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Maximilien Robespierre (1758-1794), Discours prononcé à l'Assemblée constituante le 25 janvier 1790 (25 janvier 1790)

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(Le commencement de la séance avait été consacré à divers travaux, entre autres à la lecture d'un rapport sur un secours demandé par la ville de Valenciennes. Lorsque la tribune fut libre, Robespierre y monta et s'exprima ainsi:)

Nous venons soumettre à votre délibération un objet infiniment plus intéressant pour plusieurs provinces du royaume... Il tient à la liberté générale... Il est d'une telle nature, que vous nous accuseriez d'une malversation odieuse, si nous ne soutenions pas avec force la cause qui nous est en ce moment confiée. Parmi les décrets qui fixent la quotité d'impositions nécessaires pour exercer les droits de citoyen actif, et pour être électeur et éligible, il en est qui ont donné lieu à une demande d'explication...

Des contributions directes, personnelles et réelles, sont établies dans une grande partie du royaume. Dans l'Artois et dans les provinces qui l'avoisinent, on paie peu de contributions directes; la corvée n'y existe pas; la taille et la capitation y sont converties en impositions indirectes. Il en est de même des contributions par les propriétaires de fonds: les centièmes établis depuis deux siècles étaient bien loin de produire une imposition proportionnée à la valeur des fonds: ils ont été abolis par les soins des Etats d'Artois. Ainsi, cette province ne contiendrait qu'un très petit nombre de citoyens actifs; ainsi, une partie considérable des habitants de la France seraient frappés de l'exhérédation politique...

Si vous considérez maintenant que presque la totalité du territoire des provinces belgiqnes est possédée par des ecclésiastiques, par des nobles et par quelques bourgeois aisés, que dans une communauté de 1,000 âmes, il y a à peine quatre citoyens actifs...

(M. de Montlausier interrompt et demande la preuve de ces assertions.)

J'ai l'honneur d'observer que la cause que je défends touche de si près aux intérêts du peuple, que j'ai droit à toute votre attention.

Dans l'état actuel, l'égalité politique est détruite... Prononcez sur cette importante réclamation. Nous la soumettons à votre justice, à la raison qui vous a dicté la déclaration des droits de l'homme. Jetez vos yeux sur cette classe intéressante, qu'on désigne avec mépris par le nom sacré de peuple Voulez-vous qu'un citoyen soit parmi nous un être rare, par cela seul que les propriétés appartiennent à des moines, à des bénéficiers, et que les contributions directes ne sont pas en usage dans nos provinces? Voulez-vous que nous portions à ceux qui nous ont confié leurs droits, des droits moindres que ceux dont ils jouissaient? Que répondre quand ils nous diront: vous parlez de liberté et de constitution, il n'en existe plus pour nous. La liberté consiste, dites-vous, dans la volonté générale, et notre voix ne sera pas comptée dans le recensement général des voix de la nation. La liberté consiste dans la nomination libre des magistrats auxquels on doit obéir, et nous ne choisissons plus nos magistrats. Autrefois, nous les nommions, nous pouvions parvenir aux fonctions publiques; nous ne le pourrons plus, tant que les anciennes contributions subsisteront... Dans la France esclave, nous étions distingués par quelques restes de liberté; dans la France devenue libre, nous serons distingués par l'esclavage.

Si nous pouvons vous proposer un parti qui, loin de compromettre vos décrets et vos principes, les cimente et les consacre; s'il n'y a d'autre effet que de fortifier vos décrets, et de vous assurer de plus en plus la confiance et l'amour de la nation, quelle objection pourrez-vous faire?

L'assemblée nationale considérant que les contributions maintenant établies dans diverses parties du royaume, ne sont ni assez uniformes, ni assez sagement combinées pour permettre une application juste et universelle des décrets relatifs aux conditions d éligibilité, voulant maintenir l'égalité politique entre toutes les parties du royaume, déclare l'exécution des dispositions concernant la nature et la quotité des contributions nécessaires pour être citoyen actif, électeur et éligible, différée jusqu'à l'époque où un nouveau mode d'imposition sera établi; que jusqu'à cette époque, tous les Français, c'est-à-dire, tous les citoyens domiciliés, nés Français ou naturalisés Français, seront admissibles à tous les emplois publics, sans autre distinction que celle des vertus et des talons; sans qu'il soit dérogé toutefois aux motifs d'incompatibilité décrétés par l'assemblée nationale.

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Discours par Maximilien Robespierre — 21 octobre 1789-1er juillet 1794

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