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Mardi, 13 août.

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Barcelone est entièrement traversée par une succession rectiligne de beaux boulevards qui s'appellent tous Rambla, de leur nom de famille, mais dont le prénom change presque tous les 100 mètres. La Rambla prend sur les quais du port, devant le monument de Christophe, traverse toute la vieille ville, passe sur la plaza Cataluña et va se perdre dans la banlieue. La Rambla, comme son nom l'indique, paraît-il, en espagnol, serait l'ancien lit d'un torrent desséché qu'on aurait comblé et dont on aurait fait la jolie artère actuelle. C'est là que se concentre le principal de l'animation de la grande ville, c'est de là que partent les rues aux beaux magasins, c'est sous ses grands arbres qu'une foule toujours renouvelée va se préserver des ardeurs du soleil catalan, c'est sur la Rambla que journellement se tient cet interminable marché aux fleurs dans lequel les promeneurs circulent au milieu des parfums.

Des boulevards, larges et bien tracés, entourent toute l'ancienne ville; ils ont aussi un nom générique et un nom propre; leur nom générique est Ronda, terme qui rappelle celui des Ring de Vienne et qui, en effet, sert à désigner un même objet. Les Rondas de Barcelone sont, comme les Ring de Vienne, les anciens fossés d'enceinte comblés et transformés en boulevards lorsque la ville, en plein développement, se trouva trop à l'étroit dans ses anciennes limites.

La Cathédrale est un bel édifice gothique; malheureusement tous les siècles contribuèrent à sa construction, en sorte que l'édifice est un mélange un peu trop disparate de genres et de styles. L'effet produit n'en est pas moins grandiose et impressionnant; en résumé, la cathédrale de Barcelone est un des beaux monuments catholiques de l'Espagne, pays où les catholiques ont construit beaucoup, souvent très grand, mais rarement beau. Elle est accompagnée d'un cloître du plus pur gothique de toute beauté.

Nous avons fait une agréable promenade dans les Parque y Jardines de la Ciudadela, vastes jardins publics très ombragés qui renferment une intéressante collection d'animaux sauvages; et nous sommes revenus en passant le long des quais du port. Le Port de Barcelone est vaste et commode, sa superficie est supérieure à celle du port de Marseille et presque égale à celle de Gênes; il y règne toujours une très intense animation produite par la foule de navires qui viennent y apporter leur tonnage.

A 4 heures du soir l'auto était amenée devant l'hôtel et nous quittions Barcelone. La route, dès la sortie de la ville, est fabuleuse, invraisemblable, jamais je n'avais rien vu de pareil: c'est une succession ininterrompue de trous noyés par la poussière dans lesquels l'auto plonge en aveugle, saute et s'agite comme un navire balancé par les lames furieuses au milieu de la tempête. A moins de vouloir rompre le châssis, on est obligé d'avancer à une allure que ne désavouerait aucune tortue; de la première vitesse ralentie au maximum, et malgré cela des débrayages et des coups de freins à chaque pas. Enfin nous avançons tellement doucement que de temps en temps j'éprouve l'horrible mortification de me voir dépasser par des attelages de mules: pour une 100 chevaux, c'est vraiment déplorable! Est-ce que les conseilleurs obligeants auraient eu, pour une fois, raison? J'enrage! Enfin, nous verrons bien.

L'épouvantable chemin dure ainsi pendant environ 20 kilomètres, jusqu'au delà de Molins de Rey, et je constaste qu'il nous fallu 2 heures pour faire ce trajet, soit une moyenne de 10 kilomètres à l'heure.

Puis, subitement, la route se fait bonne, excellente même par endroits et restera telle jusqu'à Tarragone.

On est assez éloigné de la mer qu'on ne voit que par aperçus lointains. Voici quelques montagnes, une sierra couverte de vastes forêts de pins maritimes; la route monte dans la sierra, l'on tournoie dans les airs sur de larges virages, la route grimpe dru mais les innombrables chevaux de notre attelage ne font qu'en rire, car, libérés désormais sur un sol excellent, ils courent pour rattraper le temps perdu. La vue s'étend très jolie du haut de ces montagnes qu'on ne tarde pas à redescendre.

C'est maintenant Villafranca del Panades, au bas de la sierra, ville sale dont le nom indique sans nul doute qu'elle est dans la panade; qu'on me pardonne ce mot quelque peu risqué, mais je n'ai pu le retenir, il peint trop bien l'aspect délabré de cette triste ville. Et cependant ce pays est riche et cultivé.

Dans la plaine, désormais, la route file au milieu de vignobles à perte de vue; puis en rase campagne, on passe sous un superbe arc romain qui annonce la proximité de l'antique Tarragone. Un peu plus loin, tout au bord de la route nous nous arrêtons pour admirer le tombeau des Scipions, vaste tombeau romain, très bien conservé, qui servirait de sépulture aux deux frères Scipion tombés à Anitorgis. C'est une imposante construction d'une dizaine de mètres de hauteur et sur la façade de laquelle il reste une sculpture fort nette encore représentant deux captifs.

Quelques kilomètres encore et nous faisons notre entrée dans Tarragone [3]. Sur un beau boulevard ombragé de grands arbres, la façade accueillante et sympathique de la Fonda de Paris réunit tous nos suffrages: nous descendons ici et nous avons bien fait, car nous avons trouvé un hôtel propre et bien tenu.

Le Tour de l'Espagne en Automobile

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