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CHAPITRE I.
LA FRANCE AU TEMPS DE LOUIS XIII.

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Table des matières

Vous savez qu'il y a eu en France, à deux cents ans de nous environ, un beau temps, très glorieux, qui a eu ses misères, comme tous les temps, où les rois et les princes ont commis de grandes fautes, mais où la nation a rendu très grand le nom de notre pays, un temps où nous avons pris sur l'étranger, au midi le Roussillon, au nord l'Artois et une partie de la Flandre, à l'est la Lorraine et l'Alsace. Cette époque doit être chère à tous les cœurs français. C'est le XVIIme siècle; c'est le temps où, après le grand et bon roi Henri IV, la France a été gouvernée par Louis XIII, ou plutôt par le premier ministre de Louis XIII, Richelieu, et puis par Louis XIV, avec ses ministres, très intelligents aussi, très laborieux et très dévoués à leur patrie, Colbert, de Lionne, Louvois.

Mais c'est surtout le temps où les Français, qu'on accuse, vous le savez, d'être légers, frivoles, inconstants, ont été peut-être le plus sérieux, appliqués à leurs devoirs, énergiques et l'esprit tourné vers les grandes choses. Ils aimaient leur pays, quoique leur pays, alors, fût très pauvre, les temps très durs, les impôts lourds, la disette bien souvent à la porte, et quelquefois dans la maison. Eh bien, tout comme plus tard, mal vêtus et mal nourris, quand on leur mettait un fusil dans la main, quand le tambour battait à l'approche de l'ennemi, ils jetaient le pain qu'on venait de leur distribuer, pour courir plus vite au combat.

Pourquoi étaient-ils ainsi? D'abord parce que les Français ont toujours été braves, et de bon cœur à leur devoir, et qu'il est plus difficile de les corrompre que de les mener au bien. Ensuite parce qu'ils avaient de bons maîtres pour leur enseigner l'amour de la vertu, du courage, de la patience, et, ce qui contient tout, l'amour de la patrie.

Ces maîtres, c'étaient les auteurs, les écrivains qui composaient de beaux livres pour les enfants et pour les hommes, les historiens, les orateurs et les poètes. Ils lisaient beaucoup Plutarque, un ancien Grec traduit en très bon français par un auteur du siècle précédent, le bon Amyot. Ce livre renfermait toutes les plus belles histoires des plus honnêtes et des plus courageux personnages de l'antiquité, et il était si bon, si entraînant à bien faire que le roi Henri IV, qui se connaissait en courage, disait, à ce qu'on assure, que c'était pour lui comme une autre conscience.

Ils lisaient encore Tite Live, un Romain, celui-là, qui a raconté comment les citoyens de Rome ont mille fois mis en danger leurs biens et leur vie pour que leur patrie fût libre, grande et respectée du monde entier. Tout cela leur donnait une idée forte et élevée de ce que doit être un homme, pour mériter d'être appelé de ce nom, et un patriote, comme nous disons. Ce mot n'existait pas encore, mais la chose était commune, si bien que c'est précisément vers la fin de l'époque dont je vous parle que le mot a été inventé.

Que lisaient-ils encore?

Faut-il vous le dire? Ils lisaient des romans. Mais c'étaient de beaux romans que ceux de ce temps-là. C'étaient des livres où l'on racontait des histoires d'hommes héroïques, extraordinaires, grands guerriers, grands batailleurs, toujours prêts à faire de grandes entreprises et à donner, pour l'honneur et pour la gloire, de grands coups d'épée. Vous comprenez combien toutes ces lectures enflammaient les courages et donnaient des idées de glorieuses entreprises ou de vaillantes défenses.

Et voilà que, juste à cette époque-là, il est né un homme de beaucoup d'esprit et de beaucoup de cœur, ce qu'on appelle un homme de génie, qui a rendu tous ces beaux sentiments, mais plus beaux encore et plus purs, en très beaux vers, et qui a fait dire ces vers dans les théâtres, par la bouche de très bons acteurs. Jamais on n'avait encore entendu de si excellentes paroles, et qui fissent battre le cœur comme celles-là. C'étaient l'idée et le sentiment de tout le monde, que cet homme mettait en vers sublimes, c'est-à-dire en phrases sonores, harmonieuses, et si faciles à retenir que chacun s'en allait les répétant toute sa vie, rien que pour les avoir entendues une fois.

Cet homme, c'était un poète; ce qu'il faisait ainsi, c'était ce qu'on nomme des pièces de théâtre, des tragédies ou des comédies, et il s'appelait Pierre Corneille. Je vais vous expliquer ce qu'il a été et ce qu'il a fait, et vous comprendrez comment il a été cause, pour sa part, d'une partie des bonnes et belles actions qui ont été accomplies en son temps.

Corneille expliqué aux enfants

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