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CHAPITRE PREMIER.
ОглавлениеPremières négociations au sujet de l’un des obélisques égyptiens. — Opinion de M. Champollion jeune sur les obélisques de Luxor. — Mission de M. Taylor en Égypte. — Cession à la France par le vice-roi de l’un des obélisques de Luxor. — Construction de l’allège le Luxor. — Préparatifs de départ.
ON attribue a Napoléon la première idée de faire transporter en France un des obélisques d’Alexandrie. Si le grand homme n’a pas mis ce projet à exécution, il a dû le concevoir.
Après avoir porté dans la patrie des Pharaons nos armes victorieuses, le vainqueur de l’Égypte, rappelé en France par des événements que sa présence et son génie auraient su prévenir, devait en effet tenir à honneur de doter le pays d’un semblable trophée, et de laisser après lui un irrécusable témoin de notre étonnante campagne de 1799.
Ce même sentiment avait déjà valu à Rome la possession des obélisques qui décorent cette ancienne capitale du monde; monuments immortels de ses victoires, et seuls restes de ses conquêtes.
A toute époque de magnificence monumentale on songea aux obélisques. Les Pharaons, les Lagides, les Césars, les Papes ont tour à tour érigé à grands frais ces signaux imposants de la civilisation égyptienne. Thèbes, Alexandrie, Bysance, Rome, ont eu les leurs: Paris devait avoir le sien, c’est Thèbes qui le lui a donné. Transporté à dix-huit cents lieues du sol où il fut érigé pour la première fois, il y a trente-trois siècles, l’obélisque de Luxor, désormais à l’abri de tous les événements qui pouvaient menacer sa conservation, s’élève maintenant sur la plus grande, la plus belle de nos places, où il rappelle de glorieux souvenirs; la population parisienne a suivi avec un vif intérêt les opérations les plus minutieuses du débarquement et de la mise en place de ce monolithe; elle a visité avec une curieuse sollicitude le bâtiment qui l’a transporté ; elle s’est émue à la pensée des travaux, des fatigues et des dangers réels, qu’il a fallu surmonter pour arracher cet admirable monument des sables de la Thébaïde, et pour l’amener jusque sur les rives de la Seine. Il est juste que la part prise par chacun à cette œuvre soit aujourd’hui connue, il importe de dire par quels moyens a été obtenu ce résultat.
Nous avons parlé de l’idée attribuée à Napoléon. Ce que vingt ans de guerre et le blocus continental ne lui permirent pas d’entreprendre, Louis XVIII le commença.
C’est par ses ordres que le consul général de France, à Alexandrie, fut chargé de négocier auprès du vice-roi d’Égypte la cession d’un de ses monuments. Les démarches faites à ce sujet eurent un plein succès. Le vice-roi accorda l’une des deux aiguilles dites de Cléopâtre, la seconde fut donnée à l’Angleterre.
Il serait difficile d’indiquer bien précisément quelles furent les causes qui s’opposèrent à ce que l’obélisque donné à la France y fût amené. Le fait est qu’il demeura sur sa base à Alexandrie, où il est encore .
Quelque temps après, l’amour des sciences conduisit en Egypte M. de La Borde, et plus tard, M. Champollion jeune. Ce furent ces deux savants qui, frappés de la beauté des monuments de l’ancienne Égypte, réveillèrent le souvenir du don fait à Louis XVIII.
M. d’Haussez était alors ministre de la marine; M, le baron Taylor, que son rang, et plus encore ses goûts et ses études mettaient en position d’éclairer ce ministre, lui rappela qu’il existait à Alexandrie un obélisque appartenant à la France, mais qui pourrait lui échapper si, en négligeant de le faire enlever, on donnait à nos rivaux le prétexte et le temps de se l’approprier.
Le musée égyptien, auquel le roi Charles X avait donné son nom, venait de se former; on recherchait pour l’enrichir tous les fragments d’antiquités égyptiennes que l’on pouvait se procurer; n’était-ce pas le moment de s’assurer la possession d’un monolithe qui, à lui seul, pouvait donner tant de prix à cette intéressante collection?
Ainsi posée, la question fut bientôt résolue. M. le baron d’Haussez adopta avec empressement les idées de M. Taylor, et n’eut plus à cœur, dès ce moment, que de signaler son passage au ministère par une expédition qu’il considérait comme pouvant être un titre de gloire, et pour le règne sous lequel il vivait, et pour lui-même, qui devait présider à son exécution.
Le 18 novembre 1829 ce ministre écrivit à M. de Cerisi, ingénieur de la marine française, alors chargé de diriger les constructions navales du vice-roi d’Égypte, pour lui demander des renseignements sur les dimensions et le poids de l’obélisque, ainsi que son avis sur les moyens à employer pour l’abattre et le transporter. Un officier de la marine, employé dans l’escadre française du Levant, était en même temps chargé de se concerter à ce sujet avec M. de Cerisi.
Cependant M. Champollion jeune, en parcourant l’Égypte, avait vu les obélisques de Thèbes; frappé de la beauté de ces monuments, il s’exprimait ainsi dans une lettre, qui plus tard fut communiquée au ministre de la marine:
«Je suis bien aise que le savant ingénieur anglais ait eu la belle idée d’une
» chaussée de 300,000 francs pour dégoûter son gouvernement, et même tout
» autre, de ces pauvres obélisques d’Alexandrie, ils sont si peu de chose à côté
» de ceux de Thèbes! Si l’on doit voir un obélisque égyptien à Paris, que ce soit
» un de ceux de Luxor: il y restera celui de Karnac, le plus beau de tous; mais je
» ne donnerai jamais mon adhésion ( dont on n’a pas besoin) au projet de scier
» en deux ou trois morceaux un de ces magnifiques monolithes, ce serait un
» sacrilège.»
Une semblable observation, venant de la part d’un homme aussi compétent que Champollion jeune, devait faire impression sur M. le baron d’Haussez. Aussi ce ministre n’hésita-t-il pas à donner toute préférence aux obélisques de Luxor. Il s’agissait bien moins dès lors, dans sa pensée, de faire transporter à Paris l’obélisque d’Alexandrie, que d’obtenir ceux de Thèbes, dût-on même, pour les avoir, renoncer à l’Aiguille de Cléopâtre.
C’est d’après ces nouvelles idées que furent conçus les plans d’opération présentés par plusieurs personnes, et notamment un projet rédigé par M. Besson, officier de la marine française au service du pacha d’Egypte, projet sur lequel fut engagée la première délibération qui eut lieu à Paris, relativement aux mesures à prendre pour l’enlèvement et le transport des obélisques.
M. le baron Tupinier, directeur des ports au ministère de la marine, avait, dès le principe, émis l’opinion qu’on pouvait charger ces pesantes masses dans la cale d’un des transports de neuf cents tonneaux appartenant à l’état, en enlevant provisoirement, pour les y faire entrer, soit le pont, soit une partie de l’avant du navire.
M. Besson, au contraire, se rappelant les moyens anciennement employés par les Romains pour de semblables opérations, proposait de construire en Caramanie un radeau de 33 mèt. de longueur sur 13m,55 de largeur, de le faire ensuite remorquer par un bâtiment marchand jusqu’à Damiette ou Rosette, et de là jusqu’à Luxor ou Karnac par des Congés .
L’obélisque à transporter devait, d’après son projet, être enfermé dans un cylindre en bois de sapin fortement cerclé en fer, et placé ensuite au milieu du radeau, dans le sens de la longueur, de manière à saillir au-dessus de la surface supérieure de la moitié de son diamètre.
Ce moyen de transport ne pouvait être employé que pour conduire l’obélisque avec le secours d’un bateau à vapeur remorqueur jusqu’à la Seyne, au fond de la rade de Toulon. Là un navire aurait été construit tout exprès pour l’amener au Havre, d’où il serait venu à Paris au moyen des bateaux employés à la navigation de la Seine.
Ce projet, dont nous ne donnons qu’un aperçu sommaire, était, comme on le voit du premier coup d’œil, fort compliqué.
Les inconvénients qu’aurait présentés son exécution, les erreurs dans lesquelles l’auteur était tombé relativement aux dimensions à donner à son radeau, les difficultés qui rendaient à peu près impraticable l’opération tentée par ce moyen, n’échappèrent pas à l’examen attentif de M. le baron Tupinier, qui, dans un rapport soumis au ministre le 12 novembre 1829, démontra de la manière la plus évidente la nécessité de recourir à d’autres conceptions.
M. le baron d’Haussez approuva les conclusions de ce rapport, et décida qu’il serait communiqué à une commission composée de MM. de La Borde, Tupinier, Drovetti, Taylor, Briet, de Mackau, et de Livron, dont il se réservait la présidence.
Cette commission s’assembla en effet le 19 novembre dans le cabinet du ministre.
Après de longues discussions sur les meilleurs moyens à employer pour transporter en France les obélisques de Thèbes, la commission conclut, suivant la proposition de M. le baron Tupinier, qu’il fallait envoyer à Alexandrie, M. le baron Taylor, pour se concerter avec MM. de Cerisi et Besson, sur le meilleur plan d’opérations à adopter, et qu’en même temps on tiendrait les transports le Rhinocéros et le Dromadaire prêts à être envoyés en Égypte pour y recevoir les obélisques, s’il était reconnu possible de les embarquer sur ces bâtiments.
Toutefois, il fallait d’abord obtenir du vice-roi d’Égypte la cession des obélisques. C’est par-là que devait commencer la mission de M. le baron Taylor. Les dispositions connues de Mehemet-Ali à l’égard de la France ne laissaient pas de doute sur le succès des démarches à faire dans ce but; aussi le baron d’Haussez n’hésita-t-il pas à soumettre au Roi les propositions relatives à cette affaire. Nous croyons devoir transcrire textuellement le rapport présenté à ce sujet à Charles X, qui en approuva les conclusions le 25 novembre 1829.
Paris, le 25 novembre 1829.
SIRE,
«La France doit à ses Rois les plus beaux monuments qui la décorent, et Paris, qui
» ne le cède qu’à une seule des capitales de l’Europe moderne, le disputera bientôt
» aux villes les plus célèbres des temps anciens; mais ses palais et ses places publiques
» n’ont pas encore, il faut l’avouer, atteint le degré de splendeur auquel est parvenue
» Rome, dont la capitale de votre royaume se montre d’ailleurs la rivale
» en magnificence. On n’y voit aucun de ces obélisques transportés d’Égypte en
» Europe. Votre auguste frère, qui, comme votre majesté, accordait aux arts
» une protection si éclairée, avait ordonné de traiter avec le Pacha d’Égypte
» pour obtenir les obélisques d’Alexandrie, ou quelques autres qui se trouvaient
» sur cette vieille terre, riche des débris de l’ancienne civilisation du monde. Mehemet-Ali
» s’empressa de répondre aux désirs du Roi de France, en offrant l’un des
» obélisques d’Alexandrie, nommé Aiguille de Cléopâtre. Malheureusement cet
» obélisque, sur lequel le temps a exercé ses ravages, présente moins d’intérêt
» pour les arts que ceux qui sont encore debout à Luxor, dans la Haute-Egypte.
» Admirables par le fini du travail précieux sous les rapports archéologiques, si
» Paris les possédait, il n’aurait plus rien à envier à Rome, et leur élévation dans
» les places publiques, outre qu’elle les rendrait plus belles encore, deviendrait un
» motif de profonde reconnaissance de la part de ces hommes laborieux et instruits,
» qui ont voué leur existence à l’étude de l’antiquité.
» Les bonnes dispositions connues du vice-roi d’Egypte pour la France, la
» possibilité de transporter ces monuments sur un des bâtiments de votre marine,
» sans beaucoup de frais, le puissant motif de compléter en quelque sorte la
» collection des monuments égyptiens, pour laquelle il a déjà été fait de si honorables
» sacrifices, l’empressement que l’on doit mettre à recueillir enfin le
» fruit d’anciennes négociations et à ne pas être privé du monument déjà obtenu,
» m’engagent à proposer à votre majesté de charger d’une mission particulière
» pour cet objet, près le Pacha d’Egypte, M. le baron Taylor, connu
» dans les arts par ses travaux, par plusieurs voyages en Afrique et en Asie, et
» par son dévouement au service du Roi. Le but de cette mission serait de négocier
» l’échange de l’obélisque d’Alexandrie pour les obélisques de Luxor, ou
» d’obtenir les obélisques de Thèbes sans céder celui d’Alexandrie.
» C’est avec la conviction que le résultat de cette opération ne fera qu’ajouter
» à l’éclat du règne de votre majesté, que je la prie d’approuver les dispositions que
» je viens d’avoir l’honneur de lui soumettre.
» Si votre majesté daignait agréer ce projet, je réunirais auprès de moi une
» commission spéciale composée de MM. Alexandre de La Borde, de Livron,
» Drovetti, de Mackau, Tupinier et Taylor, qui, avant le départ de ce dernier,
» arrêterait le plan de la négociation, et en combinerait les moyens d’exécution
» de manière à en assurer le succès.»
Signé baron D’HAUSSEZ.
Dès que ce rapport eut reçu l’approbation du Roi, on ne s’occupa plus que de préparer les moyens d’exécution. Ce fut alors que, peu satisfait des réponses qui lui étaient parvenues d’Alexandrie sur le porjet d’employer au transport des obélisques un des bâtiments qui se trouvaient à Toulon, le ministre de la marine chargea M. le baron Rolland, inspecteur général du génie maritime, de s’occuper de cette question, afin d’arrêter un plan d’opération définitif.
M. le baron Rolland proposa de construire à Toulon un navire dont le plan serait calculé de manière à remonter le Nil et à recevoir dans sa cale un des obélisques de Thèbes, pour l’apporter ensuite jusqu’à Paris.
M. le baron d’Haussez, convaincu de la préférence que ce plan méritait sur tous les projets antérieurs, n’attendit pas même le départ de M. le baron Taylor, ni par conséquent le don officiel des obélisques, pour ordonner la construction de ce bâtiment, qui, dès la mise en chantier, reçut le nom de Luxor.
L’allége le Luxor était destiné, par la nature de sa mission, à naviguer sur la mer et sur deux fleuves; ainsi le problème à résoudre consistait d’abord à lui donner des dimensions et des formes telles, qu’il pût passer sous les arches des ponts de la Seine, et que, chargé de l’obélisque, il n’enfonçât pas au de là de deux mètres, tirant d’eau de rigueur pour la navigation fluviale. Afin d’atteindre ce but, M. Rolland fut forcé de s’écarter des règles suivies dans l’architecture navale; la longueur du Luxor n’est pas en rapport avec sa largeur, et la surface de sa carène se rapproche beaucoup de celle d’un parallélipipède dont on aurait émoussé les angles et les arêtes. Sa membrure fut composée en partie avec du bois de sapin, au doublage en cuivre on substitua un placage en planches pour diminuer autant que possible les dépenses et le poids de la masse.
Ce n’était pas tout que de coordonner ces données contra ires à la marche et à la sûreté du bâtiment, de nouvelles conditions à remplir exigeaient d’autres modifications non moins importantes.
Le Luxor devait s’échouer sur une plage de sable, dans une position parfaitement droite, sans le secours d’épontilles ou étais, et porter un monolithe dont la masse était hors de proportion avec l’espace qu’il occuperait dans la cale. C’est dans ces prévisions que cet ingénieur eut à combiner tous les détails de la charpente. Ainsi il lui fallut armer le navire de cinq quilles, pour se créer des soutiens de chaque côté de la quille principale, et, par ce moyen, répartir la pression exercée par le fardeau sur un plus grand nombre de points. Ainsi il lui fallut consolider les murailles par des porques obliques, et multiplier les liaisons longitudinales afin de rendre le système solidaire. Ces difficultés, ajoutées à toutes les autres, méritaient d’être signalées. En résumé, M. Rolland fit ce qu’il y avait de mieux à faire, et l’expérience a justifié ses combinaisons .
Cependant M. Taylor s’occupait des préparatifs de son départ. Nommé, par ordonnance royale du 6 janvier 183o, commissaire du roi auprès du Pacha d’Égypte pour négocier la cession des obélisques de Thèbes, et faire transporter en France l’aiguille de Cléopâtre, il fut en outre chargé de recueillir en Égypte des objets d’art et d’antiquités, destinés à enrichir le Musée Royal du Louvre.
On lui confia divers présents destinés à être offerts à Mehemet-Ali et à son fils. Un crédit de 100,000 fr. fut ouvert pour faire face aux frais de sa mission, et le brick le Lancier reçut l’ordre de le transporter à Alexandrie.
M. Mimaut, consul général de France en cette résidence, et lui-même animé d’un amour éclairé des arts, avait été prévenu de l’objet de la mission de M. Taylor, et invité à le seconder de son crédit et de son influence. M. de Cerisy avait aussi reçu le même avis, et l’on ne devait pas douter de leur utile concours.
Le Lancier, retardé dans sa marche par de gros temps et des vents contraires, n’arriva à Alexandrie que le 23 avril 1830.
M. Mimaut ne s’y trouvait point alors; il était au Caire, auprès du vice-roi; mais il avait laissé en partant ses instructions à M. Bottu, qui le remplaçait en sa qualité de vice-consul. Ce fut ce dernier qui reçut M. le baron Taylor, et le présenta au fils de Mehemet-Ali, Ibrahim Pacha, qui commandait alors à Alexandrie en l’absence de son père; après un excellent accueil de la part de ce prince, M. Taylor se mit en route pour le Caire, où il ne trouva plus le Pacha, et ce ne fut qu’en revenant à Alexandrie à la fin de mai qu’il put enfin le rencontrer.
Cependant M. Mimaut s’était, dès les premiers avis qu’il avait reçus de la mission de M. Taylor, empressé d’en entretenir le Pacha, et l’avait déjà disposé à accueillir favorablement la demande que le commissaire du roi était chargé de lui présenter. M. Taylor, qui du reste n’a cessé de se louer de la coopération de M. Mimaut, dut s’en apercevoir, lorsque le 31 mai de la même année eut lieu l’audience dans laquelle ils demandèrent de concert, et obtinrent la cession des trois obélisques qui aujourd’hui appartiennent à la France.
Cette intéressante négociation n’était cependant pas sans difficultés, et il ne fallait rien moins que l’habileté, le talent et la persévérance de M. Taylor pour surmonter les premiers obstacles qu’il eut à vaincre. La France ayant négligé de faire enlever l’obélisque d’Alexandrie, il semblait en quelque sorte qu’elle en eût perdu la propriété, et, d’un autre côté, le pacha avait donné les obélisques de Luxor à M. Barker, consul d’Angleterre, qui les lui avait demandés avec instance.
Mais le désir d’être agréable au roi de France, à qui, disait-il, il n’avait rien à refuser, sans doute aussi l’habile intervention de M. Taylor, suggérèrent au vice-roi le moyen de tout concilier. Il donna à la France les deux obélisques de Luxor, confirma le don qu’il lui avait fait précédemment de l’obélisque d’Alexandrie, et offrit en échange à M. Barker l’obélisque de Karnac. Ce dernier accepta l’échange proposé, et dès lors fut entièrement conclue cette affaire. On convint, pour éviter toute difficulté ultérieure, que M. Taylor recevrait, avant de retourner en France, une pièce officielle attestant le don des trois obélisques.
Pendant ce temps l’on hâtait à Toulon la construction du Luxor; déjà tout était disposé en France pour l’expédition; M. Mimerel, ingénieur de la marine, avait d’abord été désigné pour diriger les travaux d’abattage et d’embarquement des obélisques, et ceux que nécessitait leur érection à Paris; d’un autre côté, M. Verninac de Saint-Maur avait été chargé du commandement du bâtiment.
Le Luxor fut mis à l’eau le 26 juillet 1830; le 27, l’ordre d’en presser l’armement par tous les moyens possibles fut adressé au préfet maritime de Toulon. Déjà le Dromadaire avait été expédié pour Alexandrie, où il se trouvait dès le 25 juin.
M. Taylor, qui dans ce moment parcourait l’Egypte afin de recueillir divers objets d’art pour les musées de France, apprit, par les lettres que lui portait le bâtiment, les progrès de la construction du Luxor, et le projet de l’expédier vers le mois de septembre. Il crut devoir, non-seulement faire embarquer sur le Dromadaire l’obélisque d’Alexandrie, mais aussi faire exécuter immédiatement, par les moyens mis à sa disposition, et d’après les indications que fournirait M. de Cerisy, le transport du deuxième obélisque de Luxor, de telle sorte que ces trois monolithes fussent rendus en France vers la fin de l’automne. Un pareil résultat, nous devons le dire, était impossible: en se flattant de l’atteindre, M. Taylor n’avait consulté que son zèle, sans entrevoir les difficultés qui l’arrêteraient dès le début.
Tel était l’état des choses lorsque le vice-roi d’Égypte apprit à Alexandrie les événements de juillet 1830. Les détails lui en étaient parvenus par des lettres de commerce, qui ne donnaient des nouvelles que jusqu’au 4 août.
Les intrigues recommencèrent alors pour arracher à la France, à la faveur de l’incertitude née de cette première nouvelle, les admirables monuments qui étaient devenus sa propriété. Le consul anglais avait conçu le dessein de les faire enlever, et plusieurs agents du Pacha étaient dans ses intérêts. Le bruit se répandit même que le vice-roi ne voulait plus laisser embarquer sur le Dromadaire l’aiguille de Cléopâtre, en échange de laquelle il avait donné, disait-on, les deux obélisques de Luxor. Mais ce bruit, passé des antichambres du sérail, où il avait pris naissance, dans les cafés d’Alexandrie , et répandu de là jusqu’à Paris, ne reposait sur rien de vrai. Ce n’était qu’un propos d’oisifs ou de jaloux, toujours prêts à contrarier ou à déprécier les plus nobles entreprises.
D’ailleurs MM. le baron Taylor et Mimaut n’avaient pas donné aux rivaux de la France le temps de faire valoir auprès de Mehemet-Ali leurs nouvelles prétentions. Bien qu’ils ne fussent pas fixés sur la détermination qui serait prise relativement au transport des trois monolithes, ils avaient parfaitement compris que, dans tous les cas, il fallait en conserver à la France l’incontestable acquisition.
Ils n’eurent pas de peine à persuader au Pacha que la révolution survenue en juillet ne devait pas être un motif de ravir à leur pays le don qu’il lui avait fait, que de semblables monuments ne pouvaient, même dans sa pensée, avoir été donnés à la personne du roi, mais bien à la nation elle-même, dont ils étaient devenus la propriété irrévocable. Ils parvinrent enfin à obtenir du Pacha la confirmation pleine et entière de sa première disposition. Le don des obélisques au gouvernement de Louis-Philippe fut sanctionné dans une lettre que ce souverain fit écrire officiellement par son ministre, le 29 novembre 1830, à M. le comte Sébastiani, alors ministre de la marine.
Cette pièce importante doit trouver ici sa place; nous la citons textuellement:
Alexandrie, le 29 novembre 1830.
EXCELLENCE,
«Son altesse le vice-roi d’Égypte a reçu par M. le baron Taylor la dépêche
» dont il était porteur, du ministre secrétaire d’état de la marine et des colonies,
» pour négocier au nom de S. M. le roi de France, et obtenir une des aiguilles
» de Cléopâtre à Alexandrie, et particulièrement les deux obélisques de Luxor,
» qui font partie des ruines de Thèbes.
» Son altesse le vice-roi m’a chargé d’exprimer à votre excellence la satisfaction
» qu’il éprouve à montrer sa reconnaissance à la France pour les nombreuses
» marques de bienveillance et d’amitié qui lui ont été à différentes époques manifestées,
» et qui lui ont été récemment renouvelées de la part de sa majesté le
» roi des Français, par l’organe de M. le consul général Mimaut.
» Je suis ordonné par son altesse de mettre les trois monuments cités à la disposition
» de S. M. le roi des Français dès ce moment, et votre excellence est
» priée de vouloir bien en faire hommage à S. M. au nom de S. A. le vice-roi
» Mehmet Aly Pacha.
» Il est très-flatteur pour moi d’être l’interprète des volontés de mon prince
» dans cette occasion, et je prie votre excellence d’agréer l’assurance de ma considération
» très-distinguée.
» Signé BOGHOZ JOUSSOUF.»
Nous avons vu précédemment que le Dromadaire était arrivé à Alexandrie le 25 juin, en l’absence de M. Taylor, pourvu des apparaux supposés nécessaires pour l’embarquement de l’obélisque. Ce navire n’avait cependant pas apporté de Toulon tous les bois indispensables à l’accomplissement de cette œuvre; il y avait nécessité de les acheter en Caramanie, l’arsenal d’Alexandrie ne possédant pas une seule pièce de bois dont le Pacha pût disposer en faveur de l’opération. Les délais nés de cette circonstance furent la cause qui, plus tard, dut faire renoncer à enlever ce monument.
Cependant le changement survenu dans le gouvernement de la France n’avait pas fait perdre de vue au ministre de la marine la grande affaire des obélisques; le chef que la France venait de se donner était lui-même trop ami des arts et par-dessus tout trop jaloux de nos gloires nationales pour qu’une entreprise destinée à en rehausser l’éclat pût être abandonnée sous son règne. On avait donc continué à s’occuper de l’armement de l’allège le Luxor. Les instructions préparées pour MM. Mimerel et Verninac de Saint-Maur avaient été expédiées le 22 septembre, et un ordre télégraphique du 6 octobre suivant avait prescrit de presser par tous les moyens le départ du bâtiment. De son côté M. Champollion, qui était alors à Paris, n’avait eu garde de laisser tomber en oubli un projet dont l’exécution était une de ses pensées dominantes; il en fit lui-même une question d’à propos. Il disait, dans une note du 29 septembre: «Le précédent gouvernement n’avait
» eu d’autre intention que d’orner la capitale d’une décoration nouvelle, le gouvernement
» national doit se proposer un but plus élevé et plus grand; à lui seul
» il appartient de marquer ses premiers pas en éternisant la mémoire des glorieux
» triomphes de nos armées pendant les guerres de la république. Ces souvenirs,
» noble patrimoine de la génération qui la première a combattu pour la liberté
» française, attendent encore leur consécration. Ce n’est pas sans étonnement que
» l’étranger parcourt notre capitale sans y rencontrer quelque part un seul monument
» qui rappelle, même indirectement, notre étonnante campagne de 1799.
» Aucun monument ne peut mieux atteindre ce but qu’un des obélisques
» d’Égypte.»
Sa conclusion était qu’il fallait se hâter de mener à fin l’entreprise commencée; mais il insistait pour qu’on s’attachât surtout aux obélisques de Luxor, beaucoup plus précieux, ajoutait-il, que ceux d’Alexandrie, et pour qu’entre les deux on donnât la préférence à l’obélisque de droite ou occidental, dont les inscriptions rappellent le nom du grand Sésostris.
M. le comte Sébastiani avait parfaitement apprécié ce qu’il y avait de juste dans ces observations. Le Luxor allait partir, lorsque M. Taylor, arrivé à Toulon par le brick le Lancier, demanda qu’on différât l’expédition au moins de quelques jours. Il avait, disait-il, à donner à M. Mimerel des explications indispensables sur les ressources dont cet ingénieur devait se pourvoir; la saison étant d’ailleurs passée pour la navigation du Nil, il fallait attendre le commencement de l’inondation de 1831 qui n’arrive qu’en juillet. Suivant M. Taylor, tout ce qu’on pouvait faire, pour ne perdre ni temps ni argent, était de transporter en France l’obélisque d’Alexandrie, et de retourner ensuite en Égypte dans la saison favorable à la remonte du fleuve. Un autre motif venait en outre à l’appui de cette opinion: comme, d’après Champollion, l’aiguille de Cléopâtre était très-inférieure aux autres obélisques, qu’on ne savait pas s’il serait possible de les transporter tous les trois, et qu’il convenait ainsi de songer d’abord au plus beau de ceux de Thèbes, on dut retarder le départ du Luxor jusqu’au printemps prochain.
Tous les frais relatifs à l’expédition avaient été, par une ordonnance du 6 janvier 1830, mis au compte de la marine, et les chambres avaient accordé pour cet objet un crédit de 300,000 fr.
Les dépenses déjà faites tant pour la construction et l’armement de l’allége, que pour la mission de M. Taylor, ne laissaient plus sur cette somme qu’environ 37,000 fr. disponibles. Aucun crédit nouveau n’était d’ailleurs ouvert au ministère de la marine sur l’exercice de 1831. Cette observation soulevait naturellement la question de savoir s’il convenait de persister dans une entreprise dont on n’avait pu jusques-là apprécier exactement la dépense totale, ou si, ajournant toute opération ultérieure, il ne fallait pas envoyer d’abord à Thèbes un ingénieur qui dresserait en connaissance de cause le devis estimatif des travaux à exécuter.
Cette question n’était pas sans gravité dans un moment où la France avait à subvenir aux besoins impérieux du commerce et de l’industrie, et de plus à soutenir son indépendance qu’elle pouvait croire menacée par l’Europe continentale.
M. le comte Sébastiani ne se dissimula pas cette difficulté ; mais, envisageant la chose de plus haut, il sentit combien il importait de ne pas laisser inachevée une œuvre grande et utile. Il pensa aussi, et avec juste raison, que l’envoi d’un ingénieur, pour dresser un devis, ne serait qu’un moyen de perdre du temps et de dépenser de l’argent sans objet et sans utilité ; il se représenta d’ailleurs le mauvais effet que produirait en Égypte le brusque abandon de ces monolithes si ardemment recherchés jusque-là. De toutes ces considérations, il conclut que, s’il fallait encore employer 200,000 fr. pour effectuer le transport des obélisques, il valait mieux s’imposer ce nouveau sacrifice que de perdre le fruit des dépenses déjà consommées. Dans tous les cas, il aurait cru mériter un juste blâme si, avant de renoncer à ce projet, il n’avait du moins soumis la question à un vote législatif.
Les chambres allouèrent le crédit demandé, et ainsi fut levé le dernier des obstacles, qui succesivement avaient été sur le point d’entraver cette intéressante entreprise. Le ministre de la marine, d’après les intentions du roi, prescrivit dès le 19 janvier 1831, au préfet maritime de Toulon, de faire tout disposer pour que le Luxor pût du moins être expédié au commencement du printemps.
M. Mimerel avait fait pressentir que l’état de sa santé s’opposerait probablement à l’accomplissement de sa mission; cette prévision se confirma, et il devint nécessaire de lui donner un successeur. Consulté sur le nouveau choix à faire, M. le préfet maritime de Toulon me proposa, ainsi que M. Moissard, ingénieur de la marine.
Désigné par M. le ministre pour diriger une opération aussi importante, j’acceptai avec orgueil cette marque de confiance: mon premier soin fut de choisir, selon l’autorisation que j’en avais reçue, les hommes qui devaient me seconder et les objets du matériel que je jugeai nécessaires. Tout étant ainsi disposé, je m’embarquai sur l’allège le Luxor, dont M. Verninac de Saint-Maur avait le commandement.
Voici les instructions qui me furent adressées par M. le comte Sébastiani.
» MONSIEUR,
» Vous avez reçu l’ordre de vous rendre en Égypte pour y diriger une opération
» importante qui a pour but d’amener à Paris les deux obélisques de Thèbes
» que le vice-roi Mehemet a donnés à la France.
» Vous savez que l’allège le Luxor a été construit à Toulon pour servir au
» transport de ces monuments, et que le tirant d’eau de ce bâtiment a été calculé
» de manière à ce qu’il puisse remonter le Nil jusque près du lieu où ils se
» trouvent.
» J’ai donné des ordres pour que le Luxor soit prêt à partir à la fin de ce mois.
» Vous vous embarquerez sur ce bâtiment comme passager, il vous portera d’abord
» à Alexandrie, et là vous verrez s’il vous convient de rester à bord pour
» vous rendre devant Thèbes, où s’il sera préférable que vous précédiez son arrivée
» dans cet endroit.
» Vous examinerez avec la plus grande attention la situation des deux obélisques
» et l’état des lieux environnants, afin d’établir le plan des travaux que
» vous aurez à faire exécuter pour les mettre à terre, les transporter jusqu’au bord
» du Nil, et les faire entrer dans le bâtiment destiné à les apporter en France.
» Si, comme je le présume, un seul des obélisques peut trouver place dans
» le Luxor, l’opération devra se faire en deux fois, et il faudra commencer par
» celui de droite, qui est désigné comme le plus précieux, ainsi que vous pourrez
» le voir dans la copie ci-jointe d’une lettre de M. Champollion jeune, qui en a
» récemment relevé et traduit les inscriptions.
» Vous serez spécialement et exclusivement chargé de diriger tous les travaux
» relatifs à l’abattage, au transport par terre et à l’embarquement de chacun des
» obélisques, ainsi que tous ceux qui auront pour objet de disposer le terrain pour
» faire arriver le monument au bord du Nil.
» Vous aurez à vous concerter avec l’officier qui commandera le Luxor sur le
» choix du lieu où il vous conviendra de le fixer, et sur tous les moyens à employer
» pour l’embarquement de l’obélisque; vous déciderez s’il faut échouer le
» bâtiment, enlever son pont ou l’ouvrir à l’une des extrémités, et cet officier aura
» l’ordre de vous seconder de tous ses moyens dans l’exécution de ces divers travaux
». Vous devrez aussi vous entendre avec lui pour le meilleur emploi à faire
» de son équipage dans les manœuvres que vous aurez à exécuter, et pour que les
» ressources matérielles du bord y soient appliquées au besoin.
» Aussitôt que l’obélisque sera embarqué et que vous aurez fait rétablir les
» parties du bâtiment que vous aurez été forcé de démolir ou de démonter, le
» Luxor ne dépendra plus que de son capitaine, qui dès ce moment restera seul
» chargé de le conduire jusqu’à Paris; votre tâche sera alors terminée, jusqu’à
» l’époque où il faudra recommencer les mêmes opérations pour l’embarquement
» du second monument.
» Peut-être serait-il possible d’employer d’autres moyens pour le transport de
» l’un des deux obélisques. M. Mimaut, consul général de France en Égypte, mettra
» pour cet objet à votre disposition M. Linant, Français établi depuis longtemps
» dans le pays, et qui paraît fort intelligent.
» Je joins d’ailleurs ici la copie d’une lettre dans laquelle M. le baron Taylor
» fournit à ce sujet quelques renseignements qui, sans avoir rien de bien positif,
» peuvent du moins être bons à consulter, surtout pour le choix des objets à
» emporter de Toulon.
» Je donne au préfet maritime de Toulon l’ordre de faire mettre à votre disposition,
» par les diverses directions de ce port, tous les moyens en matériel qui
» vous paraîtront nécessaires pour l’exécution des opérations dont il vient d’être
» question.
» Si lorsque vous serez sur les lieux d’autres ressources vous devenaient indispensables,
»vous les trouverez probablement à Alexandrie par l’intervention de
» M. le consul général de France, et dans le cas où il serait impossible de les tirer
» d’Alexandrie, vous en adresseriez la demande à Toulon.
» Vous choisirez dans l’arsenal de ce port un maître charpentier entretenu,
» un contre-maître de la même profession et dix ouvriers, qui soient à la fois
» charpentiers, perceurs, calfats, et, s’il se peut, menuisiers; vous y joindrez un
» forgeron chef de feu, deux bons frappeurs et deux tailleurs de pierres.
» Tous ces maître, contre-maître et ouvriers, seront traités pendant leur absence
» de France, comme l’ont été ceux qu’on a précédemment envoyés en Morée.
» De bons maîtres de manœuvres seront aussi embarqués sur le Luxor, et ils
» pourront vous être fort utiles dans le cours de vos opérations.
» Vous êtes au surplus autorisé à prendre sur les lieux mêmes le nombre
» d’hommes que vous jugerez nécessaire d’employer comme manœuvres; toutes
» les informations portent à croire que vous en trouverez toujours autant que
» vous pourrez le désirer et à très-bas prix.
» M. le consul général de France à Alexandrie mettra à votre disposition les
» fonds qui vous seront nécessaires; vous voudrez donc bien vous adresser à lui
» pour cet objet, et tenir un compte exact de toutes vos dépenses, afin d’en justifier
» au retour.
» L’intervention du même consul général vous procurera de très-grandes facilités
» près des autorités égyptiennes pour en obtenir les moyens d’exécution que vous
» pourriez désirer, et même, au besoin, des secours contre toute espèce de contradiction.
» Vous avez au surplus à Alexandrie un appui naturel dans le crédit
» dont y jouit M. de Cerisy, officier du génie maritime français, chargé en chef
» de la direction des constructions navales du vice-roi d’Égypte; je ne doute pas
» que vous ne trouviez en lui le plus grand empressement à vous donner de bons
» renseignements, et à vous aider des moyens d’exécution dont il peut disposer.
» Je joins ici les copies de plusieurs documents, dont la connaissance peut vous
» être utile, ce sont: 1° un mémoire de M. Besson, ancien officier de la marine
» française, maintenant au service de Mehemet-Ali, sur les moyens de transporter
» les obélisques de Luxor; 2° une lettre de M. de Cerisy sur le même sujet;
» 3° l’extrait dont j’ai déjà parlé de celle de M. Taylor, et enfin la lettre de M. Champollion,
» dont il a été question au commencement de cette dépêche.
» Je crois, monsieur, n’avoir rien omis de ce qui peut être propre à assurer
» le succès de la mission dont vous êtes chargé ; vos talents et votre zèle me sont
» garantis par vos services antérieurs, et je suis convaincu que vous réussirez
» complètement dans l’opération qu’il s’agit d’exécuter.
» Vous voudrez bien m’adresser le plus souvent possible des rapports sur les
» progrès de vos opérations.
» Je joins ici une lettre pour M. Mimaut, consul général de France en Égypte,
» et une autre pour M. de Cerisy; elles ont pour objet de leur annoncer la mission
» dont vous êtes charge, et de les prier de vous aider de tout leur pouvoir
» à la mettre à exécution. Vous voudrez bien les leur remettre à votre arrivée
» à Alexandrie.
«Signé comte SÉBASTIANI.»