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Avant-propos

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Lorsque les voix les plus éloquentes se sont élevées en faveur de la liberté de la presse, lorsque les hommes les plus vertueux et les philosophes les plus éclairés ont démontré son utilité et ses bienfaits, comment se fait-il que, sous un gouvernement constitutionnel, on ose encore réclamer l’esclavage de la pensée ? C’est au nom du bonheur public qu’on propose cette funeste mesure, mais ce n’est qu’un vain prétexte à l’ambition d’audacieux hypocrites qui, sous le nom sacré de religion et de morale, étalent insolemment leur orgueil et foulent aux pieds les droits de la nation. En vain des hommes avilis sous toutes les bannières vanteront leurs vertus, l’opinion publique veille pour les flétrir.

Ils ne rougissent pas de reproduire des arguments usés par leur faiblesse et leur décrépitude, des arguments déshonorés par l’emploi qu’en faisaient jadis les courtisans ou les valets d’un dominateur absolu.

Le temps n’est plus où l’opinion d’un seul gouvernait… La presse est le sens universel du corps politique, comme le tact l’est du corps humain. Sa liberté est d’ailleurs une conséquence nécessaire de la faillibilité universelle : il faut ou la permettre ou soutenir que l’erreur est impossible à ceux qui gouvernent. Elle effarouche, je le sais, l’orgueil et la domination, car elle les menace et les démasque ; elle effraie et déconcerte la tyrannie par la possibilité seule de la vigilance : mais ces craintes qu’elle inspire deviennent encore un éloge pour elle, une nouvelle preuve de sa nécessité, Heureuse liberté, qui va chercher et découvrir sous le voile ou dans les ténèbres et l’hypocrite qui se déguise et le charlatan qui se trompait lui-même par le succès de son imposture !

L’organisation politique perfectionnée, l’infraction aux droits du peuple connue, l’intrigue surveillée et aperçue jusque dans les derniers replis de sa marche tortueuse, les complots de l’ambition découverts, l’usurpation tremblante de ses propres projets, et finissant par en être la victime : voilà les bienfaits de la liberté de penser et d’écrire ; elle féconde l’opinion publique, elle menace et suspend le crime, et, s’il est heureux, elle devient le châtiment de son succès même. Il n’est aucun pays libre qui ne la protège, aucun pays esclave qui la souffre : Rome ne la perdit que sous le décemvirat d’Appius et sous l’empire des Césars…

La raison, comme un flambeau, s’allume dans un espace vaste et aéré ; elle meurt resserrée sous un vase étroit. Que l’impression de la pensée soit libre, et bientôt sa liberté produit celle des peuples ; et bientôt la superstition, l’ignorance, l’esclavage cessent de dégrader leurs moeurs et leur génie…

Concevez-vous qu’un pays soit libre, quand la pensée, ou la parole qui en est l’expression, ne le sont pas, quand il y a des pensées sujettes et une pensée souveraine ? L’obéissance doit être fidèle, mais éclairée : assurer qu’on la trahit en réclamant les droits violés du peuple, c’est révéler le secret trop facile des despotes. Dès l’instant qu’un homme ou un corps resserrent ou enchaînent cette liberté d’écrire qui garantissait le pacte social, ils annoncent à la nation entière que le gouvernement va changer ; ils publient indirectement un manifeste de tyrannie.

— Discours sur la liberté de la presse, prononcé au conseil des Cinq-Cents, par le marquis de Pastoret, pair de France


Ce sont les principaux arguments de Milton sur la liberté de la presse que nous offrons au public, convaincus que, dans un moment où l’on nous menace de rétablir la censure, cette importante production peut contribuer à éclairer les Français sur leurs droits et à leur faire apprécier les bienfaits d’une sage liberté.

Milton publia son discours sous de le titre de l’Areopagitica.

De la liberté de la presse et de la censure

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