoiselle de Sainte-Amaranthe.
– En vérité! je ne l'aurais pas reconnue… elle est ravissante!..
– Oui, elle est belle, répondit d'un ton sombre le farouche ami de Maximilien…; mais elle et sa mère sont traîtres à la République.
Robespierre leva les épaules.
– Tu ne veux pas le croire? eh bien! mets auprès d'elle un ou deux espions, et tu verras.
– Ce que je veux bien voir, je n'en charge que moi, dit Maximilien…; j'irai chez madame de Sainte-Amaranthe.
En effet, il y vint avec saint-Just, Legendre, Barrère, et plusieurs autres…; ils crurent que la maison de madame de Sainte-Amaranthe était une succursale de Coblentz, où ils allaient trouver un foyer de conspiration; mais la maison était une sorte de bazar où chacun entrait et sortait sans laisser de trace. Il fallait étudier cet intérieur…: ce fut en effet Robespierre qui s'en chargea.
C'est alors qu'il devint amoureux d'Émilie… Il était d'abord venu dans des intentions sinistres; mais, attaché par cette amabilité enchanteresse de la mère, ébloui, touché des grâces et de la beauté de madame de Sartines, il résolut, avant tout, d'exercer sur elle un autre empire que celui de la terreur.
Robespierre, lorsqu'il le voulait, savait prendre un ton parfait, des manières de gentilhomme, et ne rappelait en rien sa sanglante renommée. – Il faisait des vers pour Émilie24; il chantait des romances qui signifiaient ce qu'il ne voulait pas encore dire… il envoyait des bouquets… C'était une idylle tout entière que la conduite de Robespierre.
– Que me veut cet homme? disait Émilie à cet artiste; que me veut-il?.. Il me fait mal, lorsque son œil rouge et enflammé s'arrête sur moi!..
Et, en parlant ainsi, son regard d'ange dévoilait de douces et suaves pensées à celui dont l'amour l'adorait en silence.
Le parti de Robespierre fut alarmé de cet amour pour une femme née leur ennemie… Leur ennemie!.. la douce créature ne savait pas haïr même les méchants. Mais ce n'étaient pas des hommes tels que Saint-Just et Henriot qui pouvaient comprendre une telle âme. Bientôt des paroles moqueuses furent dites à Robespierre: on lui reprocha de soupirer, de faire des madrigaux, et de n'avoir encore rien obtenu. Le tigre pouvait sommeiller, mais il vivait toujours!.. En écoutant les railleries de Saint-Just, il sourit avec une expression qui annonçait le malheur de deux femmes innocentes.
Une des prétentions de Robespierre, car il en avait beaucoup, était d'être aimé, et de l'être par le seul effet de son regard; il lui croyait la puissance magnétique d'attirer à lui irrésistiblement… Une autre de ses faiblesses était que son triomphe fût connu.
Émilie, tremblante pour sa mère, son frère, son mari et sa belle-sœur, flattait le tigre, espérant ainsi le museler… Pauvre enfant!.. Maximilien ne vit dans la douceur de son sourire, la suavité de son regard, que le sentiment qu'il crut lui inspirer… Il en fut heureux, et il le laissa voir à plus d'un de ses amis. Mais ce n'était pas tout: il fallait célébrer ce triomphe, et une fête fut ordonnée à Maisons (non pas le même que celui de M. Laffitte), près de Charenton dans un lieu charmant qu'il avait fait arranger, et qui servait en de semblables occasions…
Il paraît certain que Maximilien aimait madame de Sartines…; il était pour elle comme il ne fut pour aucune autre femme dans cette journée passée à la campagne… Quand il y a de l'amour dans le cœur, il y a de la confiance même chez le plus scélérat. Robespierre, en étant auprès d'Émilie, qui, tremblant constamment pour les siens, n'osait jamais le repousser, se laissa aller plus loin que la prudence ne le permettait. Il parla d'abord d'amour…; ensuite, voulant éblouir, il parla de la haute position à laquelle il touchait…; il dit son secret enfin, et celui de son parti.
Le lendemain, un de ses fidèles fut le trouver: Robespierre était sombre; il savait que les excès, quelque faibles qu'ils fussent, lui étaient nuisibles, et s'y livrer était donc une faute selon lui; mais il ignorait encore jusqu'où elle avait été.
– Maximilien, lui dit l'ami, as-tu le souvenir de ce que tu as fait cette nuit?
ROBESPIERRE
Il est inutile de me le rappeler: ma tempérance est assez connue. Si je me suis oublié, cela m'arrive trop rarement pour que l'on m'en fasse un reproche.
SAINT-JUST
Et si cet excès avait une suite funeste, non-seulement pour toi, mais pour tes amis?
ROBESPIERRE
Que veux-tu dire?..
SAINT-JUST
Qu'hier tu t'es oublié…; tu as parlé, et tu nous exposes aux plus grands périls.
ROBESPIERRE
Mais… nous étions seuls!
SAINT-JUST
Seuls!.. et ces femmes?
ROBESPIERRE
Ces femmes?.. mais elles m'aiment, ces femmes; que puis-je craindre d'elles?..
SAINT-JUST
Maximilien, Henriot et moi, nous t'avons toujours retenu sur le bord de cet abîme, où ton entêtement vient de te faire tomber… Dans ton indiscrétion, tu as laissé entendre des noms qui compromettent d'autres têtes avec la tienne… Si tu étais seul, tu serais libre; mais d'autres marchent dans ta voie, et ceux-là agiront à la fois et pour eux et pour toi… Il faut prendre un parti.
ROBESPIERRE, fort pâle
Que faut-il faire?
SAINT-JUST
Envoyer ces femmes à la mort.
ROBESPIERRE
Y penses-tu?..
SAINT-JUST
C'est le seul moyen de nous conserver; songes-y?
ROBESPIERRE, tombant sur une chaise
Non… je ne le veux pas!
SAINT-JUST
Je t'ai dit que tu n'agiras en toute cette affaire que sous la direction de ceux que tu as compromis… Songe à cela, Maximilien!
Robespierre n'était qu'une figure visible du grand principe que les terroristes de 93 mettaient en avant. Dans sa renommée, rien ne venait de lui; sa force était empruntée; il ne pouvait rien par lui-même.
Trois jours après cette malheureuse fête de Maisons, madame de Sainte-Amaranthe fut arrêtée dans sa maison, avec madame et M. de Sartines, son jeune fils, et la sœur de M. de Sartines.
Une heure avant l'arrivée de la force armée, elles avaient reçu une lettre25 sans signature, dit-on, qui leur recommandait de fuir promptement… Elles s'y disposaient lorsqu'elles furent arrêtées.
Madame de Sainte-Amaranthe fut ordinaire comme courage; tout le monde en avait alors; mais Émilie fut sublime. Calme, résignée, conservant cette liberté d'esprit qui indique le vrai courage, elle fit rougir plus d'une fois ces monstres bourreaux, qui ne rougissaient jamais.
Il était difficile de condamner deux femmes dont la vie était aussi inoffensive… Le prétexte fut bientôt trouvé. Elles furent condamnées comme complices d'Admiral, assassin de Collot-d'Herbois… Madame de Sartines sourit avec mépris en écoutant ses juges.
– Pourquoi mentir? leur dit-elle. Il fallait dire en nous condamnant pourquoi vous prenez nos têtes… votre iniquité en serait moins vile.
Et se tournant vers sa mère, elle lui parla avec calme et tendresse pour la fortifier.
C'est la preuve d'une haute supériorité qu'un courage de sang-froid comme celui de madame de Sartines… surtout lorsque la vie bouillonne dans vos veines, que vous avez encore tant d'années devant vous à parcourir, et que vous vous voyez ainsi retranché brusquement des vivants. Alors, quand nous voyons une vive énergie sans ostentation, nous devons nous incliner devant elle; et lorsque c'est une femme jeune et belle qui agit ainsi, nous devons ajouter à notre respect une vive et profonde admiration.
Madame de Sartines coupa elle-même ses cheveux, et les partagea en plusieurs lots qu'elle chargea le concierge de la Conciergerie de remettre aux personnes qu'elle lui désigna. Sa mère était abattue… Émilie fut à elle, et l'embrassant avec son jeune frère: Ma mère, lui dit madame de Sartines… comme nous sommes heureux! nous mourrons avec toi!
Lorsqu'on leur apporta les robes rouges qu'elles devaient revêtir pour aller à la mort, madame de Sainte-Amaranthe repoussa d'abord la sienne, et retomba pâle et sans force sur sa chaise. Madame de Sartines fut encore pour elle un ange consolateur, et fortifiant sa faiblesse, donnant elle-même l'exemple, elle vint ensuite se montrer à sa mère, comme pour lui dire:
– Aurai-je plus de courage que ma mère?
Mais lorsque les victimes furent dans le fatal tombereau, madame de Sainte-Amaranthe reprit sa présence d'esprit; elle causa avec sa fille, encouragea son fils et son gendre, et ces infortunés bravèrent ainsi jusque dans la mort ceux qui les assassinaient.
Tout à coup madame de Sartines, qui parlait avec la gravité que demandait le moment, mais avec une entière présence d'esprit, s'arrêta au milieu d'une phrase; son front pâle reçoit une teinte encore plus blanche, son œil se voile…; une larme est suspendue à sa longue paupière; sa bouche se resserre convulsivement… Ah! c'est que, parmi cette foule oiseuse qui vient voir mourir deux pauvres femmes portant la chemise rouge, parmi cette foule cruelle, son œil a rencontré celui d'un être dont le regard a fait battre son cœur plus rapidement… elle cherche encore celui du malheureux qui est venu demander un dernier signe d'amour à celle qui va mourir!.. Une douce reconnaissance émeut le cœur d'Émilie en remarquant la physionomie bouleversée de cet ami qu'elle ne doit plus revoir, et que pourtant elle aimait tant!.. À cette pensée, sa tête se penche sur sa poitrine… ses yeux se ferment… elle croit mourir avant de toucher l'échafaud…! L'échafaud…! ce mot évoqué par elle-même la fait tressaillir…; mais ce n'est pas pour elle…! quel spectacle pour le malheureux…! Émilie relève sa tête avec force…; son beau regard se promène sur cette foule avide…; elle cherche de nouveau un visage aimé…; elle a retrouvé son œil chargé de pleurs attaché sur elle… Une dernière fois attachant, appuyant son regard sur le sien, elle lui révèle, POUR LA PREMIÈRE FOIS, tous les trésors d'affection que contenait son cœur; puis, rassemblant toutes ses forces, elle le supplie, par la puissance de ce même regard, de fuir cette scène d'horreur et de deuil… D'abord, son ami ne put lui obéir…; il suivait machinalement cette charrette où sa vie était attachée… Tout à coup un cri sourd fut entendu… Émilie ouvrit les yeux…; elle tressaillit… car elle approchait en ce moment de l'échafaud!.. Mais ce n'était pas elle qui avait crié…
16
Madame de Sainte-Amaranthe était en son nom Saint-Simon d'Arpajon. Elle est née à Besançon; sa famille n'était pas riche, mais noble.
17
Son père était receveur-général des finances, et fort riche.
18
M. de Sainte-Foix; il avait été fort aimé de madame de Sainte-Amaranthe, et depuis son ami intime.
19
Nous l'avons vu chez la duchesse de Luynes.
20
Celui qu'on appelait le beau Tilly; il était page de la Reine… alla se marier si étrangement en Amérique, qu'il divorça le lendemain de ses noces, et finit par se tuer d'un coup de pistolet.
21
Clairval et Michu avaient été les talents les plus remarquables de l'Opéra-Comique, c'est-à-dire la comédie italienne.
22
Jean-Louis David, né à Paris en 1748. Il était fils d'un marchand de fer167, qui mourut dans un duel, mort assez rare à cette époque pour un homme de sa classe. David fit de bonnes études aux Quatre-Nations, et fut élevé pour être architecte. Il n'aimait pas cette profession, et ce fut un jour qu'allant voir Boucher, il sentit une telle vocation pour la peinture, qu'il obtint enfin de sa mère de suivre les cours de la peinture d'histoire. Il suivit les cours de Vien, et obtint bientôt le prix. Grâce à la généreuse bonté de mademoiselle Guimard, il obtint le grand prix, partit pour Rome avec Vien, et là il étudia et devint ce que nous l'avons vu ici. Son dessin était beau, mais ses incorrections, son mauvais goût, son mauvais coloris, lui enlevaient la place du premier peintre de l'époque.
23
Elle était à Versailles chez M. de Bonnecarèce, qui l'avait eu de David lui-même, dont il était l'ami.
24
Voici le quatrain fait pour elle; il est déjà dans le Salon de Robespierre.
Sur le pouvoir de tes appas
Demeure toujours alarmée;
Tu seras d'autant plus aimée,
Si tu veux ne l'être pas.
25
On a dit que cette lettre était de Robespierre; je le croirais sans peine.