Читать книгу Études historiques, littéraires et scientifiques sur l'arrondissement de Jonzac - Pierre-Damien Rainguet - Страница 50

877 hab. — 1,720 hect.

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L’église et la paroisse sont sous le patronage de sainte Lewine ou Leuvine, Leuphrine et Leuphérine, vierge et martyre de la Grande - Bretagne, du Ve au VIe siècle. Elle avait donné sa vie pour la foi sous les premiers Saxons qui avaient conquis son pays dès l’année 428. Le corps de la sainte gardé longtemps à Seafort, près de Lewes dans le pays de Sussex, fut transporté en 1058, dans la Flandre, avec les reliques de sainte Idaberge, vierge, et elles se gardent encore à Berg-Saint-Vinox; ces reliques ont été favorisées d’un grand nombre de miracles, surtout au temps de leur translation.

Sa fête se célèbre le 24 juillet , et elle était en grand honneur avant la Révolution, surtout par rapport à la fontaine dont nous parlerons plus bas.

L’église de Sainte-Lheurine a 33 mètres de longueur sur 14 mètres 50 centimètres de largeur. Ses voûtes ont 13 mètres d’élévation. On y reconnaît quelques traces du style roman du XIIe siècle, particulièrement au mur midi, où les fenêtres sont cintrées et à baies étroites. Le XVe et le XVIe siècle allongèrent la nef de moitié et substituèrent une porte ogivale à la porte romane précédemment existante. L’abside, de forme carrée, et le chœur furent édifiés alors; le plan subit, au chevet, une légère inclinaison ce qui se rencontre en divers édifices et ce qui, dans la pensée de l’architecte chrétien, rappelait cette circonstance de la passion de N.-S. et inclinato capite emisit spiritum. On y voit de longues fenêtres à deux meneaux.

La chapelle de la sainte Vierge, longue de 25 mètres, bâtie auprès du clocher et voûtée en pierre, a des fenêtres moins élancées mais mieux ornées. Elle a été terminée en 1536, suivant l’inscription gothique qu’on y voit. En 1543, on bâtit un arceau destiné à relier entre elles les deux parties de la nef. Son grand travail d’ornementation excite l’admiration des visiteurs. Cette chapelle a été mise en communication avec le clocher au moyen d’une voûte érigée en 1629, suivant l’inscription qu’on y lit.

En 1859, la commune et la fabrique firent voûter en pierre, le chœur et le sanctuaire dont les voûtes avaient dit-on été ruinées dans les guerres de religion, et on plaça dans la fenêtre du sanctuaire une belle verrière de couleur, haute de sept mètres, représentant le Père éternel.

Une petite chapelle, existant à l’opposite du clocher, était à l’usage des anciens seigneurs de Sainte-Lheurine et leur servait de sépulture. Dans cette enceinte funèbre reposent les restes des Poussard, des Périer, des Bouchard, des Goumard, des Montauld de Castelnaud et des Belleville.

Malgré le patronage de sainte Lheurine et la dédicace de l’autel de gauche, la fête principale du lieu est l’Ascension, jour de la frérie. Il y a vingt ans, un tableau placé derrière l’autel, représentait l’Ascension de N.-S. Cette fête n’amène plus à Sainte-Lheurine, qu’un concours fort ordinaire de peuple.

Le grand autel, de style ogival flamboyant, est dû à la pieuse générosité des époux Bernard-Arnut, du hameau de Chez-Ferré.

La cloche, fondue en 1753, par les soins de l’abbé Moreau, docteur en théologie, curé de Sainte-Lheurine, pèse 550 kilogrammes et porte l’inscription suivante:

SAINTE LEVRINE PRIEZ POVR NOVS

MESSIRE JEAN BAPTISTE MOREAU CURE DE LA PAROISSE

J’AI EU POUR PARRAIN

MESSIRE GABRIEL JOSEPH DU CHILLEAU MARQUIS DU CHILLEAU

DAIRVAULT BARON DE MOINGS Ste LEURINE ET AUTRES LIEUX ET POUR MARRAINE FRANÇOISE LOUISE ANNE MARIE POUSSARD DU VIGEAN SON EPOUSE J’AI ETE BENITE EN 1753 — COURTOIS FONDEUR.

En 1453, l’église de cette paroisse dépendait de l’abbaye des Bénédictins de Charroux, au diocèse de Poitiers. Le pouillé du diocèse de Saintes pour l’an 1586, met la cure à la présentation de la même abbaye. L’auteur du mémoire que nous analysons pense que les Bénédictins avaient établi une de leurs colonies non loin de l’église; il estime en outre qu’à la place du presbytère, érigé en 1859, il existait autrefois une communauté de femmes.

La fontaine de Sainte-Lheurine, dont les eaux ont été longtemps regardées comme miraculeuses, et où se faisaient de fréquents pèlerinages, a été l’objet des dérisions de d’Aubigné, écrivain protestant, ce qui n’a rien de surprenant. Toutefois, et ce qui s’explique moins facilement, des historiens catholiques se sont chargés de reproduire les passages irréligieux empruntés à une brochure satyrique remplie de boutades graveleuses et de grossièretés, et c’est ainsi que l’opinion publique de notre temps s’est formée au regard de la fontaine séculaire et sur une historiette à qui l’on a donné la date visiblement fausse de 1633.

Le bassin de cette fontaine, placé dans le vallon au sud de la montagne, est carrelé en pierres de taille; les eaux qui en découlent ont une saveur très-prononcée. Elles coulent silencieusement et ombragées de saules, au travers de la prairie qui environne la fontaine de tous côtés. Autrefois le terrain qui l’avoisine était, dit-on, communal. Maintenant c’est une propriété privée; depuis le creusement du canal qui conduit au moulin, on y parvient même assez difficilement, la fontaine se trouvant dans une sorte d’île formée par la rivière et le canal.

On suppose qu’il exista jadis une chapelle près de la fontaine, et on montre au village d’Herbaud, à 200 mètres de là, une maison réputée néfaste et qu’on dit avoir été bâtie avec les matériaux de cette chapelle.

Très-anciennement, quoi qu’en dise d’Aubigné, et jusqu’au moment de la Révolution, on accourait de toutes parts à la fontaine pour y chercher la guérison par l’intercession de sainte Lheurine, à diverses infirmités, surtout à l’ophthalmie. On y plongeait les petits enfants malades et chacun voulait emporter chez soi une bouteille de cette eau bienfaisante. Avant de se retirer, les pèlerins ne manquaient pas de jeter une pièce de monnaie dans la fontaine comme marque de leur gratitude.

Ces pratiques de piété ont disparu avec la simplicité des mœurs, et pourtant quelques personnes affirment encore sur les lieux que cette eau est excellente pour les yeux malades.

On raconte de plus à Sainte-Lheurine, qu’au XVIIIe siècle, l’abbé Moreau, dans une grande sécheresse, conduisit ses paroissiens à la fontaine miraculeuse et que la procession n’eut pas le temps de regagner le point de départ (on était à peine au hameau de la Valade), que déjà les nuages amoncelés payaient à la terre le tribut de leurs bienfaisantes ondées.

Les subtils esprits du monde riront sans doute de ces naïves croyances populaires des anciens temps. Depuis un siècle, leurs devanciers ont activement travaillé à les détruire dans l’esprit des masses, et ils n’y ont que trop bien réussi, Mais qu’ont-ils donc mis à la place de ces croyances morales dans des cœurs maintenant froids et désséchés? L’égoïsme, le sensualisme le plus effréné et la foi la plus absurde, aux rêveries du magnétisme, aux oracles des sybilles et des énergumènes plus ou moins lucides, au langage même des tables à trois ou quatre pieds; mais sachez donc, âpres penseurs, que quand l’homme ne s’agenouille plus devant Dieu et ses saints, il se prosterne devant la brute et se livre à tous les diables, et puis gare à l’ordre public et aux sociétés les plus solidement établies...

Peu avant la Révolution, l’abbé Moreau érigea dans sa paroisse la confrérie du T.-S. Sacrement.

Un hameau de cette commune, dit la Pierre-Percée, situé sur le bord de la route de Pons à Archiac, rapelle peut-être le souvenir d’un ancien monument druidique. Vers 1760, Simon Bouchet, Olivier Benoit, Pierre Biné et Jean Pelletan, voulant justifier, par un monument durable, le nom de leur village pour lors sans raison d’être, percèrent une énorme pierre, en forme de margelle, y gravèrent leurs noms, et après l’avoir dressée sur un de ses côtés, placèrent une croix de pierre à son sommet, mais ce n’est point à cette circonstance, purement commémorative, que le hameau doit son nom.

On y trouve encore des sépultures renfermant des vases antiques. Tout récemment l’un de ces vases a été donné à M. le curé de Sainte-Lheurine qui suppose que l’ancienne pierre percée, depuis longtemps disparue, pouvait être une sorte de pierre lustrale, placée au milieu des tombeaux pour recevoir l’eau destinée à les purifier .

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