Читать книгу Amitié amoureuse - Lecomte du Noüy Hermine Oudinot - Страница 51

LIVRE PREMIER
XLIX
Philippe à Denise

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12 août.

Il y a en vous un instinct qui dort et je n'ai pu l'éveiller. Ce bienfaisant pouvoir m'a manqué. Vous perdre? A cette pensée passent les «cortèges d'heures oubliées» – déjà! – par vous.

Ne sentiez-vous donc rien, madame, alors que vous électrisiez ma pensée et mon cœur? Voilà le charme par quoi vous m'avez tenu: j'aimais ces sourires de sphinx éclosant sur vos lèvres, ces mots murmurés, votre manière de suspendre une phrase, de la laisser si bizarrement inachevée; toutes ces choses fugitives, si personnelles, avec lesquelles vous exprimiez certains mouvements intérieurs, je les aimais… Où donc étiez-vous alors? Vous sembliez si près de moi!

Que venez-vous me parler des lois du monde? elles sont générales et lointaines; mon esprit se révolte à les subir depuis que mon cœur aime. Le monde ne me semble plus une sélection, mais une foule indifférente, hypocrite, sans pitié, sans consolation. Pourquoi lui sacrifierais-je ce que, à tort ou à droit, je crois être tout le bonheur, le bonheur intime, ineffable de nos deux vies?

La nature n'a pas de moralité, je ne suis pas le premier à constater ce fait. La conscience du monde, ses scrupules, ses pudeurs, me paraissent une chose vraiment comique. La vertu de tous n'est qu'une apparence; surgisse le besoin d'amour, le vertige des sens les possède et les voilà, ces pudiques mondains, aveugles sur eux-mêmes avec autant d'intensité qu'ils ont été clairvoyants sur les autres.

Et puis, qu'importe tout cela? Ah! Denise, combien nerveusement je vous désire et je vous aime!

Amitié amoureuse

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