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AVANT-PROPOS
ОглавлениеParis! Que de visions évoque ce mot magique: le Paris historique, avec ses palais, ses églises, ses monuments, ses rues et ses places publiques; le Paris littéraire et son admirable défilé d'écrivains, de poètes, de penseurs, de dramaturges, de philosophes et d'humoristes: le Paris mondain, ses fêtes, ses réceptions, ses modes, ses élégances et son snobisme; le Paris des politiciens, le Paris des journalistes, le Paris religieux, le Paris policier, le Paris bohème, le Paris industriel. Combien d'autres encore!
Tant de passions, tant d'événements, tant d'intérêts s'y heurtent, s'y enchevêtrent, s'y renouvellent, qu'une étude sur cette ville admirable et si complexe n'est pas plutôt achevée qu'il convient presque de l'écrire à nouveau: la vérité de la veille n'étant plus celle du lendemain, le document exact hier se trouvant infirmé ce matin.
Notre ambition est plus modeste et notre titre est un programme: Coins de Paris.
Négligeant de parti pris le trop connu, le trop décrit, n'ayant surtout ni le désir, ni la prétention de refaire un «Guide de l'Étranger dans Paris», ne recherchant que le rare, sinon l'inédit, nous voudrions simplement donner à ceux qui, comme nous, adorent notre vieille Cité, un peu de la joie que nous avons chaque jour à «flâner» dans cette incomparable Ville. Notre but serait de continuer, par des promenades dans ce qui nous reste du précieux Paris d'autrefois, la série des documents peints, dessinés ou gravés que renferme le Musée Carnavalet.
La maison qu'aima tant Madame de Sévigné est, en effet, devenue le musée des Collections Historiques de Paris.
LE MUSÉE CARNAVALET.
Karl Fichot.
C'est un coin délicieux où palpite encore un peu de l'âme ancienne de la grande Ville! Nos prédécesseurs et nous-même nous sommes efforcés de réunir les documents de tout ordre qui retracent la vie de Paris. Chartes, plans, gravures, tableaux, autographes, placards jaunis et pierres commémoratives; enseignes de fer forgé qui guidaient aux cabarets les buveurs du XVIe siècle; costumes de soies changeantes que portaient les jolies Parisiennes de Louis XV; bonnets rouges de la Terreur; ceintures dont se paraient les jeunes filles autour du char funèbre de Voltaire; souliers aux bouffettes tricolores qui foulèrent le sol du Champ-de-Mars lors de la Fête de la Fédération; cravate légère de tulle noir que portait Marie-Antoinette, allant poser pour son portrait chez Dumont, le miniaturiste; pique de citoyenne ou sabre d'honneur; pierre commémorative de la Bastille; bonnets de grisettes 1830 ou cothurnes de Merveilleuses; ordre de comparution de la «veuve Capet» devant le Tribunal Révolutionnaire; affiche du spectacle des grands danseurs du Roy et convocations aux séances de la Convention: les grandes époques de la Royauté, les glorieuses journées de la Révolution, les tragédies de la Terreur; les proclamations de l'Empire, les bulletins de victoires, les messes de Requiem, les joies, les douleurs, la vie enfin du peuple le plus impressionnable, le plus nerveux, le plus enthousiaste et le plus artiste qui ait jamais existé,—tout se trouve à Carnavalet, et le même carton rassemblant avec un effrayant éclectisme la succession foudroyante des événements qui se sont passés au même endroit nous montre, pour une période d'à peine vingt années et dans les mêmes Tuileries, par exemple: l'arrivée de Louis XVI, la prise du château le 10 août, l'exécution du Roi et celle de la Reine, la fête de l'Être suprême, Thermidor, Prairial et l'invasion de la Convention, les sections foudroyées à Saint-Roch par Bonaparte, les revues du Carrousel, l'apothéose du Roi de Rome, le départ de l'Empereur, l'arrivée de Louis XVIII, sa fuite, le retour de Napoléon, la rentrée de Louis XVIII, etc.
Voilà, j'imagine, une sérieuse leçon d'histoire... et de philosophie.
Notre but, je le répète, serait donc simplement de continuer dans quelques promenades, que nous nous efforcerons de rendre aussi attrayantes que possible, la recherche de documents qui disparaissent, hélas! un peu tous les jours.
Nous diviserons Paris en trois grandes sections: la Cité et l'Ile Saint-Louis, la Rive gauche, la Rive droite.
Après le document écrit ou dessiné, le document vivant, ou tout au moins ce qu'il en survit.
Ce volume «Coins de Paris» est en grande partie la réédition d'un ouvrage «Croquis du Vieux-Paris» tiré à très petit nombre et publié en 1904 avec autant de luxe que de goût à la Librairie Conard.
Depuis, non seulement ce volume fut revu et considérablement augmenté, mais encore toute une illustration nouvelle fut choisie. Un artiste de grand talent, M. Tony Beltrand, mort hélas trop tôt, avait orné les «Croquis du Vieux-Paris» d'admirables compositions dont il avait été, de plus, l'habile graveur. Nous avons dû remplacer cette illustration par une série de reproductions de tableaux, de dessins, d'eaux-fortes, de lithographies empruntées à des collections particulières, à des Musées, à des Bibliothèques,—et c'est, pour nous, un devoir très doux que de dire publiquement l'infinie bonne grâce avec laquelle on a bien voulu nous venir en aide. Qu'il soit permis à notre profonde reconnaissance de citer les noms de MM. Sardou, Claretie, Detaille, Lavedan, Lenôtre, Bouchot, H. Martin, Funck-Brentano, A. Maignan, Massenet, Pigoreau, Ch. Drouet, de Rochegude, Beaurepaire, Ch. Sellier, L.-P. Aubey, le Dr Bach, J. Robiquet, nos maîtres ou nos amis, qui nous ont prêté le plus précieux concours. D'ailleurs, quand il s'agit de Paris, toutes les portes s'ouvrent et tous les cœurs battent.
Notre tâche fut facile; si nous n'avons pas su mieux la remplir, la faute en est à nous seul; il convient donc de terminer cet avant-propos par la vieille formule... plus que jamais de circonstance: «Excusez les fautes de l'auteur».