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INTRODUCTION

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Table des matières

Si j’avais à formuler une loi à la fois simple et complète, pour la réglementation de l’industrie, je proposerais la suivante:

«1° Toutes les industries peuvent s’exercer librement;

» 2° Lorsque la salubrité publique sera compromise par l’exercice d’une industrie, quelle qu’elle soit, les préfets pourront, après avoir pris l’avis des conseils d’hygiène et des maires, ordonner la fermeture de l’établissement, sauf le recours de l’industriel au conseil d’État;

» 3° Les particuliers qui souffriront quelques dommages par suite du voisinage d’un établissement industriel, s’adresseront aux tribunaux pour obtenir réparation de ce dommage.»

Cette loi comprend tout ce qu’il y a d’essentiel dans le sujet qui va nous occuper: libre développement de l’industrie, sauvegarde de la salubrité publique, réserve des droits des tiers.

La mise en pratique d’une pareille loi ne présenterait aucune difficulté ; mais pour être possible elle exige, de la part des autorités locales, des manufacturiers et de leurs voisins, des conditions qui sont loin d’être aujourd’hui généralement remplies.

L’étude que je viens d’achever m’en a donné plus d’une fois la preuve, et si j’ai cru devoir formuler en tète de ce travail un système aussi radicalement opposé à celui qui est en vigueur, je dois m’empresser d’ajouter que je considère ce système seulement comme un projet dont la réalisation est encore éloignée, mais vers lequel doivent tendre tous les actes destinés à l’amélioration et au perfectionnement du régime actuel.

Une autre conséquence de mes observations sur ce sujet, c’est que si les industriels désirent voir modifier les règlements qui les régissent, leur premier devoir est de se mettre en mesure de bien connaître et d’exécuter fidèlement et scrupuleusement tout ce qui leur est prescrit en ce moment par la loi, dans leur propre intérêt et dans l’intérêt général.

La législation actuelle a été un progrès sur le régime arbitraire qui l’a précédé, son application sérieuse par tout le monde pourra seule permettre d’y apporter des simplifications. Quand les industriels seront instruits de leurs devoirs et habitués à les remplir, quand les personnes étrangères à l’industrie auront appris à en apprécier les bienfaits et seront disposées à une large tolérance, quand les administrations locales auront acquis partout les connaissances nécessaires pour la pratique et l’intelligence des règlements, l’industrie pourra se passer de la protection que lui accorde l’autorité supérieure, et le système auquel je serais tout disposé à donner la préférence deviendra possible. Ici, comme à tous les autres points de vue, c’est du jeu normal et régulier des institutions existantes qu’il faut attendre leur perfectionnement Ce moyen est le plus sûr, c’est aussi le plus rapide.

On comprend dès lors quelles sont les idées qui m’ont servi de guide dans celte étude. J’ai pris la loi telle qu’elle est, et si j’ai cru devoir signaler ses lacunes et ses imperfections, je n’ai négligé aucune occasion de faire ressortir les avantages qu’elle présente.

J’ai donc eu soin de discuter et d’énumérer complètement les droits et les devoirs de tous les intéressés, magistrats, industriels, propriétaires dont le concours est indispensable pour que la loi produisen les bons effets qu’on doit en attendre.

Cette marche me parait être la meilleure pour arriver aux améliorations dont la loi est susceptible, car je suis convaincu que la législation de 1810, en matière d’établissements insalubres, aurait beaucoup plus avancé notre éducation industrielle, si elle avait été plus libéralement appliquée par les uns, plus franchement acceptée par les autres et mieux comprise par tous.

La loi a eu pour but de défendre l’industrie contre les tracasseries des voisins, et les exigences ou la faiblesse des autorités locales. Loin d’empêcher ses progrès, elle les a favorisés en la protégeant également contre ses propres écarts, et contre les fautes des manufacturiers trop avides qui ne reculent devant aucun moyen pour augmenter leurs bénéfices.

D’un autre côté, les industriels doivent être bien persuadés que le régime de la liberté pure et simple, qu’ils réclament souvent sans en comprendre les conséquences, serait pour eux plus difficile et plus onéreux que celui sous lequel ils vivent maintenant.

Quoi qu’il en soit, cette émancipation est une conséquence forcée de la marche des évènements que nous voyons se succéder dans le domaine de l’industrie; le perfectionnement des opérations, la simplification des appareils, la diffusion des connaissances scientifiques, la généralisation de la pratique des règles de l’hygiène publique et privée, tout doit concourir à amener plus ou moins rapidement cet important résultat.

En attendant sa réalisation, j’ai pensé qu’il pouvait être utile d’appeler l’attention des industriels sur les différents points de la législation actuelle. Souvent on peut constater leur ignorance absolue des devoirs qu’elle leur impose, quelquefois même on les trouve trop facilement disposés à s’y soustraire et à les éluder. Espérons que la connaissance des conséquences fâcheuses de cette omission les amènera à se montrer plus attentifs et plus scrupuleux.

Je n’ai pas la prétention d’avoir fait un travail complet sur cette matière, que j’avais d’abord seulement étudiée pour moi-même. En réunissant les principaux chapitres de cette étude, j’ai cherché surtout à me mettre à la portée des industriels et des propriétaires, étrangers comme moi à la science du droit.

Tel qu’il est, ce travail pourra être utile à tous ceux qui ont besoin de s’éclairer sur les différents points de la législation en matière d’établissements insalubres et sur la marche à suivre dans les diverses circonstances qui peuvent se présenter.

A tout industriel, à tout propriétaire qui aurait à s’adresser soit à l’administration, soit aux tribunaux pour des faits soumis à cette législation, je recommanderai toujours de recourir aux conseils d’un jurisconsulte, afin de se renseigner sur la marche qu’il faut suivre dans chaque cas particulier.

Avant de terminer cette introduction, c’est pour moi un devoir de remercier M. le Dr Noirot, secrétaire du Conseil central d’hygiène de la Côte-d’Or, qui a bien voulu accueillir cette notice et lui donner place à la suite du compte-rendu des travaux accomplis par les Conseils d’hygiène du département.

Dijon, 5 février 1867.

C. LADREY.

Les Établissements industriels et l'hygiène publique

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