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Chapitre 2 : Un cas pas comme les autres
ОглавлениеLe réveil sonna à 5h30, tirant Emma d'un sommeil agité. Elle avait l'habitude des réveils matinaux, mais ce matin-là, une boule d'appréhension lui nouait l'estomac. Dans quelques heures, elle rencontrerait Jake Donovan, l'homme dont la photo l'avait tant troublée la veille.
À côté d'elle, James dormait encore profondément. Emma se glissa hors du lit, prenant soin de ne pas le réveiller. Elle enfila sa tenue de sport et sortit silencieusement de l'appartement pour son jogging matinal.
L'air frais de New York la revigora instantanément. Alors qu'elle courait le long de l'Hudson River, Emma tenta de mettre de l'ordre dans ses pensées. Pourquoi Mr. Pearson lui avait-il confié cette affaire ? Qu'est-ce qui rendait ce cas si particulier ? Et surtout, pourquoi se sentait-elle si étrangement attirée par ce dossier ?
De retour à l'appartement, elle trouva James dans la cuisine, en train de préparer le petit-déjeuner.
– Bon matin, ma chérie, dit-il en l'embrassant. Prête pour ta grande journée ?
Emma força un sourire. – Aussi prête que possible. Je ne sais pas trop à quoi m'attendre.
James lui tendit une tasse de café. – Tu vas assurer, comme toujours. N'oublie pas qui tu es : Emma Collins, la meilleure avocate de New York.
– La plus jeune associée, nuança Emma en riant. Pas forcément la meilleure.
– Pour moi, tu l'es, répliqua James avec un clin d'œil.
Emma termina son café, reconnaissante pour le soutien indéfectible de son fiancé. Elle se doucha rapidement et enfila son tailleur le plus sobre. Pas question d'arriver à Rikers Island dans une tenue trop tape-à-l'œil.
Le trajet jusqu'à la prison fut plus long que prévu, le trafic new-yorkais étant particulièrement dense ce matin-là. Emma en profita pour relire une dernière fois le dossier de Jake Donovan.
Trente-deux ans, originaire du Bronx. Casier judiciaire chargé : quelques délits mineurs dans sa jeunesse, puis deux ans de prison pour complicité de vol. Sorti depuis cinq ans, il semblait s'être rangé. Jusqu'à cette accusation de braquage à main armée dans une bijouterie de l'Upper East Side.
Les preuves semblaient accablantes : un témoin l'avait formellement identifié, et les caméras de surveillance montraient un homme de sa corpulence, le visage dissimulé sous une cagoule. Pourtant, Jake clamait son innocence avec véhémence.
Emma soupira. Ce ne serait pas une affaire facile, loin de là. Mais quelque chose dans ce dossier l'intriguait. Les incohérences qu'elle avait repérées la veille ne cessaient de la titiller.
Le taxi la déposa devant l'imposante structure de Rikers Island. Emma prit une profonde inspiration avant de se diriger vers l'entrée. Les formalités d'usage prirent un temps interminable : contrôles de sécurité, vérification de son identité et de son autorisation de visite. Enfin, un gardien la conduisit vers la salle d'interrogatoire.
– Votre client est déjà là, Miss Collins, l'informa-t-il. Frappez à la porte quand vous aurez terminé.
Emma hocha la tête, le cœur battant. Elle poussa la lourde porte métallique et entra dans la pièce.
Jake Donovan était assis à la table, menotté. En chair et en os, il était encore plus impressionnant que sur la photo. Grand, musclé, le corps couvert de tatouages, il dégageait une aura de danger qui fit frissonner Emma malgré elle. Pourtant, quand il leva les yeux vers elle, elle fut frappée par la même vulnérabilité qu'elle avait perçue sur la photo.
– Bonjour, Mr. Donovan, dit-elle en s'asseyant face à lui. Je suis Emma Collins, votre avocate commise d'office.
Jake la dévisagea un moment avant de répondre. – Vous n'avez pas l'air d'une avocate commise d'office.
Emma haussa un sourcil. – Et à quoi est censée ressembler une avocate commise d'office, Mr. Donovan ?
Un léger sourire étira les lèvres de Jake. – Pas à quelqu'un qui porte du Chanel, en tout cas.
Emma se maudit intérieurement. Elle aurait dû opter pour un tailleur moins reconnaissable.
– Peu importe mon apparence, Mr. Donovan. Je suis ici pour vous défendre, et je compte bien le faire au mieux de mes capacités.
Jake hocha lentement la tête. – Très bien. Par où commençons-nous ?
– Par le commencement, répondit Emma en ouvrant son dossier. Racontez-moi votre version des faits.
Pendant l'heure qui suivit, Jake détailla sa journée du 15 mai, le jour du braquage. Il affirma avoir passé l'après-midi chez lui, à travailler sur des designs de tatouages pour son projet d'ouverture de salon.
– J'ai des preuves, insista-t-il. Des esquisses datées, des échanges de mails avec des fournisseurs. Je n'ai pas quitté mon appartement de la journée.
Emma prenait des notes frénétiquement. Son instinct lui disait que Jake ne mentait pas, mais les preuves contre lui restaient solides.
– Et le témoin qui vous a identifié ? demanda-t-elle.
Jake secoua la tête, frustré. – Je ne comprends pas. Je ne connais pas cette femme. Je n'ai jamais mis les pieds dans cette bijouterie. Il doit y avoir une erreur.
Emma réfléchit un moment. – Mr. Donovan, avez-vous un alibi pour l'heure exacte du braquage ? Quelqu'un qui pourrait confirmer que vous étiez chez vous ?
Jake baissa les yeux. – Non. J'étais seul. Ma copine… mon ex-copine était censée passer, mais on s'est disputés au téléphone. Elle n'est jamais venue.
Emma nota ce détail. Ce n'était pas idéal, mais ce n'était pas non plus rédhibitoire.
– Très bien, dit-elle en refermant son dossier. Je vais examiner tout ça de près. Je vais avoir besoin de ces preuves dont vous m'avez parlé : les esquisses, les emails, tout. Pouvez-vous me les faire parvenir ?
Jake acquiesça. – Mon frère a les clés de mon appart. Il peut vous les apporter.
– Parfait. Je vais aussi demander à voir les bandes de vidéosurveillance. Il faut que je voie par moi-même ce fameux suspect.
Alors qu'Emma se levait pour partir, Jake la retint. – Miss Collins ?
– Oui ?
– Merci. De me croire.
Emma hésita un instant. – Je ne crois rien pour l'instant, Mr. Donovan. Je fais simplement mon travail.
Mais au fond d'elle-même, elle savait que ce n'était pas tout à fait vrai. Quelque chose chez cet homme l'intriguait, la poussait à vouloir creuser plus loin.
De retour au cabinet, Emma s'enferma dans son bureau pour éplucher le dossier. Elle était tellement absorbée qu'elle sursauta quand Sarah frappa à sa porte.
– Emma ? Mr. Pearson voudrait vous voir dans son bureau.
Emma jeta un coup d'œil à sa montre. Il était déjà 18h. La journée avait filé à une vitesse vertigineuse.
Dans le bureau de Mr. Pearson, l'ambiance était tendue. Le vieux patriarche n'était pas seul : Richard Hartley, le père de James, était également présent.
– Ah, Emma, entrez, dit Mr. Pearson. Richard et moi parlions justement de l'affaire Donovan.
Emma s'assit, mal à l'aise. – J'ai rencontré le client ce matin. Je commence à peine à étudier le dossier.
Richard Hartley se pencha en avant. – Emma, ma chère, nous nous inquiétons un peu. Cette affaire… elle pourrait avoir des répercussions importantes sur le cabinet.
– Je ne comprends pas, dit Emma, perplexe. En quoi un cas de braquage pourrait-il affecter Pearson & Hartley ?
Mr. Pearson et Richard échangèrent un regard.
– Le propriétaire de la bijouterie braquée, expliqua Mr. Pearson, est un de nos plus gros clients. Il fait pression pour que cette affaire soit réglée rapidement.
Emma sentit une boule se former dans sa gorge. – Vous voulez que je pousse Jake Donovan à plaider coupable ?
– Ce serait la solution la plus… simple, acquiesça Richard.
Emma n'en croyait pas ses oreilles. – Mais… et s'il est innocent ?
Mr. Pearson soupira. – Emma, vous êtes brillante, mais parfois un peu naïve. Dans ce milieu, l'innocence et la culpabilité sont des notions… flexibles.
– Je ne peux pas faire ça, protesta Emma. Ce serait contraire à l'éthique, à tout ce en quoi je crois.
– Réfléchissez-y, Emma, insista Richard. Votre avenir au sein du cabinet pourrait en dépendre.
Emma sortit du bureau, la tête tournant. Était-ce pour cela que Mr. Pearson lui avait confié cette affaire ? Pour la tester ? Pour voir jusqu'où allait sa loyauté envers le cabinet ?
Elle retourna dans son bureau, l'esprit en ébullition. Le dossier de Jake Donovan était ouvert sur son bureau. Elle fixa la photo de l'homme aux yeux troublants, déchirée entre son devoir envers le cabinet et son instinct qui lui criait que quelque chose clochait dans cette histoire.
Son téléphone vibra. Un message de James :
Tout va bien ? Tu rentres tard. Je t'attends pour dîner.
Emma ferma les yeux un instant. Comment pourrait-elle expliquer tout ça à James ? Son père était impliqué. Leur mariage approchait. Tout semblait soudain si compliqué.
Elle rangea ses affaires, prit le dossier Donovan et quitta le bureau. Dans le taxi qui la ramenait chez elle, Emma prit une décision. Elle ne pouvait pas abandonner Jake sans avoir exploré toutes les pistes. Elle lui devait au moins ça.
Quand elle arriva à l'appartement, James l'attendait avec un verre de vin.
– Dure journée ? demanda-t-il en l'embrassant.
Emma hocha la tête, incapable de mettre des mots sur le tourbillon d'émotions qui l'agitait.
– Tu veux en parler ? proposa James.
Emma hésita. Devait-elle lui parler de la conversation avec son père ? Des doutes qui la rongeaient ?
– Pas maintenant, dit-elle finalement. J'ai juste besoin d'un peu de temps pour… digérer tout ça.
James la serra dans ses bras. – Je comprends. Je suis là si tu as besoin de moi.
Emma se blottit contre lui, reconnaissante pour sa présence rassurante. Mais au fond d'elle-même, elle savait que les jours à venir allaient mettre à l'épreuve tout ce en quoi elle croyait, tout ce qu'elle pensait savoir sur elle-même et sur le monde qui l'entourait.
Alors qu'elle s'endormait cette nuit-là, l'image de Jake Donovan flottait dans son esprit. Qui était vraiment cet homme ? Était-il coupable ou victime d'une terrible erreur judiciaire ? Et jusqu'où était-elle prête à aller pour découvrir la vérité ?
Emma s'enfonça dans un sommeil agité, consciente que les réponses à ces questions pourraient bien changer le cours de sa vie à jamais.