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CHAPITRE PREMIER
La lumière astrale et les cabalistes. Le miroir magique. L’argent corné des alchimistes. Les silhouettes de Charles.–Niepce et Daguerre.

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Table des matières

On voit dans un musée de Guttheingue un merveilleux portrait de jeune fille peint dans une glace. C’est une œuvre suave et étrange qui impressionne aussi vivement que la Joconde. La légende qui se rattache à tout chef-d’œuvre sans nom raconte que la jeune fiancée prête à s’arracher des bras de son bien-aimé, et voulant lui laisser son portrait, fut poussée par un irrésistible désir à se regarder dans la glace, et que le cristal retint son image. L’idée du conte, rappelée par Gœthe, Schiller et Hoffmann, est charmante, mais la rêveuse Allemagne ne l’eut pas seule. Le premier amant qui vit les traits de sa bien-aimée reproduits dans le métal poli désira fixer cette fugitive image, et l’idée de la photo garaphie naquit ainsi dans l’esprit de l’homme longtemps avant que le dessin fût inventé.

Née en Orient, dans le pays où le mirage bâtit ses merveilleux palais et où les sables chauffés par le soleil semblent retenir pour la rendre un jour l’image des caravanes qui les ont traversés et des oasis ensevelies par le simoun, la cabale, qui n’est que la tradition lointaine des civilisations et des croyances passées, a fait de la conservation des images par la lumière astrale un des dogmes qu’elle transmit par initiation, et qu’adoptait Paracelse lorsqu’il cherchait, avec les alchimistes le secret du miroir magique. MM. Constant et Desbarolles, les deux grands adeptes de la cabale à notre siècle, nous ont fait connaître dans leurs livres de haute science cette curieuse doctrine.

Pour eux, rien ne se perd dans la nature, les formes antérieures ne sont pas même détruites, le moindre reflet est empreint et conservé dans une matière éthérée qui forme la lumière astrale et nous enveloppe, et ces images, vains fantômes en apparence, apparaissent ou reviennent à la vie lorsqu’une force sympathique et appropriée les évoque. Le médium ou le somnambule lit dans la lumière astrale et jouit simplement, suivant eux, d’une vue plus parfaite que celle du vulgaire. Si l’on se montre trop incrédule à de pareilles doctrines, ils vous citent volontiers les fantaisies de Balzac dans Louis Lambert et ce passage du Cousin Pons: «Si quelqu’un fût venu dire à Napoléon qu’un édifice et qu’un homme sont incessament et à toute heure représentés par une image dans l’atmosphère, que tous les êtres existants y ont un spectre saisissable, perceptible, il aurait logé cet homme à Charenton, comme Richelieu Salomon de Caux à Bicêtre, lorsque le martyr normand lui apporta l’immense découverte de la navigation à vapeur; c’est là cependant ce que Daguerre a découvert.»

L’idée de fixer l’image d’une manière durable ne date donc pas d’hier, les siècles antérieurs l’avaient sentie passer sous leurs fronts et s’étaient mis à la recherche des moyens de résoudre ce problème. Le moyen âge tout entier avait poursuivi ce but sans résultats possibles, il est vrai, mais ses expériences, quelque incomplètes qu’elles fussent, tendaient à faire descendre l’idée des hauteurs mystérieuses où l’avait prise la cabale dans le domaine des faits, et étaient les prémices fatales de celles du dix-huitième siècle. L’alchimie s’égara sans doute à la poursuite de plus d’un rêve, mais elle précédait et avait annoncé la chimie comme les lueurs encore sombres de l’aube précèdent et annoncent l’éclat du jour. Ses efforts pour conquérir le secret de la transmutation des métaux l’avaient mise sur la voie de quelques découvertes d’où sortit l’invention, aujourd’hui incontestable, du miroir magique.

«Lorsque Schrœpfer, que tout Leipzig a connu, dit un auteur fort versé dans ces matières, lorsque Schrœpfer faisait apparaître dans un miroir magique l’ombre des parents de ceux qui le consultaient, il ne faisait pas autre chose que ce que fait chaque jour le photographe. Il allait seulement un peu plus loin. Il augmentait la puissance visuelle et voilà tout. Lorsque plus tard cette puissance sera généralement développée, on trouvera bien ridicule ce que nous appelons maintenant la raison.»

La photographie n’est donc pas tout à coup, comme Minerve du cerveau de Jupiter, sortie du cerveau d’un mortel privilégié. Sa genèse serait longue et curieuse. Elle suivrait l’esprit humain dans toutes les phases de son développement; nous la verrions jouant son rôle dans l’initiation antique, préoccupant les souffleurs chercheurs du grand œuvre et se formulant parfois d’une manière si nette dans l’esprit d’un rêveur, qu’on se demande presque si ces secrets ne furent pas vingt fois trouvés et perdus.

Ce que nous constatons là n’enlève rien à la gloire de l’époque qui a su mener l’enfant à terme, mais les faits qui précèdent prouvent que si, de nos jours, deux hommes, profitant des études et des tentatives de leurs devanciers, ont pu créer un art nouveau, que si l’un des deux surtout a pu attacher son nom à la découverte qui fait leur gloire commune, quelques esprits hardis les avaient devancés, et que les efforts de leurs prédécesseurs furent d’utiles jalons placés par le passé sur la route de l’avenir. En faisant la part des premiers nous faisons en même temps la part des derniers venus. Ceux-ci ont utilisé l’héritage des générations précédentes. La richesse amassée n’a pas diminué entre leurs mains, elle s’y est accrue, au contraire, et leur triomphe définitif est devenu le trésor de tous.

Ces longs tâtonnements sont d’ailleurs le fait de tout progrès humain; toutes les découvertes ont leur gestation longue et pénible, leur enfance pleine de faiblesse et d’incertitude, et lorsque après avoir grandi à l’ombre, elles éclatent au grand jour, elles font l’étonnement et l’admiration universels.

Il y eut un jour de l’année1839, le10août, où l’esprit tout entier d’une nation s’associa dans le sentiment d’un commun enthousiasme. Ce jour-là, un savant illustre, à la voix éloquente, à la renommée justement populaire, confiait à l’oreille du public ébloui le premier mot de l’énigme que les siècles précédents avaient vainement essayé de déchiffrer. Cette énigme avait enfin trouvé son Œdipe, ou plutôt ses Œdipes, car ils étaient deux qui avaient deviné le sphinx en même temps. Ces hardis et heureux génies s’appelaient Niepce et Daguerre, et l’honorable directeur de l’Observatoire, Arago, dans son rapport aux deux sections réunies de l’Institut, leur attribuait la plus grande découverte du siècle.

Les deux inventeurs, en effet, avaient trouvé le moyen de fixer, par l’action de la lumière et d’une manière durable, les images mal gardées jusqu’ici par la chambre noire. L’un des inventeurs, il est vrai, était mort depuis quelques années, mais l’heure de la réparation avait sonné, et sa mémoire se trouvait désormais inséparable de celle de son associé. Cependant le nom seul du survivant allait s’attacher, dans l’imagination populaire, à l’instrument trouvé par l’un des deux inventeurs; Daguerre allait créer le daguerréotype, et en baptisant ainsi son appareil, s’assurer aux yeux des masses une immortalité certaine et durable.

Lorsque Arago eut parlé, l’enivrement gagna toutes les têtes, à l’étranger comme en France, et, comme toujours, les jalousies internationales élevèrent des revendications où perçait le dépit des rivaux offusqués par cette nouvelle gloire de notre pays. L’Angleterre et l’Allemagne réclamèrent, chacune de leur côté, la priorité de la découverte. L’Allemagne se montra la plus injuste; or, comme elle n’avait rien de sérieux à nous opposer par elle-même, elle braqua ses lunettes sur l’antiquité et se mit à faire contre nous de l’érudition fantaisiste en pure perte. L’Allemagne et l’Angleterre en furent pour leurs frais de mauvais vouloir et d’imagination. L’héliographie resta française et fille de Niepce, comme le daguerréotype à plaque fut l’œuvre de Daguerre.

En restituant les choses à qui de droit et en affirmant la propriété française, nous ne dépouillons personne. Nous rendons au passé ce qui appartient au passé, et au présent ce qui appartient au présent.

Comme expression de cet esprit de justice qui nous anime, nous devons rappeler que la chambre noire est le premier pas fait dans la voie qui devait mener à la photographie. A l’un des bouts se trouve un grand peintre, Léonard de Vinci, à l’autre bout un peintre encore, célèbre à d’autres titres, Daguerre.

Le premier, esprit investigateur, avait remarqué qu’un petit trou percé dans une chambre bien close amène sur le mur qui lui fait face la reproduction de tous les objets extérieurs dans des proportions de grandeur, graduées sur leurs distances relatives. J.B. Porta, physicien napolitain, développant le principe de cette observation, plaça une lentille d’une dimension plus forte au milieu du trou. Les mêmes effets s’étant produits, il en conclut que la grandeur de l’ouverture ne pouvait modifier les résultats. C’était créer la chambre noire à l’aide d’une conclusion scientifique, mais ce n’était pas encore fixer le rayon lumineux et garder l’image des objets extérieurs. Les temps n’étaient pas venus où ce résultat deviendrait une chose vulgaire. Avant qu’il en fût ainsi, des existences d’ hommes devaient s’user à la poursuite du fantôme. Plus d’un homme de génie devait mourir à la peine avant que Papin, Watt, le marquis de Jouffroy et Fulton appliquassent la découverte du principe de la vapeur employée comme force motrice. Cyrano de Bergerac devait deviner les ballons avant que Montgolfier enfermât le gaz dans sa montgolfière. Tiphaigne de la Roche devait prophétiser, dans un cours philosophique imprimé et publié au fond d’une province, la découverte de la photographie; il en devait décrire tous les procédés chimiques avant que l’art et la chimie modernes inspirassent à Daguerre et à Niepce les recherches d’où est sortie la photographie de nos jours.

Qui inspirait successivement tous ces hommes, tous ces chercheurs? La nature, qui ne veut pas garder éternellement ses secrets, mais qui ne les abandonne que petit à petit, et comme soumise en quelque sorte à une violence plus forte que toutes ses résistances. L’homme, en effet, n’arrive pas d’un seul bond aux sommets ardus qui gardent la vérité. Il rencontre plus d’un mystère sur sa route et trébuche à plus d’une erreur; mais il marche toujours; chaque pas qu’il fait élargit devant lui l’horizon et le rapproche du but. A mesure qu’il avance, ses forces augmentent, la vérité lève de plus en plus son voile, la nature vaincue cède et se soumet. Est-ce donc trop payer ce triomphe que de l’acheter au prix de quelques génies sacrifiés par l’indifférence ou l’aveuglement de la foule, et mourant, au milieu du chemin, de folie ou de misère? Ne regrettons pas trop ces sublimes dévouements du génie et de la science qui sont comme la loi même des martyrs de l’idée et qui leur imposent la mission de marcher devant les générations comme la colonne de feu du désert devant les Hébreux. Acceptons, comme autant de progrès, comme autant de conquêtes, les imaginations du moyen âge, et sachons voir dans les cornues et les fourneaux de l’alchimie les éléments devanciers des laboratoires des grands chimistes modernes. En cherchant la transmutation des métaux, les savants et les sorciers du quinzième siècle préparaient le terrain où devait agir le dix-neuvième; témoin l’ouvrage de Fabricius sur les métaux, qui, publié en1566, expliquait que toute image produite par une lentille sur une couche d’argent corné (chlorure d’argent, s’y fixait en noir pour les parties éclairées, en gris pour les demi-teintes et en blanc pour les ombres; témoin encore et surtout ce vieux bouquin allemand, âgé de plus de trois siècles, où M. Jobard de Bruxelles a trouvé l’affirmation du même phénomène et la description très-claire de la photographie.

Quelque intérêt historique que présentent ces tentatives incomplète des siècles antérieurs, nous avons besoin de descendres le courant des âges pour trouver quelque chose de sérieux et de positif sur l’art de fixer l’image d’une manière durable. Pour sortir des limbes de l’alchimie il faut attendre Charles et Wetgwood. De ces deux hommes, l’un, le premier, obtint des silhouettes tracées en noir sur un papier enduit pour éprouver l’action lumineuse,–nouveau progrès qui, malheureusement, fut interrompu par la mort de l’éloquent professeur;–l’autre, le second, ayant remarqué que la lumière modifiait la nature du nitrate d’argent, reproduisit, à l’aide de peaux ou de papiers recouverts de chlorure d’argent, les peintures des vitraux et les gravures. Humphry Davy le suivit dans cette voie ainsi que d’autres savants qui copièrent, non sans peine, de très-petits objets à une courte distance de la lentille. Toutefois la lumière noircissait l’enduit, et sous son action l’image s’effaçait vite. La nature ne cédait son secret que pied à pied. Patience! ses vainqueurs définitifs étaient tout près, et quoique placés à distance l’un de l’autre, la communauté de leur but et de leurs efforts les rapprocha un jour pour l’avantage de tous et pour la gloire de l’esprit humain.

A Châlons-sur-Saône, un savant modeste, né en1765, Nicéphore Niepce, avait réussi à fixer, par l’action chimique de la lumière, l’image des objets extérieurs. Dans le même temps, un peintre célèbre, Daguerre, appliqué à considérer sans cesse le phénomène des images fantastiques produites par les rayons solaires dans la chambre obscure, reconnut un jour sur la plaque métallique la trace des objets reçus, même après la disparition de la lumière. L’expérimentateur se demanda quelles substances assez impressionnables au rayon pouvaient lui permettre de fixer les objets transmis par lui; et, ce que n’avaient pu découvrir les siècles passés, ce qu’avaient vainement cherché les Celse, les Fabricius, les Porta, les savants anciens et modernes, lui le reconnut en expérimentant sur une plaque d’argent exposée à la vapeur d’iode et du mercure.

Niepce avait commencé ses recherches en1814; en cherchant à remplacer la pierre lithographique par une plaque d’étain enduite de bitume, il s’était aperçu que le rayon lumineux exerce une action chimique sur le bitume judéen et lui donne une couleur grisâtre. Cette découverte lui fit entrevoir la possibilité d’obtenir des dessins à l’aide de la lumière seule. Son procédé consistait à enduire de bitume de Judée une plaque d’étain sur laquelle il appliquait une estampe rendue diaphane à l’aide d’un vernis déposé sur le verso, et qu’il exposait, ainsi préparée, au soleil. Le soleil, traversant la feuille de papier transparente, agissait sur le bitume et imprimait sur la plaque métallique une copie exacte du dessin où les détails, les noirs et les ombres étaient reproduits dans leurs valeurs et leurs positions naturelles. La plaque était ensuite plongée dans l’essence de lavande; l’action du soleil n’ayant frappé que sur certaines parties, celles qui lui avaient échappé étaient dissoutes, et les autres, intactes, livraient l’image.

Niepce marcha de progrès en progrès; il opérait plus tard sur une plaque de cuivre, recouverte d’une lame d’argent enduite d’une couche de bitume de Judée, exposée pendant un temps assez long à la lumière, plongée après dans un mélange d’essence de lavande et d’huile de pétrole, destiné à dissoudre les parties non attaquées du bitume. Ce système amenait un dessin où les clairs étaient désignés par les blancs de bitume, et les ombres par les reflets métalliques de l’argent laissé à nu. La vapeur de sulfure de potasse ou l’évaporation de l’iode auxquelles il soumettait en dernier lieu la plaque, produisaient un fond noir et vigoureux.

Arrivé à ce dernier point de sa découverte, Niepce songea à l’appliquer à l’art du graveur. Creusant le métal laissé à nu, et respectant les endroits protégés par l’enduit résineux, il forma des planches où le soleil et l’eau-forte gravèrent ensemble le dessin, et où quelques coups de burin, donnés par l’artiste, complétaient l’œuvre du soleil et achevaient de produire un bon cliché typographique. De ce procédé devait sortir l’héliographie.

L’ingénieur Chevalier venait alors de perfectionner la chambre noire et d’y adapter le prisme ménisque. Le colonel Niepce se présenta dans son magasin pour acheter un de ces appareils, et, en causant, il dit à l’habile opticien que c’était pour son frère, qui avait trouvé le moyen de fixer l’image donnée par la chambre noire. M. Chevalier prêta peu d’attention à ce propos, ne croyant pas peut-être à la possibilité d’une telle découverte. Quelques personnes alors présentes se récrièrent même contre une telle prétention, et, le colonel parti, tournèrent en ridicule la naïveté du provincial qui voulait s’emparer de son ombre.

Daguerre arriva quelques jours après chez l’ingénieur Chevalier, et lui annonça qu’il venait de découvrir Je moyen de fixer l’image de la chambre noire. Habitué à considérer l’artiste comme un esprit paradoxal et assez enclin à la mystification, l’opticien crut qu’il avait appris la visite du colonel Niepce et qu’il continuait la plaisanterie. Puis, sur l’assurance positive que lui donnait Daguerre de son affirmation, il lui fit connaître les prétentions de son rival de Châlons, et lui donna l’adresse de M. Nicéphore Niepce.

Une correspondance s’établit alors entre les deux rivaux inconnus, mais froide d’abord et pleine d’une méfiance qui se fondit peu à peu lorsqu’ils reconnurent la similitude de leurs recherches, de leurs efforts, de leurs découvertes, et que des amis communs les eurent éclairés sur la loyauté et l’honorabilité de leur caractère.

En1827, Nicéphore Niepce, passant à Paris pour se rendre en Angleterre, vit pour la première fois Daguerre. Le savant châlonnais espérait, sans doute, beaucoup de son voyage à Londres, car l’entrevue n’amena entre les deux inventeurs aucun résultat. Ils se maintinrent sur la plus grande réserve. Niepce présenta à la Société royale quelques-uns de ses produits accompagnés d’un mémoire dont la Société refusa de s’occuper. Quelques-uns des spécimens exposés alors à Londres restèrent entre les mains de M. Bauer, qui se hâta de les faire connaître en1859, pour réclamer en faveur de Niepce une justice qui lui fut complétement rendue. Ce savant anglais vient de mourir, et une des précieuses épreuves qu’il possédait va, au moment même où nous écrivons ces lignes, être mise en vente; sa place est marquée dans les archives de l’Institut: on ne peut laisser perdre cette preuve irréfragable des droits exclusifs de la France à la plus merveilleuse découverte du siècle.

A son retour de Londres, Niepce vit encore Daguerre, mais ce ne fut que deux ans après, lorsque Daguerre eut assuré à Niepce qu’il avait découvert des procédés tout différents des siens et supérieurs, que Niepce, impatient sans doute d’arriver à plus de perfection, lui proposa de s’associer pour poursuivre en commun le perfec tionnement de leur invention. Un traité fut passé le14décembre1829à Châlons-sur-Saône, et après la signature de l’acte qui constatait la déverte de l’héliographie, Niepce fit connaître tous ses procédés au collaborateur qui, plus heureux que lui, devait vivre assez pour donner son nom à leur découverte commune, et jouir de la gloire que ne devait apporter que bien tard une couronne sur son tombeau.

Niepce mourut le5juillet1833, âgée de soixante-trois ans, pauvre et ignoré, léguant, après vingt ans de luttes, de fatigues et de recherches, un patrimoine dissipé pour la science à sa famille, et à la France une de ces découvertes qui suffisent pour illustrer un siècle. La France lui fut reconnaissante, sa famille eut sa part dans la récompense nationale accordée aux inventeurs du daguerréotype, et son nom est aujourd’hui inscrit dans les fastes du progrès humain. Il devait rester de plus à son nom une gloire que n’a pas celui de Daguerre. Un de ses parents, reprenant l’œuvre interrompue par la mort, devait découvrir la photographie sur verre, et fixer le premier les couleurs de l’image, et indiquer ainsi, sinon accomplir, le dernier perfectionnement qu’ait à atteindre l’art qu’il avait créé.

Les procédés qui lui étaient propres, oubliés un temps pour ceux plus perfectionnés de son associé, devaient être repris à leur tour, et créer, comme nous le verrons, la gravure et la lithographie héliographiques.

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