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Chapitre Deux

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Lady Margaux Winslow avait voulu entrer dans un couvent, mais ses parents avaient insisté qu’elle se retire plutôt dans leur nouvel orphelinat pour une courte période de bail. Elle était tombée amoureuse de l’Écosse quelques années auparavant, quand elle s’était rendue au domaine de Lord Vernon, au Nord de Glasgow, alors qu’ils se courtisaient. Malgré sa situation regrettable, elle aimait toujours l’Écosse.

Après que Lord Vernon avait eu épousé le vrai amour de sa vie plutôt qu’elle, sa famille avait tenté de la distraire au moyen de voyages à Londres, et en Europe continentale une fois Napoléon vaincu. Elle avait réalisé qu’elle était satisfaite toute seule. Elle avait toujours été la plus indépendante de ses sœurs, et avait décidé que les somptueux mariages pouvaient être laissés dans leurs mains expertes. Elle préférait certainement la vie de vieille fille au mariage de convenance. Elle se sentait satisfaite avec les orphelins, bien qu’elle n’eût que très peu à faire grâce au personnel compétent que sa famille avait nommé.

« À quoi réfléchissez-vous, ma chère 1? » Margaux entendit sa mère demander.

« À très peu, Maman, » remarqua-t-elle, tandis qu’elles étaient assises, reprisant des chaussettes pour certains des enfants. Ses parents étaient restés avec elle, espérant la faire changer d’avis.

« Nous avons un invité à dîner ce soir. Quelqu’un d’intéressé par le don aux orphelins. »

« Très bien2, » dit-elle distraitement. Il était normal pour ses parents de recevoir des invités.

« Vous devriez porter la robe en satin émeraude. Cela vous donnerait un peu des couleurs, non ? »

« Si vous voulez, Maman. » Ce qu’elle portait importait peu à Margaux ces temps-ci.

« Allons-y. » Lady Ashbury se leva et indiqua à sa fille de faire de même. « Je vous verrai ce soir au dîner. »

Lady Margaux s’habilla automatiquement. Elle remarqua que sa domestique arrangeait ses cheveux d’une façon digne d’un bal. Elle devait admettre qu’elle traversait une petite mauvaise passe. Elle était certaine qu’une fois qu’elle aurait établi une routine à l’orphelinat, elle s’en sortirait. Elle n’avait jamais été du genre à bouder, mais elle avait besoin de trouver quelque chose d’utile à faire afin de s’occuper. Non, se corrigea-t-elle. Afin de commencer une nouvelle vie.

Elle se rendit à l’étage inférieur, déterminée à être joyeuse. Si elle pouvait convaincre ses parents qu’elle était heureuse ici, ils croiraient qu’elle était satisfaite.

« Ah, là voilà, Lord Craig, » dit Lord Ashbury quand il la vit.

« Dr Craig ? » dit Margaux, stupéfaite, croisant le regard du beau docteur qui avait été épris de Lady Béatrice.

« Désormais, il est Lord Craig, » corrigea son père.

Que faisait-il donc ici ?

« ‘Docteur’ me convient très bien, » ajouta Lord Craig en s’inclinant. « Comment allez-vous, Lady Margaux ? »

Elle fit la révérence. « Je vais bien, merci. Je présume que je dois donc vous présenter mes condoléances ? »

« Merci. Cela était très inattendu. Mon frère avait trois fils, » dit-il d’un air sombre.

« J’imagine que cela était donc bien inattendu, » compatit Lady Ashbury.

« Avec un peu d’espoir mon frère avait un bon intendant. J’ai rencontré l’ancien intendant il y a plus de dix ans, » remarqua Lord Ashbury. « J’imagine qu’il a été remplacé depuis. »

« Il est toujours là, et a au moins quatre-vingts ans. » Gavin secoua la tête.

« Gère-t-il tout de manière satisfaisante ? » Lord Ashbury semblait dubitatif.

« Je ne sais pas du tout si cela est le cas. Je n’y connais rien, à part concernant la réparation des cottages des métayers, » dit Gavin honnêtement avec un rire. « J’étais passionné par la médecine dès un très jeune âge. Je ne connais que très peu sur la gestion de domaines. »

« Mon Dieu3, » compatit Lady Ashbury. « Peut-être pouvons-nous vous aider. »

« Je ne suis pas sûr que quiconque puisse m’aider. » Gavin secoua la tête avec désarroi.

Lady Ashbuy prit son bras et commença à le mener vers la salle à manger. « Parlons-en plus amplement à table. La bonne nourriture améliore tout, non ? »

Lord Ashbury escorta sa vieille tante, Lady Ida, qui vivait aussi à Breconrae, et Lady Margaux les suivit en silence, se demandant comment la présence de Lord Craig dans la propriété voisine affecterait ses plans de vivre une vie paisible ici. Il était agréablement différent des hommes à Londres qu’elle avait fui.


Gavin n’avait pas su que Lady Margaux serait là quand il avait accepté l’invitation de lord Ashbury. Elle était plus sublime que dans ses souvenirs, avec ses cheveux d’ébène, sa peau de porcelaine et ses yeux clairs. Pourtant, curieusement, elle semblait différente, plus sombre que la jeune fille spontanée qu’elle avait été quelques années auparavant, quand il l’avait rencontrée au Prieuré d’Alberfoyle. Cela semblait être une autre vie. Il ne pouvait prétendre avoir été rien de plus qu’une simple connaissance de Lady Margaux ou de ses sœurs lorsqu’elles avaient visité Alberfoyle. Il avait été complètement submergé par la présence des triplettes toutes ensemble.

Bien qu’il ait été élevé comme le fils d’un lord écossais, il était plus mal à l’aise en la présence d’aristocratie maintenant qu’il détenait un titre. Les attentes seraient différentes. Il savait qu’il se montrait injuste envers les dames Ashbury. Elles n’avaient été que très gentilles envers lui. Cependant, il ne pouvait s’empêcher de se sentir incompétent face à leur beauté et sophistication. Inconsciemment, il baissa les yeux ses simples manteau et culotte noirs. Il lui faudrait se rendre chez un tailleur. Non pas qu’il souhaitait être un dandy, mais il savait qu’un homme de sa position devait se présentait de manière respectable d’une manière différente de celle d’un médecin campagne, qui s’habillait plus de manière pratique qu’élégante. Il ne sentait pas à sa place ici.

« À quand cela remonte-t-il, Monsieur le Baron ? »

Il leva les yeux et vit les sublimes yeux bleu-vert de Lady Margaux l’observant d’un air interrogateur. Lord Vernon avait eu un choix à faire entre elle et Lady Béatrice. Elle l’examinait impatiemment. Il aurait dû prêter plus d’attention à la conversation. Il avait été perdu dans ses pensées.

« Je vous demande pardon. À quand remonte quoi ? » demanda-t-il.

« À quand remonte l’accident », répondit-elle, les yeux tristes.

« Trois mois », répliqua-t-il, rencontrant son regard.

« Cela ne fait pas longtemps », dit doucement Lady Margaux.

« Non », convint-t-il sombrement.

« J’imagine que mon neveu Easton et sa femme ont été déçus de vous perdre. Ils espéraient vivement que vous les joindriez à leur école de médecine », dit Lady Ashbury.

« Et moi donc. Je n’ai pas encore déterminé comment j’allais pouvoir continuer à pratiquer la médecine désormais. »

« Peut-être pourriez-vous venir en aide aux jeunes filles ici de temps en temps », suggéra Lord Ashbury.

« Oui. Cela me plairait. Une fois que j’aurai tout organisé. Pour le moment, j’ai été débordé par mon nouveau rôle de père », répondit Gavin.

« Je ne savais pas que votre frère avait d’autres enfants vivants », dit Lady Ashbury, confuse.

« Non. Ce sont mes enfants », dit-il, légèrement amusé.

« Oh ? »

« J’ai pris trois enfants d’Alberfoyle sous ma tutelle. Ce sont les enfants d’un gentleman. M’étant énormément attaché à eux, j’ai décidé que je les adopterais. Le garçon faisait son apprentissage avec moi et est maintenant à l’école à Glasgow », expliqua Gavin.

« Seamus ? » demanda Margaux, reconnaissant l’enfant dont il était question.

« Je pensais qu’ils étaient devenus les pupilles de Loring ? » dit Lord Ashbury, réfléchissant à voix haute.

« Il les a aidés financièrement, mais ils ont décidé de rester à Alberfoyle. J’ai soutenu Seamus tout le long de ses études de médecin », expliqua Gavin.

« Et le reste du temps, vous étiez ici », remarqua Margaux.

Il acquiesça. “Je les voyais régulièrement quand j’étais à Aberfoyle. Je leur ai demandé de venir lorsque j’ai découvert que je déménagerai ici. J’espère ne pas avoir commis une erreur », dit-il tristement.

« Une erreur ? » demanda Margaux.

« Je n’ai pas la moindre idée de comment être père. Je pense qu’ils se sentent seuls. Seamus est à l’école. Les filles sont seules avec une nourrice. J’ai mis une petite annonce, à la recherche d’une gouvernante, mais nous n’avons eu que quelques candidates pour le moment. » Il observait un bout du mur au-dessus de sa tête, perdu dans ses pensées.

« Peut-être cela plairait-il aux filles de venir ici nous rendre une visite ? Ce n’est pas à plus de trois kilomètres de chez vous », suggéra Lord Ashbury.

« Oui4. C’est une merveilleuse idée », rajouta Lady Ashbury. « Cela les divertira, et cela nous donnera l’opportunité de rencontrer d’autres jeunes filles. »

« Je serai heureuse de les recevoir pour une visite, » sourit Margaux.

Gavin soupira de soulagement.

« Je vous en suis très reconnaissant. Je pense que cela leur plairait énormément. » Il leur sourit. « Elles sont un peu perdues dans ce grand château vide. Tout comme moi. »

« Tout est encore très nouveau et différent. Tout s’arrangera avec le temps », Margaux le rassura.

« Assez parlé de moi. Qu’en est-il de votre école ? » demanda Gavin au Lord Ashbury.

« Nous l’avons ouverte peu après l’ouverture de celle de Vernon. Nous ne prenons que des jeunes filles traversant une mauvaise période ou des jeunes filles ayant été exploitées », dit Lord Ashbury avec fierté.

« Qui n’ont pas forcément pour souhait d’entrer dans un couvent. » Lady Ashbury toussa et échangea un regard avec sa fille.

Gavin était perplexe, mais ne posa pas de question.

Il n’y avait pas de réponse polie possible à cela, il changea donc de sujet.

« Où passez-vous donc la majorité de votre temps, alors, si ce n’est pas à Breconrae ? »

« J’étais souvent ici avant mon mariage. Mes parents préféraient vivre ici. Après mon mariage, nous avons passé de nombreuses années en France avant la guerre. S’installer ici ne semble que peu intéresser mon fils, nous avons donc décidé de convertir le douaire en un foyer pour les moins privilégiés. Tante Ida y vivait avec ma mère jusqu’à son décès », répondit Lord Ashbury.

Ils se tournèrent tous pour regarder Tante Ida, qui mâchait sa nourriture mais regardait dans le vide.

« Nous divisons notre temps entre nos autres résidences », expliqua Lady Ashbury. « D’ordinaire nous sommes à Londres à cette époque. » Elle jeta un autre regard perçant dans la direction de Margaux.

« Vous n’avez pas besoin de rester ici pour moi. » Margaux sourit malicieusement à sa mère.

Lady Ashbury se leva, interrompant brutalement la conversation, signalant qu’elle se rendait dans le petit salon avec Margaux.

« Lord Craig, cela vous dérangerait-il si nous sautons le porto et nous joignons aux dames ? » demanda Lord Ashbury, sentant peut être qu’il aurait besoin d’intervenir entre sa femme et sa fille.

« Pas du tout. Moi-même, je n’apprécie pas vraiment le porto », admit Gavin.


Margaux sourit intérieurement en rentrant dans le petit salon. Son père n’avait pas complètement soutenu sa décision de vivre seule, mais il ne l’avait pas interdit non plus. Ils s’installèrent confortablement, attendant que leur thé soit servi.

« Combien de temps comptez-vous séjourner ? » demanda Lord Craig.

« Cela dépend de Margaux, » répondit sa mère.

Lord Craig avait un air curieux et jeta un coup d’œil vers elle avec ses yeux d’un bleu perçant. Une boucle de ses cheveux sombres était tombée sur son front, et elle dût se tourner pour ne pas la remettre en place.

« Je ne compte pas partir. » Elle regarde ses parents, légèrement défiante. « Je ne sais pas comment vous le dire autrement, je ne retournerai pas à Londres. »

Sa mère resta silencieuse. Elle semblait retenir sa colère.

« Très chère, je comprends ce que vous ressentez, mais peut être qu’après un peu de temps loin de Londres vous reviendrez sur votre position », dit doucement son père.

Margaux secoua la tête. Son père soupira. Lord Craig remua dans son siège. Il souhaitait probablement être n’importe où sauf ici à ce moment.

Margaux avait enduré d’être paradée devant des prétendants pendant des années, et n’avait jamais été intéressée par l’un d’entre eux ou ressenti la moindre connexion. Elle était souvent au centre des potins avec ses sœurs. Trois vraies triplettes françaises à l’apparence exotique tendaient à avoir cet effet. Au début, les gens avaient eu pitié d’elle. La société avait présumé qu’elle pleurait sa relation avec Lord Vernon. Puis, la société étant capricieuse, il avait été décidé qu’elle avait des idées trop particulières et que sa langue était trop aiguisée. Certains avaient même pris l’habitude de surnommer les triplettes Feu, Vent et Glace. Margaux était, bien sûr, le dragon souffleur de feu.

Elle avait été terriblement triste à Londres, ne rentrant jamais dans les cases, seulement acceptée à cause de son nom et sa beauté. Elle avait décidé d’abandonner sa recherche du grand amour. Il valait mieux être seule que ridiculisée.

« S’il vous plaît, Maman5. Acceptez mon choix. Retournez à Londres pour être avec Jolie », implora-t-elle.

Lady Beaujolais était une des triplettes à qui plaisait réellement la vie du ton, la haute société londonienne.

Sa mère secoua la tête et refusa de la regarder. Elle se leva brutalement.

« Pouvez-vous m’excuser ? », demanda Margaux. « J’ai besoin d’un peu d’air frais, il semblerait. »

« Puis-je me joindre à vous ? » demanda Gavin, la surprenant, puis jeta un regard à son père qui acquiesça. Ils sortirent sur la terrasse, où le soleil commençait tout juste à se coucher.

« Je suis désolée, Lord Craig. Vous n’avez probablement pas envie de devoir entendre parler de ma situation. » Margaux s’assit sur l’un des bancs en pierre de la terrasse, surplombant le Firth au-delà de la vallée.

« Il n’y a pas de quoi vous excuser », la rassura-t-il. « J’ai passé la soirée à déverser mes problèmes sur vous. » Il appuya son coude contra la balustrade de la terrasse. Il était très masculin, se tenant là, détendu ; si différent des nombreux hommes prudes qui avaient courtisé Margaux à Londres. Elle était conscience de sa masculinité, et était désarçonnée par la sensation du regard qu’il posait sur elle.

« Pas du tout. » Elle leva le regard et lui sourit.

« Qu’est-ce qui vous dérange alors ? S’est-il passé quelque chose à Londres ? »

Il semblait inquiet, la regardant directement dans les yeux. Soudainement, tous ses problèmes semblaient ridicules. Elle réfléchit précautionneusement à ses prochains mots en tournant et virant, arrachant les pétales de la fleur qu’elle avait cueilli dans le rhododendron.

« Rien de particulier ne s’est passé. Mais j’en ai assez du marché du mariage. Je veux me faire un chez-moi ici, mais mes parents ne souhaitent pas que je devienne une vieille fille, Lord Craig. »

« Je suis sûr qu’ils veulent seulement le meilleur pour vous, demoiselle », dit-il d’un ton rassurant.

« Je suis en paix avec ma décision, mais ils ne le sont pas. » Elle arracha un autre pétale.

« Je suis sûre qu’avec le temps… »

« Ils ne partiront pas tant que je n’accepte pas de rentrer avec eux. » La tige n’avait plus de pétales, elle la jeta donc par-dessus la balustrade et retourna s’asseoir.

« Ne vous laisseront-ils peut-être pas pour un peu de temps ? » suggéra-t-il.

Elle sourit. « Je les ai menacés d’entrer dans un couvent, donc ils m’ont amenée ici, pensant que je changerais d’avis. Mais j’adore l’Écosse. »

Il eut un petit rire. « Un couvent ? »

Elle acquiesça. Personne ne la prenait sérieusement. « Pourquoi pas ? » demanda-t-elle, sur la défensive.

« J’imagine qu’ils pensent qu’un jour, vous aimeriez peut-être vous marier. »

« Travailler avec les filles ici me donne une raison d’être louable », souligna-t-elle, dans un ton qu’elle espérait être raisonnable.

« Peut-être voudrez-vous même avoir des enfants », continua-t-il.

« Avez-vous déjà été à Londres, Lord Craig ? Pendant la Saison des bals ? » Elle leva les yeux vers lui, désirant lui faire comprendre.

« Je n’ai jamais fait partie de ce monde », répondit-il.

« Vous êtes chanceux. Je me suis jurée que je ne me marierai que par amour, et que je ne me conterais pas d’un arrangement vide de sens. L’amour, celui que mes parents ont, est unique. Je veux un partenariat avec un respect mutuel. C’est une triste réalité d’être élevée avec de telles attentes. »

« Bien que vous et moi n’ayons pas eu de bonnes expériences en amour, cela ne veut pas dire que tout sera mauvais », raisonna-t-il avec douceur. Cela semblait lui être destiné à lui autant qu’à elle.

« Lord Craig, je suis satisfaite seule. Je ne comprends pas pourquoi personne ne peut accepter ma décision. Ma valeur n’est pas basée sur si je suis mariée. » Elle leva le menton avec défi.

« Bien sûr que non, demoiselle. »

« Pardonnez-moi. Je réalise que je suis chanceuse d’avoir un choix sur ce sujet. Je parle comme une enfant capricieuse. » Elle soupira. « Je ne devrai pas décharger mes problèmes sur vous. Merci de m’avoir écoutée. » Elle fit la révérence et retourna à l’intérieur de la maison.

1 En français dans le texte.

2 En français dans le texte.

3 En français dans le texte.

4 En français dans le texte.

5 En français dans le texte.

De Feu Et De Flammes

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