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Maximilien Robespierre (1758-1794), Discours prononcé à l'Assemblée constituante le 23 août 1791 (23 août 1791)
Оглавление(Opinion de Robespierre sur la liberté de la presse.)
M. Dandré et les autres partisans du comité semblent quelquefois se rapprocher des principes pour s'en éloigner sur-le-champ. M. Dandré paraît dans la dernière partie de son opinion déterminé à nous accorder... (Il s'élève des murmures. Regnault de Saint-Jean-d'Angely: Je demande que le préopinant veuille bien indiquer la corporation dont il est le chef.) Je m'en vais satisfaire à l'interpellation du préopinant. Quand j'ai dit nous, je parlais de ceux que la question intéresse, c'est-à-dire de la généralité des citoyens: ce sont les droits de la nation que je réclame contre un article qui me paraît les attaquer. Je dis donc que M. Dandré paraissait accorder le droit d'une censure salutaire et libre sur les actes d'administration; si l'article remplissait cet objet, alors on pourrait dire que nous sommes d'accord; mais il ne le remplit pas.
Qu'est-ce que la liberté d'exercer la censure? (On murmure.) La puissance des comités s'étend-elle jusqu'à parler aussi longtemps qu'ils veulent et à ne laisser parler personne? Je dis que cette censure sur les actes d'administration ne pourra pas s'exercer sans que, en vertu de l'article qui vous est proposé, on puisse poursuivre le censeur comme calomniateur. Par exemple, un ministre parlant toujours de patriotisme et d'ordre public, peut mettre une négligence coupable dans l'exécution des lois relatives à la défense du royaume, entretenir des intelligences secrètes avec les ennemis du dehors. Je demande si le droit du citoyen se réduira à dire très modestement, très respectueusement: M. le ministre a négligé de porter tel corps de troupes sur les frontières; ou n'aura-t-il pas le droit de dire s'il en a le courage: j'aperçois dans sa conduite un plan de conspiration contre le salut public; j'invite mes concitoyens à le surveiller.
Voici un autre exemple. Un général préposé à la défense de nos frontières a exécuté un plan dont le résultat devait être de livrer la nation à tous les fléaux de la guerre domestique et extérieure. Je suppose que j'aie eu des indices certains de ce crime, comme tout homme de bonne foi et clairvoyant a pu en avoir, je ne pourrai donc pas provoquer la surveillance publique sur un tel homme sans être puni comme calomniateur? Je dis que par la nature des choses l'intention de faire le mal touche de si près à l'action même, qu'il y a une connexité si évidente entre le crime consommé et l'intention du crime, qu'on ne pourra dénoncer un délit d'administration, sans risquer d'être poursuivi comme calomniateur des intentions.
A quoi sert cette distinction qu'il est si facile d'éluder dans son usage entre un délit commis et l'intention, si ce n'est à gêner la censure sur tous les points?
Consultons l'expérience: sur cent accusations intentées par l'Assemblée nationale elle-même contre des citoyens, 99 sont restées sans preuves. Si M. Bouillé eût été dénoncé comme un homme méditant des projets contre la patrie, le citoyen clairvoyant et zélé, qui en eût découvert les indices sans en découvrir encore les preuves juridiques, n'eût-il pas passé pour calomniateur? Pour appuyer la vérité de cette observation, je rappellerai l'engouement général excité en faveur du patriotisme et du zèle de cet officier, les éloges qui lui ont été prodigués par l'intrigue et les remercîments même surpris à la sagesse de l'Assemblée nationale. Lorsque les chances de l'équité sont tellement incertaines en faveur de l'un et de l'autre système, je demande s'il faut priver la société de l'avantage suprême d'une censure illimitée sur les fonctionnaires publics. Je demande que la rédaction plus précise de M. Larochefoucault soit préférée à celle du comité.
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