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DEUXIÈME LECON.
ОглавлениеLe cheval en mouvement.
Après avoir démontré les principes pour monter à cheval et pour en descendre, et quelle doit être la position du corps et de ses diverses parties, on expliquera au cavalier l’action des aides en particulier, et les principes qu’il doit employer pour mettre le cheval en mouvement, et conserver, pendant le cours de sa marche, sa position première, que sans doute les réactions du cheval vont déranger. Pour cet effet on fera mettre un caveçon de main, tenu par un piqueur ou un autre homme intelligent, qui conduira le cheval de telle sorte que l’élève n’ait besoin que de s’occuper de maintenir sa position. On fera marcher le cheval sur des lignes droites, car il ne faut pas mettre de suite la grande longe, qui n’est destinée que pour faire travailler le cheval sur les cercles, ce qui est trop difficile pour un commençant.
Avant de mettre le cheval en mouvement, et pour l’exécution des principes posés, il faut d’abord démontrer au cavalier l’effet du mors de bridon dont il va être obligé de se servir.
LE MORS DE BRIDON se divise en deux ailes, deux chaperons, deux canons, un pli et un trou; l’embouchure proprement dite se divise en deux, et s’articule à son centre par le moyen du pli et du trou, ce qui rend bien distinct l’effet de chaque canon sur la bouche du cheval. En tirant la rêne droite, on fait agir la partie droite de l’embouchure sur la barre droite seulement, et par conséquent en faisant agir la rêne gauche, on fait agir la partie gauche de l’embouchure sur la barre gauche; en tirant également sur les deux rênes, les deux canons agissent en même temps sur la bouche du cheval: plus les canons sont gros, moins ils font d’effet; et plus ils sont minces, plus ils en font.
Il sera donné, à l’article embouchure, une définition plus détaillée des différens mors de bridon.
Principes généraux sur la division du corps du cheval, l’action des aides en particulier et l’accord des aides, ou des mains et des jambes.
Je suppose d’abord le cavalier bien placé sur son cheval, d’après les soins de l’écuyer; cela étant, on pourra lui bien faire connaître les points où doivent agir ses aides, lui indiquer premièrement la subdivision du corps du cheval, telle qu’elle est établie dans les manèges.
Division du corps du cheval en trois parties pour l’intelligence de l’action des aides.
Le cheval se divise en trois parties; savoir: avant-main, centre de gravité, et arrière-main.
L’avant-main prend depuis la partie antérieure du nez jusqu’au centre de gravité.
L’arrière-main commence depuis le centre de gravité, jusques et y compris le tronçon de la queue.
Le centre de gravité est précisément l’endroit où posent tous les points, de l’assiette du cavalier; il commence au point où se termine l’avant-main, et finit au point où commence l’arrière-main.
Actions des aides en particulier.
Les aides supérieures, les mains, sont chargées particulièrement de l’avant-main. En général, elles doivent être soutenues à quatre pouces du pommeau de la selle, pour le cheval qui a la tête bien attachée et bien placée; mais il n’en est pas de même pour le cheval qui porte le nez au vent; avec de tels chevaux il faut baisser un peu plus les mains, et avec un cheval qui porte la tête basse, il faut tenir les mains plus élevées que dans la règle générale que nous avons indiquée pour le cheval qui porte bien sa tête: de manière que la diagonale formée par les rênes, depuis l’appui du mors du bridon sur la barre du cheval jusqu’ aux mains du cavalier, soit moins prononcée pour le cheval qui tend le nez, que pour celui qui s’encapuchonne. Autant que possible, il faut que les mains soient soutenues, de manière que le mors agisse sur les barres du cheval.
LES MAINS en particulier servent donc à rassembler l’avant-main du cheval, à l’élever, à soutenir cette partie dans tous les mouvemens du cheval, à déterminer l’avant-main à tourner à droite et à gauche, à ralentir la masse entière, à changer les allures et placer le cheval sur des lignes droites ou circulaires, à l’arrêter, à le faire reculer et à le fixer en place.
LES JAMBES servent particulièrement à mettre le cheval en action, à porter la masse entière en avant, à entretenir et à faire doubler les allures, à enlever la masse dans les sauts, à la porter de côté, à faire élever les hanches et approcher les pieds postérieurs sous le centre de gravité lorsqu’on rassemble son cheval, à soutenir la masse dans les mouvemens circulaires, et à déterminer les hanches à suivre la ligne des épaules; à les faire suivre de côté. Elles contribuent aussi à fixer les hanches en place dans l’arrêt.
Accord des aides ou des mains et des jambes .
La première opération que l’on doit faire exécuter pour l’accord des aides, c’est de rassembler le cheval, avant de le mettre en marche.
Rassembler un cheval.
Supposons un cheval d’une sensibilité ordinaire, le cavalier doit soutenir les poignets et les mains, de manière à causer un plus haut degré de tension aux rênes que dans l’état de repos. Les rênes doivent être soutenues et légèrement tendues, dans la direction du centre de gravité du cavalier, de manière à former une diagonale depuis l’appui du mors sur les barres du cheval jusqu’aux mains; cet effet des rênes fait élever l’avant-main du cheval; dans le même moment, les jambes se ferment au premier point du premier degré d’aides, pour mettre le cheval en action et pour l’empêcher de reculer, ce qu’on appelle les jambes près; mais ce moyen des jambes ne suffirait pas pour gouverner l’arrière-main, il faut donc que les jambes se ferment un peu plus inférieurement du point qui maintient le cheval en place et le met en action, pour faire arriver l’arrière-main au secours de la masse, de manière que les pieds postérieurs se rapprochent de la ligne du centre de gravité. pour porter et chasser la masse en avant lorsque les rênes en donneront la liberté.
On observera que le cheval n’a pas besoin d’être rassemblé à un aussi haut degré pour le mettre en marche à l’allure du pas, que pour le trot, le galop, ou pour le faire sauter.
Faire marcher le cheval en avant.
Le cheval rassemblé, on fera, pour le porter en avant, baisser graduellement les mains, en conservant les jambes fermées au même point pour le pas f car il n’y a pas besoin d’augmenter encore l’effet des jambes, puisqu’on lui donne la liberté de se porter en avant en baissant les mains. Le mouvement du cheval ainsi déterminé en avant et au pas, on replacera les mains graduellement à la position indiquée ci-dessus, et les jambes se relâcheront par degrés, pour venir se placer au degré nécessaire pour entretenir l’allure.
RASSEMBLER UN CHEVAL EN MARCHANT: Même. principe, excepté que les jambes doivent fournir assez d’aides pour rassembler le cheval et entretenir son allure.
AUGMENTER UN PEU L’ALLURE: Fournir un peu plus de jambes en rendant un peu de main, c’est-à-dire, diminuer un peu la tension des rênes.
RALENTIR: Soutenir un peu les mains, et augmenter progressivement l’effet des rênes, jusqu’à ce que le cheval soit mis au degré d’allure exigé, ayant soin de diminuer graduellement l’action des jambes.
ARRÊTER: Commencer par le rassembler, ralentir un peu l’allure, et enfin l’arrêter en augmentant l’effet du mors sur la bouche du cheval jusqu’à ce qu’il arrête, les jambes près pour le soutenir dans l’arrêt et l’empêcher de reculer; baisser ensuite les mains, et relâcher les jambes graduellement.
UN DEMI-ARRÊT est la moitié de l’impression que doit faire le mors sur la bouche du cheval pour l’arrêter.
L’ARRÊT est l’effet que le mors produit sur la bouche du cheval pour l’arrêter et le fixer en place.
L’arrêt doit toujours être précédé d’un ou plusieurs demi-arrêts, qui commencent à préparer le cheval à arrêter; bien entendu que l’effet du mors doit toujours, relativement à la sensibilité de la bouche du cheval, se faire sentir dans les demi-arrêts tout comme dans l’arrêt: car le demi-arrêt que l’on formera sur un cheval qui aurait la bouche ferme; suffirait pour l’arrêt d’un autre qui l’aurait sensible; mais, dans les deux cas, c’est toujours la moitié de l’effet qu’il faut employer pour l’arrêt, qui forme le demi-arrêt.
Les demi-arrêts servent à ralentir le cheval dans ses allures, à les lui faire cadencer, avec l’accord des jambes, à le soutenir lorsqu’il s’abandonne sur les épaules, en lui faisant élever son avant-main; ils servent encore d’avertissement au cheval pour lui faire prêter attention, et le disposer à exécuter ce que son cavalier va exiger de lui.
Les demi-arrêts doivent être gradués selon la sensibilité de la bouche du cheval, et selon le mouvement qu’on veut lui faire exécuter.
Par exemple, les demi-arrêts pour cadencer l’allure doivent être très-légers; pour ralentir, un peu plus fermes; pour rassembler, un peu plus forts: pour faire changer d’allure, ils doivent se faire un peu plus sentir selon celle. qu’on veut faire prendre; pour disposer le cheval à sauter, il faut les marquer un peu plus; et enfin pour reculer, encore davantage, ensuite vient l’arrêt.
RENDRE LÉS MAINS: C’est ne plus faire sentir au cheval l’appui du mors; mais avant de rendre les mains, il faut s’assurer que le cheval est dans son équilibre; on l’y mettra en formant un ou plusieurs demi-arrêts, qui allègent l’avant-main en faisant reporter une grande partie du corps sur l’arrière-main.
En rendant les mains, il faut les baisser graduellement dans la direction où elles se trouvent placées, et sans changer leur position; car, en les portant en avant, on rendrait tout d’un coup les rênes flottantes, et si on avait besoin de s’en servir, on ne pourrait le faire sans saccades, ce qu’il faut éviter: il faut donc se réserver toujours les moyens d’arrêter son cheval sans le surprendre, s’il se portait en avant.
RECULER: Rassembler d’abord le cheval, ensuite soutenir les mains graduellement jusqu’ à ce qu’il recule; cet effet graduel des mains doit être des demi-arrêts multipliés, en laissant entre eux un peu d’intervalle lorsque le cheval a reculé quelques pas, puis le reprendre, ce qu’on peut appeler arrêter et rendre. On doit avoir les jambes près pour le soutenir, l’empêcher de jeter ses hanches de droite ou de gauche, et pour se fermer et reporter le cheval en avant, dans le cas où il se précipiterait en arrière; lorsqu’il a reculé au point désiré, les rênes diminuent graduellement leur effet, et les jambes fixent le cheval en place, et font répartir également le poids de son corps sur ses quatre extrémités.
Pour doubler le cheval dans la largeur. Supposons. à droite, et toujours en bridon.
Le cavalier devra d’abord rassembler son cheval d’après les principes qui viennent d’être indiqués; il ouvrira ensuite la rêne droite progressivement, en la tirant un peu à lui pour faire faire effet au mors sur la barre droite, et déterminer l’avant-main du cheval à tourner. Dans le même moment la jambe droite agira au premier degré, pour mettre le cheval en mouvement, entretenir son allure, et le soutenir sur la ligne circulaire qu’il doit parcourir; ce premier degré doit opérer sur le centré de gravité du cheval) mais, pour gouverner l’arrière-main, la jambe fera sentir son effet un peu plus inférieurement, en employant le genou, de manière à faire parcourir aux hanches la ligne des épaulés. Pendant le mouvement, la rêne gauche soutient les épaules, cède à fur et mesure que le mouvement s’exécute, et lorsque les épaules arrivent dans la nouvelle direction, la rêne droite diminue son effet, et la rêne gauche l’augmente un peu pour fixer les épaules sur la nouvelle-ligne. De même, pendant l’opération de la jambe droite, la gauche doit être près pour soutenir les hanches dans le cas où la première ferait trop d’effet, et lorsque les hanches arrivent sur la ligne des épaules, la jambe droite diminue son effet, et la gauche fixe les hanches sur la nouvelle direction qui est donnée par les épaules.
Mêmes principes pour tourner à gauche, et mouvement contraire.
OBSERVATIONS.
Cet accord des mains et des jambes ne convient que pour le travail en bridon; car, en bride, le résultat sera bien le même, mais la main communiquera son effet par un moyen différent.
Dans cette opération des mains et des jambes, il faut que le cavalier ne fasse pas de mouvemens du corps, qu’il ne dérange pas son assiette en remontant les genoux pour fermer les jambes, ou se penchant du côté où il veut les fermer avec plus de nerf, et qu’il ne se roidisse point comme le font quelquefois les commençans, en croyant et voulant donner plus de force à leurs aides.
Quelques personnes rejettent le secours de la jambe de dehors, soit pour tourner le cheval, soit pour ramener les hanches sur la ligne des épaules; ce système est contraire à l’expérience, quelques exemples suffiront pour le prouver. Je suppose une reprise composée de sept à huit chevaux qui suivent les murs du manège; que l’on dise à un des cavaliers du centre de la reprise de doubler son cheval individuellement ; il pourra se faire, et l’expérience me l’a bien prouvé, que le cheval résistant à la rêne et à la jambe de dedans, et voulant continuer de suivre les chevaux qui le précèdent, l’action de la jambe de dedans ne serve qu’à le maintenir au mur; il faut donc dans ces occasions, que la jambe de dehors détache le cheval du mur, et, dans le moment qu’il s’en détache, la jambe de dedans alors le reçoit, le dispose et le fait tourner; alors, quand la jambe de dedans opère, celle de dehors, qui a rempli son but en détachant le cheval du mur, se relâche un peu et soutient les hanches pendant le changement de direction.
Dans le départ au galop, si la jambe de dehors n’aide pas celle de dedans à déterminer la masse en avant et la laisse agir seule, elle pourra jeter les hanches en dehors et mettre le cheval de travers, ce qui l’empêcherait de partir juste. On dit que les murs remplacent la jambe de dehors; mais il faut donner un principe juste et applicable en toute situation; car il est bon que le cavalier puisse déterminer son cheval au galop, dans le milieu et hors du manège, comme le long du mur: à la leçon du galop, j’indiquerai l’emploi des deux jambes pour cette allure.
Il est certain et bien démontré que, dans le travail au manège, la jambe de dedans a beaucoup plus de fonctions à remplir que celle du dehors; mais l’aide de cette dernière ne doit pas pour cela être entièrement abandonnée. En voici un autre exemple: qu’un cheval que l’on dresse se défende, veuille éviter l’action de la jambe de dedans, et jette ses hanches sur le mur; assurément la rêne de dehors ne sera pas d’un effet assez sensible, en opposant les épaules aux hanches, pour empêcher celles-ci de tomber sur le mur: il faut donc que la jambe de dehors vienne soutenir l’arrière-main, qui tombe de son côté.
Dans le travail sur les lignes circulaires, la rêne de dedans amène les épaules du cheval sur le cercle, la rêne de dehors les soutient; la jambe de dedans soutient le cheval par son centre de gravité, et gouverne les hanches pour leur faire parcourir la ligne des épaules; et si les hanches viennent à tomber en dedans, c’est encore la jambe de dedans qui les ramène sur la ligne qu’elles doivent parcourir; mais si elles se jettent ou sont jetées en dehors par la jambe de dedans, qui pourrait faire trop d’effet, ou si le cheval, pour se soustraire à la ligne courbe, venait à se jeter en dehors du cercle pour se remettre sur la ligne droite, qui lui est plus agréable, je pense que l’effet de la rêne de dehors ne peut suffire pour faire rentrer les hanches sur le cercle, et que c’est alors la jambe de dehors qui doit être chargée d’agir sur les hanches, et les replacer sur la ligne qu’elles doivent suivre.
J’ai déjà fait observer en commençant, que c’était particulièrement à l’usage des troupes de cavalerie que je destinais ce traité, et que pour cette raison je l’avais mis en harmonie avec l’ordonnance de cavalerie; il faut donc que j’enseigne la manière dont les cavaliers, travaillant leurs chevaux, soit au dedans ou au dehors des manèges, doivent se servir de l’accord des jambes pour conduire leurs chevaux avec justesse.
Comment se conduirait en effet un élève qui, ayant travaillé long-temps dans un manége couvert, et ne connaissant que l’emploi de la jambe de dedans, se trouverait en rase campagne à l’armée, ou en promenade. Il serait assurément fort embarrassé : car n’ayant plus de murs pour aider à sa jambe de dedans à maintenir son cheval droit, il ne saurait comment agir pour lui faire prendre cette direction et l’empêcher de jeter les hanches en dehors; il faut observer que l’action de la rêne de dehors n’est pas toujours un moyen efficace pour contenir ou remettre les hanches sur la ligne des épaules, surtout en marchant, il est beaucoup plus naturel que ce soit la jambe du côté où les hanches tombent, qui soit chargée de les faire rentrer sur la ligne, puisque par sa position elle est plus rapprochée des hanches, et plus à même de les gouverner que la rêne, qui a d’autres fonctions à remplir.
Accord de la position du cavalier avec les mouvemens du cheval.
En ligne droite, le cavalier a son cheval sur la ligne d’aplomb, lorsqu’il a fait répartir également le poids du corps du cheval sur ses quatre extrémités, et qu’il pèse également sur ses deux fesses, ayant sa ligne verticale perpendiculaire à l’horizon. En mouvement le cavalier par la flexibilité de ses reins, doit céder sans abandon au mouvement du cheval; car si les réactions du cheval rencontraient le corps du cavalier sur une ligne roide, il enlèverait l’assiette et ferait perdre la ligne d’aplomb. Cette flexibilité ne doit s’employer qu’en raison de la dureté de l’allure du cheval qu’on monte. Le cavalier, lorsqu’il ne plie nullement les reins, se trouve selon une ligne trop ferme; et lorsqu’au contraire il les plie trop, il en détruit tout le jeu, et se laisse, à chaque secousse du cheval, enlever le corps tout d’une pièce.
C’est toujours sur la ligne d’aplomb, ou la ligne droite, que le cavalier doit rassembler son cheval, car vouloir le rassembler en tournant serait un principe faux, qui n’aurait d’autre effet que de précipiter le cheval; d’ailleurs, les aides étant occupées à faire changer le cheval de direction, ou à le maintenir sur une ligne courbe, ne pourraient quitter leurs opérations pour en exécuter une autre.
Dans les changemens de direction sur les lignes circulaires, et la partie supérieure du cheval étant inclinée plus ou moins en dedans, selon la ligne qu’il parcourt, il faut pour que le corps du cavalier soit en harmonie avec celui de son cheval, que les deux verticales de l’homme et du cheval, que nous avons dit être en direction soient inclinées dans leur partie supérieure, de manière que les deux points d’appui du cavalier posent toujours sur les deux points de support du cheval. On aura soin que le cavalier en se penchant de lui-même en dedans, ne prévienne pas le mouvement de son cheval, ou qu’il ne le retarde pas en voulant rester sur la ligne d’aplomb, tandis que le cheval se plie sur la ligne, circulaire. Car ce seront toujours les mains et les jambes du cavalier qui devront déterminer le cheval sur les nouvelles lignes: quelques exemples le prouveront facilement; supposez que le cavalier veuille faire doubler son cheval à droite, et qu’il agisse ou croie agir avec justesse des mains et des jambes pour tourner, mais que le cheval résiste, ou que les moyens du cavalier étant insuffisans, le cheval reste toujours dans sa première direction; dans ce cas, il ne faudrait pas que le cavalier cherchât à entraîner son cheval à droite en y penchant le corps, ce moyen serait vicieux, parce que le corps perdant son équilibre en se penchant en dedans, tandis que le cheval reste droit, le cavalier serait obligé de serrer la cuisse et la jambe droite, qui porteraient encore davantage le cheval du côté opposé où il voudrait le mener, et pourrait le désarçonner. Je le répète encore, l’assiette du cavalier doit être adhérente au corps du cheval, le haut du corps dans la direction de l’appui des fesses sur le centre de gravité du cheval; par la même raison, le corps du cavalier doit changer de direction en même temps que le corps du cheval, et on ne doit pas plus dans le passage des coins prévenir les mouvemens du cheval en avançant l’épaule et la hanche de dehors, qu’il ne faut les laisser en arrière lorsque le cheval tourne: ce mouvement du cavalier doit se faire en même temps que celui du cheval.
Lorsqu’on aura indiqué et fait exécuter aux deux mains quelques doublés à l’elève, et qu’on remarquera que sa position commence à s’assurer, on pourra retirer le caveçon de main, et le faire marcher par le large au pas, lui répéter les moyens qu’il doit employer pour ne pas changer sa position, ni celle de son cheval le long des murs, et lui faire toujours maintenir les jambes moelleusement près, celle de dedans serrant d’un peu plus près et en raison de la sensibilité du cheval, pour le contenir droit autant que possible dans les commencemens, entretenir son allure et le maintenir sur la piste.
Passage du coin.
Je suppose le cavalier marchant le long d’un des grands murs, à quelques pas avant d’arriver au coin; il doit soutenir son cheval de la rêne de dehors et de la jambe de dedans, pour le faire arriver sur le point où il veut le faire tourner, parce que souvent le cheval tourne de lui-même et cherche à éviter d’entrer dans le coin. Dès qu’il s’est un peu plus rapproché du coin, il rassemble son cheval, ouvre et tire progressivement la rêne de dedans, pour déterminer l’avant-main à tourner; en même temps il soutient de la rêne de dehors, pour que les épaules du cheval ne se jettent pas par à-coup en dedans; mais cette rêne ne doit pas faire trop d’effet, sans cela elle contrarierait celui de la rêne de dedans, qui opère pour attirer les épaules sur la nouvelle ligne, et lorsque les épaules sont arrivées sur cette ligne, c’est la rêne de dehors qui les y fixe dans le moment où la rêne de dedans diminue son effet; en même temps que les rênes opèrent sur l’avant-main, la jambe de dedans se ferme graduellement, de manière que sa plus grande pression s’effectue quand le cheval a son centre de gravité vis-à-vis l’angle du coin.
Les premiers points de la jambe de dedans agissent sur le cheval, 1° pour entretenir son allure, que l’action des rênes ralentirait si la jambe de dedans ne venait pas au secours des mains; 2° ces mêmes points agissent aussi pour le soutenir dans son mouvement circulaire; 3° les points plus inférieurs de la jambe agissent sur l’arrière-main, pour faire parcourir aux hanches la ligne des épaules; le mouvement se terminant, la jambe de dedans se relâche par degrés, et vient se replacer sur le centre de gravité, et agir sur la masse entière, pour entretenir le degré d’allure nécessaire pendant l’opération du mouvement; la jambe de dehors est toujours disposée à soutenir l’arrière-main, dans le cas où la jambe de dedans agirait avec trop de force et jetterait les hanches en dehors de la ligne qu’elles doivent parcourir; pendant ce mouvement, le corps du cavalier doit être d’aplomb sur sa base, les fesses portant sur les mêmes points; et comme le cheval est obligé de s’incliner un peu en dedans en décrivant son arc de cercle, le cavalier doit être incliné au même degré, mais il ne doit pas prévenir ni retarder les mouvemens de son cheval: le prévenir, s’il se penchait en dedans avant que son cheval ne s’inclinât, ou s’il avançait l’épaule et la hanche de dehors avant que le cheval ne tournât, et le retarder, s’il voulait rester sur la ligne droite, tandis que son cheval se présente sur l’arc de cercle qu’il doit parcourir pour passer le coin, ou s’il refusait l’épaule et la hanche de dehors. L’arc de cercle est plus ou moins étendu, selon qu’on fait plus ou moins entrer son cheval dans les coins; on observera à l’égard des commençans, de ne pas trop exiger qu’ils fassent entrer leurs chevaux dans les coins; ce n’est qu’en raison des progrès qu’ils feront qu’on pourra exiger davantage.
On fera exécuter souvent les doublés dans le travers et dans la longueur du manège; ces mouvemens donnent l’habitude au cavalier de se servir de ses aides avec justesse, et lui apprend à contenir son cheval droit sans le secours des murs.
Doubler dans la longueur, à droite et à gauche.
Le cavalier ayant fait quelques tours de manége le long des murs, on le préviendra, pour le faire doubler dans la longueur, que lorsqu’il aura quitté le grand mur et parcouru le tiers du petit mur, il doit rassembler son cheval; puis il le fera tourner au milieu du petit côté, d’après les principes qui ont déjà été donnés, pour suivre, dans le milieu du manége, une ligne parallèle aux deux grands murs; pendant ce mouvement, il doit avoir les deux jambes également en action, pour porter son cheval en avant, le maintenir droit, et s’il sent que son cheval laisse tomber ses hanches de droite ou de gauche, alors la jambe du côté où les hanches tombent doit les redresser, et les ramener par degrés sur la ligne des épaules; de même, si les épaules tombent d’un côté ou de l’autre, la rêne du côté opposé où elles tombent doit les redresser et les ramener sur la ligne qu’elles doivent parcourir; lorsqu’elle est presque entièrement parcourue, le cavalier rassemble de nouveau son cheval, et lui fait déjà sentir une légère impulsion de la rêne de dedans, pour lui indiquer le côté où il va le déterminer à tourner, sans cependant qu’il quitte la ligne du doublé ; ce moyen empêche que le cheval ne soit dans l’incertitude en arrivant à l’extrémité de la ligne, et lorsque le cavalier se détermine à faire tourner son cheval, il le fait avec plus d’aisance et plus de justesse, le cheval étant déjà prévenu. Alors, arrivé sur le point où il veut lui faire changer de direction, il le fait tourner pour regagner le petit mur opposé à celui qu’il a quitté, ou à la ligne qui figure le petit mur; c’est-à-dire que cette ligne est établie devant les piliers, parce que les sauteurs qui sont aux piliers gêneraient pour rejoindre le petit mur qui se trouve derrière eux.
A l’égard de cette impulsion que je recommande ci-dessus, et que le cavalier doit donner à son cheval, pour lui indiquer le côté où il veut le faire tourner, sans qu’il sorte de la ligne, on ne doit pas trop encore en parler aux commençans et attendre qu’ils soient un peu plus forts, parce que cela demande du tact et de la finesse dans l’action des mains, ce qu’ils ne peuvent encore avoir acquis.
Doubler dans la largeur.
Lorsque le cavalier a suivi quelque temps les murs, et qu’il est arrivé presqu’au milieu d’un des grands murs, il rassemble son cheval; puis il ouvre la rêne du dedans pour déterminer les épaules de son cheval à tourner, et il emploie les mêmes principes que pour tourner ou doubler dans la longueur; et il se dirige ainsi d’un grand mur sur l’autre et à la même main.
Les doublés ont pour objet d’accoutumer les cavaliers à conduire leurs chevaux droits, sans le secours des murs.
Du trot.
Le trot étant l’allure du cheval, dont les réactions se font sentir avec plus de force, se succèdent plus rapidement et causent le plus d’ébranlement dans la position du cavalier, on lui fera d’abord monter des chevaux qui trottent doux, et on le tiendra le long des murs afin qu’il ait plus de moyens de conserver et de rectifier sa position, en travaillant sur des lignes droites. On ne doit le mettre au trot sur les cercles que lorsqu’il commence à avoir une position assurée; car cela serait trop difficile pour un commençant, si on le mettait de suite sur des cercles, à l’allure du trot, et il ne serait occupé que de s’empêcher de tomber: ce qui le tiendrait dans une crainte continuelle, et le retarderait au lieu de l’avancer.
On le fera donc aller d’abord au petit trot; on le préviendra que ce n’est que par le jeu des vertèbres lombaires, qui forment ressort, que le cavalier peut résister aux secousses du cheval, et empêcher l’assiette d’être enlevée à chaque temps du trot. Cette flexibilité des reins doit s’employer selon la dureté de l’allure; on ne doit ni prévenir ni retarder l’accord qui doit exister entre les ressorts du cavalier et les secousses du cheval; on préviendrait, le mouvement si on fléchissait du pli des reins avant que la réaction du temps de trot se fasse sentir à l’assiette du cavalier; on le retarderait, si on fléchissait du pli des reins après la réaction: dans les deux cas, les ressorts du cavalier ne se trouvant pas en harmonie avec les réactions du cheval, à chaque temps de trot, l’assiette serait enlevée de dessus la selle, et le haut du corps serait jeté en avant; ainsi, il faut que ce soit au moment même où le temps de trot ou toute autre réaction du cheval s’exécute, que le cavalier fléchisse graduellement du pli des reins sans faire de mouvemens de corps, c’est-à-dire, de manière que ce moelleux dans les reins du cavalier, qui doit être employé sans abandon, soit tellement exécuté avec justesse et proportionellement au degré d’allure, qu’il ne soit même pas remarquable à l’œil: dans ce cas, les fesses ne doivent pas quitter la selle, ni le cavalier perdre un instant la ligne d’aplomb.
On voit que ce serait ne pas tenir compte du principe le plus utile, que de vouloir commencer à mettre l’élève au trot à la longe, sur les cercles, avant qu’il n’ait bien conçu les moyens qu’il doit employer pour résister, par ses ressorts, aux secousses du cheval; et c’est sur la ligne droite que les réactions du cheval se communiquent au cavalier avec plus de justesse et de régularité, et qu’elles font le moins varier son équilibre.
On fera augmenter un peu l’allure, et monter un cheval qui trotte plus dur, à mesure que l’élève acquerra de la solidité et de la confiance; on peut même, dans les commencemens que l’on fait aller au trot, ne pas exiger que le cavalier arrondisse le passage du coin, mais bien de le couper diagonalement: ce qui dérangera moins sa position. On peut aussi le faire passer souvent du pas au trot, et du trot au pas.
OBSERVATIONS.
Les Anglais, dans leur manière de monter à cheval, sont obligés de chercher ces ressorts dans les articulations des pieds et des genoux, qui fléchissent en mesure à chaque réaction du cheval; mais cette manière, qui enlève le corps et l’assiette, n’a pas autant de ressort, de justesse, de finesse et de solidité, puisque le cavalier n’est pas aussi lié à son cheval qu’à la manière française, et qu’il ne peut pas se servir de ses jambes pour gouverner son cheval avec justesse. On voit quelquefois des jeunes gens allant à l’anglaise, être dérangés, désarçonnés par le moindre contre-temps, surtout si le cheval vient à s’arrêter court; la grâce et la finesse que l’on doit employer dans nos manèges n’admettent pas cette manière de monter.
Je n’ai fait cette observation que pour prouver qu’il faut des ressorts fermes et moelleux, pour résister aux réactions du cheval, et que pour cet objet ce sont les vertèbres lombaires du cavalier, dont se composent ses reins, qu’il faut principalement employer.
Passer du trot au pas.
Le cavalier doit former un ou plusieurs demi-arrêts pour disposer son cheval à changer d’allure; puis, lorsqu’il le sent préparé, il en forme un dernier un peu plus fort, pour faire passer le cheval du trot au pas. Tandis que les mains font changer d’allure, les jambes doivent être en mesure d’empêcher le cheval de s’arrêter, et fournir assez pour entretenir l’allure du pas, qu’il fera un peu allonger dans le commencement, et ensuite formera quelques demi-arrêts pour le fixer au degré nécessaire; pendant l’opération des mains et des jambes, on prendra garde que le cavalier ne se laisse pas attirer le corps en avant, et qu’il ait soin de porter la ceinture en avant, en pliant les reins dans le moment que le cheval passe du trot au pas: ce qui maintient le cavalier sur la ligne d’aplomb, et lui donne la facilité de se servir de ses jambes pour recevoir son cheval lorsqu’il change d’allure, le porter en avant et le contenir droit.
Arrêter.
Mêmes principes, excepté que les jambes fournissent un peu plus, pour fixer le cheval en place et l’empêcher de reculer, et que les mains font aussi un peu plus d’effet pour arrêter le cheval.
Remettre le cavalier en mouvement, pour lui faire exécuter les changemens de mains.
Pour exécuter un changement de main (supposons à droite ), on préviendra l’élève, que lorsqu’il aura parcouru le petit mur, et qu’il aura marché le long du grand mur environ trois fois la longueur de son cheval, il devra le rassembler un peu avant le point où il veut commencer le changement de main, et qu’en arrivant sur ce point il doit ouvrir et tirer progressivement la rêne de dedans, pour tourner les épaules du cheval sur la ligne diagonale.
Du changement de main.
La jambe de dedans devra se fermer au degré nécessaire pour entretenir l’allure, et déterminer les hanches sur la ligne des épaules; la rêne de dehors soutient les épaules, et les fixe dans la direction du point où doit, se terminer le changement de main; la jambe de dehors s’approche pour soutenir les hanches, et les contenir d’accord avec la jambe de dedans sur la ligne des épaules. Le cavalier dirige son cheval dans une ligne droite, par l’accord des deux mains et des deux jambes, sur la ligne et vers le point où doit se terminer le changement de main. Dans la ligne la plus prolongée, ce point doit être à sept à huit pas du coin opposé. Arrivé sur ce point, le cavalier rassemble de nouveau son cheval, le présente la tête vis-à-vis et près du mur, dans la direction du changement de main; et pour replacer le cheval à la nouvelle main, il ouvre et tire graduellement la rêne de dehors, qui va devenir du dedans, ferme progressivement la jambe du même côté, pour replacer le cheval parallèlement au grand mur, relâche la jambe qui est devenue du dehors, sans l’éloigner du corps du cheval, et continue ainsi à suivre les murs à la nouvelle main.
OBSERVATIONS.
C’est surtout pour faire exécuter ce changement de main, qui a pour objet de tourner et de mettre le cheval à l’autre main, pour lui faire entamer avec la nouvelle épaule du dedans la nouvelle ligne qu’il va parcourir, qu’il est bon d’apprendre à l’élève à se servir de la jambe de dedans, qui devient de dehors, pour soutenir les hanches un temps, et empêcher que le cheval ne jette tout d’un coup ou machinalement ses hanches sur le mur. Ce soutien de la jambe de dedans et le demi-arrêt de la rêne du même côté forcent le cheval à présenter la nouvelle épaule du dedans pour entamer la nouvelle ligne. Ce principe est même très-bon lorsqu’on dresse les jeunes chevaux, surtout quand on commence le travail au galop; par ce moyen, le cheval est obligé de reprendre juste en arrivant à l’extrémité de la ligne du changement de main.
On peut diminuer l’étendue de la ligne du changement de main, en le commençant plus tard que le point que j’ai indiqué ; mais toujours le terminer au moins deux ou trois fois la longueur du cheval, avant que d’arriver au coin, de manière que le cheval soit replacé sur la ligne droite, et qu’il y marche deux et trois fois sa longueur avant que de lui faire passer le coin. Ainsi, lorsqu’on veut raccourcir la ligne, il faut ouvrir un peu plus l’angle formé par le mur et le cheval, que dans le changement de main ordinaire.