Читать книгу L'hygiène des hommes de lettres et des employés - Gustave Delahaye - Страница 4
ОглавлениеDu corps humain.
Il y a des misères sur la terre qui saisissent le cœur. Il manque à quelques uns jusqu’ aux alimens. Ils appréhendent de vivre....
Le pauvre est bien proche de l’homme de bien.
(LABRUYÈRE.
Notre corps est un assemblage harmonieux des parties physiques, qu’on peut appeler l’enveloppe de l’âme: en l’ouvrant, on voit la plus surprenante et la plus admirable machine mécanique, au centre de laquelle est un alambic qui, recevant extérieurement les matières nécessaires, les dissout, les décompose pour former une matière nutritive qui, passant par différens laboratoires dans lesquels elle est encore décomposée, forme plusieurs autres liqueurs destinées à divers usages.
Les os sont la charpente qui soutient toutes les parties de cette admirable machine: cette charpente est creuse et renferme une moëlle, émanation du cerveau qui, recevant par une multitude innombrable de canaux imperceptibles, une liqueur nourrissante, la digère, pour ainsi dire, et en forme une huile, laquelle entrant daus les pores des os leur tient lieu de sève. Elle est forcée d’y circuler, y étant retenue par une membrane qu’on nomme périoste, qui enveloppe au dehors toute cette charpente. Cette membrane, tissu merveilleux d’une quantité de petits canaux, reçoit par eux sa nourriture, et en fait part encore aux os qu’elle couvre.
Notre corps étant destiné à se mouvoir, à tourner dans tous les sens, à se baisser, se relever, s’étendre et se plier de tous côtés, avait besoin d’une quantité prodigieuse de charnières; il y en a de toutes les espèces. Les bras, les mains, les cuisses, les jambes, les pieds sont attachés par une multitude de leviers, de formes, longueurs et grosseurs différentes. Tous ces leviers, qui sont des muscles, meuvent les os par des charnières de diverses formes, les unes comme des poulies, les autres comme des chevilles, jointes ensemble par des ligamens.
Le coffre est composé antérieurement de vingt-quatre côtes formant berceau, et postérieurement par une tige droite portant vingt-quatre charnières; emboîtées les unes dans les autres, elles entrent, sortent, tournent l’une sur l’autre en tout sens; et, par cette facilité, baissent, relèvent, tournent et dirigent ce coffre selon ses besoins. Ce genre de charnières se nomme vertèbres.
Tous les intervalles de cette charpente sont remplis par une matière molle qu’on appelle chair, soutenue par un nombre infini de ces leviers animés, que nous venons de désigner sous les noms de muscles et tendons, chacun desquels ayant une direction et un mouvement particuliers, entraîne les chairs à leurs actions. Cette chair, formant le ventre des muscles, est nourrie par une multitude innombrable de petits canaux, et traversée partout d’une infinité de petits vaisseaux de différentes grosseurs; les uns composés d’une simple tunique, on les nomme veines; les autres d’une double tunique, on les nomme artères; ils servent à conduire le sang et la lymphe, qui en est la partie séreuse et qui roule avec lui. Tous ces muscles et ces chairs se correspondent par un tissu de petits filamens appelés fibres, qui leur servent de cordages et les traversent en tout sens, pour les lier et les unir ensemble dans tous les mouvemens.
Toutes ces parties molles sont encore recouvertes par un tissu admirable qu’on nomme nerfs, qui, émanant du cerveau, se partagent en multitude de rameaux entrelacés comme un filet. Ils se communiquent en tout sens et sont doués d’une si grande sensibilité, que le moindre ébranlement qu’éprouve une partie, est ressenti par le tout au même instant.
Enfin, le tout est enveloppé d’une membrane épaisse qu’on nomme peau, et qui est recouverte elle-même d’un autre tégument beaucoup plus délié qu’on appelle épiderme. Tous ces tissus sont percés de petits canaux creux appelés pores, sans cesse abreuvés par la liqueur qui lui est propre. Dans les interstices de ces tissus sont plantés une multitude de petits oignons semblables à ceux des fleurs, de chacun desquels sort une tige que l’on nomme poil. Ceux de la tête, plus humides que les autres, sont les plus longs de tous; on les appelle cheveux. Ces oignons sont de véritables végétaux; ils ont des racines creuses qui pompent l’humidité, l’apportent dans l’oignon qui la digère et en forme une sève qui circule dans plusieurs petits tuyaux, et est portée jusqu’à l’extrémité de la tige. Quelle délicatesse, quelle finesse doivent avoir ces tuyaux nourriciers dans un poil follet? Que de merveilles!... O... Altitudo!....
Au haut de la colonne verticale est placée la tête, qui renferme mille chefs-d’œuvre; elle tourne par des ligamens musculaires, dont les uns ne lui permettent que de former un demi-cercle, et les autres l’empêchent de se renverser. Cette tête est une boîte osseuse garnie au dedans d’une quantité de cloisons. Dans la partie supérieure, sous une voûte impénétrable par la dureté des os qui la forment, est placé le cerveau, substance moelleuse, traversée de toutes parts d’une multitude de filets et vaisseaux imperceptibles qui forment un labyrinthe. C’est dans ce labyrinthe que naissent les pensées et sont conservées les idées.
Cette substance enveloppée de plusieurs tuniques, se prolonge dans les vertèbres de l’épine et prend alors le nom de moëlle allongée: se divisant ensuite en plusieurs branches qui prennent différentes formes et différens degrés de dureté, elle compose ce tissu incompréhensible qu’on nommé nerfs. Le cerveau est le vrai laboratoire de l’âme; elle y réside probablement toujours: car tout semble en émaner, s’y rapporter, et tous les nerfs, seuls organes de la sensibilité, s’y réunir.
Partons de ce principe posé, pour suivre l’âme dans ses opérations; principe néanmoins très-conjectural, mais auquel nous nous arrêterons préférablement ici, d’après le systême d’Hypocrate, qui place l’âme au cerveau, comme Descartes, dans la glande pinéale: sans rien préjuger des opinions contraires d’autres philosophes qui la font résider: Aristote, dans toute l’habitude du corps; Epicure, dans l’estomac; les Stoïciens, dans le cœur; Empédoclès, dans le sang, et disant d’ailleurs sur le reste de cette question métaphysique, qui n’est pas de notre ressort, ce qu’en a dit sagement Cicéron: Quâ facie sit animus, aut ubì habitet ne quœrendumquidem est. Quant à la forme et au siège de l’âme, c’est ce dont il ne faut pas seulement s’informer.