Читать книгу Le Jour des Rois - Уильям Шекспир, William Szekspir, the Simon Studio - Страница 4
LE JOUR DES ROIS
OU
CE QUE VOUS VOUDREZ
ACTE PREMIER
SCÈNE II
ОглавлениеLa côte de la mer.
VIOLA, UN CAPITAINE, suivi de matelots
VIOLA. – Amis, quel est ce pays?
LE CAPITAINE. – C'est l'Illyrie, madame.
VIOLA. – Et que ferai-je en Illyrie? mon frère est dans l'Élysée. Peut-être n'est-il pas noyé. Qu'en pensez-vous, matelots?
LE CAPITAINE. – C'est par un hasard que vous avez été sauvée vous-même.
VIOLA. – O mon pauvre frère! – Et peut-être pourra-t-il l'être aussi par hasard.
LE CAPITAINE. – Cela est vrai, madame; et pour augmenter votre confiance dans le hasard, soyez assurée que lorsque notre vaisseau s'est ouvert, au moment où vous, et ces tristes restes échappés avec vous, vous êtes attachés au bord de notre chaloupe, j'ai vu votre frère, plein de prévoyance dans le péril, se lier avec une adresse que lui suggéraient le courage et l'espoir à un gros mât qui surnageait sur les flots: je l'y ai vu assis comme Arion sur le dos d'un dauphin, en allant de front avec les vagues, tant que j'ai pu le voir.
VIOLA. – Tenez, voilà de l'or, pour ce que vous venez de me dire. Mon propre salut me fait naître l'espérance (et votre récit l'encourage) qu'il pourra lui en arriver autant. Connaissez-vous ce pays?
LE CAPITAINE. – Oui, madame, très-bien; car je suis né et j'ai été élevé à moins de trois lieues de cet endroit même.
VIOLA. – Qui gouverne ici?
LE CAPITAINE. – Un duc aussi illustre par son caractère que par son nom.
VIOLA. – Quel est son nom?
LE CAPITAINE. – Orsino.
VIOLA. – Orsino! J'ai entendu mon père le nommer; il était garçon alors.
LE CAPITAINE. – Il l'est encore, ou du moins il l'était tout dernièrement; car il n'y a pas un mois que je suis parti d'ici, et alors il courait un bruit tout récent (vous savez que les petits causent toujours sur ce que font les grands) qu'il sollicitait l'amour de la belle Olivia.
VIOLA. – Qui est-elle?
LE CAPITAINE. – Une vertueuse jeune personne, la fille d'un comte qui est mort il y a environ un an; il la laissa en mourant à la protection de son fils, son frère, qui est mort aussi peu de temps après, et c'est pour l'amour de ce frère qu'elle a, dit-on, renoncé à la vue et à la société des hommes.
VIOLA. – Oh! que je voudrais être au service de cette dame et y rester inconnue au monde jusqu'à ce que j'aie eu le temps de mûrir mes desseins!
LE CAPITAINE. – Cela serait difficile à obtenir. Elle ne veut écouter aucune proposition, non pas même celle du duc.
VIOLA. – Capitaine, tu as une heureuse physionomie; et quoique la nature renferme souvent la corruption sous une belle enveloppe, cependant je suis portée à croire de toi que tu as une âme qui convient à ces beaux dehors. Je te prie, et je t'en récompenserai généreusement, cache ce que je suis, et aide-moi à me procurer le déguisement dont j'aurai peut-être besoin pour exécuter mes projets. Je veux m'attacher au service de ce duc. Tu me présenteras à lui en qualité d'eunuque: cela peut en valoir la peine, car je sais chanter; je saurai lui parler sur divers tons de musique variée, qui lui rendront mon service agréable. Ce qui peut advenir plus tard, je l'abandonne au temps: conforme seulement ton silence à mes désirs.
LE CAPITAINE. – Soyez son eunuque, moi je serai votre muet. Quand ma langue sera indiscrète, que mes yeux cessent de voir!
VIOLA. – Je te remercie, conduis-moi.
(Ils sortent.)