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CHAPITRE TROIS

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L’établissement pénitentiaire Delcroix était situé à l’écart de la route, sur une parcelle quelconque et sans relief. C’était le seul édifice sur un terrain d’environ deux cents hectares – pas vraiment une prison en soi, mais définitivement pas un lieu où une personne ordinaire aurait souhaité passer un laps de temps significatif.

Le service de sécurité à l’entrée laissa passer Mackenzie et Ellington et leur indiqua d’aller se garer sur le parking des employés situé à l’arrière de la propriété. Ils passèrent ensuite par le service de sécurité principal et furent accompagnés vers une petite salle où une femme les attendait.

« Agents White et Ellington ? » demanda-t-elle.

Mackenzie lui serra la main pendant qu’elle faisait les présentations. La femme s’appelait Mel Kellerman. Elle était plutôt petite et légèrement en surpoids, mais elle avait l’air d’être le genre de femme à traverser les épreuves en leur riant au nez.

Ils la suivirent à l’extérieur de la salle d’attente pendant qu’elle leur faisait une brève présentation des lieux.

« Je suis responsable de la sécurité, » dit-elle. « En tant que tel, je peux vous dire que l’homme auquel vous venez rendre visite ne représente aucun danger. Il s’appelle Bryan Taylor. Cinquante ans et ancien héroïnomane. Il a parfois des conversations avec des gens invisibles. Son casier est léger mais nous continuons à le surveiller car c’est le quatrième délit mineur qu’il commet en moins d’un an. Nous pensons que c’est surtout pour avoir un toit et de la nourriture gratuite. »

« Et en quoi consiste son dernier délit ? » demanda Mackenzie.

« Il a uriné sur la roue arrière d’un bus en plein jour. »

Ellington gloussa. « Il était saoul ? »

« Non, » dit Kellerman. « Il a juste dit qu’il avait vraiment besoin de pisser. »

Elle les guida à travers un petit couloir qui menait à un autre encore plus étroit. Au bout, ils arrivèrent à une porte que Kellerman ouvrit pour les laisser entrer. La pièce ne contenait qu’une table et cinq chaises. Un homme échevelé occupait l’une des chaises tandis qu’un homme portant un uniforme de sécurité en occupait une autre. Le gardien tourna la tête dans leur direction au moment où ils entrèrent et se mit directement debout.

« Est-ce que monsieur Taylor vous a causé des soucis ? » demanda Kellerman au gardien.

« Non. Mais il radote par contre. Les Russes et Trump à nouveau. »

« Ah, une de mes histoires favorites, » dit Kellerman. Elle se tourna vers Mackenzie et Ellington. « Je serai dans la pièce d’à côté si vous avez besoin de moi. Mais je pense que ça va aller. »

Sur ces mots, Kellerman et le gardien sortirent de la pièce, en les laissant seuls avec Bryan Taylor.

« Bonjour, monsieur Taylor, » dit Mackenzie, en s’asseyant en face de lui, de l’autre côté de la table. « Est-ce qu’ils vous ont parlé de la raison de notre visite ? »

Taylor hocha tristement la tête. « Oui. Vous venez me poser des questions sur mon frère – sur la manière dont il est mort. »

« C’est bien ça, » dit Mackenzie. « Je suis désolée pour votre perte. »

Taylor se contenta de hausser les épaules. Il pianotait des doigts sur la table et regardait tour à tour Mackenzie et Ellington.

« Et bien, je suis l’agent White et voici mon partenaire, l’agent Ellington, » dit Mackenzie.

« Oui, je sais. Du FBI. » Il leva les yeux au ciel en prononçant ces mots.

« Monsieur Taylor… dites-moi… est-ce que votre frère avait des ennemis ? Des personnes qui pourraient lui en vouloir pour une raison ou une autre ? »

Taylor ne prit même pas la peine de réfléchir avant de répondre. « Non. Juste notre mère, et elle est morte depuis sept ans. »

« Est-ce que vous étiez proche de votre frère ? »

« On n’était pas les meilleurs amis du monde, » dit Taylor. « Mais on s’entendait plutôt bien. Bien qu’il traîne avec des types plutôt bizarres. Des Illuminati. Franchement, je n’étais pas si surpris que ça d’apprendre qu’il avait été tué. Ces sales types d’Illuminati, ils n’aiment pas trop les sans-abris. Les gens célèbres non plus, d’ailleurs. Vous savez qu’ils ont assassiné Kennedy, n’est-ce pas ? »

« J’en ai entendu parler, » dit Ellington, tout en ayant du mal à contenir un sourire moqueur.

Mackenzie lui donna un coup de pied en-dessous de la table et fit de son mieux pour continuer.

« Est-ce que vous avez d’autres amis qui ont été tués récemment ? » demanda-t-elle.

« Je ne pense pas. Mais je traîne rarement avec les mêmes personnes. Dans la rue, plus tu as d’amis, plus tu as de chances de te faire voler. »

« Encore une dernière question, monsieur Taylor, » dit Mackenzie. « Avez-vous déjà entendu parler d’une entreprise du nom d’Antiquités Barker ? »

À nouveau, il n’eut pas besoin de réfléchir longuement à la question avant de répondre. « Non. Jamais entendu parler. Jamais mis les pieds dans un magasin d’antiquités. Je n’ai pas d’argent à dépenser pour des vieilles reliques poussiéreuses. C’est les gens avec trop de fric qui gèrent ce genre d’endroit. Ou qui y font leurs achats. »

Mackenzie hocha la tête et poussa un soupir. « Et bien, je vous remercie pour votre coopération et le temps que vous nous avez consacré, monsieur Taylor. Si jamais vous vous souveniez de quoi que ce soit concernant votre frère qui pourrait nous aider à trouver son meurtrier, je vous serais reconnaissante d’en parler à une personne de l’établissement afin qu’ils puissent nous transmettre l’information. »

« Oh oui, bien sûr. Vous savez… vous devriez peut-être vous rendre au Nevada. Je suis certain que vous y trouveriez des réponses. »

« Au Nevada ? » demanda Mackenzie. « Et pourquoi ça ? »

« La zone 51. Groom Lake. Ce n’est pas les Illuminati mais tout le monde sait que c’est dans cet endroit top secret du gouvernement que disparaissent des sans-abris depuis des lustres. Ils font des expériences sur eux là-bas dans le désert. »

Mackenzie tourna la tête avant que Taylor ne puisse voir le sourire qui lui venait aux lèvres. D’après ce qu’elle savait à son sujet, elle savait qu’il ne pouvait pas s’en empêcher – il avait l’esprit légèrement dérangé. Ellington par contre ne parvint pas à rester aussi professionnel.

« Merci pour le conseil, monsieur Taylor. Nous y jetterons définitivement un coup d’œil. »

Alors qu’ils étaient sur le point de sortir, Mackenzie s’approcha de lui et se pencha assez près pour lui murmurer à l’oreille : « C’était limite méchant, » dit-elle.

« Pourquoi ? J’essayais juste qu’il ait l’impression d’avoir vraiment contribué à l’enquête. »

« Tu brûleras en enfer, » dit-elle, en souriant.

« Oh, je sais. Avec tous les Illuminati, j’en suis sûr. »

***

En se dirigeant vers leur voiture, Mackenzie avait déjà en tête quelle serait leur prochaine étape. Elle sentait que c’était du solide, bien qu’elle comprenne également pourquoi cette piste n’avait pas encore été explorée à fond par le FBI.

« Tu sais, Taylor a quand même raison sur un point, » dit Mackenzie.

« Ah bon ? » demanda Ellington. « Ça a dû m’échapper. »

« Il a parlé du fait que certaines de ces communautés de sans-abris avaient des liens très forts. Je pense que le FBI s’est tellement préoccupé de savoir quel était le genre de lien qui existait entre les vagabonds qu’ils ont omis d’examiner de près comment des personnes telles que Jimmy Scotts et Gabriel Hambry pouvaient être connectés à eux. »

Ils entrèrent dans leur voiture, Ellington prenant place derrière le volant cette fois. « Ah, mais ce n’est pas tout à fait vrai. Les refuges pour sans-abris et les soupes populaires ont été contactés pour savoir si l’un de ces deux hommes avait une quelconque affiliation avec ce genre d’endroits. »

« Exactement, » dit Mackenzie. « On a supposé que le lien qu’ils auraient avec les vagabonds les placerait au-dessus d’eux. Mais peut-être qu’il y a autre chose. »

« Comme quoi ? Tu penses que Scotts et Hambry aient pu être des sans-abris à un moment de leur vie ? »

« Je n’en ai aucune idée. Mais disons qu’ils l’aient été. Cela nous donnerait un lien solide et nous indiquerait que notre type ne cible que des vagabonds, pour une raison ou une autre. »

« Ça vaut la peine d’y jeter un coup d’œil, » dit Ellington. « Mais ça ne répond toujours pas à l’importante question de savoir pourquoi ? »

« Et bien, vérifions d’abord mon hypothèse, puis on verra pour le reste. »

« Comment ? »

« D’après ce que j’ai lu dans les rapports, Gabriel Hambry n’a aucun parent proche. La seule famille qui lui reste, c’est ses grands-parents qui vivent dans le Maine. Mais Jimmy Scotts a une femme et deux enfants à Lincoln. »

« Et tu veux qu’on y aille ? » demanda Ellington.

« Et bien, en tenant compte du fait que l’endroit où je veux me rendre après ça se trouve à plus de six heures de route, oui… je pense qu’on devrait commencer par là. »

« Six heures de route ? Où est-ce que tu veux qu’on aille ? De l’autre côté du Nebraska ? »

« Oui, de fait. Le comté de Morrill. Une petite ville du nom de Belton. »

« Et qu’est-ce qu’on est sensé y trouver ? »

Faisant de son mieux pour réprimer un léger tremblement, Mackenzie répondit : « Mon passé. »

Avant Qu’il Ne Chasse

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