Читать книгу Antoine et Cléopâtre - Уильям Шекспир, William Szekspir, the Simon Studio - Страница 7

ANTOINE ET CLÉOPÂTRE
TRAGÉDIE
ACTE PREMIER
SCÈNE V

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Alexandrie. – Appartement du palais

Entrent CLÉOPÂTRE, CHARMIANE, IRAS, l'eunuque MARDIAN

CLÉOPÂTRE. – Charmiane.

CHARMIANE. – Madame?

CLÉOPÂTRE. – Ah! ah! donne-moi une potion de mandragore12.

CHARMIANE. – Pourquoi donc, madame?

CLÉOPÂTRE. – Afin que je puisse dormir pendant tout le temps que mon Antoine sera absent.

CHARMIANE. – Vous songez trop à lui.

CLÉOPÂTRE. – O trahison!..

CHARMIANE. – Madame, j'espère qu'il n'en est point ainsi.

CLÉOPÂTRE. – Eunuque! Mardian!

MARDIAN. – Quel est le bon plaisir de Votre Majesté?

CLÉOPÂTRE. – Je ne veux pas maintenant t'entendre chanter. Je ne prends aucun plaisir à ce qui vient d'un eunuque. – Il est heureux pour toi que ton impuissance empêche tes pensées les plus libres d'aller errer hors de l'Égypte. As-tu des inclinations?

L'EUNUQUE. – Oui, gracieuse reine.

CLÉOPÂTRE. – En vérité?

MARDIAN. – Pas en vérité13, madame, car je ne puis rien faire en vérité que ce qu'il est honnête de faire; mais j'ai de violentes passions, et je pense à ce que Mars fit avec Vénus.

CLÉOPÂTRE. – O Charmiane, où crois-tu qu'il soit à présent? Est-il debout ou assis? Se promène-t-il à pied ou est-il à cheval? Heureux coursier, qui porte Antoine, conduis-toi bien, cheval; car sais-tu bien qui tu portes? L'Atlas qui soutient la moitié de ce globe, le bras et le casque de l'humanité. – Il dit maintenant ou murmure tout bas: Où est mon serpent du vieux Nil? car c'est le nom qu'il me donne. – Oh! maintenant, je me nourris d'un poison délicieux. – Penses-tu à moi qui suis brunie par les brûlants baisers du soleil, et dont le temps a déjà sillonné le visage de rides profondes? – O toi, César au large front, dans le temps que tu étais ici à terre, j'étais un morceau de roi! et le grand Pompée s'arrêtait, et fixait ses regards sur mon front; il eût voulu y attacher à jamais sa vue, et mourir en me contemplant!

ALEXAS entre. – Souveraine d'Égypte, salut!

CLÉOPÂTRE. – Que tu es loin de ressembler à Marc-Antoine! Et cependant, venant de sa part, il me semble que cette pierre philosophale t'a changé en or. Comment se porte mon brave Marc-Antoine?

ALEXAS. – La dernière chose qu'il ait faite, chère reine, a été de baiser cent fois cette perle orientale. – Ses paroles sont encore gravées dans mon coeur.

CLÉOPÂTRE. – Mon oreille est impatiente de les faire passer dans le mien.

ALEXAS. – «Ami, m'a-t-il dit, va: dis que le fidèle Romain envoie à la reine d'Égypte ce trésor de l'huître, et que, pour rehausser la mince valeur du présent, il ira bientôt à ses pieds décorer de royaumes son trône superbe; dis-lui que bientôt tout l'Orient la nommera sa souveraine.» Là-dessus, il me fit un signe de tête, et monta d'un air grave sur son coursier fougueux, qui alors a poussé de si grands hennissements, que, lorsque j'ai voulu parler, il m'a réduit au silence.

CLÉOPÂTRE. – Dis-moi, était-il triste ou gai?

ALEXAS. – Comme la saison de l'année qui est placée entre les extrêmes de la chaleur et du froid; il n'était ni triste ni gai.

CLÉOPÂTRE. – O caractère bien partagé! Observe-le bien, observe-le bien, bonne Charmiane; c'est bien lui, mais observe-le bien; il n'était pas triste, parce qu'il voulait montrer un front serein à ceux qui composent leur visage sur le sien; il n'était pas gai, ce qui semblait leur dire qu'il avait laissé en Égypte son souvenir et sa joie, mais il gardait un juste milieu. O céleste mélange! Que tu sois triste ou gai, les transports de la tristesse et de la joie te conviennent également, plus qu'à aucun autre mortel! – As-tu rencontré mes courriers?

ALEXAS. – Oui, madame, au moins vingt. Pourquoi les dépêchez-vous si près l'un de l'autre?

CLÉOPÂTRE. – Il périra misérable, l'enfant qui naîtra le jour où j'oublierai d'envoyer vers Antoine. – Charmiane, de l'encre et du papier. – Sois le bienvenu, cher Alexas. – Charmiane, ai-je jamais autant aimé César?

CHARMIANE. – O ce brave César!

CLÉOPÂTRE. – Que ton exclamation t'étouffe! Dis, le brave Antoine.

CHARMIANE. – Ce vaillant César!

CLÉOPÂTRE. – Par Isis, je vais ensanglanter ta joue, si tu oses encore comparer César avec le plus grand des hommes.

CHARMIANE. – Sauf votre bon plaisir, je ne fais que répéter ce que vous disiez vous-même.

CLÉOPÂTRE. – Temps de jeunesse quand mon jugement n'était pas encore mûr. – Coeur glacé de répéter ce que je disais alors. – Mais viens, sortons: donne-moi de l'encre et du papier; il aura chaque jour plus d'un message, dussé-je dépeupler l'Égypte.

FIN DU PREMIER ACTE

12

Plante narcotique.

13

En vérité, indeed et in deed; en effet, dans le fait, en réalité. Le jeu de mots est plus complet en anglais.

Antoine et Cléopâtre

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