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INTRODUCTION.

Table des matières

DEUX factions qui luttent avec acharnement pour la possession exclusive des pouvoirs existans, que chacune d’elles considère, par des motifs différens, comme sa propriété naturelle; un gouvernement qui cherche à se garantir des tentatives de l’une et de l’autre, mais qui se croit néanmoins obligé de satisfaire leur avidité commune, en répartissant, d’une manière plus ou moins égale, les bénéfices de l’administration entre les deux classes rivales d’ambitieux; enfin, des industriels de tous genres, cultivateurs, fabricans et négocians, qui se lamentent de porter deux bâts, qui désirent vivement de ne plus servir de pâture aux intrigans de toute espèce, mais qui n’ont aucune idée nette, ni aucune volonté arrêtée, sur la marche à suivre pour cela, et qui, par suite, restent spectateurs passifs de la lutte, attendant avec bonhomie qu’une portion de ceux qui vivent ou qui aspirent à vivre de l’intrigue et du gaspillage, les délivre généreusement du gaspillage et de l’intrigue: tel est, en raccourci, le tableau que présente la scène politique actuelle, à tout observateur impartial et éclairé; tel a été, jusquà présent, le triste résultat d’une révolution dont le but était manifestement, dès l’origine, l’organisation d’un régime économique et libéral, ayant pour objet direct et unique de procurer la plus grande source de bien-être possible à la classe laborieuse et productrice, qui constitue, dans notre état de civilisation, la véritable société.

Quelles sont les causes qui, en détournant notre révolution de son but primitif, ont amené et retiennent la société dans le déplorable état où elle se trouve aujourd’hui? Quels sont les moyens de l’en faire sortir, d’établir l’ordre et la prospérité sur des bases solides? Telles sont les deux questions générales intimement liées entre elles, dont je présente ici un premier éclaircissement.

Le caractère essentiel de cet écrit, celui que je désire principalement avoir rendu sensible, c’est le rapprochement, ou, pour mieux dire, la communauté que j’établis partout entre les intérêts de la royauté et ceux des industriels. La combinaison de ces deux forces a été la pensée dominante qui a occupé mon esprit pendant tout le cours de ce travail: j’aurai atteint mon but le plus important, si je puis obtenir que l’attention des industriels, ainsi que celle des vrais amis de la royauté, se fixe sérieusement sur ce point fondamental.

Pour faire sentir aux deux parties intéressées toute l’importance de ce rapprochement, j’ai tâché de leur démontrer séparément: 1o. Que la principale déviation de la révolution a consisté dans la faute commise par la royauté de se séparer des communes, peu de temps après l’ouverture des états-généraux; et par les communes, de se laisser bientôt entraîner dans une direction hostile à l’égard de la royauté, au lieu de persister, des deux côtés, dans une combinaison de forces politiques dont la bonté était éprouvée, tant pour la royauté que pour les communes, par une expérience de plusieurs siècles: 2o. Que, par conséquent, le besoin le plus pressant, dans l’état actuel des choses, pour la royauté et pour les communes, est de revenir immédiatement à cette sage combinaison.

Je fais observer à la royauté, que, si le but réel de la révolution a été manqué jusqu’à présent, et précisément même parce qu’il l’a été, il n’en a pas moins continué de subsister, et il subsiste encore dans toute sa force et dans toute son étendue, excepté que les principaux obstacles à son accomplissement ont été levés; car, pour les corps politiques comme pour les individus, tout besoin réel dure nécessairement jusqu’à ce qu’il ait été satisfait, et il se prononce avec d’autant plus d’énergie, qu’on tarde plus long-temps à le satisfaire. Ainsi, la révolution est loin bien d’être terminée, et elle ne peut l’être que par l’entier accomplissement du but que la marche des choses lui a assigné, c’est-à-dire, par la formation du nouveau système politique.

Il n’est au pouvoir d’aucune force humaine de faire rétrograder ce mouvement naturel, ni même de n’y obéir qu’à demi: ce qu’il peut y avoir de plus avantageux pour la royauté, c’est de se placer à sa tête.

Considérant ensuite la question, quant à l’intérêt particulier et immédiat du pouvoir royal, je prouve que le besoin impérieux de sa conservation lui fait une loi pressante de se liguer le plus promptement et le plus complétement possible avec les industriels, qui peuvent seuls protéger efficacement la royauté contre les attaques de la féodalité napoléonienne. Je fais voir que les préventions du Gouvernement contre l’attachement des industriels à la royauté entre les mains de la dynastie actuelle, ne sont nullement fondées. Les industriels étant par position essentiellement amis de l’ordre, et n’ayant en vue, sous le rapport politique, que l’établissement d’un système d’administration économique et utile à l’industrie, il n’y aurait point de possibilité qu’il se formât en eux le moindre désir d’un changement de dynastie, aussitôt que le pouvoir royal aurait clairement prononcé l’intention de faire cause commune avec eux, et d’abandonner à elles-mêmes les deux classes de frélons qui vivent à leurs dépens. Dès ce moment, on verroit les industriels prendre une attitude qui ôterait absolument tout espoir de succès aux ambitieux qui espèrent opérer le renversement de la dynastie actuelle pour placer sur le trône un roi de leur façon.

En m’adressant, d’une autre part, aux industriels, je leur fais voir que le moment est arrivé pour eux d’entrer en activité politique, et de s’occuper directement de leurs intérêts généraux, sans prendre plus long-temps des conseils hors de leur sein, excepté parmi les savans occupés de la culture des sciences d’observation, avec lesquels ils doivent se regarder comme ne faisant qu’un seul et même corps; j’établis que tous les fléaux dont ils ont été accablés depuis le commencement de la révolution, ont eu pour cause première et générale leur inertie politique, leur obstination à confier aux légistes la conduite de leurs intérêts sociaux. Je tâche de leur faire sentir combien il est absurde, de leur part, d’attendre d’autres que deux-mêmes la formation d’un régime économique, et conçu dans l’intérêt de la culture, de la fabrication et du commerce, puisqu’ils sont les seuls qui puissent avoir à la fois et la volonté réelle, et la capacité d’établir un tel système. Je m’efforce de les convaincre que leur inertie est aujourd’hui la seule difficulté véritable qu’ils aient à surmonter, puisque leurs forces sont, sous tous les rapports, et au plus haut degré, prépondérantes.

Raisonnant d’après ces données, je conclus que, si le pouvoir royal, éclairé sur ses plus chers intérêts, se décide à prendre les mesures nécessaires pour mettre les industriels en activité politique, ils devront s’empresser de marcher avec confiance dans la route qui leur sera ouverte. Dans le cas contraire, l’intérêt de la royauté, comme le leur propre, leur fait une loi de prendre l’initiative à cet égard. Dans l’une ou l’autre supposition, le premier acte politique des industriels doit être une déclaration solennelle et énergique qu’ils veulent formellement le maintien de la royauté entre les mains des Bourbons. Cette déclaration est indispensable pour faire cesser les tentatives turbulentes des ambitieux, en leur ôtant tout espoir de succès. Je fais voir aux industriels que les préventions que les bonapartistes tendent à leur inspirer sur le désir des Bourbons de prolonger la durée des pouvoirs abusifs, sont absolument chimériques; car les Bourbons doivent évidemment tenir beaucoup plus à jouir du pouvoir avec sécurité (ce que la protection des industriels leur garantirait pleinement) qu’à l’étendre au-delà de ce qui est nécessaire dans l’état actuel de la société.

Les conclusions générales de cet écrit, relativement aux industriels et à la royauté, sont donc que ces deux puissances ont le plus grand intérêt à s’unir, et que cette combinaison ne saurait être ni trop prompte ni trop intime.

Mais ce résultat n’était point suffisant. Trop souvent on a donné, soit au gouvernement, soit aux peuples, des conseils qui, bien que justes au fond, n’ont pu être d’aucune efficacité réelle, faute d’avoir été assez précisés, et d’avoir indiqué des moyens d’exécution susceptibles d’être mis sur-le-champ en activité. J’ai donc cru devoir compléter mon travail en proposant des mesures administratives immédiatement applicables, et qui ont pour objet de commencer à former la ligue des industriels et de la royauté, pour travailler à la coordination et à l’établissement du nouveau système politique. Ces mesures peuvent, d’un côté, être mises facilement à exécution, dès ce moment, par le pouvoir royal, s’il se décide à les adopter. D’un autre côté, je prouve aux industriels qu’ils ont des moyens simples et légaux de déterminer promptement leur adoption par la royauté, au cas où celle-ci serait assez aveuglée pour n’en pas reconnaître avant eux l’efficacité.

On peut voir, par ce court aperçu, que mon travail se compose de trois sortes de considérations. J’établis d’abord la nécessité, pour les industriels et pour la royauté, de combiner leurs forces; j’expose ensuite les mesures qui peuvent commencer à mettre cette combinaison en activité; enfin, je fais voir que ces mesures sont susceptibles d’une exécution facile et immédiate.

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