Читать книгу Roméo et Juliette - Уильям Шекспир, William Szekspir, the Simon Studio - Страница 5

ACTE PREMIER
SCÈNE II

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Une rue.

Entrent CAPULET, PARIS, UN DOMESTIQUE.

CAPULET.—Montaigu est lié par la même défense que moi, et sous des peines semblables; et il ne sera pas difficile, je pense, à deux vieillards comme nous de vivre en paix.

PARIS.—Vous jouissez tous d'une existence honorable, et c'est pitié que vous ayez été si longtemps ennemis. Mais parlez, seigneur, que répondez-vous à ma demande?

CAPULET.—En répétant ce que je vous ai déjà dit. Mon enfant est encore étrangère dans le monde; elle n'a pas vu s'accomplir la révolution de quatorze années: laissons encore pâlir l'orgueil de deux étés avant de la croire mûre pour être une épouse.

PARIS.—De plus jeunes qu'elles sont devenues d'heureuses mères.

CAPULET.—Mais elles se flétrissent trop tôt, ces mères prématurées.—La terre a englouti toutes mes autres espérances; elle est en espérance la maîtresse de mes terres. Mais faites-lui votre cour, aimable Pâris; gagnez son coeur; ma volonté n'est qu'une dépendance de son consentement: si elle vous agrée, c'est dans les limites de son choix que réside mon aveu, et que ma voix vous sera loyalement accordée.—Ce soir je donne une fête dont j'ai depuis longtemps l'usage; j'y ai invité beaucoup de convives, tous mes amis; et parmi eux, je vous verrai avec très-grande joie, comme un de plus, en augmenter le nombre. Attendez-vous à voir ce soir dans ma pauvre maison des étoiles qui foulent aux pieds la terre, éclipsent la lumière des cieux; cette joie bienfaisante que ressent le jeune homme plein d'ardeur lorsqu'avril, dans toute sa parure, marche sur les talons de l'hiver chancelant, vous l'éprouverez ce soir parmi ces jeunes fleurs de beauté prêtes à s'épanouir; écoutez-les toutes, voyez-les toutes, et préférez celle dont le mérite sera le plus grand. Au milieu du spectacle d'une telle réunion, ma fille, réduite à elle-même, pourra faire nombre, mais non pas attirer l'attention.—Allons, venez avec moi.—(A un domestique.) Toi, maraud, trotte dans la belle Vérone; trouve toutes les personnes dont les noms sont écrits ici (il lui donne un papier), et dis-leur que la maison et le maître attendent leur bon plaisir.

(Sortent Capulet et Pâris.)

LE DOMESTIQUE.—Trouver ceux dont les noms sont écrits, ici! Il est écrit que le cordonnier se servira de sa toises et le tailleur de pierres de sa forme; le pêcheur de son pinceau, et le peintre de ses filets. Mais on m'envoie chercher les personnes dont les noms sont inscrits là-dessus, et je ne pourrai jamais trouver les noms que l'écrivain a écrits là-dessus. Il faut que je m'adresse aux savants… dans un moment…

(Entrent Benvolio et Roméo.)

BENVOLIO.—Allons, mon cher, la flamme est un remède à la brûlure qu'a faite une autre flamme; une douleur est diminuée par l'angoisse d'une autre; tournez jusqu'à vous étourdir et vous vous remettez en tournant dans l'autre sens; un chagrin désespéré se guérit par la langueur d'un nouveau chagrin. Laisse entrer dans tes yeux un nouveau poison, et l'ancien venin perdra toute son âcreté.

ROMÉO.—Votre feuille de plantain est excellente pour cela.

BENVOLIO.—Pour quel mal, je t'en prie?

ROMÉO.—Pour vos os brisés?

BENVOLIO.—Allons, Roméo, es-tu fou?

ROMÉO.—Non, pas fou, mais lié plus que ne le serait un fou, tenu en prison, privé d'aliments, fustigé, tourmenté, et..... Bonsoir, mon bon garçon.

LE DOMESTIQUE.—Dieu vous donne le bonsoir.—Je vous en prie, monsieur, savez-vous lire?

ROMÉO.—Oui, c'est un bonheur que j'ai dans ma misère.

LE DOMESTIQUE.—Peut-être l'avez-vous appris sans livres: mais, je vous prie, pouvez-vous lire tout ce que vous voyez?

ROMÉO.—Oui, si je connais les caractères et la langue.

LE DOMESTIQUE.—C'est répondre sincèrement; tenez vous en joie.

ROMÉO.—Arrêtez, mon ami, je sais lire. (Il lit.) «Le seigneur Martino, sa femme et sa fille; le comte Anselme et ses charmantes soeurs; la dame veuve de Vitruvio; le seigneur Placentio et ses aimables nièces; Mercutio et son frère Valentin; mon oncle Capulet, sa femme et ses filles; ma jolie nièce Rosaline; Livia; le seigneur Valentio et son cousin Tybalt, Lucio et l'agréable Hélène.» C'est une belle assemblée. (Il lui rend le papier.) Où doit-elle se réunir?

LE DOMESTIQUE.—Là-haut.

ROMÉO.—Où, là-haut?

LE DOMESTIQUE.—A souper, à la maison.

ROMÉO.—A la maison de qui?

LE DOMESTIQUE.—De mon maître.

ROMÉO.—Au fait, c'est ce que j'aurais dû vous demander d'abord.

LE DOMESTIQUE.—Maintenant je vous dirai, sans que vous me le demandiez, que mon maître est le puissant et riche Capulet; et si vous n'êtes pas de la maison de Montaigu, je vous invite à venir avaler un verre de vin. Tenez-vous en joie.

(Il sort.)

BENVOLIO.—A cette ancienne fête des Capulet soupera Rosaline, celle que tu aimes tant: avec toutes les beautés qu'on admire à Vérone. Viens-y, et d'un oeil sans prévention compare sa figure avec quelques autres que je te montrerai, et ton cygne ne te paraîtra plus qu'une corneille.

ROMÉO.—Quand la religieuse dévotion de mes yeux pourra me soutenir un pareil mensonge, que mes larmes se changent en flammes, et que ces hérétiques diaphanes, si souvent noyés sans pouvoir mourir, soient brûlés comme imposteurs. Une femme plus belle que mon amante! Le soleil qui voit tout n'a jamais vu son égale depuis le commencement du monde.

BENVOLIO.—Bon, vous l'avez vue belle parce qu'il n'y avait personne autre à côté; elle se balançait elle-même dans vos deux yeux: mais pesez dans ces balances de cristal la dame de vos pensées avec telle autre jeune fille que je vous montrerai brillant à cette fête, et à peine trouverez-vous bien celle qui vous paraît maintenant la plus belle de toutes.

ROMÉO.—J'irai, non pour y voir un semblable objet, mais pour m'y pénétrer de plaisir dans la splendeur de celui qui m'est cher.

(Ils sortent.)

Roméo et Juliette

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