Читать книгу Au soleil de juillet (1829-1830) - Paul Adam - Страница 8
IV
ОглавлениеDepuis que le comte Dubourg avait vendu la vieille demeure de ses aïeux, au capitaine Lyrisse et aux Héricourt, contre une rente viagère, il continuait d'y vivre dans un petit corps de logis pour lequel il payait location. Ainsi n'était-il pas déchu de ses habitudes un peu seigneuriales. Mme Héricourt le priait souvent à dîner. L'oncle Edme le ramenait sans cesse de leurs courses mystérieuses jusqu'au salon du Régent, ainsi nommé parce que ce personnage y avait écrit, d'après le conseil de son écuyer le comte Dubourg, la renonciation aux visées sur le trône d'Espagne, acte exigé par Louis XIV. Le mobilier fort simple d'ailleurs et sévère était demeuré tel, sauf les réparations indispensables. Un portrait de Jean-Jacques Rousseau; un autre de d'Alembert méditaient là. Mme Héricourt se recueillait au fond d'un large fauteuil reposant sur quatre pieds de bouc en chêne ciré. Les candélabres d'argent, qui avaient éclairé la scène historique, occupaient encore les angles de la cheminée en pierre tendre.
A l'ordinaire les deux amis entreprenaient le jeune avocat pour l'intéresser aux chicanes des Francs-Maçons, ceux de leur Loge «Ardente-Amitié». L'oncle marchait de long en large, les mains dans le pont de sa culotte et penchait, en discourant, son corps maigre. Il plaignait le F.·. Roulon d'avoir perdu son procès contre un maître couvreur. Ne devait-on pas malgré l'avis d'Omer, aller en appel? L'imprimeur des carbonari, Pied-de-Jacinthe, n'avait pas encore obtenu la diminution de ses amendes: il entendait seulement s'acquitter en partie. Contre un voisin, le F.·. Rambourg plaidait pour une servitude qui permettait à ses chevaux de traverser une cour mitoyenne; ce voisin refusait indûment ce passage. Comment pouvait s'y prendre le tailleur Durtot, afin de recouvrer une créance sur Maxime de Trailles, sans le faire interner à Sainte-Pélagie, où il eût fallu payer l'entretien du débiteur?
L'avocat ne savait que répondre. Son oncle n'admettait point que la jeunesse d'Omer le privât d'influence auprès des juges qui, pourtant, l'estimaient trop heureux d'être déjà notable, envié par tous ses collègues du barreau. Dubourg reprochait cette inaction. On ne pouvait conduire les hommes qu'en les alliant par des moyens matériels aux grands desseins des chefs. Durant les guerres de Vendée qu'il avait faites, avant d'être le prisonnier converti à la Révolution par Bernadotte, il avait obtenu de ses chouans l'héroïsme, à condition d'autoriser le pillage des fermes et des maisons appartenant aux bourgeois républicains des villes.
Il rappelait alors mille traits de bravoure particuliers aux compagnons de Charette et de La Rochejacquelein. Continués à table, de pareils récits toujours miraculeux séduisaient Mme Héricourt. Car le général était adroit, bien que vindicatif et hargneux. A côté d'elle, il affectait de la religion par politesse. Il disait comment il avait vu l'hostie devenir sanglante à l'élévation, un jour, entre les mains d'un inconnu tonsuré que ses Vendéens avaient découvert dans un village conquis sur les Bleus, et qu'ils avaient contraint de dire immédiatement la messe. L'épouvantable miracle affola les paysans. Ils accusèrent le prêtre. Il lui fallut reconnaître qu'il était assermenté. Les chouans avaient cloué le sacrilège, les bras en croix contre une grande porte, et l'avaient criblé de balles... Une autre fois, sa bande avait aperçu, dans le ciel, sainte Anne qui faisait signe de courir sus à l'ennemi. Bien qu'ils tombassent en grand nombre frappés par la mitraille, les chouans atteignirent la batterie et y entrèrent dix-sept sur deux cents hommes; les autres gisaient dans les prairies, morts, et tous les mains jointes.
Ses yeux en extase, la veuve écoutait cela. Elle enviait la foi de ces rustres qui leur avait valu la présence du miracle. Quels saints étaient-ils donc? Malgré sa dévotion, elle n'espérait pas que jamais la grâce pût toucher son cœur d'une manière si parfaite. Évidemment, elle restait loin de cet état de piété. Que tenter pour y parvenir? Ces élus, ces simples de la glèbe que pensaient-ils de Dieu? Sur eux, elle questionnait intelligemment leur ancien chef. Il narrait sans fatigue les incidents de ces pauvres vies défuntes. Il nommait chacun de ses chouans, l'évoquait, retraçait avec éloquence le portrait physique du martyr. Car il avait profondément aimé leurs âmes rudes et croyantes, au temps de son adolescence énergique, quand il les conduisait vers le sacrifice, lui, fluet garçon de vingt ans, juché sur un gros cheval de labour au poil jauni.
Dans la salle à manger, où présidait, debout au milieu de la niche creusant les lambris gris, un hercule de marbre, la main remplie de grappes, tous les soirs, ces mêmes propos mêlés à d'autres souvenirs accompagnaient le repas servi par un valet silencieux et attentif. Mme Héricourt tâtait les grains de son chapelet en attendant le plat. L'oncle Edme expliquait souvent les affaires du château de Lorraine dont il administrait les revenus consacrés à leurs dépenses de Paris. Il refusait toujours de restituer ce bien national acheté en 1793 par son aïeul à la famille de Luxembourg, quelle que fût la supplication de sa pieuse sœur. Bientôt sa faconde s'exerçait en louant les mérites du menu. Toujours, il redemandait une seconde assiette de potage; après la première:
«Fameuse soupe! disait-il, fameuse, la soupe.» Le poisson lui paraissait généralement délicat. Le ragoût valait qu'il dît: «C'est à se pourlécher les babines! hein?» Au reste, peu de chose lui semblait comparable au filet de bœuf quand il était tendre. «Cela fond sous la dent! ma sœur! Remercie Dieu de nous l'avoir donné, en reprenant un morceau.» Le légume intéressait moins le capitaine. Il dédaignait la pâtisserie, mais saluait d'exclamations un fromage à point. Pour les fruits, il glissait à l'oreille d'Omer des métaphores luxurieuses, les assimilant à la chair des femmes. «J'ai joliment dîné!» ne manquait-il point de proclamer, en se levant au signal de Mme Héricourt, désireuse de réciter enfin les grâces. Tous les jugements du capitaine étaient sincères. Son visage un peu rouge, sa bouche luisante, ses yeux brillants et rieurs, les mouvements de son gosier, et ses hauts-le-corps témoignaient de sa franchise.
Dans la galerie dont les colonnes plates encadraient les murailles de miroirs, il prolongeait les éloges, en réclamait du général Dubourg et d'Omer. N'avait-il pas lui-même composé le menu, averti la cuisinière, surveillé la sauce? Il supposait même l'approbation du colonel Héricourt bien que le défunt demeurât définitivement muet dans un manteau de cavalerie, les cheveux balayés par le coup de vent, la main serrant le sabre à travers un gantelet de cuir; sur la neige, au fond du tableau, les lignes d'infanterie fusillaient la charge déjà victorieuse des dragons. Dubourg appréciait les liqueurs des îles, et il aimait le whist. Doucement, il avait persuadé la veuve d'apprendre ce jeu. Elle y avait pris goût. Une fois le café servi, le domestique dressait le guéridon à tapis vert. Les cartes s'étalaient. Omer considérait comme un devoir de faire le quatrième. Cependant, il détestait de prendre la place opposée à celle de Dubourg, qui, s'échauffant vite, imputait tous les coups mauvais à l'étourderie de son partenaire, cela sans ménager les insolences.
Aigri par les déboires de sa vie, il avait, le soir, l'humeur méchante. Quand, à dix heures, Mme Héricourt s'était retirée, fort triste d'avoir laissé entre de telles mains l'argent des aumônes, il allumait sa pipe, soupirait et lâchait mille injures contre Bernadotte, qui, sur le trône du Nord, l'oubliait trop, contre Napoléon, qui l'avait empêché de faire sa fortune en Suède, contre Moreau qui l'avait compromis sans rien prévoir des événements de 1814, contre les Bourbons, qui l'avaient destitué après avoir accepté de lui tant de services. Ensuite, il énumérait toutes les filouteries dont Bernadotte s'était rendu coupable, jadis, à l'armée de l'Ouest, en recevant les pots de vins des fournisseurs, en grâciant, contre finance, les chouans capturés et condamnés à mort, dont lui, Dubourg. Les amants de Joséphine, il les nommait. Il raillait Napoléon d'avoir été cocu. Il savait mille anecdotes ignobles et comiques. En une armoire de son logis, il conservait une collection de camées faux où l'on reconnaissait la famille impériale dans toutes les postures de la fornication. Il accusait Moreau d'avoir été stupide, Alexandre retors et cauteleux, puis ambitieux ridiculement jusqu'à vouloir se déclarer le suprême souverain d'une Sainte-Alliance, qui eût compris toutes les monarchies d'Europe. Quant aux Bourbons, ils étaient, selon lui, d'infâmes scélérats. D'ailleurs, il ne tarissait pas sur la liaison sodomique et sentimentale de Louis XVIII avec son ministre Decazes, de qui l'approche était utile au vieux roi incapable de rien ressentir auprès des femmes, même de Mme de Cayla. Si le satiriste lâchait sa verve, il finissait par poser sa pipe et imiter les adieux larmoyants de Louis XVIII à Decazes, lorsqu'on les contraignit à se séparer, après l'assassinat du duc de Berry. Gonflant son estomac pour égaler la bedaine royale, mimant le podagre, les pieds en dedans, il poursuivait un Decazes imaginaire...
L'oncle Edme riait aux larmes, se tapait les cuisses, laissait éteindre son tabac, et remplissait les petits verres. Dubourg renchérissait par les mille anecdotes de son passé réel et fabuleux.
Surtout il n'épargnait point Bernadotte qu'il accusait d'ingratitude sans nom, de sottise et de forfanterie. Il le connaissait bien, ayant suivi longtemps la fortune du général gascon, auquel il devait la vie. A l'entendre, lui, Dubourg, avait failli porter au trône de France son sauveur, alors exclu de la grande armée pour avoir, après Wagram, réfuté, dans un ordre du jour, le blâme impérial lancé contre ses troupes saxonnes, et ses manœuvres. A Paris, lui, Dubourg, qui secouait là sa pipe, avait, en 1809, agi de concert avec Fouché, les philadelphes et les jacobins. A l'insu de Napoléon, retenu en Autriche, on fit la levée en masse des gardes nationales sous prétexte de repousser une démonstration anglaise aux rivages hollandais de Walcheren.
Lui, Dubourg, et il se carrait dans le fauteuil, avait eu cette idée-là qui avait mis des forces énormes aux mains de son ami, forces près d'être alors acclamées par d'intrépides citoyens hostiles au despotisme du Corse, et maudissant l'attentat de Brumaire. Lui, Dubourg, qui se tapait du doigt la cravate, avait organisé l'état-major, et concentré les brigades autour d'Anvers. Il ne restait plus qu'à courir sur Paris en proclamant la déchéance du tyran. Les banquiers anxieux du blocus continental, les jacobins du Sénat, toute la garde de la capitale eussent acclamé le successeur. Même en sirotant le curaçao de maman Virginie, Dubourg ne pardonnait pas à Bernadotte d'avoir eu peur. Ni les résultats de la victoire remportée à Wagram, ni l'assassinat du général Oudet et de son état-major philadelphe par les gendarmes de Savary, déguisés en Kaiserlicks, ni les préliminaires de la paix prochaine n'auraient dû terrifier à ce point le prince de Ponte-Corvo. Lâchement, le gascon avait cédé aux menaces remises sous pli cacheté, par Reille, l'estafette de Bonaparte.
Dubourg frappait du talon, haussait les épaules, soufflait un nuage de tabac: «Cet homme-là, c'est la présomption servie par l'insuffisance!» Et il imitait avec rage la mine effrayée de son chef lisant le message du courroux impérial.
En 1828, il lui fallait encore deux ou trois petits verres de cognac bus d'un trait pour se résigner à la perte de cette merveilleuse partie. Dubourg se vantait d'avoir manigancé toute l'affaire de Suède avec l'illuminisme allemand, d'avoir fomenté les émeutes de Stockholm, et fait massacrer le maréchal Axel de Fersen à coups de parapluies par les bourgeois des Loges, pour épouvanter l'aristocratie: et l'illuminisme put imposer au vieux Charles XIII, fanatique de franc-maçonnerie, l'adoption d'un souverain révolutionnaire près de se dresser, en Europe, contre Napoléon, contre l'ancien général terroriste, le renégat devenu l'époux de Marie-Louise d'Autriche, et le neveu par alliance de Louis XVI.
C'était lui, ce Dubourg caressant au fond de ses goussets le gain du whist, lui, qui, dès la mort du prince héritier, avait été voir le comte Mörner, chambellan suédois capturé, en 1806, près de Lübeck, avec ses troupes, par les brigades françaises de Bernadotte poursuivant Blücher. En souvenir de ménagements et de politesses qui, lors, avaient adouci les conséquences de sa piteuse aventure, Mörner avait écouté Dubourg, s'était rendu à Paris, sous allure de féliciter Napoléon à propos du mariage autrichien, et au nom de Charles XIII, mais surtout pour combattre la candidature de Frédérick VI de Danemark, en assurant que les Suédois n'accepteraient point une nouvelle union de Calmar, après tant de guerres contre les Danois, en affirmant que les professeurs, les étudiants d'Upsal et les bourgeois des villes, encore enthousiastes des idées encyclopédistes, accueilleraient un soldat qui aurait acquis son grade et son titre de prince dans les guerres de la Révolution.
—Malgré toute sa bêtise, Napoléon, criait-il, sut estimer au juste la valeur de mon acte: il m'interdit d'habiter Stockholm, auprès du rival qu'il haïssait... Là-dessus Bernadotte eut encore la faiblesse de céder à son caporal. En me perdant, il perdait l'empire! Je le lui dis le jour de mon départ... J'ai compris que je me dévouais, depuis quinze ans, à la fortune d'un valet irrésolu, et que son âme de domestique l'emporterait toujours dans les occasions sublimes. Alors, je renonçai, las de cet homme sans principes et sans boussole... Hélas! j'allais obéir deux ans à ce faquin de Berthier, à ce singe en uniforme, qui dormait dans ses bottes et dans ses chamarrures, prêt à paraître sous la grande livrée au moindre appel de son maître. Hélas!... avec ça l'esprit d'un niais! Si la division polonaise que j'ai conduite en Russie, comme colonel d'état-major, fut détruite, dès décembre 1812, si je reçus un biscaïen dans la cuisse, dont je souffre rudement quand la température est humide, si je fus traîné captif dans les casernes de Saint-Pétersbourg, je le dois à un ordre incompréhensible à force de paraître clair et point embarrassé de détails superflus... Ah! il était bien incapable d'ajouter quoi que ce fût aux paroles de son maître, le pauvre homme! Et Napoléon a contresigné une pareille dépêche! Mais oui! C'est ça qui m'a décidé à redevenir chouan. J'ai repris les illusions de ma jeunesse. Ces goujats m'avaient lassé. Fichue bêtise, au reste, que je fis là... Car en fait d'ignorance et d'iniquité les Bourbons en remontrèrent à Buonaparte lui-même, sur mon dos..., sur mon dos..., je puis bien le dire.
Il hochait a plusieurs reprises sa tête aquiline, il clignait de l'œil dans les sourcils touffus. S'il ricanait, il se mettait debout, arpentait la galerie, le long des murs en miroirs créant des perspectives factices et mystérieuses de palais antiques avec la disposition des colonnes plates, reflétées indéfiniment. Il se passait les mains dans ce qui lui demeurait de cheveux blonds et blancs autour de l'occiput nu. Il s'agitait de mille manières pendant que le capitaine Lyrisse défendait Napoléon, les Maréchaux, brandissait sa pipe, et, parfois, bondissait de son fauteuil courbe, pour joindre à son éloquence toute la mimique de son corps nerveux.
Entre eux, Omer s'amusait, silencieux, surpris de ne pas frémir à leurs enthousiasmes. Plusieurs fois, il les vit se provoquer ainsi que pour le duel. Ils étaient au point de se couper furieusement la gorge, en l'honneur des qualités politiques attribuées par l'un à Murat ou bien à Victor, décriées par l'autre. Déniant au génie de Napoléon les triomphes, Dubourg trouvait dans le jeune avocat un approbateur. Et de cela, l'oncle Edme enrageait.
—Tu as le même esprit que ton père: tu refuses, par un misérable orgueil, de t'incliner devant le soleil!
—Buonaparte n'était qu'un rayon. Il n'était pas le soleil, s'écriait Dubourg. Le soleil c'était l'esprit de la République et de la Liberté!... Voilà!...
Et il se campait, les poings aux hanches...
Le capitaine Lyrisse se battait les flancs, levait les poings aux verreries du lustre. Bientôt les deux contradicteurs se réconciliaient en injuriant les Bourbons.
Amis, ils l'étaient autant que ceux de la fable. Sans doute, à cause de la différence entre les grades, le capitaine laissait au général-comte toutes les initiatives, sauf en matière de discussion politique et stratégique. Dubourg continuait à vivre en maître dans son hôtel vendu. Lui-même inspectait, à l'écurie, le poil des chevaux, grondait les domestiques tout le jour, ordonnait qu'on nettoyât mieux les pierres humides de la cour, et qu'on se privât de cuire l'odeur des oignons dans la cuisine. Il grommelait si quelqu'un des meubles se trouvait hors de la place coutumière. Il entrait partout sans cogner aux portes, fermait les persiennes, tirait les rideaux, bousculait les livres d'Omer dans la bibliothèque, s'oubliait dans un sofa, tout seul au milieu d'une pièce, et baillait là, des heures, une brochure sur les genoux. Il détestait le silence, adorait la conversation. Il se précipitait sur Omer pour lui souhaiter le bonjour et en déduire la commodité de dire une anecdote personnelle. Aussitôt il avouait son importance durant la première Restauration. En effet, quand les illuminés du Tugend Bund se furent avisés de contraindre Alexandre à rappeler d'Amérique Moreau, dans l'intention d'opposer à l'autocratisme de Buonaparte l'ancien prestige du général révolutionnaire, celui-ci reçut les conseils de Bernadotte, en débarquant sur la côte suédoise. Il avait donc voulu enrôler Dubourg dans son état-major. Le comte eut consenti à condition d'arborer la cocarde blanche. Ce serin de Moreau croyait déjà succéder à son rival, et gouverner avec le secours des républicains accourus dans ses bras, comme au temps de Hohenlinden. L'imbécile, ne voulut pas de la cocarde blanche. Le général-comte déclina l'honneur de manquer, avec ce fat, sa fortune. Elle parut prendre forme quand Louis XVIII l'eut nommé chef d'état-major, l'année suivante, au ministère de la Guerre. Pendant les Cent Jours il avait suivi le roi en Belgique et rédigé avec «ce dindon de Châteaubriand», le Journal politique de Gand. Après Waterloo, il avait battu les fédérés, les corps francs, rétabli l'autorité des Bourbons dans Arras, et reçu en récompense, le gouvernement de l'Artois. Mal habile à persécuter ses amis de l'empire, philadelphes, bonapartistes et jacobins il avait été brutalement destitué, sur les réclamations en haut lieu, des ultras. Cette injustice l'avait rejeté dans les rangs des républicains. Il préconisait même les thèses les plus avancées de la Révolution, louait Babeuf et Buonarotti dont il recommandait au jeune avocat les thèses. Il le poursuivait en prêchant le communisme et la terreur.