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CHAPITRE V.
Des temps antérieurs à Moïse et des livres attribués à ce législateur
ОглавлениеMAINTENANT si les Juifs n'ont pu conserver de notions exactes du temps écoulé entre le grand-prêtre Héli et Moïse, ni du temps que dura le séjour de leurs pères en Égypte (car rien n'est clair à cet égard), comment peuvent-ils prétendre avoir mieux connu les temps antérieurs où n'existait pas encore la nation, et qui plus est, les temps où n'existait aucune nation, c'est-à-dire, l'époque de l'origine du monde, à laquelle aucun témoin n'assista, et dont leur Genèse nous fait cependant le récit, comme si l'écrivain en eût eu sous les yeux un procès verbal? Les Juifs nous disent que c'est une révélation faite par Dieu à leur prophète: nous répondons que beaucoup d'autres peuples ont tenu le même langage. Les Égyptiens, les Phéniciens, les Chaldéens, les Perses, ont eu, comme le peuple juif, leurs histoires de la création, également révélées à leurs prophètes Hermès, Zoroastre, etc. De nos jours les Indous ont présenté à nos missionnaires les Vedas et les Pouranas, avec des prétentions d'une antiquité plus reculée que la Genèse même, et que les autres livres attribués à Moïse. Il est vrai que nos savants biblistes rejettent, ou du moins contestent l'authenticité de ces livres; mais quand notre zèle convertisseur présente aux Indous la Bible, qu'aurons-nous à répondre, si les brahmes nous rétorquent nos propres arguments européens? Si, par exemple, ils nous disent:
«Vous niez l'authenticité et l'antiquité de certains Pouranas et Chastras, par la raison qu'ils mentionnent des faits postérieurs aux dates présumées de leur composition: eh bien! nous nions à notre tour l'authenticité des cinq livres que vous attribuez à Moïse, par cette même raison que nous y trouvons un grand nombre de passages et de citations qui ne peuvent convenir à ce législateur.»
La question se réduit donc à savoir si cette dernière assertion est fondée en preuve de faits; et c'est une question qui doit se traiter avant toute autre; car le système chronologique antérieur à Moïse, tirant son autorité principale de la supposition que ce prophète en a été le rédacteur, si cette supposition était démontrée fausse, l'autorité du système en serait considérablement affaiblie. De savants critiques ont déjà traité ce sujet44; mais parce qu'ils ne l'ont pas à beaucoup près épuisé, et que surtout ils n'ont pas bien saisi les conséquences qui découlent des preuves, nous allons reprendre la discussion dans ses fondements, et dresser un tableau plus complet qu'aucun autre précédent, de tous les passages du Pentateuque, qui prouvent la posthumité de cet ouvrage relativement à Moïse, et qui indiquent la véritable époque de sa rédaction.
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Voyez, entr'autres, le Tractatus Theologico-Politicus, publié en 1665, et l'Histoire critique du Vieux-Testament, in-4°, 1685.