Читать книгу Maurice Utrillo - Gustave Coquiot - Страница 3
Оглавлениеà GIRAN-MAX,
Quand on veut savoir quelque chose de la Rue d’hier, c’est à vous qu’il faut s’adresser. Vous avez tout vu, tout retenu. Vos «Mémoires» seraient du plus pur intérêt, mais vous ne les écrirez pas.
Peintre, pourquoi auriez-vous choisi une spécialisation, puisque vous éprouvez tant de joies à ne vous borner point? Peintre observateur de la Butte, nul n’en saisit comme vous le côté dramatique ou funambulesque. Né rapin, vous l’êtes resté, parce que vous avez su, vous, conserver toute votre jeunesse. Vos cheveux ont pu tomber, mais non point votre verve, votre bonne humeur, vos joyeuses façons de dire. Où vous passez, vous laissez des larves de rire. Volontiers, vous vous dites torero, pêcheur et collectionneur de tout: de vieux bois comme de vieux dessins. C’est que tout vous attire également. Vous fixerez-vous jamais? Je ne le crois pas! Vous avez la bougeotte, le tracassin. Cent projets vous sollicitent à la semaine. Le dernier venu est toujours le meilleur. Vous vivez surpris, émerveillé, enchanté. Il faut être froid, dogmatique, ennuyeux, pour solliciter et obtenir des «honneurs», c’est pourquoi vous n’en avez pas. Votre inaltérable fantaisie leur jouerait trop de tours; vous seriez capable de vous retrouver baguenaudant chez les brocanteurs alors qu’on vous attendrait à l’Elysée. Homme de la Rue, restez donc homme de la Rue. Le sort de Constantin Guys est enviable, le vôtre aussi; lui, il a jeté çà et là des milliers de dessins; vous, vous nous distribuez des milliers de judicieuses observations et de cocasses aventures. C’est vous qui renseignerez le mieux Dieu le père, quand il vous aura nommé, là-haut, chef chroniqueur de Montmartre et autres lieux!
G.C.