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LES Goncourt, Paul Mantz, M. André Michel, M. Pierre de Nolhac, ont publié sur le peintre François Boucher de magnifiques ouvrages, où l’on trouve sur sa vie et son œuvre les renseignements les plus complets et les appréciations les plus sûres. Nous ne possédons d’ailleurs sur ce peintre, comme sur beaucoup de ses contemporains, que des indications assez incomplètes, et c’est surtout par ses œuvres qu’il nous est connu.

Malheureusement, la facilité extrême de Boucher, la rapidité de ses moyens de composition et d’exécution sont telles que son œuvre, considérable, est souvent de qualité inférieure, et il ne faut guère retenir de lui, à côté de quelques tableaux de chevalet et de dessins admirables, que les modèles de tapisseries qu’il donna pour les Manufactures de Beauvais et des Gobelins, et pour lesquels il n’a jamais été égalé.

La tapisserie est un des modes les plus précieux d’interprétation et de diffusion des œuvres décoratives. Grâce à la solidité du tissu et des couleurs employées, nous possédons encore d’admirables décorations du XIV^e et du XV^e siècle. Les grandes fresques murales de cette époque et même du XVI^e et du XVII^e siècle ont presque toutes péri, et les tapisseries nous aident à les reconstituer. L’œuvre même de Le Brun, qui n’est pourtant pas bien éloignée de nous, est complètement détruite par la matière même de sa peinture qui a noirci. Comment connaîtrions-nous, sans la tapisserie, ses magnifiques suites de l’Histoire d’Alexandre, de l’Histoire de Louis XIV et des Maisons royales? Boucher nous est resté tout entier grâce à elle.

Boucher, dont la facilité tient du prodige, toucha à toutes les formes et à toutes les matières d’art.

Après avoir appris la gravure dans l’atelier des Cars et collaboré au Recueil de l’œuvre de Watteau, gravé et publié par les soins de M. de Julienne, il donna les dessins d’une illustration célèbre de Molière et de différents recueils gravés. Il collabora avec Lancret, Vleughels, d’autres encore, à la belle collection de planches gravées d’après les Contes de La Fontaine, éditée par Larmessin en 1737-38; du Bréviaire de Paris, donnée en 1736 par l’archevêque Charles de Vintimille. En même temps, il travaillait dans les châteaux royaux, peignait des plafonds, dessus de portes, décors; enfin, en 1735, appelé par Oudry à Beauvais, il put, dans plus de cinquante modèles, donner libre cours à son talent de décorateur, de coloriste et de peintre de paysage.

LA CHARITÉ

Bréviaire de Paris, 1, 30

Collaborateur de la Manufacture de Vincennes, il assura le succès de la Manufacture réorganisée à Sèvres, qui allait bientôt devenir la Manufacture royale de porcelaine de France, en fournissant les premiers modèles et dessins des ravissantes statuettes et des groupes de biscuit en pâte tendre qui devaient détrôner les figures de Saxe et ramener en France les traditions du goût et de la beauté.

Boucher, comblé d’honneurs, chargé de commandes, devait encore collaborer à la découverte d’un nouveau procédé de gravure, la gravure à la manière du crayon et du pastel, et donner par ce moyen à ses innombrables dessins au fusain, au pastel et à la sanguine, une diffusion qui lui attira jusqu’à ses derniers jours les commandes les plus appréciables.

Boucher exécuta aussi des décors de théâtre, et il subsiste encore quelques dessins pour le Hameau d’Issé, pour Silvie, Renaud et Armide, Castor et Pollux, mais c’est surtout Boucher décorateur, auteur de modèles de tapisseries, et Boucher inspirateur des manufactures de Vincennes et de Sèvres, que nous avons étudié ici.

Les documents nouveaux publiés dans le présent volume se rapportent:

Au séjour de Boucher à Rome, dont les dates ont pu être précisées;

Au portrait de M^me Boucher jeune, peint par Boucher en 1742 (collection de M. David Weill);

A une gravure au trait inédite d’un portrait inconnu de M^me de Pompadour;

Au classement des tapisseries de Beauvais et des Gobelins, d’après Boucher;

Et aux documents qui concernent la participation de Boucher à la fondation de la Manufacture de Sèvres.

RENAUD ET ARMIDE

Musée du Louvre)